Publié le 21 Décembre 2019

SABAT N°1 de Guy N. Smith

Guy N. Smith, un des auteurs phares de la « pulp horror », a été régulièrement publié au Fleuve Noir dans la collection Gore. Cependant une grande partie de sa prolifique production reste inédite chez nous. Il a ainsi écrit six volumes concernant Mark Sabat, ancien prêtre formé par les SAS devenu exorciste pour combattre divers démons et carrément l’Antéchrist qui, d’ailleurs, le possède en partie. Sabat possède un équipement entre James Bond et le Docteur Strange : des armes classiques, un crucifix et la maitrise des arts mystiques qui lui permet de voyager dans l’astral hors de son corps. Le héros viole aussi deux jeunes femmes mais comme en fait elles aiment ça il est pardonné. Autre temps autres mœurs.

La version originale comptant 160 pages, le roman n’a probablement pas souffert de son adaptation aux normes de la collection « Gore ». Le lecteur retrouve, par conséquent, le style habituel de Guy N. Smith qui, comme toujours, se vautre dans le mauvais goût, l’horreur saignante et l’érotisme crapoteux. A croire que Smith, tombé amoureux des premiers romans de James Herbert, a fini par se dire qu’ils étaient trop psychologiques et timorés.

SABAT avance donc à un rythme frénétique et ne laisse aucunement le temps au lecteur de se remettre de ce déferlement de littérature « pulp » distillée à haute température. Le tout rappelle un peu la saga du COMMANDEUR de Michel Honaker avec son mélange de fantastique déjanté, d’horreur sanglante et d’érotisme gratuit.

En définitive, SABAT constitue un honnête petit « Gore ». On a lu plus extrême dans la collection mais l’approche old school et complètement décomplexée de Smith emporte l’adhésion. Bref, ce roman s’apparente à une bande dessinée pour adultes sans prétention (Elvifrance aurait pu l’adapter avec bonheur). Ce n’est cependant pas le meilleur livre de l’auteur et, pour les curieux maitrisant l’anglais, on conseille plutôt, chez Smith, le délirant NIGHT OF THE CRABS, le très divertissant BATS OUT OF HELL ou le référentiel THE SLIME BEAST dont les titres annoncent déjà la couleur…

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Gore, #Horreur, #Roman de gare

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Publié le 20 Décembre 2019

LE RETOUR DU BANNI (LE CONCLAVE DES OMBRES TOME 3) de Raymond E. Feist

Ce troisième tome, toujours inscrit dans la gigantesque saga de « La guerre de la faille » ou « Krondor », conclut la trilogie du « Conclave des Ombres » d’une manière quelque peu surprenante. En effet, au lieu de continuer à suivre Ser Fauconnier, héros des deux précédents volumes, LE RETOUR DU BANNI nous place aux côtés de son adversaire, le « méchant » Kaspar, duc d’Olasko, exilé par un magicien à l’autre bout de l’univers.

La première moitié du roman, probablement la plus intéressante, originale et adulte, décrit ainsi les tentatives de Kaspar pour revenir chez lui, ce qui s’accompagne d’une prise de conscience de ses actes passés. Peu à peu, ses ambitions lui paraissent futiles et il bascule, si on peut dire, dans le côté lumineux de la force, fréquentant par exemple de simples fermiers (une mère et son enfant) loin des fastes de la Cour. Avec son mélange de regret, de nostalgie et de fatalisme, cette première moitié trouve son ton, mâture et convaincant.

Par la suite, Kaspar rencontre trois marchands accompagnés d’une étrange armure qui s’avère un Talnoy, un être maléfique venu d’une autre dimension. Les marchands et Kaspar se trouvent dès lors sous l’influence d’un sort lié à l’armure qui les oblige à voyager en direction du Port aux Etoiles. Ils vont rencontrer différents personnages, dont des dieux, pour finir par retrouver les membres du Conclave : Ser, devenu restaurateur, et l’inévitable Pug, effrayé à l’idée d’une nouvelle guerre dévastatrice.

