Publié le 29 Décembre 2020

L'heure du bilan est donc arrivé...136 bouquins lus cette année (dont environ 120 romans)...

Sur la première place, parce que c'est une brique de qualité et qu'on aimerait que d'autres écrivains aient droit à autant d'attention voici le grand vainqueur de l'année

BILAN BEST OF 2020

La suite avec 9 lectures indispensables...Pas d'ordre de préférence, les 9 sont excellents: un polar classique (Fletch aux trousses), deux recueil de nouvelles fantastiques et SF (Serpentine et Axiomatique), un roman "jeunesse" appréciable à tout âge (Soulbreaker), un monument de la science-fiction à lire ou relire (Demain les chiens) et une passionnante histoire de voyage dans le temps (A travers temps). En prime, 3 romans courts issus de la collection incontournable Une Heure Lumière.  

BILAN BEST OF 2020

Rendez vous l'an prochain! 

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #BEST OF

Repost0

Publié le 28 Décembre 2020

ORAGE SUR LA GRANDE SEMAINE de Marcel Lanteaume

Marcel Lanteaume reste un écrivain très mystérieux et aujourd’hui hélas oublié. Né en 1902 (et décédé en 1988), il écrira plusieurs romans policiers pour distraire ses compagnons de Stalag entre 1940 et 1942. Après-guerre, trois d’entre eux furent publiés dans la collection « Le Labyrinthe » mais souffrirent de ventes insuffisantes. Le romancier cessa alors d’écrire et, selon la légende (et son fils), détruisit alors au moins cinq manuscrits ! Des trois romans existants, l’un reste quasiment introuvable (LA 13ème BALLE), les deux autres ayant été réédités au Masque à la fin des années ’90.

ORAGE SUR LA GRANDE SEMAINE constitue un parfait exemple de « chambre close » : deux frères, Marc et Edgar Kuss, invitent quelques personnes, dont le détective privé Bob Slowman et son biographe Charles Termine à diner. Une amie des frères, l’actrice américaine Gertrud Ross, est également de la partie. Mais la jeune femme, enfermée dans la salle de bain, est brutalement assassinée alors que pièce ne comporte aucune issue excepté une porte constamment surveillée par les convives. Slowman mène l’enquête et découvre que la maison servait jadis à des cultes sataniques. De plus un ancien amant de Gertrud, « initié » aux arts noirs, voulait sa mort. Tout comme un mystérieux « club des 9 », un réseau d’espionnage à qui Gertrud a dérobé d’importants documents. Ou encore José Montero, un gangster que la belle avait doublé ! Si les suspects ne manquent pas, restent à déterminer qui est l’assassin, et surtout comme il a pu agir.

Après un excellent démarrage, l’enquête patine un peu et le lecteur peut se sentir quelque peu dérouté, voire perdu, devant la multiplication des personnages et de leurs mobiles. Heureusement Bob Slowman (avatar transparent de l’auteur Lenteaume) nous offrira quelques belles démonstrations de son talent, avec, en outre, l’explication d’un fameux numéro d’illusionniste. Si la partie centrale du roman reste en deçà de son entrée en matière fracassante et de sa conclusion, elle reste, toutefois, agréable à lire.

Le meurtre impossible en chambre – pardon, en salle de bain ! – close se verra finalement et logiquement expliqué dans les dernières pages. Beau joueur, l’écrivain avait offert, peu avant, un énorme indice afin d’orienter le lecteur vers l’explication. Mais le familier du genre avait probablement deviné l’essentiel assez rapidement : il est, en effet, vite évident qu’une seule solution est possible. Car, c’est le paradoxe (ou pas ?) du genre : plus la situation parait inextricable et moins il existe de possibilité réelle pour le criminel d’avoir procédé pour commettre son méfait. Lorsqu’une pièce est « simplement » close le problème se montre, au final, plus compliqué à résoudre que lorsque l’auteur multiplie les impossibilités : une pièce petite, sans cachette possible, sans fenêtre, dont l’unique porte d’entrée est surveillée par plusieurs témoins dignes de foi. En appliquant la méthode dite de « Sherlock Holmes » et en étant attentif aux indices dissimulés (mais relativement transparent) par l’auteur, le lecteur devrait parvenir à résoudre le mystère. L’écrivain prend d’ailleurs la peine d’inclure un de ses fameux défis, si cher à Ellery Queen, pour lui signaler le moment où, ayant tous les indices en sa possession, il peut découvrir le qui, le comment et le pourquoi.

