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Publié le 6 Octobre 2023

LE ROYAUME DES CHIMERES de Robert E. Howard

Robert Howard c’est Conan. Oui, bien sur. Mais pas seulement. Ce riche recueil témoigne de la diversité d’un auteur parti beaucoup trop jeune mais qui démontre sa fougue, son énergie épique et son imagination débordante. Les nouvelles présentées sont relativement longues, parfois proches de « courts romans » (ou novalla), par exemple « Le sang des dieux » qui approche des cent pages.

Les récits varient de la pure fantasy au cape et épée historique en Normandie en passant par les épopées Vikings et l’horreur lovecraftienne. On voyage ainsi dans le temps (époque romaine, début du XXème siècle, Moyen-âge, Far West, antiquité fantasmée) et dans l’espace. Le recueil commence avec la nouvelle titre, « le royaume des chimères, consacrée au fameux roi atlante Kull qui vécut bien avant Conan (mais dans le même univers). Comme Conan voici un barbare certes mais relativement raffiné, en tout cas intelligent, qui ne se repose pas uniquement sur sa hache et ses muscles. Tout le contraire de la caricature de connard barbant auxquels sont souvent associés les créations d’Howard.

Il y a de nombreuses autres nouvelles réussies dans ce recueil, notamment Agnès la Noire, au sujet d’une épéiste française (le titre original, « Sword Woman », est plus évocateur) ou l’épique « les épées de la mer nordique » avec des Vikings.

Howard propose encore des récits plus portés vers l’horreur dans le style de Weird Tales. Citons par exemple « L’homme noir », « Les pigeons de l’enfer », « la pierre noire » ou « les vers de la terre ». On y trouve les hommages / emprunts aux mythes lovecraftien (R’lieh, Dagon, etc.) dans un mouvement d’enrichissement mutuel des auteurs de l’époque.

LE ROYAUME DES CHIMERES constitue donc un épais recueil, joliment et richement illustré, qui offre près de 600 pages d’aventures, de Fantasy, d’horreur et d’action. Le style de Howard est plus léger, plus fluide et (osons le dire) plus moderne que celui de Lovecraft. Ces récits aux dialogues percutants et aux descriptions courtes et précises apparaissent encore très actuels alors qu’ils furent écrits voici un siècle. On peut même ajouter qu’ils restent plus plaisants et grandioses que 90% de la production actuelle dans le même style. Chaudement recommandé.

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Publié le 26 Septembre 2023

LE REVEIL DE CTHULHU de brian Lumley

Brian Lumley, avant sa saga du NECROSCOPE, s’est signalé par ses romans lovecraftiens, notamment ceux consacrés à son héros Titus Crow. Ce-dernier est une sorte de détective du surnaturel, un aventurier entre Jules de Grandin et Harry Dickson. Il est flanqué de son associé, Henry-Laurent de Marigny, et se confronte aux Grand Anciens à longueurs de pages.

La vision / version du Mythe par Lumley ressemble à la bonne fan-fiction (ce n’est pas péjoratif) avec son mélange d’innovations et d’hommages / resucées aux écrits antérieurs de Lovecraft et ses potes de chez Weird Tales. Au rayon des nouveautés, Lumley propose une conception plus rationnelle de la cosmogonie d’HPL : les créatures du mythe sont des entités extraterrestres qui peuvent être combattues de manière scientifique. Et lorsque la « magie » fonctionne c’est de manière détournée. Les déités, par exemple, ont un « implant mental » qui les rend sensibles à des signes comme l’étoile de Mnar ou certaines invocations. Lumley rationnalise donc le mythe et lui donne une certaine « cohérence », comme a pu le faire August Derleth. Il est d’ailleurs amusant de constater que si ces deux auteurs sont souvent critiqués par les puristes c’est leur vision, plus que celle de Lovecraft, qui prévaut actuellement dans le grand public. Que ce soit en roman, en jeu de plateau, jeu de rôle ou même film, le côté « désespéré » de HPL (avec ses héros qui finissent immanquablement à l’asile) a laissé place à une version plus portée sur l’aventure fantastique. Titus Crow initie cette tendance et précède également X-Files tout en évoquant le Dr Who qui luttait aux côtés de la UNIT. Nous avons donc nos deux héros télépathes recueillis par la Fondation Wilmarth, sise à Miskatonic, pour contrer les chtoniens et autres DCC (les Divinités du Cycle de Cthulhu, texto). Car HPL avait raison et tout ce qu’il a écrit est véridique quoique publié sous forme de fictions pour ne pas horrifier la populace. Ce en sont donc plus quelques rencontres entre un érudit et une entité surnaturelle qui sont racontées par Lumley, c’est véritablement une guerre épique et cosmique entre les Terriens et les Créatures.

