graham masterton

Publié le 30 Août 2023

LA MAISON AUX CENT MURMURES de Graham Masterton

En dépit d’un début effectif et de bonnes critiques, ce roman laisse une impression mitigée. Le mystère de départ fonctionne agréablement avec d’intéressantes considérations historiques sur les cachettes secrètes et les « caches de prêtres » élaborées par Nicolas Owen. Mais la suite déçoit. Elle évoque un peu trop un des meilleurs romans de l’auteur, DEMENCES, avec ses prisonniers ayant disparus dans les murs de leur geôle. Ici il s’agit d’une maison réputée hantée mais le principe reste similaire. L’intervention d’une sorcière (ou charmeuse), d’un sorcier (ou glaneur) et d’un prêtre venu exorciser la demeure entrainent de nombreuses discussions. La maison est-elle hantée ? S’agit-il de démons, de fantômes, d’autres choses ? Masterton parait hésiter, embrassant tour à tour chacune des explications sans réellement convaincre. Le tout semble donc très bavard et ce ventre mou occupe malheureusement une trop grande partie du récit.

Bien évidemment, l’auteur a souvent eu recours précédemment à l’excès et à l’empilement d’influences et de mythologies. Entre la sorcière qui lance de la poudre de cadavre pour découvrir les spectres, le sorcier rationaliste qui refuse l’existence des fantômes mais admet la puissance des enchantements druidiques et l’exorciste entrainé par le Vatican le roman verse dangereusement vers le grotesque ou la parodie plus ou moins volontaire. Le final surenchérit encore dans l’outrance avec l’apparition d’une entité légendaire maléfique, Masterton ajoutant une pincée de folk-horror à ce récit de hantise rationnalisé par une boucle temporelle ayant piégé ses victimes. Et le climax, comme (trop) souvent avec l’auteur sombre dans le n’importe quoi. C’est pratiquement une constance depuis MANITOU mais, souvent, cela donne à ses romans un côté série B excessive et fun. Ici ça ne fonctionne pas, peut-être parce que le tout se veut sérieux.

De plus, au niveau du « rentre dedans / choquant », l’auteur parait bien moins inspiré que dans ses romans d’il y a 30 ans. Le gore, l’horreur pure, l’épouvante sont quasiment absents, tout comme l’érotisme. Masterton entame bien une scène de viol collectif mais l’arrête très rapidement. Caramba, encore raté ! Décidément, le romancier n’a plus la forme d’antan à moins que la lecture de trop nombreux récits splatterpunk / splatterporn aient rendu, par comparaison, les intrigues de l’Anglais trop consensuelles. Nous sommes loin des descriptions de cannibalisme gratinées de RITUEL DE CHAIR ou des excès déjantés des MANITOU. Un roman d’horreur qui ne provoque ni peur ni dégoût, quoi de pire ?

En résumé, LA MAISON DES CENT MURMURES part d’une bonne idée et maintient l’intérêt durant une centaine de pages avant que le soufflet ne se dégonfle. En dépit de quelques bons passages, le tout reste largement en deçà de ce que l’auteur nous a jadis proposé. On peut se contenter des « restes » ou se désoler de ce ratage tout en se réjouissant néanmoins de voir Masterton à nouveau traduit dans nos contrées.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Graham Masterton, #Horreur, #Fantastique

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Publié le 2 Janvier 2018

WENDIGO de Graham Masterton

Une fois de plus, Graham Masterton s’intéresse à la  mythologie indienne qu’il a déjà abondamment illustrée. Bien sûr, on citera son « grand œuvre », à savoir la saga du Manitou qui comporte six romans (dont les cinq premiers furent traduits en français) mais également LA MAISON DE CHAIR dans lequel on croise le terrible Coyote ou encore CORBEAU. Ici, l’écrivain britannique s’intéresse au Wendigo, créature surnaturelle déjà abordée par Algernon Blackwood dans une longue nouvelle (« The Wendigo ») à laquelle  Masterton fait régulièrement référence.

L’intrigue se montre assez classique et typique de l’écrivain : Lily, mère divorcée de deux enfants travaillant dans une agence immobilière, est agressée chez elle par deux hommes masqués qui enlèvent sa progéniture, l’attachent à une chaise, la traitent de sorcière et tentent de la bruler vive. Heureusement, Lily réussit à s’en sortir et apprend qu’elle n’est pas la première victime : en effet une bande de machos fanatiques décidés à « punir » les mauvaises mères, « Flamme », sévit depuis quelques temps. Lily soupçonne immédiatement son ancien mari, dont elle est divorcée et avec lequel elle est brouillée. Deux agents fédéraux mènent l’enquête mais, malheureusement, sans succès. Le FBI étant dans l’incapacité de retrouver les enfants, Lily finit par demander à un sorcier indien, George Iron Walker, d’invoquer le légendaire Wendigo, un chasseur cannibale aux talents de pisteur sans égaux. George accepte en échange d’un terrain sacré pour son peuple. Lorsque Lily se révèle incapable d’éponger sa dette et de remplir sa part du contrat, George Iron Walker lâche le monstre sur la jeune femme.

Si le roman s’avère plaisant et rondement mené, dans la tradition des précédents bouquins de Masterton, difficile de ne pas en pointer les nombreux défauts et facilités. Tout d’abord, la personnalité de l’héroïne, Lily, reste assez clichée et il parait difficile de ne pas s’offusquer devant la bêtise de certaines de ses réactions. Ainsi, alors qu’on lui a expliqué la nature démoniaque et cannibale du Wendigo, la jeune femme pousse des cris d’orfraie lorsque le monstre commence à tuer ses agresseurs. Les relations de l’héroïne avec son patron manquent aussi de crédibilité : le boss la met sur la touche car ses cheveux brûlés et rasés mettent les clients mal à l’aise (puisqu’ils la soupçonnent de subir une chimiothérapie !) mais il ne perd jamais une occasion d’essayer de la draguer. Les agents fédéraux paraissent eux aussi peu professionnels, appelant régulièrement la jeune femme à la moindre fausse alerte tout en étant incapables de trouver le moindre indice. Bien sûr, au cours du récit, notre héroïne combative finira par trouver une oreille attentive qui croira en l’existence du Wendigo et recueillera ses confidences sur l’oreiller. Du déjà vu et revu.

Néanmoins, en dépit de ses bémols, d’une écriture quelque peu fade et d’un manque d’audaces certains (Masterton semble avoir délaissé la surenchère érotico-gore de ses premières œuvres pour un style passe partout et « grand public »), WENDIGO se lit sans déplaisir. Le roman, en effet, s’avère rythmé, court (330 pages) et globalement efficace en dépit de sa linéarité et d’un troisième acte à la fois longuet et prévisible. Difficile néanmoins de considérer ce bouquin comme une réussite tant l’écrivain, que l’on a connu autrement plus inspiré et innovant, apparait ici en pilotage automatique.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Graham Masterton

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