fantasy

Publié le 10 Janvier 2018

L'EMPLOYE DU DIABLE de Guillaume Nicolleau

Ce roman se situe dans la veine « urban fantasy » ou « paranormal romance », en contant l’histoire d’Edwards, un démon âgé de 300 ans. Il œuvre au service de Mr L. et obtient la prolongation de son immortalité en poussant les humains au péché. Toutefois, son histoire d’amour avec Abigael, la fille d’un de ses amis, modifie la donne.

Tout d’abord, le bouquin aurait mérité une relecture plus rigoureuse pour éviter les redondances et les répétitions de mots (beaucoup de dialogue utilise « dit untel »). Les constructions de phrases paraissent aussi un peu trop lourdes et freine la lecture, on sent l’enthousiasme de l’auteur, pas encore le métier, ce qui somme toute est normal pour un premier roman.

La longueur du livre, pour sa part, constitue autant une qualité qu’un défaut : si l’écrivain évite les longueurs, il ne fait qu’effleurer un univers dont la richesse aurait mérité davantage de développements. Ainsi, le livre nous apprend ce que peut accomplir (ou non) un employé du diable : « Pour un démon, pousser un humain au suicide était une opération très facile à réaliser ».  Par contre, le démon n’a pas le droit de tuer lui-même un homme. La caractérisation de cet employé du diable s’avère sympathique, il est présenté non comme un être démoniaque mais simplement comme une sorte de fonctionnaire au service des Enfers, soucieux de faire son boulot correctement, de satisfaire son patron déchu, de gagner des points, d’avoir de l’avancement,…L’Enfer comme métaphore de la bureaucratie ? Pourquoi pas, ce n’est pas franchement novateur mais ça reste amusant.

Le véritable dilemme d’Edward Blake survient lorsqu’Abigael, la fille de son plus vieil ami, décide de se suicider. A partir de là le récit s’emballe mais, malheureusement, au détriment de la crédibilité. Tout est trop rapide et si l’intrigue reste plaisante, elle s’avère souvent expédiée, en particulier en ce qui concerne cette relation amoureuse. Par la suite nous avons droit à l’attaque du bar d’Abigael (et à l’agression de son père) par une bande de voyous auquel un apprenti démon à chuchoté de commettre un crime sous les conseils de Lucifer en personne. Edward comprend dès lors que les actes démoniaques ne sont pas sans conséquence, ce qui accentue son envie de révolte.

La fin, une fois encore, parait trop hâtive même si l’humour atténue la déception. L’EMPLOYE DU DIABLE révèle néanmoins un potentiel et bien des histoires similaires (et publiées) se révèlent moins imaginatives. On conseille à l’auteur, pour son prochain roman (ou pour une éventuelle version retravaillée), de développer davantage ses personnages et de soigner un peu plus la forme. Ce premier jet, de par sa longueur réduite, ses idées intéressantes et ses quelques notes d’humour, pourra toutefois plaire aux amateurs de romance surnaturelle.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Fantasy, #Paranormal Romance

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Publié le 9 Novembre 2017

L’EPEE DE RHIANNON de Leight Brackett

Leigh Brackett (1915 – 1978) fut, avec son époux Edmond Hamilton, une des grandes romancières de la science-fiction de l’Age d’Or. Connue pour sa participation au scénario de classiques cinématographiques comme « Rio Bravo », « Le grand sommeil » ou « L’Empire contre-attaque »), Brackett commença à publier dans les pulp comme Astounding ou Planet Stories au début des années ’40. Elle se spécialisa rapidement dans une science-fantasy épique et lyrique inspirée par Edgar Rice Burrough, mélange de space-opéra, de planet opéra et d’heroic-fantasy. De nombreuses nouvelles datant de cette époque furent, par la suite, remaniée et allongées pour donner les romans formant le cycle de Mars.