Cette seconde partie se conforme davantage aux conventions de la High Fantasy : failles dimensionnelles, créatures maléfiques, sortilèges, magiciens, elfes, objets enchantés, etc. Ce n’est pas désagréable, c’est même bien ficelé et bien écrit en dépit de passages un peu longuets et verbeux (les explications données à Kaspar sur la nature du Mal paraissent parfois redondantes et Feist semble alors tirer à la ligne pour relier les différents fils de son intrigue « bigger than life ») mais cette deuxième moitié, certes plaisante, ne retrouve pas le ton nostalgique et mélancolique des premiers chapitres.

Si LE RETOUR DU BANNI souffre de ce léger déséquilibre et d’un final expédié (annonçant cependant la prochaine trilogie, « La guerre des ténèbres », via un épilogue sous forme de cliffhanger attendu mais à la redoutable efficacité) il demeure un bon exemple de Fantasy divertissante et réussie. Bref, une lecture abordable par tous, sans grande aspérité ni d’une originalité fracassante, mais à l’écriture solide (on sent le métier d’un écrivain qui arpente cet univers depuis des décennies), aux personnages attachants et aux dialogues qui sonnent souvent justes.

Tant pis pour ceux (dont un site bien connu consacré à la Fantasy) qui persistent à ne voir que « stéréotypes », « clichés » et « formatage », les romans de Feist appartiennent certes à ce qu’il est convenu d’appeler, de manière (un peu trop) péjorative de la Big Commercial Fantasy mais ils ressuscitent aussi, avec bonheur, la fougue du roman feuilleton et apportent le dépaysement indissociable de la bonne littérature d’aventures fantastiques.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantasy

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Publié le 19 Décembre 2019

L'EXECUTEUR: SANGLANT ELDORADO de Mike Newton

Notre infatigable Exécuteur Mack Bolan change d’environnement et part pour la jungle, Mike Newton marchant sur les traces d’Indiana Jones pour cette aventure mouvementée. Mack va découvrir, en compagnie d’une jeune demoiselle, une ancienne cité Maya dont l’or approvisionne une organisation criminelle.

Voici un récit original qui change de la sempiternelle « Guerre contre la Mafia » quoique Mack doive une fois de plus stoppé des terroristes. Mais le changement des jungles urbaines vers les réelles jungles encore inexplorées rend cet énième EXECUTEUR fort efficace.

On peut bien sûr chipoter en pointant les facilités du scénario ou les quelques invraisemblances mais honnêtement elles sont bien moins nombreuses que dans la majorité des blockbusters d’action actuels. On pardonnera donc ces quelques fautes mineures pour se laisser porter par l’histoire qui développe des personnages secondaires bien typés afin d’aider Mack dans sa mission.

Pour du roman dit « de gare », SANGLANT ELDORADO s’avère correctement écrit, ce n’est pas du Prix Goncourt en puissance mais c’est très professionnel, très américain : bon sens du rythme, de l’efficacité, scènes d’action (plus rares et plus courtes que de coutumes) judicieusement placées à intervalles réguliers, rebondissements relançant l’action lorsque celle-ci s’enlise. Du bon boulot d’écrivain qui ne se fiche pas de son public et lui offre deux ou trois heures de divertissement, certes sans prise de tête mais pas idiot pour autant.

Une très belle surprise pour cet EXECUTEUR atypique particulièrement convaincant et réussi.

L'EXECUTEUR: SANGLANT ELDORADO de Mike Newton

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Exécuteur, #Roman de gare

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Publié le 17 Décembre 2019

L'ENTERREMENT DES RATS de Bram Stoker

Avec ce petit recueil à « pas cher », voici l’occasion de découvrir un auteur souvent résumé à son seul DRACULA.