Ce premier volet de la Geste de Titus Crow est donc une version plus blockbuster et simpliste de l’original (c’est un peu à L’APPEL DE CTHULHU ce que SHANARRA est au SEIGNEUR DES ANNEAUX) avec des humains qui, cette fois, contre-attaquent. Les ennemis sont sous le sol, des sortes de vers géants façon DUNE qui déclenchent tremblements de terre et autres catastrophes.

Batailles épiques contre des monstres à la Godzilla, escarmouches mentales,… la narration alterne notes diverses, comptes-rendus, journaux et récit plus romanesques car l’écriture de Lumley est définitivement plus fluide et moins portée sur les superlatifs pompeux.

Bon, on trouve encore des passages un peu pesants où l’auteur égrène les titres des bouquins d’occultisme et lance des imprécations imprononçables mais, dans l’ensemble, c’est une lecture bien plus « facile » et « détente » que celle de son ainé. Et on se dit que ces aventures donneraient quand même un sacré film ou une bonne série télé.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Lovecraft, #Fantastique, #Aventures, #Horreur

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Publié le 22 Décembre 2022

L'AGENCE LOVECRAFT TOME 1 : LE MAL PAR LE MAL de Jean-Luc Marcastel

Avec ce roman (destiné aux adolescents mais lisibles par les plus jeunes… et les plus vieux !), Marcastel s’inscrit dans la tradition du pulp. Par son thème lovecraftien mais aussi par le principe si plaisant d’intertextualité dont se servirent jadis Philip José Farmer ou, plus récemment, Alan Moore en comics. Car, dans ce roman, aux côtés d’une bande de jeunes héros, l’auteur fait intervenir l’Homme de Bronze en personne, le Doc Savage des années ’30, et la descendante du Capitaine Némo, aux commandes du Nautilus V. Sans oublier une certaine personne dont le nom commence par M durant l’épilogue.

Ce premier tome démarre sur les chapeaux de roue en présentant une poignée de personnages qui fuient une mystérieuse menace. L’auteur nous expose ainsi divers héros lors d’une succession de courts chapitres avec point de vue alterné. C’est rapide, énergique et sans temps morts, dans la tradition « young adults ». Le roman mélange ainsi fantastique, thriller / mystère et aventure inspiré par Jules Vernes (et, pour être plus actuel, le steampunk) avec une touche d’horreur venue, forcément, de Lovecraft.

Comme les lecteurs de HPL le savent, la Terre était jadis dominée par des créatures monstrueuses qui espèrent recouvrer leur suprématie perdue après l’extermination de l’espèce humaine. Trois adolescents dotés de pouvoirs, Marie, Ryan et Sergueï, vont ainsi se rencontrer par l’entremise d’une mystérieuse jeune fille. Cette dernière travaille pour l’Agence Lovecraft et lutte contre les forces maléfiques et autres adeptes des Grands Anciens.

