Publié le 30 Juillet 2020

ZIGZAG MOVIE d'Elmore Leonard

Elmore Leonard propose ici une comédie policière réjouissante centrée sur un producteur de films d’horreur, Harry Zimm, traqué par Chili Palmer, le genre de gros bras qui casse les jambes des mauvais payeurs. Or Zimm en est un et il a donc logiquement les chocotes. Cependant c’est également un malin et un beau parleur. Avec l’aide de son ex, Karen, comédienne plus réputée pour sa poitrine que pour son talent, Zimm va donner des idées à Chili Palmer, lequel se verrait bien scénariste et producteur de films à succès. Mais pour ça il faut des histoires ? Pas de problème, en utilisant son expérience personnelle pour nourrir ses scripts Palmer est sûr de réussir. Ne reste plus qu’à trouver le gros paquet de pognon nécessaire, quitte à ne pas tout à fait respecter les lois…

ZIGZAG MOVIE constitue un très plaisant roman, mi polar mi comédie, situé dans le cinéma hollywoodien où, selon l’auteur, règnent des règles similaires à celles ayant cours dans la pègre. Bref, le romancier brosse une série de portraits acides du monde du cinéma : producteur de séries Z en quête de reconnaissance critique, actrice dont le seul talent réside dans son tour de poitrine, escrocs divers, etc.

Le genre de roman qui se lit comme on regarde un Tarantino, d’ailleurs ce-dernier eut certainement aimé le réaliser si Barry Sonnenfeld ne l’avait pas devancé en rassemblant, en 1995, une distribution prestigieuse : John Travolta, Gene Hackman, Danny DeVito, Rene Russo, etc.

Le bouquin se déguste donc avec plaisir : on y retrouve des personnages déjantés, une intrigue tarabiscotée mais aisée à suivre, des rebondissements, une bonne ambiance, un humour efficace dans un style semi-parodique et distancé qui ne sombre pas dans la gaudriole. Elmore Leonard démontre son métier et livre un récit alerte qui ne traine jamais en longueurs.

Bref, un bon moment.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Cinéma, #Polar, #Policier, #Humour, #Thriller

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Publié le 26 Juillet 2020

R.R.RETROSPECTIVE de George R.R. Martin

Le succès littéraire (avant télévisé) du TRONE DE FER a permis la sortie de ce superbe recueil, évidemment incomplet mais largement suffisant pour contenter les plus exigeants. Publié en 2003 aux USA il ne fut traduit que fin 2017 en France, sans doute pour profiter de la popularité acquise par Martin. En tout cas, l’attente en valait la peine. Plus de 1500 pages pour résumer la première partie de carrière de George R.R. Martin, du tout début des années ’70 à l’aube du XXIème siècle. Trois décennies bien remplies puisque l’auteur commença dans les scénarios de comics amateur, récolta un paquet de récompenses en science-fiction, se tourna vers l’horreur lors du grand « boom » des années ’80, se laissa tenter par Hollywood (« La quatrième dimension », « La belle et la bête » et même une série avortée, « Doorways », dont n’existe que le pilote) et trouva finalement la richesse et la gloire dans la Fantasy.

Les textes, judicieusement présentés, sont entrecoupés de larges passages biographiques qui, rassemblés, forment une bonne centaine de pages aussi passionnantes qu’éclairantes sur la manière de Martin de concevoir ses récits.

Ce voyage débute donc à la fin des 60’s avec un texte « amateur » et anecdotique rédigé par un Martin âgé de 17 ans sous influence des comics, « Y a que les gosses qui ont peur du noir » (également disponible dans le recueil LA FLEUR DE VERRE, tout comme « Cette bonne vieille mélodie », « Fleur de verre » et « Le régime du singe », vainqueur du Locus) et on poursuit avec « La forteresse » et « « Et la mort est son héritage » (issus de AU FIL DU TEMPS, tout comme « Assiégés » et « Variante douteuse »).