La première nouvelle, qui donne son titre au recueil, suit un Anglais de passage à Paris en 1950. Il quitte les voies balisées et s’enfonce dans le quartier de Montrouge, peuplé d’une foule de chiffonniers façon cours des miracles. Notre touriste de la misère espère entendre des récits de la Révolution mais il tombe dans un piège et sur une bande de détrousseurs qui balancent les corps de leurs victimes aux rats. Une nouvelle à l’intrigue certes rudimentaires (une course poursuite dans les rues parisiennes les plus crasseuses entre un Anglais nantis et une horde de loqueteux assassins) mais à l’ambiance fort bien rendue avec cette horde de monstrueux miséreux plus agressifs qu’une meute de morts vivants. Très sympa.

« Une prophétie de bohémienne » traite donc, on s’en doute, de l’annonce faite par une bohémienne à un homme : il va tuer sa femme. C’est un court récit où le fantastique se réduit à cette clairvoyance et qui se veut surtout humoristique. Ca se lit, ça s’oublie mais ce n’est pas désagréable.

« Les sables de Crooken” joue aussi la carte de l’humour mais plus subtilement. Le récit rappelle un peu le point de départ du récent film “Le daim” avec cet Anglais suffisant qui, parti en Ecosse, veut absolument porter le magnifique costume traditionnel. Sauf qu’il se rend ridicule mais, par vanité, continue de le porter en dépit des moqueries. Une histoire de double (doppelganger), de fantôme et de malédiction planant sur des sables mouvants ajoute un élément fantastique à ce récit.

La dernière nouvelle, « Le secret de l’or qui croit » emprunte beaucoup à Poe mais annonce également d’innombrables récits ultérieurs (pensons simplement aux comics façon TALES FROM THE CRYPT) avec ses cheveux d’une jeune femme assassinée sortant des murs du salon où son amant l’a dissimulée.

Dans l’ensemble, ce petit recueil permet de découvrir Stoker, écrivain très connu grâce à DRACULA mais dont la popularité du Seigneur de la Nuit a aujourd’hui totalement occulté le reste de l’œuvre. Or on apprécie ces nouvelles agréables, bien écrites, au style joliment recherché mais facile d’accès et pas du tout vieillot. Plaisant.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Historique, #Horreur, #Recueil de nouvelles

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Publié le 13 Décembre 2019

MEILLEURS VOEUX DE LA JAMAÏQUE de Ian Fleming

Recueil de trois nouvelles consacrées à James Bond publié à titre posthume en 1966, MEILLEURS VŒUX DE LA JAMAIQUE débute avec « Octopussy » (traduite, vu le jeu de mot intraduisible de l’original, par « Meilleur vœux de la Jamaïque »). James Bond y rend visite au Major Dexter Smythe, retiré à la Jamaïque depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Gros buveur, gros fumeur, passionné par les poissons mais n’ayant plus guère le goût de vivre, Smythe vit de sa fortune. En réalité celle-ci provient de deux lingots d’or nazi dérobé à la fin de la guerre après avoir abattu son guide, Hannes Oberhauser. Smythe les a fait fructifier en s’appuyant sur la pègre chinoise locale. Or, le cadavre d’Oberhauser vient d’être retrouvé. Et il était instructeur de ski et ami de Bond…

Une nouvelle très bien ficelée ou le style brut de Fleming fait merveille pour illustrer la célèbre maxime sur la vengeance, ici un plat qui se mange très froid pour Bond…et encore vivant pour la pieuvre qui donne son titre original à la nouvelle ayant servi de base, lointaine, pour certains passages du film « Octopussy ».

« The Property of a lady », la deuxième nouvelle du recueil, fut, elle aussi, remaniée pour s’intégrer au film « Octopussy ». Il s’agit d’un récit d’espionnage au sujet d’un Œuf de Fabergé servant de payement à une espionne russe. Un texte plaisant, avec la coolitude nécessaire, qui se déroule essentiellement lors d’une vente aux enchères devant permettre à Bon d’identifier ses adversaires.