Fort rythmé, ce premier opus n’arrête pratiquement jamais et, comme ses jeunes protagonistes, courent à toute allure. Toujours en mouvement, l’intrigue joue la carte de l’aventure saupoudré de mystères, de récit d’apprentissage (avec ces héros qui se découvrent progressivement) et de fantastique. L’écriture, elle, se montre toujours fluide et plaisante, avec un vocabulaire recherché et des tournures soignées. Le lecteur plus âgé peut d’ailleurs mesurer l’évolution de la littérature dite « jeunesse » puisque l’intrigue, les situations et le style peuvent s’apprécier par les adultes. Ils n’ont d’ailleurs rien à envier à des romans jadis classés « pour les grands ». Dans son mélange de genre et ces clins d’œil, le lecteur reconnait ainsi l’influence de LA LEAGUE DES GENTLEMEN EXTRAORDINAIRES tandis que l’option de traiter les mythes lovecraftiens à la sauce aventure / mystère rappelle les romans de Brian Lumley (longtemps dévalorisés mais aujourd’hui réévalués par beaucoup).

Si on regrette un final un brin expédié (mais c’est de bonne guerre, il faut préparer la suite et nous en saurons plus dans les tomes ultérieurs), on apprécie cette aventure très divertissante assortie d’une postface éclairante et joliment publiée (format, couverture, etc.). Une bonne pioche.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantastique, #Jean-Luc Marcastel, #Jeunesse, #Lovecraft, #Steampunk

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Publié le 13 Janvier 2022

SHERLOCK HOLMES ET LES MONSTRUOSITES DU MISKATONIC de James Lovegrove

Etonnamment, alors que l’engouement pour Cthulhu n’a jamais été aussi prononcé et que nous mangeons du Sherlock a toutes les sauces depuis plusieurs années, rares sont les auteurs à avoir fusionné ces deux univers. On se souvient de l’excellent nouvelle « Une étude en émeraude » de Neil Gaiman mais peu d’autres si étaient risqués. La rationalité du limier de Baker Street se marie, en apparence, assez mal avec une horreur cosmique qu’on imagine davantage du ressort d’Harry Dickson. Néanmoins, ce deuxième volet d’une trilogie confrontant Holmes et les Grands Anciens se révèle convaincante, respectueuse et bien menée.

Au printemps 1895, Sherlock Holmes et John Watson sont fatigués. Quinze ans de combats contre les Grands Anciens ont laissé des traces : le premier a vieilli prématurément, le second a perdu son épouse. Ils acceptent cependant de traiter le cas d’un homme, amnésique et mutilé, hébergé à l’asile de Bedlam. Il est le seul survivant d’une expédition partie à l’aventure dans l’espoir de capturer un légendaire Shoggoth. Mais Holmes et Watson vont découvrir que les apparences sont parfois trompeuses…

Le roman débute à la manière de Conan Doyle avec une enquête menée par Holmes, toujours aidé de Watson. Ce-dernier prend des notes « pour plus tard » quoique l’équivalent littéraire de Sherlock soit mort, tué avec Moriarty lors du « dernier problème ». Le bon docteur a donc renoncé aux aventures, pourtant lucratives, de sa version « édulcorée » de Holmes, lequel affronte – dans les livres - des criminels ordinaires et non les entités surnaturelles combattues par le « véritable » détective. On le voit, nous sommes en plein pastiche et l’auteur ne se prive pas de quelques clins d’œil comme la présence d’un certain Joshi, bien connu des lecteurs lovecraftiens, ici personnifié en gardien de l’asile Bedlam. Les références et clins d’œil « canoniques » s’avèrent eux aussi nombreux, Watson se démenant pour transformer les rencontres surnaturels en crimes de tous les jours.

La seconde moitié du bouquin tient davantage de Lovecraft et constitue le récit d’une expédition partie à la chasse au Shoggoth. Forcément, puisqu’un des membres de la dite expédition se nomme Whateley, la situation se dégrade rapidement et des expériences pas très catholique de transferts d’identité se produisent à bord du navire.