Nous entrons ensuite dans le vif du sujet, alors que Martin devient un auteur confirmé et professionnel, ce qu’il explique dans l’ironique article « le sale pro ». Cinq textes sont tirés du formidable recueil UNE CHANSON POUR LYA (« Le héros », « La sortie de San Breta », « Il y a solitude et solitude », « Au matin tombe la brume » et, bien sûr, une premier chef d’œuvre, le court roman « Une chanson pour Lya » vainqueur du Hugo).

« La clarté des étoiles lointaines » était jusqu’ici inédit en français et le recueil suivant de l’auteur, DES ASTRES ET DES OMBRES, publié en France en 1983, se voit représenté par « Tour de cendres », « sept fois, sept fois l’homme, jamais » et « Un luth constellé de mélancolie »

Autre gros morceau, LES ROIS DES SABLES, représenté par « Aprevères », l’exceptionnel « Par la croix et le dragon » (récompensé par le Hugo et le Locus) et le fameux « Les rois des sables », lauréat du triplet magique (Hugo, Nebula, Locus) dans la catégorie des nouvelles longues et adapté pour le reboot de la série télévisée « Au-delà du réel ».

Le recueil DRAGON DE GLACE, pour sa part, à droit à la totale puisque ses quatre nouvelles sont reprises ici : le conte / fantasy « Dragon de glace », « Dans les contrées perdues », « L’homme en forme de poire » (lauréat du Bram Stocker Award) et l’angoissant « Portrait de famille »

« Retour aux sources » n’est pas un inédit mais il fallait chercher pour le trouver : soit dans l’anthologie ORBIT parue dans la collection « le livre d’or de la SF » soit dans le N° de Bifrost consacré à Martin. Sa republication constitue donc une aubaine pour les fans.

« Le Volcryn », court roman de science-fiction horrifique déjà disponible à l’unité et adapté en série télévisée, se voit ici republié à nouveau et reste toujours prenant et efficace. L’inédit « Une bête pour Norne » s’enchaine avec « Les gardiens », gagnant du Locus et jadis publié dans l’anthologie UNIVERS 83 (ça ne nous rajeunit pas !)

R.R.RETROSPECTIVE propose ensuite les scénarios d’un épisode de « La quatrième dimension » (« j’étais au Canada ») et celui de la série avortée « Doorways ». Le premier est plaisant en dépit de son classicisme, le second s’avère plus intéressant et aurait mérité davantage de développement (sous forme d’un roman par exemple mais Martin est tellement occupé avec son trône de fer…). On y retrouve une ambiance proche de « Sliders » avec son héros emporté dans un monde parallèle uchronique.

« Partir à point » et « Le journal de Xavier Desmond » sont tiré de l’univers partagé WILD CARDS établi par Martin à la fin des années ’80, une uchronie super héroïque dans laquelle une infime portion de la population s’est trouvée dotée de superpouvoirs (les As), certain au prix d’horribles mutations (les Jokers). On entre finalement facilement dans ce vaste univers des plus réussis que l’on a envie d’explorer de manière plus approfondie.

Cette rétrospective se poursuit avec « Skin trade », un court roman horrifique (récompensé par le World Fantasy en 1989 mais qui ne connut une première publication française qu’en 2012) et un autre roman court, « Le chevalier errant » jadis publié dans l’anthologie LEGENDES de Silverberg (à l’époque Martin n’était même pas mentionné sur la couverture qui préférait miser sur Stephen King, Anne McCaffrey, Terry Goodkind, Raymond Feyst et Robert Jordan). « Le chevalier errant » fut, par la suite, réédité en compagnie de « L’épée lige » (non repris ici) dans un volume assez roublard sous-titré « Préludes au Trône de fer »

De par sa taille (1500 pages), son ambition (résumer 30 ans de carrière), sa variété (fantastique, fantasy, horreur, science-fiction), son alternance de texte allant de la brève nouvelle au roman court en passant par le scénario, ses illustrations évocatrices et ses pages biographiques passionnantes, R.R.RETROSPECTIVE constitue un recueil absolument indispensable et pratiquement sans équivalent. Au total, une trentaine de nouvelles, trois romans courts et deux scénarios de série télévisées, sans oublier une bibliographie très complète et de très nombreuses notes biographiques composent cette exceptionnelle rétrospective. On souhaite donc que d’autres éditeurs publient de similaires pavés rétrospectifs sur d’autres écrivains. En tout cas, pour 30 euros, voici une belle affaire et un incontournable pour tous les amateurs de littérature de l’imaginaire.

