Publié le 29 Mars 2019
Ce tome 3 aborde une période charnière : la fin des magazines, la prise de pouvoir de l’édition de poche, la sortie de nombreux classiques (DUNE, ELRIC LE NECROMANCIEN), les tentatives de SF engagée, politique ou expérimentale (avec la new wave britannique), la domination du cinéma (de 2001 à « Rencontres du 3ème type » en passant par les phénomènes « Star Wars » et « Star Trek ») et l’arrivée de nouveaux auteurs décidés à ruer dans les brancards comme Ellison, Spinrad ou Dick, sans oublier le retour d’un courant appelé à devenir ultrapopulaire : la Fantasy.
Après une courte mais intéressante introduction dans laquelle Sadoul brosse un panorama de la foisonnante SF américaine et fustige les tentatives « nombrilistes et politiques » de l’infâme SF française engagée à gauche qui réussit seulement à « détourner les lecteurs », l’anthologie commence avec le célèbre « Lumière des jours enfouis » de Bob Shaw. Une très belle nouvelle poétique qui illustre bien les diverses voies empruntées alors par la SF et que Shaw développera dans LES YEUX DU TEMPS. L’auteur traite ici d’un « verre lent » qui capte la lumière pour plusieurs années et révèle ainsi des paysages depuis longtemps disparus.
Le trublion Harlan Ellison nous offre un de ses classiques, devenu difficile à trouve (précédemment publié dans un recueil de 1979) « La bête qui criait amour au cœur du monde », vainqueur du Hugo de la meilleure nouvelle. Pour ma part je reste souvent hermétique à Ellison et à son mélange de provocation, d’humour grinçant et de surréalisme science-fictionnel. Ce texte ne fait pas exception.
« La fourmi électrique » constitue une nouvelle typique de Philip K. Dick et traite donc de la question de l’humanité pour les « hommes électriques » (on pourrait aussi les nommer réplicants). Plaisant mais Dick reviendra fréquemment sur ce thème et fera mieux ensuite.
« Ceux qui partent d’Omelas » a été très souvent publié mais ce n’est que justice pour cet excellent texte d’Ursula K. Le Guin d’ailleurs récompensé par un Hugo, un récit symbolique, utopique et philosophique d’une grande richesse en moins de dix pages. Chapeau bas.
Autre récipiendaire d’un Hugo, Carolyn Cherryh et son « Cassandra », un court récit effectivement convaincant.
Norma Spinrad nous propose une nouvelle plus originale et quelque peu expérimentale, « L’Herbe du temps », au sujet d’une drogue qui abolit l’impression de chronologie linéaire du temps. Le narrateur devient donc un individu existant en continu dans un espace infini de 110 ans. Une excellente réussite, le deuxième chef d’œuvre de ce recueil après le récit de Le Guin.
Robert Silverberg, un des monuments de la science-fiction, livre un « Groupe » précédemment publié dans le recueil HISTOIRES DE SEXE FICTION, un récit correct sans être transcendant au sujet de partouzes futuristes connectées.
Enfin, Orson Scott Card termine ce recueil par un exceptionnel « Sonate sans accompagnement », une nouvelle d’une grande originalité servie par une belle écriture et qui mérite l’inclusion dans toutes les lites « best of » de la SF. Le troisième chef d’œuvre de ce recueil (qui ne compte que 128 pages!!!).
Voici donc une très belle sélection de nouvelles assorties de présentations pertinentes vendue à un prix dérisoire et qui ne compte pas moins de trois prix Hugo. Faudrait être fou pour s’en priver !