Dans les derniers chapitres, les deux mythologises se rassemblent : Moriarty, Holmes, les Grands Anciens, les rituels, les possédés,…James Lovegrove connait sa matière et maintient l’intérêt même si le roman se montre plutôt linéaire et, en particuliers durant la partie consacrée à l’expédition scientifique, prévisible. Les connaisseurs de Lovecraft seront donc rarement surpris mais ce n’est qu’un défaut mineur car le roman, bien mené et rythmé, parvient néanmoins a maintenir l’intérêt et le lecteur passe un bon moment. De la bonne littérature d’évasion policière et fantastique.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantastique, #Lovecraft, #Policier, #Sherlock Holmes

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Publié le 22 Novembre 2021

OFFSHORE CONNECTION de Gerald Montgomery

402ème roman « Exécuteur » publié, OFFSHORE CONNECTION (n’eut-il pas été plus simple de garder le titre original de « Leviathan » ? ) constitue une agréable diversion des routines de la série. Mack doit, cette fois, intervenir sur un important site de forage pétrolier dans l’Océan Atlantique. La station Cassiopée est même considérée comme un état indépendant hors des juridictions nationales. Or, le pétrole n’y est qu’une couverture : on y trafique également de la drogue et la mafia et la CIA en font un terrain d’affrontements. Mais ce n’est pas tout car, pour ne rien arranger, intervient dans l’équation une bande de cultistes vénérant les étranges calamars géants qui nagent dans ses eaux. Nous voici donc entrainé dans un bouquin particulièrement délirant qui reprend quelques tropes de la saga de Mack Bolan mais les intègrent dans un récit plus vaste et plus original. L’auteur propose ainsi des clins d’œil prononcés à l’aventure façon 20 000 LIEUES SOUS LES MERS ou aux séries de science-fiction rétro comme « Voyage aux fonds des mers ». Bien sûr, la présence de cultistes et de monstres marins, fait immédiatement songer à Lovecraft et OFFSHORE CONNECTION ne se prive pas de plonger dans les territoires des Grands Anciens ou d’orchestrer un combat homérique entre un sous-marin et un gigantesque calamar. Pas spécialement vraisemblable mais qu’importe, l’essentiel reste le plaisir du lecteur !

Atypique et déjanté, OFFSHORE CONNECTION s’éloigne radicalement des conventions habituelles de la saga de Mack Bolan, lequel aurait d’ailleurs pu ne pas être présent. Nous sommes bien davantage dans un mélange de science-fiction, de fantastique référentielle et d’aventures à l’ancienne que dans les classiques guérillas urbaines typiques de nombreux « Exécuteur ». Une certaine idée du roman pulp, certes modernisé, mais qui renvoie davantage aux bouquins style Doc Savage qu’aux productions actuelles des « romans de gare ». Et ce n’est pas plus mal tant tout cela s’avère, dans les limites de ses ambitions, plaisant.

OFFSHORE CONNECTION de Gerald Montgomery

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Publié le 30 Septembre 2021

L'AMULETTE TIBETAINE d'August Derleth

Souvent cantonné au simple rang d’imitateur variablement inspiré de Lovecraft, Derleth est aujourd’hui davantage respecté pour son acharnement à éditer des textes peu connus (via Arkham House) que pour ses propres écrits. L’AMULETTE TIBETAINE constitue donc l’occasion pour le lecteur de découvrir des récits ayant peu à voir avec Lovecraft mais qui reprennent les thématiques classiques de l’épouvante rétro.

L’auteur explore ainsi les thèmes de la malédiction, des zombies (« Ils ressusciteront »), des mains maléfiques (« la main de gloire »), de l’écriture automatique teintée de hantise (« L’obsession de McGovern »), des fantômes revanchards (« le retour de Sarah »),…Des thèmes classiques mais bien traités.

Derleth se tourne parfois vers un fantastique plus feutré, une certaine épouvante « tranquille » non dénué de poésie et de tendresse pour les « créatures de la nuit ». On citera, dans ce domaine et en particulier, « le petit garçon perdu » avec son jeune fantôme revenant (oups !) à l’école ou encore « Mademoiselle Esperon » dans laquelle la sorcellerie et les poupées vaudous viennent en aide à un enfant martyrisé par sa belle- mère. Ou même « la couverture à damier » et sa chambre hantée dans laquelle se glisse le soir un jeune spectre pressé de se recroqueviller sous la couverture du titre.

