stephen king

Publié le 13 Septembre 2023

CLASSE TOUS RISQUES de Stephen King & Bev Vincent

Mitonnée par Stephen King et Bev Vincent, cette anthologie rassemble des récits sur le thème de l'avion…Comme le titre original est "flight or fright", on se doute que les voyages proposés vont mal se passer. Bref une lecture pas vraiment conseillée pour les aérophobes…Comme toute (bonne) compilation thématique qui se respecte, le bouquin comprend des classiques, des incontournables et des textes plus méconnus, voire rédigés spécialement pour cette occasion.

On trouve ainsi "L'horreur des hauteurs", une nouvelle écrite aux tous débuts de l'aviation (en 1913) par Arthur Conan Doyle et l'inévitable "Cauchemar à 20 000 pieds" de Matheson. Un récit très connu, adapté pour la série télévisée "La quatrième dimension" (et son penchant cinéma réalisé par George Miller) mais toujours agréable à (re)lire. Autre classique, "Raid aérien", de John Varley (adapté à l'écran sous le titre "Millénium" reste une excellente dystopie à base de terre polluée et de voyages dans le temps. Ray Bradbury se montre lui aussi de la partie via « La machine volante », un classique de 1953.

Le vétéran E.C. Tubb livre également l'intéressant "Lucifer" tandis que, parmi les plus jeunes, on signale Tom Bissell. Sa longue et percutante "Cinquième catégorie" convoque le thème très actuel de la légitimité de la torture dans la lutte contre le terrorisme. Beaucoup plus courte mais néanmoins réussie, "Deux minutes quarante-cinq secondes" de Dan Simmons démontre que l'auteur, spécialisé dans les textes très (mais alors très!) longs est capable de briller en moins de dix pages. Joe Hill mérite lui-aussi sa place avec l’excellent et complètement nihiliste « Vous êtes libres » au sujet des passagers d’un avion rattrapés par une guerre nucléaire.

Au milieu de ces récits fantastiques et de science-fiction, les anthologistes glissent une variante du meurtre en chambre close concoctée par le spécialiste Peter Tremayne, le bien nomme « Meurtre dans les airs » sur le thème des « WC étaient fermés de l’intérieur ».

Les deux anthologistes proposent de leur côté deux textes efficaces, l’amusant « Des zombies dans l’avion » pour Vincent et le très parano « L’expert en turbulences » pour le King.

Au final, une excellente anthologie puisque la quasi-totalité des nouvelles proposées sont au pire simplement intéressantes (à titre historique) et, pour la plupart, très réussies et agréables à lire.

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Publié le 11 Janvier 2023

LA TOUR SOMBRE TOME 3: TERRES PERDUES de Stephen King

Après LE PISTOLERO, agréable dans sa brièveté et son côté western, LES TROIS CARTES avait permis au lecteur d'en savoir un peu plus sur le monde de Roland. TERRES PERDUES, le troisième volume, débute par un combat entre nos héros et un gigantesque ours robot. La suite, sur 600 pages bien tassées, multiplie les péripéties sans que l'on comprenne très bien où le King veut en venir. Créatures bizarres, guerres claniques, train dirigé par un ordinateur fou adepte des devinettes,…La route est longue mais la Tour se rapproche. Cela dit il faudra encore beaucoup de patience pour l'atteindre.

Alors que LES TROIS CARTES parvenait à maintenir l'intérêt durant 500 pages, TERRES PERDUES adopte un rythme plus compliqué: des passages très lents, que l'on pourrait définir comme anecdotiques exceptés pour les plus accros à cet univers, voisinent avec des scènes plus mouvementées où l'action prédomine. Il faut donc accepter de se laisser emporter par l'imagination du King, laquelle semble parfois tourner à vide ou s'emballer en roue libre. Résultat, on sent les longueurs, les passages exagérément étirés et le gras. L'auteur aime ce monde, cette "pièce centrale de son univers", quitte à y passer un temps déraisonnable. Couper une bonne centaine de pages eut sans doute rendu le pavé plus digeste mais King aime s'attarder sur les détails. Dès lors les moments où l'ennuie pointe puis s'installe finissent par rendre la lecture laborieuse. Qu'est-ce que la Tour Sombre? Que cherche Roland et ses amis? Au terme de ces 600 pages le lecteur n'en apprendra pas beaucoup plus. Il faut donc un peu se forcer pour venir à bout de ce tome. Une précédente tentative de lecture de la saga s'était arrêtée là, au terme d'un troisième tome plus pesant que passionnant.

