Publié le 31 Juillet 2017

TERREUR DELIQUESCENTE de Harry Adam Knight

 

Harry Adam Knight était le pseudonyme de l’auteur australien John Brosnan (1947 – 2005) surtout connu pour son roman CARNOSAUR adapté au cinéma pour une trilogie horrifique à petit budget largement inspirée de « Jurassic Park » (notons cependant que le roman précédait de six ans celui de Michael Crichton). Prolifique, Brosnan écrivit également divers novelisations, des comics, de nombreux bouquins sur le cinéma (JAMES BOND IN THE CINEMA, THE STORY OF SPECIAL EFFECTS IN THE CINEMA, etc.).

Mais, chez nous, Brosnan fut surtout un auteur régulier de la collection Gore : on lui doit le sympathique VRILLES ! (publié sous le pseudo de Simon Ian Chiller tout comme LES PARASITES DE LA HAINE fut édité chez Maniac), le plaisant BRASIERS HUMAINS (sous le nom de James Blackstone) et L’IMMONDE INVASION (sous l’alias Harry Adam Knight). Bref, Brosnan fut un des romancier non francophones les mieux représenté par la collection aux côtés de Richard Laymon ou Shaun Hutson. Il faut d’ailleurs signaler que ces écrits, tous construits sur le thème d’une « immonde invasion » (hum !) semblaient tailler pour la collection par leur format restreint et leur nombreux passages horrifiques ou sexy.

Associé à l’auteur de fanzine anglais Leroy Kettle, Brosnan livre avec TERREUR DELIQUESCENTE (« slimer » en version originale, laquelle compte 156 pages, on peut donc supposer que la traduction fut, pour une fois, fidèle) une pure série B qui mélange concepts science-fictionnels, angoisse paranoïaque et horreur sanglante. Les mauvaises langues diront (avec raison) que le résultat ressemble beaucoup à un remake à peine déguisé de « The Thing » assorti de quelques scènes érotiques indissociables de la collection. « C’est pas faux » comme disait l’autre mais le bouquin s’avère cependant très plaisant.

L’originalité vient des protagonistes : trois couples de retour du Maroc où ils ont trafiqué de l’herbe (et également, pour l’un d’eux, de l’héroïne). Après le naufrage de leur bateau, nos survivants dérivent jusqu’à atteindre une station de forage pétrolière perdue en pleine mer du Nord. Sur place, les naufragés ne découvrent que des vêtements épars, la plateforme semblant déserte. Rapidement, ils se rendent compte que des scientifiques s’y livraient à diverses expériences sur les mutations. Et le produit de l’une d’elle, une sorte de monstre polymorphe créé à partir d’un grand requin blanc (!) erre à présent à la recherche de nourriture…

La caractérisation des personnages reste rudimentaire mais ne sombre pas dans la caricature : avec un drogué violent et obsédé sexuel en guise de principal protagoniste le roman évite la facilité et ne présente pas un héros traditionnel, fort et sûr de lui. A force de se serrer les coudes, l’un des couples réussira cependant à vaincre la créature en utilisant une méthode originale et bien trouvée. Toutefois, pour respecter la tradition, TERREUR DELIQUESCENTE s’achève sur une fin semi-ouverte. Elle laisse entendre que le monstre n’est pas vraiment mort et que, par conséquent, la menace peut ressurgir à tout moment. Habilement, les romanciers développent une atmosphère d’angoisse et de suspicion, chacun craignant que ses amis ne soient plus eux-mêmes mais de simples « marionnettes humaines » contrôlées par la créature mutante. Là encore, ils s’inspirent ouvertement de « The Thing » et « Alien » mais les déambulations de nos naufragés dans les couloirs désertés de la station offrent aux lecteurs réceptifs leur lot de frisson.

Dans l’ensemble et malgré quelques facilités dans la construction (assez linéaire et prévisible) du récit, TERREUR DELIQUESCENTE constitue un bon roman d’horreur. Simple, efficace et bien rythmé, avec suffisamment de passages horrifiques et sexy pour contenter les inconditionnels de la collection sans rebuter les lecteurs davantage friands d’épouvante classique que de boucheries pures, le tout donne une bonne lecture dans laquelle on peut même replonger sans déplaisir pour un second tour de piste.

Le livre fut, par la suite, adapté (certains disent massacré) au cinéma sous le titre « Protheus » par Bob Keen.

TERREUR DELIQUESCENTE de Harry Adam Knight

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Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #Horreur, #Fantastique, #Gore

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Publié le 28 Juillet 2017

ILS ETAIENT QUATRE A TABLE de John Dickson Carr

Ils étaient quatre à table…sauf que l’un d’entre eux est à présent décédé. Tout avait pourtant commencé par une bonne soirée entre amis désirant discuter et partager quelques cocktails. Blystone le chirurgien, la critique d’art Bonita Sinclair, l’égyptologue Bernard Schumann et le businnesman Felix Haye ont pourtant été empoisonnés à l’atropine. Si les trois premiers se réveillent simplement intoxiqués, Haye, lui, a été en outre poignardé. Qui a pu vouloir l’assassiner ? Serait-ce lié à ces cinq petites boites contenant des révélations apparemment importantes déposées par Haye chez son avocat peu avant son décès ? Des boites qui, d’ailleurs, ont-elles-aussi disparus, l’étude ayant été cambriolée la nuit où le crime fut commis. Les deux affaires sont forcément liées. Le célèbre Henry Merrivale va mener l’enquête et tenter, tout d’abord, de comprendre comment les quatre invités ont pu être empoisonnés alors que les rescapés affirment que nul n’a pu verser le poison dans leur verre.