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Publié le 21 Juillet 2020

L'ABOMINATION D’INNSWICH d'Edward Lee

Fanatique de Lovecraft, le riche Foster Morley, quelques années après le décès de son idole, entreprend de visiter ces régions du Massachussets qui l’inspirèrent. Morley découvre ainsi le petit bled côtier d’Innswich, modèle évident pour le mythique Innsmouth…mais à quel point Lovecraft s’est-il basé sur la réalité pour construire son univers ? Foster Morley s’apprête à le découvrir.

Ecrivain ayant déjà une belle carrière derrière lui, Edward Lee (né en 1957) donne volontiers dans le « splatter punk » et l’excessif comme en témoigne ses recueils de nouvelles (non traduits) généralement gratinés qui ne lésinent jamais sur l’horreur sanglante et le sexe explicite. Les titres parlent d’eux-mêmes : BRIDES OF THE IMPALER, HOUSE INFERNAL, NIGHT LUST, etc.

Il s’est attaqué plusieurs fois à Lovecraft avec des pastiches HAUNTER OF THE THRESHOLD ou DUNWICH ROMANCE et, comme son titre l’indique, cette ABOMINATION D’INNSWICH constitue son hommage aux classiques LE CAUCHEMAR D’INNSMOUTH et L’ABOMINATION DE DUNWICH. Excepté ce court roman seuls trois de ses nouvelles furent traduites en français.

Cependant, Lee écrit d’une manière totalement différente de Lovecraft, quoiqu’il lui reprenne certains « tics » (construction alambiquée, vocabulaire suranné, etc.) et surtout son écriture se montre nettement plus frontale. Sans être érotique, ce court roman patauge dans la sexualité, devenue pivot central d’une intrigue à la fois référentielle et déjantée. L’horreur, elle aussi, y est décrite frontalement, avec tout ce que cela implique de monstruosités tentaculaires gluantes. Et comme l’auteur n’hésite jamais à en faire trop il convoque même, lors d’un final outrancier,…Non ! n’en disons pas plus et laissons la surprise au lecteur qui passera un bon moment avec cette ABOMINATION D’INNSWICH très fréquentable.

Bien sûr il faut accepter un certain second degré (plus ou moins volontaire) et la modestie de l’entreprise qui se contente de reproduire LE CAUCHEMAR D’INNSMOUTH en y ajoutant un paquet de sexe et de sang. On imagine très bien le présent récit servant d’inspiration à une bonne série B cradingue après le passage de Lovecraft au rouleau compresseur de producteurs avides (« bon coco, ton histoire elle est sympa mais si tu pouvais y mettre des filles à poil qui baisent avec des bestioles à tentacules ça serait quand même plus vendeur »). Pour le meilleur et pour le pire, le tout se rapproche beaucoup du roman graphique NEONOMICON d’Alan Moore qui, lui aussi, revisitait dans le sang et le foutre, la mythologie lovecraftienne. Plus récemment, le Suédois Anders Fager a suivi, lui-aussi, une voie similaire avec ces recueils LA REINE EN JAUNE et LES FURIES DE BORAS. Bref, après des décennies d’auteurs imitant plus ou moins habilement Lovecraft (ou Derleth !), voici venir les « cultistes » du XXIème siècle, plus démonstratifs et délirants.