Malgré tout, TERRES PERDUES donne envie de poursuivre le récit, d'enfin atteindre cette mystérieuse Tour. Il y a de bonnes choses et de belles scènes. Des personnages attachants et des monstres étranges. Le monde reste riche, avec ce mélange improbable (est-ce vraiment cohérent? Peut-être pas mais ce n'est pas si important) entre fantasy, science-fiction, post-apocalypse, western et aventures. Une fusion d'épopée à grand spectacle et de considérations intimistes avec quelques hommages à Tolkien, notamment par le jeu des devinettes. La route se poursuit…la Tour se rapproche.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantastique, #Fantasy, #Stephen King

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Publié le 30 Août 2022

LA TOUR SOMBRE: LE PISTOLERO de Stephen King

Premier volet du cycle monumental de la « Tour Sombre », LE PISTOLERO s’avère souvent négligé par les lecteurs qui lui reprochent son manque d’action, de suspense ou de « palpitant ». Il est vrai que le texte reste très obscur. Dès lors, on peine à comprendre les motivations de ces deux personnages qui se poursuivent dans une ambiance pesante et un décor désertique. Pourtant le tout reste globalement agréable à lire, l’ambiance très western italien donnant tout son sel à cette longue poursuite sous un soleil de plomb.

LE PISTOLERO convoque ainsi le nouveau western, la science-fiction, le post apocalypse et la Fantasy pour confectionner un univers apparemment construit de bric et de broc. A tel point que le lecteur se demande souvent où le romancier veut nous conduire. D’ailleurs, le bouquin constitue en réalité une collection de nouvelles ensuite transformées en roman. De son propre aveu, King ne savait pas où il allait lorsqu’il a entamé sa saga, au début des seventies. Par conséquent le lecteur ne sait pas vraiment, lui non plus, où il va. Il suit donc, un peu passivement et sans toujours une grande implication, Roland. Dernier pistolero « d’un monde qui a changé », il erre dans les plaines, fier, solitaire avec un gamin pour partenaire.

Si le roman ne se montre pas franchement original dans son déroulé ce n’est pas le plus important : on dit que ce qui compte c’est le décor. Et ici, le King réussit à donner envie de s’engager avec lui sur ce chemin semé d’embuches pour rejoindre une hypothétique Tour Sombre, qualifiée par King de point central de son univers et même de « Jupiter de son imaginaire ».

Le romancier nous donne également à percevoir un monde plus vaste, un multivers comme dirait Marvel. Le King saute les époques et les lieux pour un nouveau Far West. Il s’imprègne de mysticisme lors de la confrontation finale entre Roland et l’Homme en Noir. Dans le monde du rêve on termine par un happy-end et ici le bon Stephen opte plutôt par une fin ouverte. Celle-ci amène plus de questions que de réponses. On referme donc le roman quelque peu mitigé mais content d’avoir fait ces quelques pas en compagnie de cet émule de Clint Eastwood. La route vers la Tour Sombre est encore longue mais, un pas à la fois, on s’en approche. Du coup, intrigué, le lecteur est pressé de continuer. Tel le Champion Eternal engagé dans la quête de Tanelorn…

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantasy, #Fantastique, #Stephen King, #Western

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Publié le 29 Juin 2022

SAC D'OS de Stephen King

Quoique fréquemment cité parmi les réussites du King et lauréat du Bram Stoker et du Locus, SAC D’OS reste, pour ma part, une des plus grosses déceptions écrites par le romancier du Maine.