Originellement publié sous le pseudonyme de Carter Dickson voici un roman policier très classique mais plaisant qui ajouter au traditionnel « whodunit » un problème de « howdunit », le crime impossible étant la spécialité de John Dickson Carr. Ici nous avons affaire à un empoisonnement qui laisse perplexe les enquêteurs. Une variante assez rare du problème de la chambre close dont, plus récemment, Doherty avait offert une variation avec son très plaisant L’ASSASSIN DE SHERWOOD.

Comme souvent avec Carr, l’intrigue est tortueuse, les fausses pistes nombreuses et les retournements de situation, proposés à intervalles réguliers pour relancer l’intérêt, efficaces. Le roman ne sombre pas, cependant, dans l’extrême complexité d’autres œuvres de Carr (pas toujours très digestes avec leurs digressions nombreuses) et le procédé utilisé par le meurtrier se révèle finalement fort simple (mais, comme toujours, il fallait y penser !). Néanmoins, on retrouve les scories coutumières du romancier, en particulier ce Merrivale quelque peu insupportable et toujours très satisfait de son intelligence : il connait dès le départ la solution mais refuse de la donner et invite les enquêteurs à réfléchir au problème.

L’humour, fort présent, rend heureusement le bouquin agréable et lui évite l’austérité de certains Carr qui tiennent davantage du problème intellectuel insoluble que du divertissement. Les dialogues bien troussés confèrent à l’ensemble un rythme soutenu et la galerie de protagonistes (et donc de suspects) restreintes transforme le tout en un véritable jeu à la Cluedo des plus sympathique. On peut rapprocher le livre du similaire CARTES SUR TABLE d’Agatha Christie publié l’année suivante où, là aussi, quatre personnes sont réunies autour d’une table (pour jouer aux cartes) et l’une d’elles est mystérieusement assassinée.

S’il n’est pas le meilleur ou le plus élaboré des problèmes conçus par Carter Dickson / John Dickson Carr ILS ETAIENT QUATRE A TABLE assure au lecteur un bon moment de détente et, par sa relative simplicité, peut même être conseillé aux novices du romancier qui souhaiteraient faire plus amples connaissances avec le maitre incontesté (du moins avant la naissance de Paul Halter) du crime impossible.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Golden Age, #Impossible Crime, #John Dickson Carr

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Publié le 26 Juillet 2017

Mr MERCEDES de Stephen King

 

L’Amérique des années 2010…un pays en pleine crise. Des centaines de chômeurs désespérés se pressent devant les portes du City Center pour arriver les premiers à l’ouverture de la grande foire de l’emploi qui leur permettra, peut-être, de décrocher un job. Certains poireautent durant toute la nuit. Lorsque pointe l’aube, un type surgit dans une Mercedes grise. Il fonce dans la foule, fait huit morts et bien davantage de blessés. Pas de mobile si ce n’est l’envie de tuer. Pas d’indice. Pas de piste. Le tueur, surnommé Mr Mercedes, ne sera jamais appréhendé. Il se nomme en réalité Brady Hartsfield, un jeune passionné d’informatique cumulant deux emplois : réparateur dans un magasin d’électronique durement touché par la crise et vendeur de glaces dans sa petite camionnette. Très pratique pour espionner les gens car, franchement, qui se soucie du marchand de glace ? Brady vit toujours chez sa mère, une alcoolique avec laquelle il entretient une relation trouble, pour ne pas dire incestueuse. Plus jeune il s’est déjà débarrassé de son petit frère handicapé. La tuerie du City Center a suffi à canaliser sa rage et il ne compte pas récidiver. Du moins cherche-t-il à s’en convaincre. 

Bill Hodges, de son côté, est un officier de police récemment retraité qui songe au suicide en se gavant de télévision. Il a la satisfaction du devoir accompli même si, forcément, il a dû quitter la police en laissant quelques affaires en suspens. Comme celle du tueur à la Mercedes, par exemple.

Spoiler:

Jaloux des honneurs reçus par l’ancien flic, Brady vient le narguer, d’abord par lettre puis en lui donnant rendez-vous sur un réseau social privé, le Parapluie bleu de Debbie. Après avoir demandé conseil à un de ses rares amis, le jeune Noir Jerome Robinson qui s’y connait en nouvelles technologies, Bill accepte le défi de Mr Mercedes. Il remet ainsi en cause la thèse officielle concernant Olivia Trelawney, propriétaire de la Mercedes ayant servi au massacre. Rongée par la culpabilité, Olivia s’était suicidée après avoir entendu les voix de ses victimes mais Bill découvre qu’elle a été poussée à se donner la mort par le sadique

Ragaillardi par son enquête, Bill décide de traquer Mr Mercedes. De son côté, Brady veut se faire exploser durant un concert du boys band ‘Round here auquel assisteront la mère et la sœur de Jerome Robinson.