Pas un chef d’œuvre, loin de là, L’ABOMINATION D’INNSWICH reste un divertissement tout à fait acceptable qui eut très bien pu figurer dans les pages de la Collection Gore durant les années 80.

 

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Erotique, #Fantastique, #Gore, #Horreur, #Lovecraft, #Roman court (novella)

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Publié le 17 Juillet 2020

LE PHENIX VERT de Thomas Burnett Swann

Longtemps oublié, Thomas Burnett Swann avait été redécouvert avec sa formidable novella LE MANOIR DES ROSES dans l’anthologie du même nom. Ces deux cycles les plus célèbres, celui du Minotaure et celui de Latium, ont depuis été réédités. LE PHENIX VERT constitue le premier tome de cette trilogie du Latium qui suit les aventures d’Enée après la Guerre de Troie, le vieux guerrier rêvant de fonder une nouvelle cité à l’embouchure du Tibre en compagnie de son fils Ascagne. Là, il rencontre une dryade, Mellone, courroucée par le crime accidentel dont s’est rendu coupable Ascagne, lequel a tué le centaure Caracole.

Inspiré par les récits antiques, Swann offre une fantasy mythologique retournant aux sources légendaires de l’Histoire européenne avec les panthéons grecs et romains, les villes de Troie et, plus tard, de Rome, les êtres surnaturels (dryades, centaures, satyres, faunes…). En moins de 200 pages, l’auteur illustre tout cet univers avec ses légendes (l’arbre sacré où les dryades attendes d’être fécondées, leurs relations amicales avec les abeilles et les bourdons, leurs armes étranges, leurs divinités,…).

L’action, elle, reste peu présente, l’important étant la découverte de ce monde et les relations entre ces personnages, avec un aspect gentiment érotique (plus suggestif qu’explicite) véhiculé par toutes ces nymphes / nymphettes désireuses de connaitre intimement les Hommes ou les satyres.

LE PHENIX VER n’a donc rien de commun avec (99% de) la Fantasy actuelle, toute de bruit et de fureur, on peut davantage la rapprocher des tableaux mythologiques, voire d’un Tolkien détaillant la vie des Hobbits (en laissant de côté Sauron et les batailles !) en utilisant une écriture travaillée, bien tournée, un brin archaïque et toujours poétique. Un roman court et plaisant, en tout cas suffisamment dépaysant, sensuel et rafraichissant pour être apprécié du lecteur curieux.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Fantasy

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Publié le 13 Juillet 2020

LA MOITIE D'UN MONDE (LA MER ECLATEE TOME 2) de Joe Abercrombie

Deuxième volet de la trilogie de « La mer éclatée », cette séquelle de LA MOITIE D’UN ROI s’éloigne quelque peu du personnage principal du premier tome, Yarvi (lequel reste présent mais de manière plus secondaire), pour suivre le destin d’une nouvelle héroïne, Epine. Celle-ci veut devenir une guerrière ce qui n’est guère courant (ni bien accepté) pour une fille. Malheureusement, au cours d’un entrainement, elle tue accidentellement un de ses camarades. La voilà condamnée à mort ! C’est Yarvi qui la sauvera. Bien sûr, la jeune fille, aussi peu féminine que possible, connaitra bien des aventures et rencontrera même l’amour auprès du timide Brand.

Les premiers chapitres de LA MOITIE D’UN MONDE déstabilisent quelque peu le lecteur cherchant à savoir ce qu’il est advenu de Yarvi. En effet, Abercrombie se focalise surtout sur un nouveau personnage, Epine, tandis que Yarvi se voit relégué au second plan : cette fois il a surtout un rôle politique de « manipulateur ». Il tire les ficelles de manière cynique, jouant adroitement de ses influences pour arriver à ses fins, mais laisse Epine mener l’action.