L’intrigue, tout d’abord, se développe avec une lenteur excessive. Ambiance, climat, épouvante, présentation, mise en place, etc. diront les laudateurs. Certes. Mais là, le King en pleine crise de sa fameuse « elephantiasis littéraire », dépasse peut-être les bornes. Les cent premières pages, quoique très lentes et sans réel lien avec la suite, fonctionnent pourtant agréablement. Elles présentent ce personnage, typiquement « Kingien », d’écrivain d’une quarantaine d’années, Mike, confronté à la page blanche à la suite de son récent veuvage. Après avoir exploité, au sens propre, ses fonds de tiroirs pendant plusieurs années, le voilà qui sèche complètement. Seule solution, retourner dans sa maison de vacances et renouer avec les rituels qui lui permettaient, jadis, d’écrire.

La suite, soit près de quatre cents pages (avant le dernier acte) entremêle plusieurs lignes narratives pas vraiment crédibles. Notre romancier vient par exemple en aide à une très jeune veuve de 20 ans dont il tombe rapidement amoureux. Celle-ci ne semble pas contre, que du contraire, mais l’écrivain tergiverse. Ca traine et ça traine… jusqu’à ce que la jeunette en vienne à (littéralement !) le supplier de la baiser.

Comme nous sommes chez King et en dépit de cette romance très envahissante, des phénomènes paranormaux se produisent. Mike mène l’enquête pour comprendre les raisons de cette hantise. Hélas, non seulement cela lui prend un temps fou mais le héros se comporte à la manière des protagonistes des séries B d’horreur les plus stupides : malgré toutes les manifestations et « avertissements » divers il s’obstine. Et, forcément, tout ce qui pouvait mal se passer va se produire.

Les personnages se montrent d’ailleurs assez unidimensionnels, ce qui étonne chez un écrivain capable de brosser des protagonistes en peu de traits. Ici, en dépit d’un background très (trop !) développé, les héros restent schématiquement décrits. Était-ce donc nécessaire de s’étendre sur des pages et des pages ? Probablement pas et nul doute que raboter d’un tiers le roman aurait grandement gagné en efficacité et en potentiel de frissons. Les explications surgissent dans les derniers chapitres de manière un peu hâtive (ce qui permet quand même de ne pas en rajouter dans les longueurs) et sont fort attendues.

SAC D’OS se situe donc dans la lignée des King de la fin des années ’90 / début 2000 comme DREAMCATCHER, DESOLATION, LES REGULATEURS, etc. Bref, pas la meilleure période du romancier.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Prix Locust, #Stephen King

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Publié le 19 Juillet 2021

SI CA SAIGNE de Stephen King

Stephen King se montre généreux. Au lieu de publier quatre courts romans, il les assemble dans un gros recueil à la manière de DIFFERENTES SAISONS. Voici donc un copieux bouquin (450 pages) qui alterne le meilleur et le…moins convaincant.

Dans la première nouvelle, « Le téléphone de Mr Harrigan », un jeune garçon fait la lecture à un vieil homme pas spécialement recommandable, en tout cas capable d’une grande rudesse envers ses ennemis. Celui-ci fait l’acquisition d’un Iphone et ne peut plus vraiment s’en détacher. Lorsqu’il meurt le garçon enterre Mr Harrigan avec son téléphone. Ce qui leur permet de reste en contact, le décédé accomplissant les souhaits de l’enfant. Si le début rappelle un peu « Un élève doué » pour cette amitié qui se noue entre un garçon et un vieillard, le récit dévie rapidement vers un récit de vengeance post mortem. Très classique mais bien mené, un peu à la manière des bandes dessinées TALES FROM THE CRYPT, voici du King en pilotage automatique mais qui assure le boulot. Et même très bien ! (4/5)