Mr MERCEDES de Stephen King

Récompensé par le Edgar Award décerné par les « Mystery Writers of America », MR MERCEDES a été décrit par Stephen King comme son premier « hard boiled detective novel ». On y retrouve, en effet, le personnage classique de l’ancien flic : actif durant sa carrière, honoré lors de sa pension, il se retrouve une fois à la retraite désœuvré et incapable de trouver un sens à sa vie. Affalé devant la télé, son révolver à portée de la main pour en finir le jour où il ne pourra plus supporter son existence, il va replonger et devenir un « tonton », autrement dit un ancien policier qui, retiré du service actif, continue à poursuivre les criminels. Aidé par son jeune ami Jérome, spécialiste de l’informatique, le vieux flic se lance sur les traces d’un maniaque adepte du meurtre de masse.

Durant 670 pages, Stephen King, de manière très efficace, alterne les points de vue des deux antagonistes : il passe de l’officier Hodges au redoutable Mr Mercedes en une suite de chapitres très courts qui confèrent un rythme haletant au roman en dépit de sa longueur et de quelques digressions typiques du romancier. En conteur hors pair possédant un incroyable métier (MR MERCEDES constitue son 62ème roman !), le King brosse un portrait psychologique très vraisemblable du héros et de son adversaire. Tous deux s’émancipent rapidement des clichés pour devenir parfaitement crédibles, de même que les personnages secondaires, du jeune Noir très intelligent qui s’amuse à parler « p’tit nègre » à la quadragénaire névrosée trouvant dans cette traque manière à échapper à sa mère dominatrice. Si les rebondissements ne sont pas très nombreux, certains sont réellement surprenants et le suspense, lui, est constant jusqu’à un troisième acte mené tambour battant, véritable course contre la montre visant à stopper le dingue muni d’une ceinture d’explosif en plein concert d’un boys band à minettes.

Et puis, bien sûr, Stephen King n’a rien perdu de son talent d’écrivain et sa prose, quoique certains continuent à la dénigrer, possède une force évocatrice indéniable tant le bonhomme a le sens de la formule impeccable, de la métaphore percutante et de la citation bien trouvée. En dépit du caractère réaliste, brutal et terriblement contemporain du récit (débuté peu avant les attentats de Boston), MR MERCEDES garde pourtant un côté optimiste réjouissant accentué par quelques références aux œuvres antérieures de King et de nombreuses touches d’humour.

Une éclatante réussite.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Thriller, #Stephen King

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Publié le 24 Juillet 2017

LES GRIFFES DE LA MORT de Michael Wolfitt

Ecrit par l’anglo-saxon Mike Fredman sous le pseudonyme de Michael Wolfitt, l’intrigue de ces GRIFFES DE LA MOT se concentre sur une jeune femme, Hilary, et son époux Roger. Victimes d’un accident de voiture, le couple est conduit à l’hôpital où Hilary perd son bébé, lequel n’était pas tout à fait normal. Le médecin Willis affirme même à Roger qu’il était sans doute préférable que l’enfant ne naisse pas. De plus, Hilary ne pourra plus avoir d’enfant, du moins est-ce l’opinion du monde médical car la jeune femme semble persuadée du contraire. Peu après, elle recueille également un chat, baptisé Râ, sur lequel elle reporte son affection. Dès lors le couple se trouve au centre d’une série de morts sanglantes liées à d’antiques malédictions égyptiennes.

Récit horrifique mélangeant divinités antiques, malédictions, meurtres sanglants et agressions animales commises par de petits chats, LES GRIFFES DE LA MORT combine des éléments classiques pour aboutir à une décoction relativement originale. On y retrouve quelques influences allant de « La Féline » aux premières œuvres de James Herbert, maitre tutélaire des apprentis romanciers anglais en mal d’horreur durant les années ‘80.

L’adjonction des références mythologiques égyptiennes et la place des félidés dans cette civilisation confèrent une réelle plus-value à ce petit bouquin pas toujours réussi mais indéniablement attachant. L’atmosphère prime ici sur les débordements sanglants, une constance dans la plupart des romans anglo-saxons publiés dans la collection « Gore ». Le déroulement, quelque peu prévisible, n’empêche pas de prendre plaisir à ce récit dont la conclusion s’avère étonnante. Notons cependant quelques défauts, en particuliers une caractérisation schématique des protagonistes, quelques incohérences et, surtout, l’une ou l’autre sous-intrigues qui tournent courts. Ainsi, le chat réveille la sexualité d’un couple lors d’une scène saugrenue : l’épouse découvre la collection de gadget érotique de son mari et, d’abord choquée, se décide ensuite à porter une tenue sexy et à l’accueillir de manière provocante avant de lui administrer une fessée. Un passage (très soft) qui remplit le cahier des charges (décharge ?) de l’épouvante mais n’aboutit finalement à rien. A moins qu’il s’agisse d’un problème de traduction ? Le livre n’a, apparemment, pas trop souffert de son adaptation aux standards de la collection (la version anglaise comporte 216 pages, la française 160 en petits caractères) mais peut-être que cette sous-intrigue était, à l’origine, plus étoffée. Quoiqu’il en soit, LES GRIFFES DE LA MORT démontre que les romans publiés chez Gore abordaient des sujets variés et ne se limitaient pas à une suite de séquences pornographiques ou sanguinaires. Sans être une grande réussite, ce bouquin sympathique se lit sans le moindre déplaisir, ce qui n’est déjà pas si mal pour ce genre de produit horrifique de consommation courante.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Gore