Si ORAGE SUR LA GRANDE SEMAINE reste en deçà de TROMPE L’ŒIL, le 3ème roman de Lenteaume à la solution stupéfiante, il n’en demeure pas moins un classique francophone du crime en chambre close.

Voir les commentaires

Repost0

Publié le 26 Décembre 2020

LES MEURTRES DE MOLLY SOUTHBOURNE de Tade Thompson

Petite fille comme les autres, ou presque, Molly Southbourne a un petit problème : son sang donne naissance à des créatures qui lui ressemblent mais souvent animées de mauvaises intentions. A la puberté, bien sûr, le problème devient plus…problématique !

Psychologue et écrivain originaire du Nigeria à présent établi en Angleterre, Tade Thompson effectue une entrée fracassante sur la scène SF avec son roman ROSEWATER qui sera suivi de deux séquelles et une poignée de novellas dont ces MEURTES DE MOLLY SOUTHBOURNE. Toutes ces œuvres reçoivent un bel accueil critique et se voient nommés dans plusieurs prix prestigieux.

La novella évolue dans divers genres : l’intrigue semble fantastique mais les explications finales l’orientent vers la science-fiction tandis que le traitement oscille entre récit d’épouvante psychologique et horreur viscérale. L’auteur s’intéresse particulièrement aux fluides corporels, au sang et à la sexualité, bref à cette « body horror » jadis prisée par un cinéaste comme David Cronenberg.

Le style de l’auteur se montre très efficace, tant dans le portrait des personnages que dans les descriptions et les passages horrifiques. Les influences sont nombreuses et évidentes mais Thompson parvient néanmoins à en tirer une intrigue prenante dont la richesse vient de ce traitement multiple, échappant à un genre particulier de l’imaginaire pour plonger dans un tourbillon mêlant horreur, science-fiction, etc. Les révélations finales s’avèrent, certes, attendue mais cela n’entame en rien le plaisir de lecture, l’écrivain privilégiant une approche « honnête » nous conduisant inexorablement vers la conclusion sans recourir aux artifices ou aux retournements de situation.

Publié dans l’incontournable collection Une Heure lumière assorti d’une éclairante entrevue avec l’auteur en guide de bonus, LES MEURTES DE MOLLY SOUTHBOURNE constitue une vraie réussite, passionnante de bout en bout, efficace et dérangeante, bref une lecture qui, en dépit de sa brièveté (130 pages !) secoue durablement et parvient à marquer plus profondément le lecteur que de nombreux pavés littéraires. Un court roman rarement chic (l’auteur plonge dans le glauque et le malsain sans excès mais sans retenues) mais toujours choc, à conseiller à ceux qui aiment qu’un écrivain les bouscule et même leur assène quelques directs dans l’estomac. On attend la suite avec impatience !  

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Roman court (novella), #science-fiction

Repost0

Publié le 22 Décembre 2020

A CHRISTMAS CAROL de Jacques Sadoul

Revoici Carol Evans, ex-agent des services spéciaux, reconvertie, surtout par ennui, détective. Lorsque Dyan Marley est retrouvée étranglée dans sa chambre new-yorkaise, Carol Evans se lance sur la piste du meurtrier, un tueur en série surnommé le Lady Killer. Mais Carol rencontrera sur sa route des flics pas toujours très honnête, des criminels de Harlem, la Mafia et, également, une mannequin noire, Sharon Clarke, qui ne laisse pas indifférente Carol.

Avec la série des « Carol », Jacques Sadoul nous offre un beau personnage de détective bad-ass, sorte de version féminine (et lesbienne) de Mike Hammer. Autrement dit, la demoiselle utilise aussi bien son cerveau que ses poings et, accessoirement, le reste de son corps, d’ailleurs fort attrayant. Raconté à la première personne, le récit ne lésine pas sur un certain humour pas toujours politiquement correct (une autre époque) car Carol n’aime pas grand monde : ni les Noirs, ni les Hispaniques, ni les « gouines non maquillées », ni les communistes. D’ailleurs elle ressasse régulièrement la décadence de l’Amérique, tombée sous l’emprise de l’immonde pensée Rouge et se désole de la nullité de tous ses présidents de gauche, « excepté Reagan qui était correct ».