La seconde novella, LA VIE DE CHUCK, déstabilise. Elle débute par la présentation d’un monde apocalyptique dans lequel tout se détraque (Internet, l’électricité, etc.) tandis que des messages de remerciement à un mystérieux Chuck se multiplient. Chuck est décédé à 39 ans et avec lui le monde se dirige vers sa fin. Ensuite, nous remontons le temps à deux étapes de la vie de ce Chuck, d’abord âgé de près de 30 ans et emporté dans une danse improvisée par la rythmique d’un musicien de rue. Et ensuite, alors que Chuck à 7 ans et qu’il vient de perdre ses parents. L’intrigue est originale (surtout par sa chronologie inversée), avec un côté monde truqué que n’aurait pas renié Philip K. Dick. La morale (évidente) affirme que lorsqu’un homme meurt un univers entiers disparait. Efficace et mélancolique, bien écrite et prenante, du grand King, sans doute le récit le plus réussi de cette anthologie. (4/5)

SI CA SAIGNE aurait pu être publié de manière indépendante vu sa longueur (200 pages). De plus il s’agit de la suite de L’OUTSIDER, lui-même spin off de la trilogie Mr MERCEDES. King revient donc une cinquième fois sur ses personnages favoris de ces dernières années : Holly, Jérome, etc. Ce « long court roman » (hum) reprend, grosso modo, le schéma de L’OUTSIDER : après une explosion dans une école, Holly soupçonne quelque chose de louche et entame une (languissante) enquête. Pour elle, un nouvel « outsider » est responsable, une sorte de vampire psychique qui se nourrit de la souffrance. Le principal suspect ? Un présentateur télé opportunément présent sur les lieux de différentes catastrophes. Sauf que, lassé d’attendre que la prochaine se produise, il a décidé de passer à la vitesse supérieure et de les provoquer…Bon, c’est peut-être personnel mais j’avoue que cette énième resucée ne m’a pas vraiment convaincu. Après un début intriguant, le roman s’enlise dans une intrigue peu originale et guère passionnante. Trop étiré pour constituer une nouvelle prenante ou, au contraire, trop ramassé pour permettre de développer la mythologie des vampires psychiques, le tout a le cul entre deux chaises. Les admirateurs inconditionnels de Holly seront cependant heureux de la retrouver même si cette nouvelle enquête n’apporte pas grand-chose par rapport aux précédentes. Bof. (2/5)

La dernière nouvelle, RAT, peine également à convaincre, surtout que le King a déjà traité bien souvent du thème de l’écrivain confronté à la page blanche. Ici un auteur de nouvelles part s’isoler pour enfin réussir à boucler son grand roman (un western) qu’il n’a jamais réussi à écrire dans le train-train du quotidien. Coincé par une tempête, dans une ambiance désespérante (un petit côté SHINING), l’écrivain s’apprête à vivre un nouvel échec : le bouquin qui partait si bien s’enlise et échoue sur une voie de garage. Que faire ? Un rat viendra proposer à notre romancier en galère un pacte faustien pour accéder à la notoriété. Encore un récit typé « tales from the crypt » qui semble un peu trop en pilotage automatique et souffre du défaut habituel de l’auteur, à savoir un délayage parfois visible, d’autant qu’ici la fin laisse quelque peu dubitatif. (2,5/5)

Au final, un recueil dont le lecteur ressort quelque peu mitigé, les deux premières nouvelles, très réussies, compensant les faiblesses des deux suivantes. Bref, King ne surprend pas vraiment avec SI CA SAIGNE mais rassure néanmoins sur sa capacité à encore proposer des textes de qualité. Tous les récits sont d’ailleurs déjà promis à de futures adaptations, au cinéma ou à la télévision.