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Publié le 18 Juillet 2017

TITAN HUNT de Dan Abnett. Paulo Siqueira, Sandra Hope, Brett Booth et Norm Rapmund.

Nouvel événement DC Comics annonçant le prochain reboot (dénommé rebirth) de cet univers, TITAN HUNT est une mini-série de 8 épisodes (ce qui nous donne donc environ 200 pages de lecture) consacrée à la populaire équipe des Teen Titans. Or, ces derniers ont, semble-t-il, oublié qu’ils furent jadis des héros. Le premier numéro (publié dans Justice League Universe 10) introduit donc l’intrigue et se centre sur le jeune Speedy, devenu un alcoolique (et ancien toxicomane) qui tente de se souvenir de son existence super-héroïque et se voit hanté par différentes visions du passé. Par la suite, au fil des numéros, on découvre les autres ex Titans eux aussi obsédés par des images en provenance d’une vie commune lointaine. Dick Grayson va donc redevenir Nightwing (pour des raisons assez floues), retrouver Aqualad et Wonder Girl et tout ce petit monde va se rassembler pour combattre Mr Twister, leur plus vieil adversaire (apparu lors de leur première aventure dans  les années ’60). Lilith aurait jadis effacé la mémoire des Titans afin de les protéger (de quoi ?  pourquoi ? rien n’est très clair) et de contrecarrer les plans de ce Mr Twister. Mais tout ça ne fait guère sens.

L’intrigue, erratique, avance souvent de manière elliptique et les scénaristes complexifient à outrance une trame pourtant basique et éculée : les Titans ont perdu la mémoire, se sont séparés et doivent à présent se réunir et apprendre à agir de concert pour combattre un ancien ennemi. A partir de là, des développements inattendus se succèdent de manière assez confuse : Lilith, par exemple, convie une organisation pour aider les Titans mais les assassins convoqués se retournent contre les héros. Pourquoi ? Encore une fois la question ne se pose pas (il y a bien une explication mais elle laisse assez perplexe à l’image du scénario dans son ensemble), le récit sacrifiant toute cohérence pour proposer une réunion de personnages emblématiques et de grosses bastons. Enfin, emblématiques c’est vite dit car mis à part Dick Grayson et, dans une moindre mesure, Donna Troy, les différents protagonistes (Speedy, Aqualad, Heraut, Colombe et Faucon, etc.) ne sont pas franchement les plus connus de l’univers DC.

TITAN HUNT se révèle en outre linéaire et répétitif. Lu d’une traite (aidé par une version française qui rassemble les cinq derniers volets dans le N° 13 de Justice League Universe) on mesure davantage les redites d’une intrigue qui bassine à longueur de pages la perte de mémoire des héros et la nécessité pour eux de se réunir. En gros, l’histoire se construit lentement dans le seul but d’aboutir à un final sympathique sous forme de « Titans, rassemblement ! ».

Bien sûr, les scénaristes ne peuvent se dépatouiller des habituels problèmes de continuité plombant la narration « comic book » depuis une trentaine d’années : la première aventure de nos jeunes Titans s’est déroulée en 1964 mais elle est repositionnée opportunément « voici cinq ans ». Donna Troy y a d’ailleurs participé alors que la nouvelle continuité DC en fait une création récente, lorsque Wonder Woman avait accédé à la divinité guerrière. Quant aux raisons de la reprise du costume de Nightwing par un Dick Grayson (« je suis passé par la batcave, je l’ai pris, ça peut servir » déclare-t’il simplement) supposé décédé elles sont aussi abracadabrantes que la mini-série dans son entièreté.

Dans l’ensemble, TITAN HUNT déçoit et apparait comme une production très moyenne à tous les niveaux (dessins, caractérisation des protagonistes, scénario, conclusion) dont la principale motivation est de conduire les protagonistes à remarquer l’absence d’un des membres de l’équipe (Wally West, alias Kid Flash) réintroduit dans la continuité à l’occasion de TITAN REBIRTH.  Un nouvel arc (publié sous la forme d’un « récit complet de la justice league » par Urban) apportant quelques éclaircissements sur la saga TITAN HUNT mais également beaucoup  de nouvelles questions sans réponses.