L’intrigue de vengeance simple et efficace de LA MOITIE D’UN ROI se développe ici pour prendre une ampleur bien plus importante : la trame reste classique avec ses différents royaumes qui s’affrontent, oscillant entre la Paix et la Guerre, tandis que le tout puissant et avide Haut Roi menace tout un chacun. Il faudra donc ruser pour établir les alliances nécessaires et pouvoir passer au-dessus des vieilles rancœurs afin de s’unir contre le péril commun. Epine et Brand seront, évidemment, les instruments de ce plan ourdi par Yarvi.

Moins surprenant que le premier tome mais plus élaboré au niveau de l’intrigue globale, LA MOITIE D’UN MONDE monte en puissance : si les premiers chapitres peuvent quelque peu décevoir, la suite du roman finit par emporter l’enthousiasme. A mi-parcours, le bouquin est définitivement sur ses (bons) rails et Abercrombie, par des chapitres très courts, maintient le suspense et augmente l’intérêt jusqu’à l’attendu mais fort réussi combat final. Le style est toujours pertinent, épique et pourtant simple, plein de considérations sur le sens de la vie, de l’héroïsme, de la guerre nécessaire et de la paix souhaitée. L’influence de Gemmell s’avère importante mais bien digérée, ce qui rend le roman fort plaisant. Orienté « young adult » (mais avec toutefois un peu de sexe et pas mal de violence, loin des bouquins jeunesses d’antan), cette trilogie se révèle pour l’instant une grande réussite…ne reste plus, à présent, qu’à en découvrir le dernier tome qui s’annonce évidemment « bigger than life ».

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantasy

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Publié le 9 Juillet 2020

AETERNIA, TOME 1 : LA MARCHE DU PROPHÈTE de Gabriel Katz

Démarrant très classiquement, ce roman nous présente un champion des arènes désireux de partir à la retraite pour gouter à la vie de famille. Leth Marek quitte donc Morgoth, ville « barbare », pour la cultivée cité de Kyrenia, siège du culte de la Grande Déesse et de son temple. Seulement voilà, sa famille et ses amis vont être massacrés sur la route et Marek va devoir à nouveau se servir de son immense hache. Dans le même temps, Varian, jeune candidat à la prêtrise encore naïf et bercé d’illusions, va se trouver au cœur des machinations politico-religieuses de la grande ville…et en tirer partie pour tenter de s’octroyer le pouvoir suprême.  

Avec AETERNIA nous naviguons dans une fantasy épique et quelque peu « grim » portée sur les épaules musclées d’un valeureux guerrier qui sent pourtant l’âge commencer à faire son œuvre. Bref, nous sommes sur les terres de DRUSS LA LEGENDE et autre combattant légendaire. On retrouve d’ailleurs certaines des qualités du regretté Gemmell (ceux qui n’aiment pas ce style peuvent donc passer leur tour) avec des personnages bien campés, à la fois « bigger than life » et finalement très humains, des dialogues qui sonnent justes dans leur simplicité imprégnés d’un bon sens pertinent (une sorte de philosophie de la vie à destination des non-philosophes), une histoire classique mais qui offre quelques développements intéressants, un rythme soutenu, un monde proche du notre dans lequel on s’enfonce facilement, plusieurs retournements de situation et une révélation finale surprenante qui reprend les principes du cliffhanger en attendant le deuxième volume. Et, comme pour Gemmell, un style simple mais efficace, adapté à un récit destiné aux grands adolescents (et aussi aux plus âgés !) qui ne s’offusquent pas d’une certaine dose de cruautés et de violences.

Les aspects fantasy les plus classiques (magie et créatures surnaturelles) s’avèrent absents et AETERNIA élabore, par conséquent, un univers nettement plus proche du nôtre : excepté les lieux, il s’agit quasiment d’un roman historique, d’autant que le monde décrit reste assez proche de la fin de l’Empire Romain. L’originalité vient donc des luttes entre deux religions antagonistes dont les adeptes, comme toujours, semblent persuadés de détenir l’unique vérité. D’un côté la Grande Déesse, de l’autre Ochin. Au milieu, beaucoup de victimes innocentes, d’hérétiques et d’exaltés, les deux camps comptant davantage d’intégristes que de modérés. Pas de bons, pas de mauvais, les deux ne valent pas grand-chose et n’hésitent pas à recourir à la manipulation pour s’imposer. Et même les jeunes prêtres idéalistes abandonnent rapidement leurs illusions. De leur côté, Leth Marek et son pote surnommé Le Danseur, autre guerrier d’élite, vont se retrouver au centre de ces coups politiques tordus et devoir manier la hache pour s’en sortir indemnes.