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Publié le 15 Février 2019

FIN DE RONDE de Stephen King

Après l’excellent MR MERCEDES, le second tome de la trilogie de Stephen King consacré au flic Bill Hodges (CARNETS NOIRS) avait déçu. Trop étiré, trop différent, il perdait le côté thriller surnaturel si réussi du premier volet. Pourtant, les dernières pages, prometteuses, annonçaient le retour de Brady, le fameux psychopathe adepte des voitures meurtrières surnommé Mr Mercedes. Si la tuerie date à présent de plusieurs années, elle continue d’affecter bien des infortunés ayant eu la malchance de croiser Mr Mercedes. Nous retrouvons ainsi Bill Hodges, policier à la retraite devenu détective privé en compagnie de la très bizarre Holly. Brady, pour sa part, est toujours alité à l’hôpital mais possède à présent la capacité d’investir mentalement divers gadgets, notamment de petites consoles de jeux portables. Il prend ainsi le « contrôle » d’une poignée d’individus qu’il pousse au suicide. Mais, en bon psychopathe, Brady a un plan à grande échelle…Peut-être pas la conquête du monde mais une vaste entreprise de destruction à laquelle seule Bill peut s’opposer. Un Bill à qui les médecins viennent de diagnostiquer un cancer. Un Bill en fin de ronde qui veut cependant régler ses comptes et partir en beauté.

Avec ce troisième tome, King change une fois de plus de registre et plonge dans un thriller techno geek horrifique proche de classique du cinéma comme « Patrick » ou « La grande menace ». Brady devient donc une menace grandissante auquel se confronte l’ancien flic atteint d’un cancer incurable. Bref, Bill n’a plus beaucoup de temps devant lui pour stopper le malade mental à présent doté de capacités télékinésiques. Le King a déjà abordé ce thème dans CARRIE et surtout CHARLIE mais, évidemment, les protagonistes de ces romans étaient bien plus fréquentables que l’infâme Brady.

Au final, cette FIN DE RONDE s’avère satisfaisante et certainement plus convaincante que CARNETS NOIRS. On reste néanmoins en deçà de Mr MERCEDES (sans doute un des meilleurs King du XXIème siècle) et le lecteur peut parfois ressentir un léger ennui (une fois de plus le King se permet pas mal de longueurs et de digressions pas toujours palpitantes en dépit de son talent de conteur). Tout cela est tempéré par le plaisir ressenti à retrouver cette petites « famille » dysfonctionnelle autour de Bill, en particulier Holly (qui reviendra dans le spin off THE OUTSIDER) et Jérome. Ce sont les personnages, plus que le récit en lui-même, qui fonctionnent ici et rendent la lecture de cette FIN DE RONDE constamment plaisante malgré l’une ou l’autre facilité et un scénario pas toujours très crédible. Mais qu’importe, au final, le lecteur passe un bon moment jusqu’au final où il faut bien se résoudre à dire au revoir au sympathique Bill.

Un mot sur l’adaptation télévisuelle à présent : si la première saison de « Mr Mercedes » suivait relativement fidèlement le bouquin, la deuxième saison (la série ayant fait l’impasse – on peut le comprendre – sur les CARNETS NOIRS) s’éloigne drastiquement du roman et, à mi-parcours, prend une tout autre direction pour un résultat décevant à l’intérêt très limité. Dommage.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Policier, #Thriller, #Stephen King

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Publié le 21 Juin 2018

CARNETS NOIRS de Stephen King

CARNETS NOIRS constitue la suite (au cinéma on parlerait peut-être de spin-off) de Mr MERCEDES : on y retrouve les principaux personnages (le retraité Hodges et son petit monde) mais l’intrigue part dans une tout autre direction et délaisse Brady, le tueur à la Mercedes. Ce-dernier apparait néanmoins dans quelques séquences annonçant le troisième et dernier tome, FIN DE RONDE.

Tout débute par l’assassinat d’un célèbre écrivain à la retraite, John Rothstein, par un de ses fans déçu par la conclusion d’une trilogie littéraire consacrée à Jimmy Gold, dit le Coureur, sorte de looser magnifique finissant par rentrer dans le rang. Le meurtrier, Morris Bellamy, se fait choper quelques jours plus tard pour viol. Condamné à la prison à vie il croupit durant 30 ans dans sa cellule avant d’être finalement libéré, décidé à récupérer son pactole, à savoir non seulement une grosse somme d’argent mais surtout les manuscrits inédits de Rothstein, dont deux romans supplémentaires du cycle Jimmy Gold. Or, ce trésor est tombé entre les mains d’un adolescent, Peter Sauber, dont le père sans emploi a été gravement blessé par le tueur à la Mercedes. Peter décide d’utiliser cette manne providentielle pour sauver sa famille. Chaque mois il envoie quelques centaines de dollars à ses parents de manière anonyme. Mais un jour le puit se tarit et Peter se résout à négocier les fameux carnets inédits de Rothstein auprès d’un libraire spécialisé. Ce qui permet à Morris de retrouver sa trace…