La plupart des nouvelles sont efficaces et courtes, témoignant d’une époque où l’écrivain allait droit à l’essentiel, une approche très pulp qui ne s’embarrasse pas du superflu mais dégraisse à l’extrême le récit jusqu’à n’en garder qu’un squelette d’éléments signifiants. Peu de développement, de background ou de fioritures stylistiques mais l’envie de brosser une situation étrange en une dizaine de pages avant de conclure par une chute plus ou moins inspirée. Dans ce registre, la dernière histoire, « Diner de têtes », apparait comme un petit modèle de concision saupoudré d’un humour noir féroce qui culmine dans une chute en une ligne à la simplicité digne des meilleurs E.C. Comics.

Une seule nouvelle, la plus longue (30 pages) se réfère explicitement à Lovecraft : « La chambre aux volets clos » sorte de suite à « L’abomination de Dunwich ». Ecrite en 1959, elle constitue un exemple honnête mais peu original de récit « à la manière de ». Derleth y reprend les conventions de Lovecraft pour en tirer une intrigue correcte à la progression cependant linéaire et à la chute trop attendue pour pleinement convaincre. Une lecteur néanmoins plus agréable que la vision de la médiocre adaptation qui en fut tirée dans les sixties sous le titre « La malédiction des Whateley ».

Dans l’ensemble ce recueil solide propose des nouvelles de bonne tenue et sans texte réellement faibles. Voici donc une bonne découverte et une occasion d’explorer les récits non liés au Mythe rédigés par un écrivain encore peu connu chez nous à l’exception de ses pastiches lovecraftiens ou à la façon de Conan Doyle.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Golden Age, #Horreur, #Lovecraft, #Recueil de nouvelles

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Publié le 4 Juin 2021

L'AFFAIRE CHARLES DEXTER WARD de I.N.J. Culbard et H.P. Lovecraft

Le court roman de Lovecraft se voit ici transposé par le dessinateur britannique I.N.J. Culbard, fan de Sherlock Holmes (qu’il adapta à quatre reprises), Tintin et Adèle-Blanc-Sec. Des influences évidentes dans ce récit où se mêlent intrigue policière (la très belle couverture sous forme de puzzle ne ment pas), aventures mystérieuses et fantastique.

A Providence, en 1918, le jeune Charles Dexter Ward se passionne pour la vie d’un de ses ancêtres, Joseph Curwen, ayant fui Salem durant la chasse aux sorcières. Peu à peu, Ward, devenu obsédé par Curwen, se pique à son tour d’occultisme et son comportement devient de plus en plus étrange au point que ses parents, dépassés par les événements, font appel au docteur Willet pour étudier son cas. Le médecin va finalement mettre à jour une incroyable réalité.

Culbart (dont les quatre transpositions de Lovecraft furent rassemblées dans un épais volume intitulé QUATRE CLASSIQUES DE L’HORREUR) use ici d’un style dépouillé, sorte de ligne claire épurée, qui permet au lecteur de se concentrer totalement sur l’intrigue. Cette dernière s’avère parfois complexe à suivre de par la transformation du héros, possédé par son ascendant, et les événements se déroulant à deux époques différentes. Si beaucoup d’éléments du roman sont éludés par cette adaptation, le résultat reste néanmoins satisfaisant et constitue une porte d’accès aisée à l’univers de Lovecraft. Il est toutefois préférable de lire d’abord le court roman L’AFFAIRE CHARLES DEXTER avant de se plonger dans cette mise en image très correcte mais sans doute un peu trop sage pour emporter totalement l’adhésion.