En résumé, ce premier tome d’AETERNIA s’avère très plaisant et fort bien mené. Sa conclusion surprenante invite, pour sa part, le lecteur à poursuivre l’aventure avec le second et dernier tome. Une jolie petite réussite pour un auteur déjà confirmé de la Fantasy francophone.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantasy

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Publié le 7 Juillet 2020

JACK REACHER: ELLE SAVAIT de Lee Child

Treizième aventure de l’infatigable Jack Reacher qui se retrouve, cette fois, au cœur d’une intrigue mêlant mystère, thriller et espionnage. Dans une rame de métro, notre ancien militaire repère une jeune femme dont le comportement laisse supposer, selon les manuels du Mossad, qu’elle désire commettre un attentat suicide. Reacher tente de la calmer mais la femme se suicide d’une balle dans la tête et voici notre héros entrainé dans un vaste complot d’état. Chacun cherche à savoir ce que la victime a bien pu confier à Reacher vu « qu’elle savait » bien des choses pouvant potentiellement menacer la sécurité des Etats-Unis. Problème, elle n’a rien dit à Reacher qui va devoir évoluer à l’aveugle…

Personnage intéressant, ancien soldat devenu une sorte de SDF justicier évoluant dans les combines politiques américaine, Jack Reacher est une homme d’une autre époque, incapable de se servir d’un ordinateur et dépourvu de téléphone portable. Heureusement, il dispose de capacité de déductions affutées et d’un physique de bagarreur de rue qui lui permet de balader sans (trop de) risques dans les quartiers les plus malfamés. Il a aussi le chic de se mêler de ce qui ne le regarde pas. Et de s’attirer des ennuis.

ELLE SAVAIT (comme les autres Jack Reacher) fonctionne sur les principes bien rodés du « page turner » à l’américaine avec ses chapitres courts, ses rebondissements nombreux, ses dialogues qui s’enchaînent et son rythme enlevé. Le lecteur aime, par conséquent, avancer dans le récit pour en démêler les fils quitte à s’y perdre tant les personnages sont nombreux, sans oublier les agences gouvernementales plus ou moins clandestines qui se livrent à une véritable guerre secrète. Au programme on trouve CIA, FBI, Delta Force, Ousama Ben Ladden, Russes, Afghans, Américains,…La totale du roman d’action paranoïaque post-11 septembre.

Cependant, le roman souffre aussi de longueurs car l’auteur aime multiplier les descriptions (armes, lieux,…) pas toujours nécessaires. De même les manipulations politiques peuvent finir par lasser, le bouquin semblant parfois trop épais (près de 550 pages) et une version élaguée d’une bonne centaine de pages aurait probablement été plus efficace et percutante. Au final on se retrouve avec un plaisant mélange d’espionnage, de polar, de mystère, d’action et de thriller politique, le tout mené par un héros solitaire séduisant et burné. Le tout n’est pas si éloigné d’un bouquin de gare des années ’80 façon SAS ou Exécuteur…excepté que le tout est deux fois plus long. On en ressort donc quelque peu mitigé quoique l’ensemble s’avère relativement divertissant. Mais nous sommes largement en deçà d’UN VISITEUR POUR OPHELIE du même Lee Child.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Espionnage, #Polar, #Thriller