Après MISERY, le King renoue avec l’obsession littéraire et propose deux protagonistes antagonistes tout aussi fascinés par les romans de Rothstein : d’un côté le psychopathe Morris Bellamy (sorte de version masculine de l’infirmière Annie), de l’autre Peter, adolescent intelligent et sensible. Malheureusement, ces deux portraits réussis, auxquels s’ajoute le toujours attachant Hodges et sa petite troupe, ne suffisent pas à rendre CARNETS NOIRS réellement palpitant.

Le roman souffre en effet du défaut coutumier du King : une dilution du récit dans de nombreuses sous-intrigues. Lorsque l’auteur est inspiré cela ne pose aucun problème, même dans ses pavés les plus conséquents (CA, 20/11/63). Par contre, lorsqu’il se montre moins en forme, comme ici, les longueurs se font sentir et le lecteur achoppe sur de trop nombreux détails pas vraiment indispensables. Il faut, par exemple, atteindre le tiers du roman pour retrouver les personnages de Mr MERCEDES, jusque-là à peine évoqués. Certes, il est intéressant de voir l’écrivain opter pour une approche différente et s’éloigner radicalement des recettes du précédent ouvrage mais, avouons-le, les 150 premières pages manquent un peu de mordant pour passionner. Le lecteur s’impatiente avant de retrouver les personnages de Mr MERCEDES : le vieux flic retraité Hodges, la perturbée mais sympathique Holly Gibney et le jeune prodige Jérôme. En dépit d’une intrigue bien menée (on reconnait le métier du King pour entremêler différentes lignes narratives qui finissent logiquement par se rejoindre), tout cela manque de suspense et d’une réelle tension et la conclusion, trop prévisible et attendue, déçoit.

Heureusement, des passages très réussis, intercalés durant la progression de ces CARNETS NOIRS, en rendent néanmoins la lecture plus intéressante. Diverses scènes montrent ainsi Hodges retourner au chevet d’un Brady (le fameux tueur à la Mercedes) catatonique alors que les infirmières chargées de sa garde font état d’étranges rumeurs : l’assassin aurait développé des pouvoirs psychiques. L’épilogue, entre « Patrick » et « La grande menace » confirme la véracité de ces dires et laisse ouverte la porte pour l’ultime volet de la trilogie, FIN DE RONDE que l’on a hâte d’entamer en dépit de la semi déception de ces CARNETS NOIRS. Un King « bon mais sans plus ». On en attend davantage de l’auteur phare du fantastique et de l’épouvante.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Thriller, #Polar, #Stephen King

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Publié le 26 Juillet 2017

Mr MERCEDES de Stephen King

 

L’Amérique des années 2010…un pays en pleine crise. Des centaines de chômeurs désespérés se pressent devant les portes du City Center pour arriver les premiers à l’ouverture de la grande foire de l’emploi qui leur permettra, peut-être, de décrocher un job. Certains poireautent durant toute la nuit. Lorsque pointe l’aube, un type surgit dans une Mercedes grise. Il fonce dans la foule, fait huit morts et bien davantage de blessés. Pas de mobile si ce n’est l’envie de tuer. Pas d’indice. Pas de piste. Le tueur, surnommé Mr Mercedes, ne sera jamais appréhendé. Il se nomme en réalité Brady Hartsfield, un jeune passionné d’informatique cumulant deux emplois : réparateur dans un magasin d’électronique durement touché par la crise et vendeur de glaces dans sa petite camionnette. Très pratique pour espionner les gens car, franchement, qui se soucie du marchand de glace ? Brady vit toujours chez sa mère, une alcoolique avec laquelle il entretient une relation trouble, pour ne pas dire incestueuse. Plus jeune il s’est déjà débarrassé de son petit frère handicapé. La tuerie du City Center a suffi à canaliser sa rage et il ne compte pas récidiver. Du moins cherche-t-il à s’en convaincre. 