L'AFFAIRE CHARLES DEXTER WARD de I.N.J. Culbard et H.P. Lovecraft

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Comic Book, #Horreur, #Fantastique, #Lovecraft

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Publié le 6 Mai 2021

LES AGENTS DE DREAMLAND de Caitlin R. Kiernan

Après une nouvelle récemment publiée dans Bifrost et située dans le même univers (« Noirs vaisseaux apparus au sud du paradis »), Caitlin R. Kiernan propose un court roman (environ 120 pages) qui reste tout aussi déstabilisant. Nous sommes vraiment dans le « weird », cette forme particulière de l’imaginaire qui (sans entrer dans les définitions complexes ou les querelles de clocher) mélange science-fiction, enquête sous forme de thriller paranoïaque, fantastique, urban fantasy, horreur, références aux mythes, etc. Avec LES AGENTS DE DREAMLAND l’autrice offre une synthèse d’un siècle de « bizarrerie » allant, pour faire court, de Lovecraft à « X-Files ».

L’intrigue ne s’avère donc pas spécialement simple à aborder. C’est le moins que l’on puisse dire ! Alors disons simplement que nous nageons en plein thriller parano science-fictionnel déjanté. Nous avons deux agences de renseignements avec leurs agents secrets, le Signaleur et Immacolata Sexton, dépêchés pour enquêter sur des phénomènes étranges et notamment un cadavre mutilé découvert dans le désert. Une survivante à un massacre de secte annonce l’holocauste à venir et la fin de l’Humanité. Pendant ce temps, une sonde spatiale, New Horizons, voyage vers Pluton. Pour trouver quoi ?

Dans ce court roman, Caitlin R. Kiernan mêle la fiction et la « réalité » de belle manière, évoquant par exemple une adaptation d’Edgar Rice Burroughs par James Whale qui, bien sûr, n’existe pas. Cette démarche rappelle quelque peu l’intertextualité du steampunk lorsque les auteurs s’amusaient à provoquer des rencontres entre personnages ne s’étant, dans la véritable Histoire, jamais croisés. Beaucoup de thèmes science-fictionnelles sont donc revisités ou, parfois, simplement effleurés pour épaissir et opacifié encore davantage un récit décousu. L’intrigue brode ainsi autour des voyages dans le temps, du post apocalypse, des extra-terrestres, des entités cosmiques à la Lovecraft, etc. Les personnages principaux, pour leur part, restent flous et mystérieux, avec d’un côté un type revenu de tout (sauf de la bouteille) et de l’autre une sorte d’exploratrice temporelle. Enfin peut-être car, au final, le lecteur ne peut pas vraiment en être certain. D’ailleurs il ne peut être certain de rien. Les références culturelles et même la chronologie restent également peu clairs. Tout est opaque, comme si l’autrice avait volontairement sabré dans les passages explicatifs de son roman pour garder son caractère sybilin. Bien sûr, tout cela est voulu : le lecteur doit accepter d’errer dans le brouillard et ne pas obtenir toutes les pièces du puzzle, un peu comme si Fox Mulder devait résoudre L’APPEL DE CTHULHU mais que la série avait été annulée avant sa conclusion.

Tout comme « Noirs vaisseaux apparus au sud du paradis », cette novella provoque par conséquent des sentiments contradictoires qui peuvent aller de la fascination à l’irritation, pratiquement d’une page à une autre. Cependant, le positif l’emporte et la lecture des AGENTS DE DREAMLAND reste largement recommandable, le voyage, bien que ténébreux, étant fort agréable à condition d’être prêt à embarquer (pour Arkham aurait dit Robert Bloch !) pour un voyage n’ayant pas de réelle fin. Alors avouons-le c’est bien, voire très bien..mais on n’y comprends rien (ou du moins pas grand-chose). On salue donc la traduction de Mélanie Fazi qui a du galérer à transposer ce casse-tête.  