Plus proche du prologue potable que d’un véritable récit se suffisant à lui-même, TITAN HUNT reste divertissant pour les plus indulgents, aidé par son rythme soutenu et des dessins très corrects. Mais il n’y avait vraiment pas de quoi en faire tout un plat ni se passionner pour le retour inespéré d’une des plus célèbre équipe super-héroïque de la Distinguée Concurrence.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Comic Book, #DC, #Superhéros

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Publié le 16 Juillet 2017

NOEL TRAGIQUE A LEXHAM MANOR de Georgette Heyer

L’Anglaise Georgette Heyer (1902 – 1976) fut une prolifique auteure de romans historiques. Elle débute très jeune dans l’écriture puisqu’elle publie son premier livre, THE GREAT ROXHYTHE, en 1923.  Par la suite, Heyer devient une spécialiste de la romance historique située, généralement, durant la période de la Régence. Beaucoup furent publiés chez nous par Harlequin (ou Milady). Heyer écrit également de nombreux romans policiers, lesquels se vendent nettement moins que ses romances (en moyenne  16 000 exemplaires pour les premiers,  plus de 100 000 pour les seconds). La romancière considérait d’ailleurs ses œuvres policières comme « une diversion intellectuelle proche des mots croisés ». Elle écrira une douzaine de romans d’énigme avec l’aide de son mari qui, souvent, fourni les bases des intrigues et des personnages.

NOEL TRAGIQUE A LEXHAM MANOR constitue un bel exemple de whodunit à l’ancienne dont le classicisme se voit tempéré par une dose humour et un rythme bien géré. La romancière ne perd pas de temps pour introduire ses protagonistes et évoquer leur aménité. Car, quoi de mieux qu’une réunion  de famille un soir de Noël pour cultiver les rancœurs, lesquelles mèneront forcément au crime de l’instigateur de la fête,  Nathaniel Herriard, retrouvé poignardé dans son bureau fermé à clé. L’inspecteur Hemingway de Scotland Yard se voit chargé de l’enquête et les suspects, probablement motivés par l’héritage, ne manquent pas. Mais comment expliquer ce crime en apparence impossible ? 

La Nativité inspira fréquemment les auteurs de l’Age d’or puisque ces réunions de famille fournissaient l’occasion de dévoiler des secrets enfouis et de supprimer quelques tyrans familiaux. LE NOEL D’HERCULE POIROT d’Agatha Christie vient immédiatement à l’esprit mais on peut aussi citer le MEURTRE A L’ANGLAISE de Cyril Hare, LE CERCUEIL DE NOEL de Ngaio Marsh, le AU DOUZIEME COUP DE MINUIT de Patricia Wentworth, LES NEUF TAILLEURS de Dorothy Sayers ou encore LE MYSTERE DES TROIS CROIX d’Ellery Queen. Un véritable sous-genre du roman d’énigme, ici joliment illustré par une Georgette Heyer menant adroitement sa barque en présentant une  belle brochette de suspects : le frère de la victime (Joseph), son neveu (Stephen), sa nièce (Paula), leur compagne et compagnon respectifs (l’auteur dramatique en devenir Roydon, la volage et futile actrice Valerie Dean), sans oublier la cousine Mathilda, l’associé de la victime, et les domestique.

Archétype du whodunit (et du howdunit), NOEL TRAGIQUE A LEXHAM MANOR joue à ce point des clichés et conventions du genre que le roman verse pratiquement dans l’auto parodie pince sans rire : rien ne manque au catalogue, de la femme fatale ultra vénale et stupide à la jeune fille intelligente et effacée en passant par un maitre d’hôtel caricatural. Ne manque qu’un crime en chambre close inexplicable et la disparition mystérieuse d’un apparemment anodin bouquin historique pour couronner un récit légèrement prévisible. L’identité de l’assassin semble en effet évidente à mi-parcours et la méthode utilisée – inspirée par l’assassinat de l’impératrice Elizabeth d’Autriche – n’est pas vraiment originale et a déjà été employée à maintes reprises (on en trouve d’ailleurs une variante récente dans le troisième épisode de la sixième saison de « Meurtre au paradis » d’ailleurs intitulé « The Impossible Murder »).

En dépit de ces bémols, NOEL TRAGIQUE A LEXHAM MANOR se lit avec plaisir : c’est (relativement) court, rythmé, efficace et les dialogues bien écrits, très vivants et souvent amusants rendent le roman fort plaisant.  Conseillé !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Golden Age, #Impossible Crime, #Georgette Heyer

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Publié le 13 Juillet 2017

LE SURVIVANT - GUERRE TOTALE de Jerry Ahern

Expert en arme et écrivain prolifique, Jerry Ahern (1946 – 2012) reste essentiellement connu pour sa longue saga littéraire consacré à l’agent de la CIA John Thomas Rourke, alias « Le Survivant ». Sous le formidable pseudonyme d’Axel Kilgore on lui doit également la série du « Mercenaire », elle aussi publiée en France chez Gerard De Villiers. En tout, Ahern écrivit plus de 80 bouquins dont 29 appartiennent à la saga du « Survivant » débutée en 1981 avec ce premier tome, GUERRE TOTALE.