« Bons Baisers de Berlin (The Living Daylight) » servit, pour sa part, de pitch à « Tuer n’est pas jouer » et constitue un jeu du chat et de la souris entre Bond et un sniper russe, le tout assorti d’un flirt à distance entre l’agent anglais et une musicienne berlinoise. Quelque peu prévisible mais fort bien mené.

Au total, MEILLEURS VŒUX DE LA JAMAIQUE rassemble trois récits efficaces qui se sont aujourd’hui parés d’une patine agréable. En effet (et forcément) les politiques-fictions d’actualité à l’époque de la sortie du bouquin sont aujourd’hui devenu des textes historiques au sujet d’une période à la fois très proche et déjà lointaine, celle de la guerre froide, de Berlin divisée, des chassés-croisés d’espions, etc.

Très divertissant !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Espionnage, #Recueil de nouvelles, #James Bond

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Publié le 12 Décembre 2019

J'AURAI TA PEAU de Mickey Spillane

Ecrit juste après la Seconde Guerre Mondiale, ce roman a lancé la carrière de Mickey Spillane, à son époque le plus gros vendeur de bouquin des USA (« il n’avait d’autre concurrent que lui-même » a-t-on même dit). Après avoir scénarisé des comics pour Marvel (comme Captain America), Spillane se lance dans le pulp et, à même pas 30 ans, crée le personnage emblématique de Mike Hammer dont le patronyme laisse deviner les méthodes musclées. C’est d’ailleurs le grand intérêt des romans de Spillane tant Hammer incarne le stéréotype du héros viril, raciste, sexiste et macho comme on n’en fait plus (pratiquement un James Bond ou un SAS avant l’heure). L’oppose d’un héros politiquement correct d’aujourd’hui.

Mike méprise les gays (« pédales ») et les minorités (divisées entre les « bâtards jaunes » et les « nègres », mais les femmes adorent. D’ailleurs, elles se jettent toutes à ses pieds et Hammer les fait toutes craquer : sa secrétaire ultra canon se désespère de le mettre dans son lit (Miss Moneypenny ?), deux jumelles dont une nymphomane insatiable s’offrent à lui (mais devant cette avance « trop facile », Hammer passe son tour) et une psychiatre chaude comme la braise lui fait immédiatement des propositions indécentes. « Entourée d’homme sans virilité elle aspirait à un vrai homme ». Mike souhaite d’ailleurs l’épouser : elle devra bien sûr arrêter de travailler et rester à la maison pour qu’il sache toujours où la trouver et notre demoiselle qui n’en peut plus (Mike refuse de coucher avec elle avant le mariage !) réclame à grand cri sa bague ! Même lorsque Mike prend un raccourci par le parc, il croise des nurses qui lui adressent « un sourire plein d’espoir ». Son enquête s’interrompt donc régulièrement le temps de satisfaire ses dames.

Au rayon enquête et détection, Hammer ne la joue pas non plus Hercule ou Sherlock, préférant laisser parler ses poings et y aller franco niveau menaces, intimidations et coups et blessures. Pas question de chercher des indices et on le trouvera plus volontiers le 45 en main que la loupe.

Il faut dire que Mike a des raisons d’être en rogne car Jack, son meilleur copain, vient d’être assassiné. Un brave type ce Jack, il aurait même donné son bras pour Mike, d’ailleurs il l’avait fait au sens propre en s’embrochant sur une baïonnette destinée à notre héros durant la guerre. Ca forge une amitié, dur comme l’acier (ou la bite à Hammer). Du coup Mike veut coincer le meurtrier avant les flics, pas question que l’assassin se retrouve en cabane ou même sur la chaise, Mike veut le voir souffrir un maximum avant de l’abattre comme un chien. Mike est « le juge, le juré et l’exécuteur » et rien ni personne ne l’arrêtera dans sa mission. Pendant ce temps les morts s’accumulent…