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Lovecraft, #Roman court (novella), #science-fiction

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Publié le 19 Mars 2021

LA MALEDICTION QUI S'ABATTIT SUR GOTHAM

Publié dans la gamme Elseworld (des récits hors continuités) de DC au tout début des années 2000, LA MALEDICTION QUI S’ABATTIT SUR GOTHAM suit une expédition de sauvetage organisée, en 1928, par Bruce Wayne partie à la recherche non pas des Montagnes Hallucinées (quoique…) mais bien d’une précédente expédition lancée par Oswald Cobblepot. Wayne découvre un bloc de glace et une créature tentaculaire avant de rentrer à Gotham où divers événements étranges surviennent. Pas de doute, « la chose s’en vient ».

Mike Mignola, ultra célébré pour son HELLBOY également pétri de références lovecraftiennes, imagine cette histoire uchronique après le succès de son GOTHAM BY GASLIGHT, déclinaison steampunk du Chevalier Noir sortie en 1989. Dans LA MALEDICTION QUI S’ABATTIT SUR GOTHAM le lecteur retrouve plusieurs personnages familiers de l’univers « Batman » comme Double Face, le Pingouin, Man Bat, Oliver Queen, etc. Le démon rimeur Etrigan est également de la partie, ce qui constitue un plus à mon sens (il est toujours agréable de revoir cet étonnant et intriguant Etrigan !). Certains personnages sont conformes (globalement) à leur version classique, d’autres diffèrent de manière plus ou moins drastique. Nous sommes devant une réinvention de la mythologie de l’Homme chauve-souris bien réalisée et suffisamment rafraichissante pour emporter l’adhésion.

LA MALEDICTION QUI S'ABATTIT SUR GOTHAM

L’intrigue, de son côté, s’avère un brin touffue et parfois légèrement confuse. Elle traite d’un grimoire maudit, sorte de Necronomicon bis rédigé par Ra’s Al Ghul avant que ce-dernier ne soit dévoré vivant par un être invisible. Oui, cela rappelle quelque chose…Au-delà des nombreux clins d’œil à Lovecraft (on croise le maire Whateley ou Ludwig Prinn, entre autres), l’histoire se développe à la manière d’un pulp avec des personnages costumés qui utilisent une technologie (alors) futuriste pour combattre des créatures surnaturelles. Bref, DOC SAVAGE ou THE SHADOW ne sont pas très loin et la présence de Talia donne aussi à l’ensemble un côté polar de série noire délicieusement suranné avec leurs vamps aux mystérieuses intentions qui croisent la route des héros. 

Au niveau des dessins, Troy Nixey dessine de manière très similaire à Mike Mignola et les amateurs d’HELLBOY seront donc en terrain connu. C’est joli et efficace, bref du bon boulot !

Sans être un incontournable absolu, LA MALEDICTION QUI S’ABATTIT SUR GOTHAM constitue une lecture plaisante, une fusion convaincante entre l’univers de Batman, les romans pulp des années ’30 et les horreurs indicibles chères à Lovecraft. Pour qui aime les crossovers improbables (ceux où Batman se bat contre Dracula ou des aliens…) cette BD s’avère un divertissant très estimable à lire ou à relire.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Batman, #Fantastique, #Horreur, #Lovecraft, #Superhéros, #DC Comics

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Publié le 3 Mars 2021

LA CHOSE DES TENEBRES de H.P. Lovecraft, A. Derleth, etc.

Les anthologies consacrées au Mythe de Cthulhu sont souvent de véritables casse-têtes pour l’amateur. On plaint d’ailleurs le lecteur d’avant Internet qui devait se retrouver dans ce fatras. LA CHOSE DES TENEBRES, « présentée » par Lovecraft et Derleth fut ainsi également publiée sous le titre LEGENDES DU MYTHE DE CTHULHU TOME 2. Mais ce n’est que le début du dédale car les nouvelles qui composent ce recueil se sont également retrouvées dans de nombreux bouquin. A tout saigneur tout horreur, nous commençons avec Lovecraft lui-même et son hommage amusé à Robert Bloch, « La Chose des ténèbres ». Le récit figura dans les recueils LE CAUCHEMAR D’INNSMOUTH, PAR DELA LE MUR DU SOMMEIL, LEGENDES DU MYTHE DE CTHULHU, LE CYCLE DE NYARLATOTHEP, CTHULHU LE MYTHE et LA MAISON MAUDITE, sans oublier, forcément, la volumineuse INTEGRALE LOVECRAFT de chez Laffont. Pour compliquer les choses la nouvelle (« The haunter of the dark » en VO) fut tour à tour affublée des titres suivants : « la chose des ténèbres », « L’habitué des ténèbres », « La créature de la nuit », « celui qui hante les ténèbres » et « celui qui hante la nuit ».