Dans ce roman nous faisons la connaissance de notre valeureux héros, John Thomas Rourke, un as de la CIA revenant d’une mission au Moyen-Orient. Persuadé que le monde court à sa perte, Rourke s’est familiarisé avec les techniques de survie et a construit un abri antiatomique pour sa famille. La situation au Pakistan semble donner raison à Rourke et la tension s’accroit entre les Etats-Unis et la Russie. Malgré les efforts de paix des deux nations, l’escalade militariste conduit à un holocauste nucléaire qui dévaste la quasi-totalité de la planète. Lorsque les missiles frappent le sol américain, Rourke est à bord d’un avion. Les pilotes sont aveuglés par la déflagration mais l’agent de la CIA parvient à poser l’appareil tant bien que mal. Avec un autre survivant, Paul Rubinstein, il se dirige vers la ville la plus proche, Albuquerque, où il espère trouver un soutien. Pendant ce temps, son épouse Sarah emmène ses enfants vers ce qu’elle espère être la sécurité…

Lançant la mode fructueuse (en particuliers au cinéma) du « post nuke », LE SURVIVANT – GUERRE TOTALE n’est, bien sûr, pas le premier roman à traiter du thème de la survie après une guerre nucléaire mais il est sans doute responsable des nombreuses imitations ultérieures qui allaient encombrer les halls de gare durant les années ’80, en particulier la série « Doomsday Warrior ».

Ce premier tome se veut réaliste et se consacre, durant une centaine de pages, à la situation géopolitique en passe de se dégrader irrémédiablement. Les efforts de la Russie pour stopper l’expansion du fondamentalisme islamiste conduisent à une riposte américaine menant elle-même à la guerre totale. Les temps ont changés… Ou pas ? Moins manichéen que la plupart de ses collègues œuvrant dans le roman de gare, Aherm présente des personnages certes stéréotypés mais néanmoins intéressants. Bien sûr, Rourke constitue le parfait exemple d’invincible héros du roman de gare, un mercenaire capable d’affronter à lui seul 40 bikers sans subir la moindre  égratignure. Précurseur  des combattants inflexibles du cinéma musclé, défenseur émérite des valeurs américaines menacées par la pourriture communiste, Rourke combine Mad Max, John Rambo et le Chuck Norris d’ « Invasion USA » afin de protéger sa famille et ce qu’il reste du monde libre. Alternant de manière classique mais toujours aussi efficace les différents points de vue des protagonistes, GUERRE TOTALE avance à un rythme ultra soutenu qui ne laisse aucunement le temps de souffler au lecteur. Les dernières pages, encore plus imprégnées d’action, annoncent les outrances à venir et anticipent largement sur « Mad Max 2 » et le cinéma post-nuke de  cette époque puisque Rourke se venge d’une horde de sanguinaires hell’s angels auxquels il tient tête avec sa bite, son couteau et ses pistolets automatiques.

Comme souvent avec ce genre de série paralittéraire, les tomes ultérieurs s’éloigneront progressivement de ces bases réalistes pour verser plus frontalement dans une science-fiction débridée incluant cryogénie, mutants et autres cannibales. En France, seuls les premiers tomes eurent droit à des traductions respectueuses du matériel originel, les bouquins furent, par la suite, écrits par d’illustres inconnus qui étirèrent la saga jusqu’au tome 51.

Pour les nostalgiques de la Guerre Froide, les fans de post-nuke ou les simples amateurs de bouquins d’action vite écrits et vite lus, GUERRE TOTALE s’impose comme une réussite étonnamment plaisante et d’une rare efficacité que l’on n’a pas envie de lâcher avant la fin (provisoire évidemment). Rondement mené et vivement conseillé !

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Publié le 8 Juillet 2017

L'ASSASSIN HABITE AU 21 de Stanislas André-Steeman

Publié en 1939 et porté à l’écran trois ans plus tard, L’ASSASSIN HABITE AU 21 demeure le classique incontournable de Stanislas André-Steeman, auteur liégeois d’excellents romans d’énigme. Fréquemment adapté au cinéma dans les années 40 et 50, Steeman est, aujourd’hui, oublié des scénaristes et quelque peu négligé. Un tort vu la qualité de ses intrigues, souvent ramassées (moins de 200 pages pour la plupart) et rythmées.

L’ASSASSIN HABITE AU 21 se déroule à Londres durant les années ’30.  La ville, plongée dans le brouillard, est terrorisée par un assassin cupide qui tue ses victimes à l’aide d’un sac de sable pour les dépouiller de leurs parfois très maigres économies. La police n’arrive pas à coincer le meurtrier qui signe ses méfaits en laissant sa carte de visite : Mr Smith. Toutefois, un tuyau conduit la police vers la pension de famille du 21 Russell Square. Cependant, qui, parmi les occupants, peut être le coupable ? Les policiers demandent à un  nouvel arrivant, le professeur Julie, de leur servir d’espion mais, dès la première nuit qu’il passe au 21, Mr Julie est assassiné. Il ne laisse qu’un message énigmatique : il b… Dès lors le coupable est-il Mr Collins, le bègue, le docteur Hyde, le boiteux, Boris Andreyew, passionné de broderie ou bien le prestidigitateur hindou Lalla-Poor. A moins qu’ilne s’agisse du major Fairchild, retraité de l’armée des Indes ou encore d’Ernest Crabtree, complètement dominé par son épouse ? Mr Collins est finalement arrêté mais, durant son emprisonnement, Mr Smith commet un nouveau crime.