L’intrigue, pour sa part, se montre bien construite et complexe, à mi-chemin entre le polar hard-boiled et le policier d’énigme plus classique, dans la tradition des grands anciens à la Chandler ou Spillane. Le lecteur peut d’ailleurs se perdre dans un dédale qui mêle trafic de drogue, serial killer, guerre des gangs, etc. Sadoul, grand seigneur, récapitule heureusement les faits à deux reprises pour permettre à chacun d’emboiter les pièces. En parlant d’emboitage, Carol, pourtant ouvertement raciste, tente durant tout le roman de gagner les faveurs d’un mannequin noire au vocabulaire des plus fleuris. Ce qui donne de nombreuses scènes savoureuses entre séduction et disputes façon « comédie de mariage » (ou plutôt de couchage !). L’atmosphère de Noel et les excès de la période sont également bien rendus, ce qui offre une toile de fond plaisante qui justifie le titre en forme de calembour.

Enlevé, divertissant et bien mené, A CHRISTMAS CAROL constitue donc le polar idéal pour accompagner des fêtes de fins d’années confinées. A déguster sans modération.

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Humour, #Jacques Sadoul, #Polar, #Policier

Repost0

Publié le 20 Décembre 2020

NOUS ALLONS TOUS TRES BIEN, MERCI de Daryl Gregory

Jan Sayer forme un groupe de paroles à visées thérapeutiques, un peu sur le modèle des Alcoolique Anonymes, pour une poignée de personnes traumatisées par des événements horrifiques ou paranormaux. Le court roman va nous détailler leur rencontre avec des êtres maléfiques, des tueurs en série, des monstres indicibles, etc.

Encensé par de nombreux critiques, NOUS ALLONS TOUS TRES BIEN MERCI constitue une œuvre assez déstabilisante, sorte d’hommage / réinvention à l’épouvante moderne. Un entretien avec l’auteur nous éclaire d’ailleurs sur son objectif : proposer un roman consacré non pas à l’horreur mais plutôt à son « après ». Bref, que se passe-t-il vraiment pour, par exemple, les survivants d’un slasher : lorsque la Final Girl a défait le tueur fou va-t-elle pour autant retrouver sa vie d’avant ? Sans doute pas et pourtant cette partie de l’histoire n’est jamais abordée. Ce court roman se veut donc, entre guillemet, celui du « post-générique ». Nous allons suivre, au cours de leurs discussions (mais aussi de leurs silences et hésitations), Harrison, victime adolescent de monstruosités cosmiques lovecraftiennes devenu principal protagoniste de comics. Et Martin qui ne quitte jamais des lunettes de réalité virtuelle lui révélant le monde « réel ». Ou Stan, réduit à un homme-tronc après que tous ses amis aient été découpés par une famille de bouchers cannibales. Sans oublier Barbara et ses os sur lesquels un tueur en série a gravé ses secrets et prophéties. Et enfin la trop belle Greta complètement scarifiée par une secte…

NOUS ALLONS TOUS TRES BIEN MERCI débute de belle manière, en présentant les personnages et les raisons de leur présence dans ce groupe de parole, lequel rappelle celui de films comme « Freddy 3 » ou « Bad Dreams ». A cela s’ajoute les références plus ou moins évidentes : « Massacre à la tronçonneuse », « Se7en », « La colline a des yeux », « Invasion Los Angeles » et puis, de façon plus générale Lovecraft, le slasher, les zombies, etc. De bonnes intentions !

La première partie du bouquin (qui ne compte que 180 pages en tout) se montre très réussie et intrigante. Mais la suite ne se montre pas vraiment à la hauteur de cette originalité : le dernier acte fonctionne nettement moins bien et se montre beaucoup plus classique. Après une centaine de pages d’angoisse, de suspense psychologique et d’horreur en mode « less is more », les cinquante dernières pages reviennent à un récit plus balisé…et moins convaincant.

Par rapport aux critiques élogieuses, voire dithyrambiques, lues un peu partout, NOUS ALLONS TOUS TRES BIEN MERCI reste donc une déception, certes intéressante et souvent plaisante mais une déception malgré tout. Entre un début fracassant et une conclusion tout juste passable se cache donc un roman moyen. Dommage.

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Cinéma, #Horreur, #Lovecraft, #Fantastique

Repost0

Publié le 15 Décembre 2020

HANTISES de John Saul

Kevin a coupé complètement les ponts avec sa mère, la très acariâtre Helena Devereaux. Il ne l’a plus vu depuis une vingtaine d’années et n’est plus retourné, non plus, dans la propriété familiale. Mais Helena, mourante, demande à Kevin de venir la voir une dernière fois. Alors, accompagné de sa femme et ses enfants, Kevin se rend dans la vaste demeure. Il ignore que même après son décès Helena souhaite le maintenir sous son emprise…Ce qui avait commencé comme de longues vacances d’été afin de se ressourcer dans la maison de sa jeunesse tourne rapidement au cauchemar pour Kevin.