Bill Hodges, de son côté, est un officier de police récemment retraité qui songe au suicide en se gavant de télévision. Il a la satisfaction du devoir accompli même si, forcément, il a dû quitter la police en laissant quelques affaires en suspens. Comme celle du tueur à la Mercedes, par exemple.

Spoiler:

Jaloux des honneurs reçus par l’ancien flic, Brady vient le narguer, d’abord par lettre puis en lui donnant rendez-vous sur un réseau social privé, le Parapluie bleu de Debbie. Après avoir demandé conseil à un de ses rares amis, le jeune Noir Jerome Robinson qui s’y connait en nouvelles technologies, Bill accepte le défi de Mr Mercedes. Il remet ainsi en cause la thèse officielle concernant Olivia Trelawney, propriétaire de la Mercedes ayant servi au massacre. Rongée par la culpabilité, Olivia s’était suicidée après avoir entendu les voix de ses victimes mais Bill découvre qu’elle a été poussée à se donner la mort par le sadique

Ragaillardi par son enquête, Bill décide de traquer Mr Mercedes. De son côté, Brady veut se faire exploser durant un concert du boys band ‘Round here auquel assisteront la mère et la sœur de Jerome Robinson.

Mr MERCEDES de Stephen King

Récompensé par le Edgar Award décerné par les « Mystery Writers of America », MR MERCEDES a été décrit par Stephen King comme son premier « hard boiled detective novel ». On y retrouve, en effet, le personnage classique de l’ancien flic : actif durant sa carrière, honoré lors de sa pension, il se retrouve une fois à la retraite désœuvré et incapable de trouver un sens à sa vie. Affalé devant la télé, son révolver à portée de la main pour en finir le jour où il ne pourra plus supporter son existence, il va replonger et devenir un « tonton », autrement dit un ancien policier qui, retiré du service actif, continue à poursuivre les criminels. Aidé par son jeune ami Jérome, spécialiste de l’informatique, le vieux flic se lance sur les traces d’un maniaque adepte du meurtre de masse.

Durant 670 pages, Stephen King, de manière très efficace, alterne les points de vue des deux antagonistes : il passe de l’officier Hodges au redoutable Mr Mercedes en une suite de chapitres très courts qui confèrent un rythme haletant au roman en dépit de sa longueur et de quelques digressions typiques du romancier. En conteur hors pair possédant un incroyable métier (MR MERCEDES constitue son 62ème roman !), le King brosse un portrait psychologique très vraisemblable du héros et de son adversaire. Tous deux s’émancipent rapidement des clichés pour devenir parfaitement crédibles, de même que les personnages secondaires, du jeune Noir très intelligent qui s’amuse à parler « p’tit nègre » à la quadragénaire névrosée trouvant dans cette traque manière à échapper à sa mère dominatrice. Si les rebondissements ne sont pas très nombreux, certains sont réellement surprenants et le suspense, lui, est constant jusqu’à un troisième acte mené tambour battant, véritable course contre la montre visant à stopper le dingue muni d’une ceinture d’explosif en plein concert d’un boys band à minettes.

Et puis, bien sûr, Stephen King n’a rien perdu de son talent d’écrivain et sa prose, quoique certains continuent à la dénigrer, possède une force évocatrice indéniable tant le bonhomme a le sens de la formule impeccable, de la métaphore percutante et de la citation bien trouvée. En dépit du caractère réaliste, brutal et terriblement contemporain du récit (débuté peu avant les attentats de Boston), MR MERCEDES garde pourtant un côté optimiste réjouissant accentué par quelques références aux œuvres antérieures de King et de nombreuses touches d’humour.

Une éclatante réussite.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Thriller, #Stephen King

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