Contrairement à son adaptation cinématographique, le roman ne met pas en scène Monsieur Wens, le détective récurrent de Steeman. Mais l’énigme ne manque cependant pas d’attrait (peut être la solution apparaitra t’elle légèrement attendue pour les afficionados du whodunit ?) et évolue sur un rythme soutenu, présentant tour à tour les différents suspects. Inculpés puis disculpés lorsque Mr Smith commet un nouveau crime, ils finissent d’ailleurs par attendre tranquillement, sans même chercher à nier leur culpabilité, qu’un meurtre soit commis. D’où une ambiance particulière, une sorte d’angoisse flegmatique alimentée par la brume noyant la capitale anglaise. L’humour, très présent, fonctionne agréablement et l’auteur joue fair-play avec le lecteur en lui proposant, en référence directe à Ellery Queen, un défi à deux reprises.

Servi par une écriture classique, au vocabulaire à la fois simple et précis, le roman est très vivant, avec des dialogues bien écrits qui donnent beaucoup de charme aux différents interrogatoires menés par les policiers. Inscrit dans le cadre temporel (les années ’30) et géographique (l’Angleterre, mais ici confinée dans une pension de famille qui tient du véritable microcosme sociétal) typique des classiques du roman policier de l’Age d’Or, L’ASSASSIN HABITE AU 21 n’a pas volé sa réputation  de classique du whodunit toujours aussi agréable à lire ou à relire.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Golden Age, #Stanislas André-Steeman

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Publié le 6 Juillet 2017

L'ETRANGE VIE DE NOBODY OWENS de Neil Gaiman

En 1985, Neil Gaiman a l’idée d’une sorte de démarquage macabre du LIVRE DE LA JUNGLE (« The Jungle book » devient dès lors logiquement « The Graveyard Book ») situé dans un cimetière où grandit un jeune garçon. Divisé en huit chapitres qui fonctionnent tels des nouvelles situées dans le même univers (la quatrième histoire fut d’ailleurs précédemment publiée dans une anthologie et récolta le Prix Locus de la meilleure nouvelle), celui de ce plaisant cimetière, le livre suit la vie de cet étrange Nobody Owens et ces démêlées avec le mystérieux Jack.

Un enfant de dix-huit mois échappe par miracle à la mort lorsque le Jack, un assassin membre d’une confrérie secrète, tue tout le reste de sa famille. Le garçonnet trouve refuge dans un cimetière où il est adopté par un couple de fantôme, Monsieur et Madame Owens, et confié  à la garde de son tuteur, le vampire Silas. Rebaptisé Nobody, l’enfant grandit en compagnie des spectres  et des lycanthropes, apprend à côtoyer les vivants et, parfois,  à les effrayer. Il se lie aussi d’amitié avec Scarlett qui aime bien discuter avec lui même si elle le considère comme son ami imaginaire. Mais le Jack, lui, cherche toujours à le tuer…

Après CORALINE, voici une nouvelle réussite éclatante de Neil Gaiman, aussi à l’aise dans le roman adulte (AMERICAN GODS), le comic book (SANDMAN, 1612), la nouvelle (comme en témoigne ses divers recueils) que dans la littérature « jeunesse ». Ici, comme souvent avec cet auteur,  nous sommes dans un univers gothique et macabre non dénué d’humour, proche du cinéma de Tim Burton (celui des « Noces Funèbres ») qui reprend également les codes du roman d’apprentissage. On peut aussi évoquer une version à la fois plus sombre et décalé d’un Harry Potter affrontant un nouvel adversaire qui ne peut être nommé,  un tueur sanguinaire rappelant Jack l’Eventreur et simplement baptisé le Jack. Chacun des chapitres propose une avancée de deux ans et marque ainsi une étape dans la vie de Nobody, dit Bod.

Neil Gaiman, en 300 pages qui se lisent très rapidement et rehaussées de belles illustrations en  noir et blanc évocateur, laisse libre cours à ses talents de conteur pour convier tout un bestiaire de morts, de vivants et de morts-vivants. Son joyeux cimetière est peuplé de sorcière défunte mélancolique (car nulle pierre ne marque l’emplacement de sa tombe), de goules affamées, des fantômes bavards, de tuteur vampire et de louve-garou autoritaire. Un mélange de fantasy, d’épouvante et d’humour destiné aussi bien aux adolescents qu’aux adultes et justement couronné par le Prix Hugo du meilleur roman et le Prix Locus du meilleur roman « jeunesse ».