J’AURAI TA PEAU (un titre presque aussi réussi que le « I, The Jury » original) constitue une bonne cure pour se laver du polar actuel à prétentions sociales. Ici le lecteur plonge dans le « pulp hard boiled » originel dans le style de Raymond Chandler mais en plus percutant, en plus série B avec tout ce que cela implique de machisme satisfait, de vulgarité assumée et de violences gratuites. Mike Hammer annonce à la fois James Bond, un justicier dans la ville, l’Exécuteur et l’Inspecteur Harry. Bref, comme disait l’autre « c’est du brutal ». Rafraichissant, plaisant et hautement divertissant.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Roman de gare, #Polar, #Whodunit

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Publié le 11 Décembre 2019

LA MALEDICTION DE BETHANY de Robert McCammon

 

Voici un des premiers romans de Robert McCammon qui deviendra une des valeurs sûres de l’horreur et du fantastique. L’intrigue est relativement classique avec son couple venant s’installer, en compagnie de leur petite fille, dans une petite ville tranquille au nom étrange, Bethany’s Sin. L’homme, Evan, écrivain de son état, y voit une opportunité de rédiger un article et se renseigne sur les origines du patelin. Très vite, bien sûr, il découvre certaines zones d’ombre aidé en cela par ses capacités paranormales de clairvoyance via ses rêves.

Premier bémol : le roman prend un temps certain à assembler les pièces de son puzzle…il faut attendre la moitié du livre (autour de la page 160) pour que la vérité se dévoile. Ce ne serait pas dramatique si la quatrième de couverture ne levait pas tout mystère sur la véritable nature du Mal qui se cache à Bethany…du coup mieux vaut éviter de lire ce résumé pour garder le suspense intact. Heureusement les personnages s’avèrent étoffés et relativement originaux. Bien sûr on n’échappe pas au cliché de l’écrivain s’installant dans un bled perdu pour écrire tranquillement mais son passé traumatisant au Viet Nam et ses talents de prémonitions lui donnent une certaine épaisseur. Dommage que l’épouse paraisse souvent bien stupide dans ses réactions et se refuse, quasiment jusqu’au bout du roman, a accordé foi à ses mises en garde concernant ce village maudit.

Si le roman suit une ligne bien tracée, le Mal qui peuple Bethany s’avère surprenant et rarement utilisé dans la littérature fantastique…ni sorcière ni vampires ni loups-garous mais bien…bon je ne le dirais pas mais c’est étonnant. McCammon aime l’Histoire (comme en témoigne son formidable L’HEURE DU LOUP) et LA MALEDICTION DE BETHANY lui permet donc d’explorer le passé, réel et / ou mythologique pour nourrir son intrigue.

Au final, LA MALEDICTION DE BETHANY constitue une lecture agréable mais pas exceptionnelle : l’auteur a encore des progrès à accomplir pour mieux gérer le rythme, la construction du récit et les relations entre les protagonistes. Néanmoins, c’est loin d’être désagréable. Pour un second roman, écrit à 28 ans, c’est même fort solide et bien des écrivains n’auront pas atteint une telle maitrise après des années de boulot. La dernière partie, plus mouvementée, fonctionne plaisamment et, dans l’ensemble, LA MALEDICTION DE BETHANY reste un honnête divertissement fantastico-horrifique.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur

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Publié le 9 Décembre 2019

NOTRE DAME AUX ECAILLES de Mélanie Fazi

Ecrites à la première personne, ces douze nouvelles, très personnelles, imposent un fantastique discret et délicat, loin des normes tapageuses de bien des récits courts.

Nous explorons par exemple  deux villes hantées, Venise (« La cité travestie ») et New Orleans (« Mardi-gras ») qui, derrière leurs vitrines attrayantes de piège à touristes, cachent de sombres secrets. Après lecture, on regarde différemment la Cité des Doges, ville vivante vengeresse pétrie de légendes aquatiques. Par comparaison, New Orleans semble plus attrayante malgré ses blessures puisqu’elle revit après le passage de Katrina et se pare une fois de plus des atours du Carnaval. « Rien n’annule Mardi Gras »

Dans « En forme de dragon » nous assistons au pouvoir de création par la musique d’une jeune fille décidée à donner corps à son imagination après l’effacement des dessins de son paternel. Où l’intrusion du merveilleux au cœur de l’existence routinière.