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Publié le 5 Juillet 2020

LES DERNIERS JOURS DU PARADIS de Robert Charles Wilson

Robert Charles Wilson s’est imposé comme un des maitres de la science-fiction du XXième siècle. Il semble avoir digéré aussi bien les auteurs classiques que les petits nouveaux portés sur la hard-science ou la spéculation anticipative. Ses romans combinent en quelques sortes le meilleur de ces mondes : intrigue très solide, personnages intéressants, fonds scientifiques pointu mais abordable, sense of wonder et conséquences bien étayées des prémices souvent vertigineuses. SPIN (récompensé par le Hugo), l’hallucinant LES CHRONOLITHES, le superbe A TRAVERS TEMPS, l’efficace BLIND LAKE,…que du bonheur pour l’amateur ! Malheureusement, LES DERNIERS JOURS DU PARADIS, ne se hisse pas à la même hauteur que les titres précités. Il s’agit d’un roman nettement plus mineur et plus faible. Pourtant, la « recette » de Robert Charles Wilson semble cuisinée avec les mêmes ingrédients.

Le point de départ, tout d’abord, interpelle : nous sommes en 2014, dans un monde uchronique vivant dans une paix mondiale (certes relative) depuis un siècle. L’Amérique s’apprête à célébrer l’Armistice de 1914 qui a mis fin à toutes les guerres. Mais quelques scientifiques triés sur le volet et appartenant à une mystérieuse Correspondance Society, soupçonne la vérité : la radiosphère entourant la terre est, en réalité, un être vivant symbiotique (ou parasitaire, le débat reste ouvert) baptisé hypercolonie ayant mené l’humanité à la paix…Mais dans quel but ? L’hypercolonie dépêche des êtres artificiels, dit simulacres, pour supprimer les savants s’approchant trop près de la vérité. Cassie, dont les parents ont jadis été tués, doit fuir les « sims » avec une poignée d’individus connaissant la réalité concernant l’hypercolonie. Mais fuir vers où ?

L’auteur se place ici sous les influences de John Wyndham (en guise de clin d’œil un personnage porte d’ailleurs ce patronyme), Philip K. Dick et autres spécialistes de la SF parano dans laquelle les protagonistes évoluent dans des « mondes truqués ». Le cinéphile peut également, même si la référence fait moins sérieux, évoquer la saga « Terminator » dans cette fuite permanente devant une entité toute puissante qui délègue des simulacres pour assurer sa sécurité. Dès lors, le roman prend des allures de road movie (ou road book ?) puisque les personnages sont perpétuellement en mouvement, poursuivi par les simulacres. Et c’est là que le bouquin montre, hélas, ses limites. Car il n’échappe pas à une réelle monotonie et se montre souvent répétitif. De plus, les enjeux restent souvent limités à quelques personnages et les côtés uchroniques s’avèrent quasiment occultés : nous en apprendrons peu sur ce monde pacifié. Si LES CHRONOLITHES, par exemple, combinait les destins individuels des personnages et des événements grandioses, LES DERNIERS JOURS DU PARADIS parait manque un peu d’ampleur. Ce n’était pas le but rétorqueront les enthousiastes ! Certes, mais la frustration du lecteur est réelle.

Reste heureusement les qualités habituelles du romancier : chapitres courts rondement menés, idée de départ impressionnante, personnages attachants, rythme efficace (en dépit, ici, de quelques longueurs), toile de fond mystérieuse donnant envie de poursuivre la lecture. A tout cela s’ajoute, ici, un hommage à peine voilé à cette SF des sixties qui, du VILLAGE DES DAMNES à L’INVASION DES PROFANATEUR, a beaucoup contribué aux théories paranoïaques et complotistes de ces dernières années. Malheureusement, au fil des pages, l’intérêt s’étiole et le dernier tiers du bouquin manque de mordant pour maintenir l’attention du lecteur. Seul l’épilogue tempère un peu ce jugement sévère.

En résume, un roman potable, avec quelques bonnes idées et l’un ou l’autre passages réussi mais hélas décevant de la part de Robert Charles Wilson. On se consolera avec le suivant…

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Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #Uchronie

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