L’EPEE DE RHIANNON se rattache à cette saga martienne mais nous emmène dans le passé de la planète rouge où l’archéologie Matt Carse pille les ressources de l’antique civilisation aujourd’hui disparue. Un jour, on lui propose la légendaire épée du dieu Rhiannon. Intéressé, Matt se rend avec son interlocuteur à l’emplacement de la tombe de Rhiannon, laquelle se révèle bourrée de trésors. Cependant, nos deux hommes se querellent et Matt est projeté dans un gouffre temporel qui le conduit dans un autre temps, alors que la civilisation martienne vit son apogée. Mais c’est également une période de conflit entre l’Empire de Sark et les redoutables Rois de la Mer. Armé de l’épée de Rhiannon et peut-être même habité par l’esprit du maléfique dieu en quête de rédemption, Matt affrontera mille périls en ces temps reculés afin, peut-être, de regagner son monde.

Ce récit d’aventures court et rythmé annonce le similaire LES ROIS DES ETOILES que rédigera son mari Edmond Hamilton en 1949 : un individu se retrouve déraciné, loin de son monde et de son temps, mais en possession d’une arme redoutable et « habité » par l’esprit d’un être supérieur, ici le dieu déchu Rhiannon.

Brackett propose ici un space / planet opéra à l’ancienne, loin de la complexité des grandes fresques actuelles (parfois indigestes) et qui recourt volontiers à une imagerie et un imaginaire proche de la fantasy à base de superbe reine, d’épée fabuleuse, de pirates, etc. En moins de 200 pages, l’écrivain emballe son récit sans laisser au lecteur le temps de souffler, avec une verve constante qui ne se retrouve que dans les meilleurs romans feuilletons ou les pulp les plus échevelés. Alors, évidemment, le lecteur d’aujourd’hui, à près de 80 ans de distance, peut trouver cela un peu « léger » ou prévisible : l’intrigue, quoique riche en rebondissement, reste linéaire et sans grande surprise, les protagonistes ne sont guère fouillés (mais ils demeurent joliment brossés en quelques lignes évocatrices) et le tout accuse le poids des ans. Mais qu’importe, L’EPEE DE RHIANNON n’en reste pas moins un roman d’aventures parfaitement rythmé et mené qui se dévore pratiquement d’une traite. Un vrai bon moment de lecture divertissante.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #Golden Age, #Fantasy

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Publié le 25 Octobre 2017

LA DERNIERE ODYSSEE de Fabien Clavel

Comme son titre l’indique, ce romain de Fabien Clavel raconte une histoire parallèle à celle contée par Homère. Ulysse n’est, en effet, pas l’unique héros à avoir combattu durant la Guerre de Troie. Le prince Niréus, par exemple, est venu avec une flotte modeste de trois navires. Après dix ans de combats, dégoutté de la guerre, il embarque pour retrouver son royaume. Lorsqu’une tempête menace de couler son navire, Niréus demande à ses hommes de jeter le butin par-dessus bord pour alléger le bateau. Evidemment, ceux-ci refusent et se révoltent. Après avoir échappé à la noyade, Niréus rencontre divers personnages destinés à l’accompagner dans sa quête. En chemin vers son île, le prince croise la route des Gorgones, affronte les Amazones et se voit confier la mission de supprimer une redoutable hydre pour récupérer son trône tombé aux mains d’un régent usurpateur.

La malheureusement éphémère collection « Royaumes perdus » de chez Mango (15 titres parus) débutait de bien belle manière avec ce roman revisitant à sa manière l’Odyssée et, plus généralement, la mythologie grecque. La collection se voulait, en effet, dédiée à « fantasy, aux mythes et légendes qui nourrissent l’imaginaire mondial » et, quoique présentée comme destinée à la jeunesse, elle mentionnait un plus adapté « tout lecteur ».

Fabien Clavel nous propose ici de la belle fantasy historique et légendaires, un roman « grand public » (dans le bon sens du terme) qui, en 220 pages, nous permet de voyager aux côtés des héros de la Guerre de Troie. Enfin, héros… le terme est peut-être mal choisi comme le constate Niréus, défiguré par une vilaine blessure, au début du récit : « Je suis venu avec trois navires remplis chacun de cent vingt jeunes gens, il ne m’en reste plus qu’un seul (…) et pas même cinquante hommes. J’ai tout perdu : ma beauté, ma jeunesse, mes amis ». Mentionné par Homère sans que son destin ne soit explicité, Niréus, lui aussi, désire rentrer chez lui. Clavel nous conte ce retour dans un récit épique dont la linéarité se voit brisée par quelques sous intrigues réussies. Car l’auteur s’intéresse non seulement à Niréus et ses compagnons mais également aux dieux de l’Olympe qui observent les actes des hommes après la chute de Troie. Et aussi à un étrange Chasseur Noir, mystérieux personnage désirant se venger de notre héros tourmenté qui, chaque nuit, « retrouve ses victimes et se réveille en sursaut le corps baigné de sueur ».