Valeur sûre du fantastique et de l’épouvante, abondamment publié dans les collections phares du genre durant les années ‘80/’90, John Saul propose ici un thriller fantastico horrifique bien troussé même s’il n’est pas follement original. Le roman prend son temps pour installer son atmosphère, qui est celle d’une ancienne plantation de coton tenue par des esclavagistes, cernée par la plage mais aussi par des marécages où rodent crotales et crocodiles.

La principale réussite de HANTISES réside d’ailleurs dans ce climat poisseux, cette culpabilité larvée, ces protagonistes bourrés de regrets ou de remords, écrasés par le poids du passé. D’où quelques passages effectifs et une série de personnages plutôt bien troussés et parfois originaux (la vieille fille vivant à côté de sa mère agonisante en dispensant des cours de danses aux adolescentes locales reste la plus réussie et « vivante ») qui compensent, en partie, l’aspect très prévisible du récit. Il n’y a, en effet, guère de surprise durant le roman mais celui-ci avance à un rythme relativement enlevé et les 280 pages se lisent donc sans ennui. Le dernier acte parait même un peu précipité et l’auteur pousse souvent trop loin la suspension d’incrédulité pour emporter l’adhésion mais, dans l’ensemble, HANTISES reste appréciable à l’image d’une série B d’horreur des années ‘80. L’écriture, simple mais bien rodée, constitue un autre point positif quoiqu’on eut aimé davantage de folie et de scènes plus marquantes, bref davantage de piment à ajouter dans un plat un peu trop fade.

En résumé un honnête petit bouquin d’ambiance qui ne révolutionnera aucunement le genre et ne surprendra aucunement les afficionados mais se laisse lire sans déplaisir. HANTISES plaira probablement davantage au « grand public » qu’aux lecteurs voraces de fantastiques et d’épouvante (qui se retrouveront en terrain balisé) mais reste un divertissement tout à fait acceptable.

 

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur

Repost0

Publié le 13 Décembre 2020

L'INSIGNE DU CHANCELIER (LES LAMES DU ROI - TOME 1) de Dave Duncan

Premier tome d’une longue saga, L’INSIGNE DU CHANCELIER nous permet de découvrir un univers de cape & épées mâtiné de fantasy appréciable dont la principale originalité réside dans le lien existant entre une Lame et son égide. La Lame c’est un épéiste d’exception, entrainé au Hall de Fer, bien meilleur que les combattants lambda les plus réputés. Une fois sa formation achevée, une Lame se voit attribuée à une haute personnalité du royaume, ou au Roi lui-même, et se voit liée à lui par un serment, un enchantement dangereux (certains en meurent) qui l’oblige à défendre cette personne, cette égide, n’importe quand et dans n’importe quelle situation.

Le roman suit ainsi la trajectoire de Durendal, le meilleur des meilleurs Lames, d’abord « offert » à un noble sans intérêt puis qui finit par s’imposer au sein de la Garde Royale. L’intrigue, relativement classique, n’en demeure pas moins plaisante et le rythme se montre soutenu, l’auteur recourant à l’ellipse de manière étonnante. Ainsi un périlleux voyage de deux ans est expédié en un paragraphe et, à mi-parcours, le bouquin effectue un saut temporel de 30 ans alors qu’un auteur plus besogneux en aurait profité pour refiler un tome supplémentaire à son éditeur. Cela donne une certaine originalité au récit, évitant les passages trop convenus pour privilégier une approche sous forme de chronique : les années passent, les héros vieillissent, les reines sont répudiées, les rois meurent, la mode change,…Bref, la société évolue et nous n’avons pas l’impression, courante dans la fantasy, d’un monde « figé ». Les personnages passent parfois aussi au second plan et sont assez peu détaillés, défauts pour les certains lecteurs, qualités pour d’autres qui auront davantage l’impression de lire un bouquin historique dans lequel les protagonistes ne sont pas toujours mis en valeur.

L’aspect « cape & épée » dans une veine proche des 3 MOUSQUETAIRES reste d’ailleurs prédominant, ce qui contribue au réalisme des situations et à la crédibilité des personnages. Certes, la magie existe dans cet univers mais son utilisation reste limitée, notamment aux Sœurs Blanches capables de « renifler » les enchantements afin de protéger le roi.