« Langage de peau » se fait délicat et sensuel pour décrire la relation physique qui s’établit entre deux loups-garous. Autre récit sensuel, pour ne pas dire érotique, « la danse au bord du fleuve » convie la narratrice à assister aux ébats d’une nouvelle amie avec les eaux d’un fleuve.

L’excellente « Noces d’écumes » revisite, elle, le thème lovecraftien de l’individu irrémédiablement attiré par les flots océaniques (et ce qui s’y cache) au point de délaisser sa jeune épouse.

La nouvelle qui donne son titre au recueil célèbre, pour sa part, la relation entre une jeune cancéreuse et une statue guérisseuse. Très réussie (lauréate du Prix Masterton), tout comme « Fantôme d’épingles » et sa poupée de chiffon absorbant la douleur d’une jeune femme  après chaque deuils. Citons encore « Le nœud cajun » qui mêle vaudou et boucle temporelle ou les multiples hantises de la « Villa Rosalie », sans oublier ce « Train de nuit » accueillant les désespérés pour les emmener vers…ailleurs.

Objet recelant une part de magie, hantise, malédiction, train fantôme, lycanthropes, épousailles contre nature, vaudou, piège temporelle,…Mélanie Fazi revisite les thèmes classiques du fantastique mais d’une manière totalement personnelle et originale. A chaque fois, son écriture impeccablement ciselée fait mouche, avec une grande économie de mots (pas une ligne de trop alors que l’époque est aux romans fleuves interminables) et d’effets (pas de « jump scare », même littéraires). Si le lecteur a bien sûr le droit de préférer l’une ou l’autre de ces nouvelles, toutes sont réussies et brillantes, sans déchet, sans texte faible.

Du grand art.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Fantasy, #Recueil de nouvelles

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Publié le 6 Décembre 2019

CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU de Karim Berrouka

Revoici Karim Berrouka, chanteur du groupe punk rigolo Ludwig Von 88, qui s’attaque cette fois au Mythe de Cthulhu. Il nous présente son héroïne, Ingrid Planck qui va découvrir être la seule constante dans un univers délirant. En effet, cette trentenaire parisienne typique est contactée par cinq factions « cultistes » qui veulent soit détruire le Grand Cthulhu soit provoquer son retour.

Suite à une sorte de blague cosmique, notre pauvre Ingrid se retrouve Centre du Pentacle et chaque fois qu’elle sort de chez elle rencontre des mecs complètement fracas. La voilà donc contrainte d’écouter les élucubrations des Adorateurs de Dagon (dont l’église se trouve confronté à un schisme) ou des laudateurs de Shub-Niggurath. Et pendant ce temps, le Grand Cthulhu attend en rêvant depuis bien trop longtemps.

En dépit d’un côté un peu redondant dans les premiers chapitres (L’héroïne voyage et rencontre des cultistes toujours plus frappadingues), CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU constitue un roman amusant et efficace qui remet un peu d’humour dans un univers lovecraftien de plus en plus encombré. Jacques Finné disait déjà, voici 40 ans, « le mythe de Cthulhu est aujourd’hui devenu aussi monstrueux que le dieu qui lui donne son nom ». Que dirait-il aujourd’hui devant la profusion d’œuvres estampillées du Grand Ancien Endormi ? Comme disent les critiques sérieux, CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU est donc un livre « nécessaire », afin de délirer un peu entre deux bouquins (trop ?) sérieux se référant à Lovecraft. Ici, les références sont nombreuses et le lecteur adepte du Vieux Gentleman de Providence s’amusera à les référencer.