La « réponse » donnée par Robert Bloch, « The shadow from the steeple », eut pratiquement autant de succès puisqu’on la retrouve non seulement dans LA CHOSE DES TENEBRES mais également dans les recueils AUX PORTES DE L’EPOUVANTE, HUIT HISTOIRES DE CTHULHU, LES YEUX DE LA MOMIE, LES MYSTERES DU VER et L’INTEGRALE LOVECRAFT. On reste avec Robert Bloch et son « manuscrit trouvé dans une maison abandonnée », là aussi maintes fois publié : HUIT HISTOIRES DE CTHULHU, HISTOIRES D’HORREUR, LES YEUX DE LA MOMIE, ENFANTS ROUGES, LES MYSTERES DU VER et L’INTEGRALE LOVECRAFT. Une histoire classique mais convaincante.

« Epouvante à Salem » de Harry Kuttner se retrouva également dans HUIT HISTOIRES DE CTHULHU, dans LE LIVRE DE IOD et bien sûr dans L’INTEGRALE LOVECRAFT qui, décidément, fut une bénédiction pour le déchiffreur du Mythe. Cette nouvelle efficace reprend les thématiques classiques de la maison maudite absorbant, tel un vampire, la force vitale de ses habitants et l’influence pernicieuse exercée par une sorcière jadis exécutée.

« La Chose dans le cimetière » de John Vernon Shea se retrouva également dans HUIT HISTOIRES DE CTHULHU et L’INTEGRALE LOVECRAFT. Pareil pour le « Sueurs froides » de Ramsey Campbell et « La cité sœur » de Brian Lumley (auquel on peut ajouter une publication dans COMPARTIMENT TERREUR) et « Le rempart de béton » du même Lumley (également trouvable dans COMPARTIMENT TERREUR et RECITS CTHONIENS). La plus-value de ce recueil était donc le plus rare « Ceux des profondeurs » de James Wade et « Le retour des Lloigors » de Colin Wilson…qui se retrouveront, par la suite, dans L’INTEGRALE LOVECRAFT. Le présent recueil ne sera donc indispensable qu’à ceux qui ne possède pas cette brique (en trois tomes !) sur H.P.L. ou les collectionneurs maladifs. Mais les nouvelles sont, pour la plupart, plaisantes et méritent bien une relecture, « Ceux des profondeurs » bien que classique fonctionne efficacement et « Le retour des Lloigors », une novella de 80 pages bien tassée s’élève au-dessus de la mêlée. Wilson, très intéressé par l’occultisme, y combine divers thèmes mystérieux : le manuscrit Voynich (qui serait en réalité le Necronomicon originel), la disparition du continent de Mu, les anciens astronautes (venus des étoiles et ayant réduits l’Homme en esclavage), les légendes galloises (déjà évoquées par Machen), sans oublier des considération philosophiques et ésotériques. Une réussite qui, en se basant sur des thèmes classiques déjà évoqués par HPL, renouvelle habilement l’épouvante cosmique chère à Lovecraft.

Dans l’ensemble un très bon recueil de textes relativement variés (thèmes, longueurs, modernisme ou récits à l’ancienne) inspirés par les écrits de Lovecraft. Recommandé.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Golden Age, #Horreur, #Lovecraft, #Recueil de nouvelles

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