Adroitement dosé, le mélange entre action, aventure et merveilleux alterne l’intimiste et le grand spectacle avec les rencontres vécues par les compagnons sur le chemin du retour : les Gorgones, les Amazones, l’hydre, les Ichthyocentaures mi-hommes mi-poissons, les lycaons (proches des loups-garous), la Sybille et ses prophéties, Hermès le messager des dieux, etc.

Un roman d’évasion hautement recommandable dont la conclusion en demi-teinte pour Niréus annonce une suite, LES GORGONAUTES.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantastique, #Jeunesse, #Fantasy

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Publié le 6 Juillet 2017

L'ETRANGE VIE DE NOBODY OWENS de Neil Gaiman

En 1985, Neil Gaiman a l’idée d’une sorte de démarquage macabre du LIVRE DE LA JUNGLE (« The Jungle book » devient dès lors logiquement « The Graveyard Book ») situé dans un cimetière où grandit un jeune garçon. Divisé en huit chapitres qui fonctionnent tels des nouvelles situées dans le même univers (la quatrième histoire fut d’ailleurs précédemment publiée dans une anthologie et récolta le Prix Locus de la meilleure nouvelle), celui de ce plaisant cimetière, le livre suit la vie de cet étrange Nobody Owens et ces démêlées avec le mystérieux Jack.

Un enfant de dix-huit mois échappe par miracle à la mort lorsque le Jack, un assassin membre d’une confrérie secrète, tue tout le reste de sa famille. Le garçonnet trouve refuge dans un cimetière où il est adopté par un couple de fantôme, Monsieur et Madame Owens, et confié  à la garde de son tuteur, le vampire Silas. Rebaptisé Nobody, l’enfant grandit en compagnie des spectres  et des lycanthropes, apprend à côtoyer les vivants et, parfois,  à les effrayer. Il se lie aussi d’amitié avec Scarlett qui aime bien discuter avec lui même si elle le considère comme son ami imaginaire. Mais le Jack, lui, cherche toujours à le tuer…

Après CORALINE, voici une nouvelle réussite éclatante de Neil Gaiman, aussi à l’aise dans le roman adulte (AMERICAN GODS), le comic book (SANDMAN, 1612), la nouvelle (comme en témoigne ses divers recueils) que dans la littérature « jeunesse ». Ici, comme souvent avec cet auteur,  nous sommes dans un univers gothique et macabre non dénué d’humour, proche du cinéma de Tim Burton (celui des « Noces Funèbres ») qui reprend également les codes du roman d’apprentissage. On peut aussi évoquer une version à la fois plus sombre et décalé d’un Harry Potter affrontant un nouvel adversaire qui ne peut être nommé,  un tueur sanguinaire rappelant Jack l’Eventreur et simplement baptisé le Jack. Chacun des chapitres propose une avancée de deux ans et marque ainsi une étape dans la vie de Nobody, dit Bod.

Neil Gaiman, en 300 pages qui se lisent très rapidement et rehaussées de belles illustrations en  noir et blanc évocateur, laisse libre cours à ses talents de conteur pour convier tout un bestiaire de morts, de vivants et de morts-vivants. Son joyeux cimetière est peuplé de sorcière défunte mélancolique (car nulle pierre ne marque l’emplacement de sa tombe), de goules affamées, des fantômes bavards, de tuteur vampire et de louve-garou autoritaire. Un mélange de fantasy, d’épouvante et d’humour destiné aussi bien aux adolescents qu’aux adultes et justement couronné par le Prix Hugo du meilleur roman et le Prix Locus du meilleur roman « jeunesse ».

L'ETRANGE VIE DE NOBODY OWENS de Neil Gaiman

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Jeunesse, #Prix Hugo, #Fantasy, #Neil Gaiman

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