Si on ne parlera pas de claque magistrale ou d’incontournable de la Fantasy, L’INSIGNE DU CHANCELIER s’impose cependant comme une très plaisante lecture, suffisamment réussie et enthousiasmante pour donner envie de poursuivre la saga, l’auteur ayant écrit 2 trilogies dans cet univers.

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantasy

Repost0

Publié le 10 Décembre 2020

CHINOISERIES POUR OSS 117 de Jean Bruce

Jean Bruce a régné sur l’espionnage « à la française » avec 88 romans écrit entre 1949 (avec ICI OSS 117) et 1963. Par la suite c’est son épouse puis ses enfants qui se chargèrent de faire perdurer OSS 117 jusqu’au début des années ’90 (jusqu’à OSS 117 PREND LE LARGE en 1992). Plus de quarante ans de succès, 265 romans et 75 millions d’exemplaires vendus. Alors évidemment nous sommes dans le pur bouquin de gare mais, dans le genre, l’ensemble possède son charme. Tout d’abord par le contexte : dans CHINOISERIES POUR 0SS 117 nous visitons Macao et Hong Kong au milieu des années ’50 avec ses zones de non-droits abandonnées par la Chine ou l’Angleterre, ses prostituées opérant sur des sampans, ses criminels minables qui s’imaginent rois du (tout petit bout de) monde, ses chefs de gangs voulant être califes à la place du calife et pactisant une fois à gauche (la Chine), une fois à droite (l’Occident) pour garder leurs misérables prérogatives. Bref, voilà un roman qui, par la grâce des soixante ans écoulés, s’est paré d’un charme certain au niveau de l’ambiance historique bien rendue et imprégnée, forcément, des fumées d’opiums et des parfums des dames légères. L’intrigue, comme souvent, reste excessivement simple dans ses grandes lignes mais bien compliquées dans les détails. Trahisons, agent double, agent triple, on s’y perd un peu et, à vrai dire, ce n’est guère important, c’est juste le bal des barbouzes entre les communistes et les Américains pour un petit bout de territoire stratégiquement important.

Alors, comme tous les autres de la série, le roman rappelle évidemment la parodie « Le Magnifique » avec Bebel mais c’est plutôt positif à condition que le lecteur s’amuse des excès de cette littérature de pur divertissement. Hubert Bonnissoeur a même droit à être comparé à un fauve à la manière de Bob Saint Clare. Pour les plus jeunes ce sera sans doute les versions humoristiques de l’agent secret, campé par Jean Dujardin, qui viendront à l’esprit. Car tout cela n’est pas toujours franchement crédible et les coïncidences s’accumulent pour permettre à notre espion de se sortir d’un panier de crabes en plein cœur de l’enfer du jeu. Clichés touristiques, violences, érotisme (frileux, époque oblige), rebondissements,…Jean Bruce assure cependant un réel plaisir de lecture avec son style très simple mais pas trop relâché pour autant. Disons qu’il possède une certaine efficacité, un sens du rythme et du rebondissement que n’ont pas toujours les besogneux de l’espionnage ou du polar. CHINOISERIES POUR OSS 117 emporte donc l’adhésion et se lit en une soirée tout comme on visionne un film d’espionnite des sixties : sans être dupe de la qualité réelle du produit proposé mais néanmoins avec plaisir et sans ennui. N’est-ce pas là l’essentiel ?

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Espionnage, #Roman de gare

Repost0

Publié le 6 Décembre 2020

LES MAGICIENS DU CRIME de Roland Lacourbe

Roland Lacourbe, grand spécialiste des crimes impossibles, des meurtres en chambre close et des énigmes insolubles, propose une nouvelle anthologie de 20 nouvelles consacrées aux prestidigitateurs. Car quels personnages sont les plus à même de résoudre les assassinats étranges que ces spécialistes du détournement d’attention, du truc et astuce et des tours de passe-passe ? Le recueil se divise en trois sections : « magiciens criminels et magiciens détectives », « sur les traces d’Houdini » (autrement dit on va parler d’évasions impossibles) et « Occultisme et charlatans », à chaque fois précédées d’un article d’une dizaine de pages signé Lacourbe.