L’humour, pour sa part, fonctionne de belle manière, en particulier pour les différentes sectes aux pratiques improbables : les hippies partouzeurs de la Chèvre aux Milles Chevreaux (pire que les allumés de Krishna, ne manque que la paix l’amour la liberté et les fleurs), l’Eglise du Christ quantique Higgs Boson, les anti mélomanes vénérant Azatoth (« Tout pour le trash ! »), les Profond de l’American Dagon Scuba Diving Society, etc. Karim Berrouka en profite pour se moquer de toutes ces religions aux croyances ridicules et à leur improbable Messie. Les titres de chapitre sont, eux aussi, référentiels et bien trouvés. Bref, CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU ne se moque pas de son sujet mais le traite avec la dérision nécessaire, sans – heureusement - verser dans la parodie à gros sabots (dans le style des illisibles LORD OF THE RINGARDS) où trois jeux de mots foireux font office de comédie trop drôle (ou pas).

On fait donc gaffe aux Anciens (« ils font trembler la terrer, font déborder la mer’), on apprécie le style efficace, travaillé mais sans lourdeur (là aussi pas la peine d’essayer de copier HPL, les phrases boursouflées il faisait ça très bien mais ceux qui ont tenté de l’imiter ce sont bien vautrés) et des descriptions convaincantes parfois carrément lyriques voire poétiques, comme quoi la déconnade c’est sympa mais sur 400 pages mieux vaut garder quelques cartouches en réserve pour le grand final façon Horreur Cosmique.

Un bon moment à conseiller particulièrement aux amateurs d’HPL qui n’en peuvent plus des copies faisandées des récits de Lovecraft (ou Derleth).

 

 

 

Et pis Hou-là-là!

Na.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Lovecraft, #Humour

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Publié le 5 Décembre 2019

PAX AMERICANA de Roland C. Wagner

Les auteurs de SF avaient quand même parfois le nez creux… En 2005, le trop tôt disparu Roland C. Wagner imaginait déjà très bien les conséquences possibles du Réchauffement et de la disparition des ressources.

XXIème siècle…le pétrole n’est plus qu’un souvenir pour beaucoup. Les USA (rebaptisés Zu’ssa) se sont accaparé les derniers stocks afin d’alimenter leur armée chargée d’imposer la Pax Americana au reste du monde. Violemment privés de leurs réserves, l’Europe a dû se tourner, contrainte et forcée, vers les énergies renouvelables. Bien sûr, la transition a entrainé des changements drastiques : fini la voiture individuelle, bonjour l’ordinateur à pédales. Les USA, de leur côté, ont continué d’épuiser les dernières ressources à la manière d’un ogre insatiable. Aujourd’hui le pays fonce droit dans le mur au point que le Président des USA s’apprête à renouer les relations avec le Vieux Continent. Mais la rumeur d’un attentat à son encontre enfle…

Roland C. Wagner propose ici une anticipation crédible avec d’un côté une Europe retournée à l'avant pétrole et des USA qui épuisent le peu de ressources restantes en guerroyant à tout va. Ils gardent ainsi la maitrise des énergies fossiles au point de s’être illusionné : pensant ces dernières inépuisables voilà le grand pays rattrapé par la réalité.

Mi satire, mi politique fiction, cette anticipation parfois grave et parfois amusante n’oublie pas de raconter une histoire et évite les excès loufoques (mais rapidement lassant) de LA SAISON DE LA SORCIERE du même Wagner. L’écrivain brosse quelques jolis portraits, dont un président européen aussi gentleman qu’insatiable sexuellement. Le tout donne une novella bien ficelé qui n’oublie pas l’humour pour parler de choses sinistres car comme le disait Didier Super « On va tous crever, on va tous crever,
Y'a la fin du monde qui nous guette et nous on fait la fête!”.

Sympathique et finalement optimiste donc recommandé même si le bouquin aurait mérité quelques dizaines de pages supplémentaires pour développer un univers à peine effleuré.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Roman court (novella), #anticipation, #science-fiction, #Humour

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