L'ETRANGE VIE DE NOBODY OWENS de Neil Gaiman

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Jeunesse, #Prix Hugo, #Fantasy, #Neil Gaiman

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Publié le 3 Juillet 2017

UNIVERSE X d'Alex Ross, Jim Krueger et Doug Braithwaite.

Après le succès de l’excellent KINGDOM COME pour DC Comics, Alex Ross imagine, en 1997, le futur forcément dystopique de l’univers Marvel, un monde dans lequel tous les individus, affectés par les brumes terratogènes libérées par Flèche Noire et les Inhumains, ont acquis des super pouvoirs. Pour réaliser cela, Flèche Noir a rendu aveugle Uatu, le Gardien de la Terre, et ce-dernier se voit forcé de choisir comme remplacement le robot vivant X 51, alias Machine Man.

Que deviennent les autres personnages bien connus ? Captain America quitte les Avengers, Spiderman prend sa retraite, Namor tue la Torche, Susan Richards meurt en compagnie du Dr Fatalis. Reed, pour sa part, s’exile en Latverie où il prend la place laissée vacante par son ennemi.

L’Homme Absorbant, le plus dangereux super vilain de cet univers, est détruit par la Vision tandis que Galactus arrive sur Terre pour dévorer un œuf implanté par les Célestes au cœur de la planète. Il est finalement révélé que Galactus n’est autre que Franklin Richards…

L’intrigue d’UNIVERSE X peut débuter, alors que des perturbations climatiques sans précédents ont tués des millions de personnes. Une secte d’adeptes fanatiques de l’Homme Absorbant rassemble également les membres épars du criminel décédé afin de le ramener à la vie et de détruire les torches créées par Richards afin de débarrasser l’atmosphère des brumes terratogènes et rendre leur humanité aux peuples de la Terre. Mais le veulent-ils ? Pendant ce temps Mar-Vell (autrement dit Captain Marvel) se réincarne sous la forme d’un enfant sur lequel veille un Captain America désabusé.

Bien que la trilogie EARTH X / UNIVERSE X / PARADISE X ait été, au départ, envisagé comme le futur « officiel » de l’univers Marvel, les révélations successives sur la destinée des principaux personnages ont conduit à ce qu’elle soit rétroactivement retirée de la continuité. La saga doit donc s’envisager comme une histoire alternative, un présent possible mais différent, similaire aux Elsewhere de la Distinguée Concurrence.

UNIVERSE X s’étend donc sur plus de 700 pages bien tassées, assez pauvres en action puisque largement consacrées aux dialogues entre le Gardien et Machine Man, ce qui donne un récit très bavard voulu philosophique, adulte et intelligent. Malheureusement, l’impression dominante reste souvent l’ennui devant ces dizaines de pages de développement parfois abscons agrémentés d’appendices littéraires (deux ou trois pages de textes concluent chaque chapitres, censés clarifier le récit, elles le rendent en réalité encore moins compréhensible). L’intrigue reste nébuleuse, confuse, brouillonne. Elle se veut ambitieuse, brasse des dizaines de héros (certains connus d’autres complètement obscurs), les réinvente dans des versions altérées (Thor est devenu une femme suite aux manipulations de Loki, Hulk et Bruce Banner sont dissociés, la fille de Peter Parker a fusionné avec Venom), se déplace de notre monde à un au-delà très guerrier où s’affrontent héros et vilains, imagine des réalités alternatives dans lesquelles Franklin Richards est Galactus et où Mephisto (le Diable ?) a transformé Kurt Wagner en Belasco.

Tout cela démontre un réel foisonnement imaginatif, parfois mégalomane dans sa volonté d’offrir une vision définitive de l’univers Marvel futur, mais n’évite pas un côté hautement rébarbatif pour ne pas dire indigeste sur la longueur. Il est difficile de se passionner pour cette intrigue trop vaste et trop embrouillée pour ne pas en décrocher lorsqu’on se rend compte que les auteurs ne vont nulle part. A moins d’avoir une connaissance encyclopédique de l’univers Marvel cette suite de vignettes d’un intérêt très variable semblera donc peu engageante quoique certaines surnagent, notamment celle consacré à un Magneto privé de ses pouvoirs et asservi par le Crapaud. Les dessins (sans égaler ceux d’Alex Ross qui se charge uniquement des couvertures, de quelques illustrations et de l’idée de base) s’avèrent très corrects et évitent le rejet total de cette vaste épopée plus prometteuse sur le papier que concluante dans sa réalisation.

Que l’on aime ou pas UNIVERSE X nous sommes forcé d’admettre que la série, par sa démesure, son ambition et son écriture très littéraire, tranche avec le tout venant du comic super héroïque et s’impose comme une date importante de la bande dessinée américaine. Les enthousiastes parleront sans doute d’une œuvre foisonnante, les déçus d’un gros foutoir et d’une accumulation de bonnes idées mal exploitées. Décevant mais pas inintéressant, au final, même si, pour être honnête, se taper les 700 pages quasi d’une traite n’est sans doute pas une bonne idée, le tout étant, il faut l’avouer, assez imbuvable.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Comic Book, #Uchronie, #Alex Ross, #Marvel Comics

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