Le livre s’ouvre donc sur « le maitre du temps » de Rafael Sabatini (auteur de « L’aigle des mers » et « Scaramouche ») un récit historique intéressant consacré au célèbre Cagliostro. Plus classique, Clayton Rawson propose avec « Meurtre sans assassin » une enquête du magicien détective Merlini (par la suite reprise dans le recueil du Masque dédié à Merlini). Une histoire de soucoupes volantes et de petits hommes verts amusante avec un coupable évident mais un procédé particulièrement inventif et ingénieux. Joseph Commings, spécialiste du crime impossible, livre « la balle ensorcelée » et « la malédiction d’Othello », deux jolies réussites quoique le modus operandi soit un peu aléatoire et nécessite une bonne dose de chance pour fonctionner…qu’importe, l’amateur ne cherche pas la vraisemblance mais plutôt l’inventivité dans le procédé.

Parmi les autres nouvelles on signale, dans la partie consacrée aux évasions impossibles, le macabre « L’ultime évasion » que l’on imagine facilement transposé dans les pages des « Tales from the crypt » ou encore l’efficace « le moment de décision » et sa conclusion sous forme de point de suspension efficace.

Enfin, au rayon « occulte », c’est encore une fois John Dickson Carr qui emporte le morceau avec « la mort dans les ténèbres », crime impossible fort bien ficelé perpétré durant une séance de spiritisme. La narration, sous forme de pièce radiophonique, rend le récit très haletant et efficace.

Joseph Commings clôt cette anthologie avec sa troisième participation, « Le spectre sur la terrasse » dans lequel il se surpasse niveau impossibilité : apparition de fantôme, lévitation, double spectral, téléportation,…Les explications tiennent la route et démontrent l’ingéniosité de l’écrivain.

Trop inégal, LES MAGICIENS DU CRIME n’est sans doute pas la meilleure anthologie de Lacourbe mais le thème général de la magie et de la prestidigitation s’avère intéressant et finalement pas aussi souvent traité qu’on le pense dans la littérature d’énigme. Whodunit et tour de passe-passe ont pourtant beaucoup en commun dans l’art de la misdirection et dans la manière de cultiver une atmosphère de merveilleux et de fantastique. Ce recueil de nouvelles reste donc recommandable pour l’amateur de crime impossible et de délit mystérieux.

Voir les commentaires

Repost0

Publié le 3 Décembre 2020

L'ENFANCE ATTRIBUEE de David Marusek

Ce court roman d’anticipation s’inscrit dans la catégorie de la dystopie teintée d’éléments technologiques disons cyberpunk (pour poser une étiquette simple). Nous sommes à la fin du XXIème siècle. L’humanité, ou du moins une certaine élite, vit très longtemps. Ce n’est pas l’immortalité mais ça y ressemble. Bain regénérant, nanotechnologie nettoyante,…Du coup la surpopulation menace et la procréation est interdite, seuls quelques privilégiés obtiennent le droit d’avoir un enfant ou plutôt un « châssis », autrement dit une sorte de petit être bidouillé dont ils choisissent le sexe, les caractéristiques, etc. Sam et Eleanor y ont droit, ce qui bouleverse grandement leur existence. Sam est une sorte d’artiste / programmeur n’ayant plus réalisé grand-chose depuis longtemps, Eleanor est une célébrité du futur, une demi mondaine aurait on dit jadis qui n’est célèbre que…parce qu’elle est célèbre. Une influence de l’avenir dont l’existence s’expose en permanence sur les réseaux sociaux et qui passe son temps à faire la fête par avatar ou hologramme interposé. Pour gérer cette vie trépidante les individus disposent également de conseillers virtuels, des programmes qui leur servent à la fois de mémoire et d’agenda, sans oublier de constituer des systèmes de défenses contre les cyber attaques et les gadgets déglingués. Heureusement tout le monde est surveillé en permanence et les défaillances systèmes sont – normalement – court-circuitées avant le grillage de neurones.

Publié par le magasine Asimov aux USA en 1995 puis par Le Belial en 1999 avant d’être repris par le même éditeur dans sa collection « Une Heure Lumière » en 2019, cette novela se révèle une lecture intéressante. Si le début peut déstabiliser, la suite se montre rapidement bien menée, l’auteur utilisant le prétexte d’une histoire d’amour entre deux individus dissemblables pour brosser le tableau d’un futur crédible et réussi, probablement encore plus plausible aujourd’hui que voici 25 ans. Bref, l’auteur se montre visionnaire et percutant, rappelant parfois Philip K. Dick dans sa manière d’imaginer un univers en apparence enviable mais qui montre rapidement ses monstruosités et dans sa description d’un individu dont la vie bien réglée s’écroule pour plonger dans un véritable cauchemar éveillé.

Une bonne pioche dans cette collection hautement recommandable !

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Cyberpunk, #Roman court (novella), #anticipation, #science-fiction

Repost0