uchronie

Publié le 8 Janvier 2024

TEMERAIRE - LES DRAGONS DE SA MAJESTE de Naomi Novik

Naomi Novik, né en 1973, entame en 2006 sa saga des « Dragons de sa majesté » avec TEMERAIRE, nominé au Hugo et lauréat du Locus. La saga, une uchronie de Fantasy historique, comptera au final 9 tomes.

L’intrigue suit Will Laurence, un Anglais capitaine de navire au tout début du XIXème siècle. Il s’empare d’un navire français et découvre un œuf de dragon qui éclot. Laurence est, dès lors, obligé de s’occuper du petit dragon, baptisé Téméraire, et de s’enrôler dans « l’aviation » britannique afin de combattre les forces de Napoléon.

Sur le papier, ce roman semble terriblement prometteur : une aventure historique et maritime revisitée sous l’angle d’une uchronie durant les guerres napoléoniennes avec des combats entre, non pas des aéroplanes, mais des dragons. Le début du livre parait d’ailleurs répondre aux promesses avec des personnages relativement intéressants et un univers riche. Hélas, comme (trop) souvent dans la Fantasy, tout traine rapidement en longueur. Nous avons droit à la romance contrariée et au long entrainement du dragon à « l’école militaire » des « aviateurs ».

La relation entre le héros et le dragon occupe une large part du bouquin. Un dragon qui, par ailleurs, semble à la fois très intelligent et d’une naïveté confondante. La révélation finale, sans doute too much, nous apprend en outre qu’il n’est pas un dragon « rare » mais carrément un « céleste », soit le plus rare et le meilleur dragon possible. Bon, mais sinon nous avons droit à des combats épiques à dos de dragons avec les cieux qui s’enflamment et tout et tout ? Pas vraiment. Quelques batailles interviennent à la fin du roman mais rien de véritablement formidable.

TEMERAIRE apparait donc comme une occasion manquée : le potentiel d’une flamboyante uchronie teintée de fantasy historique et d’une touche de romance impossible est là mais le résultat se montre, au final, assez terne. Le relatif cliffhanger final avec la révélation concernant Téméraire donne envie de continuer la saga mais la perspective de devoir s’enfiler huit tomes supplémentaires décourage les bonnes volontés.

TEMERAIRE n’est pas un mauvais roman malgré son côté « introductif » et ses longueurs. Le style est plutôt agréable et la plume est suffisamment vive pour ne pas susciter l’ennui. Mais il n’est pas non plus suffisamment emballant pour continuer une aventure qui promet beaucoup mais, hélas, délivre très peu. Bref, un roman sympa, potable, vaguement divertissant mais surtout décevant.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #dragon, #Uchronie, #Historique, #Fantasy

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Publié le 5 Janvier 2024

LORD COCHRANE Vs L'ODRE DES CATACOMBES de Gilberto Villarroel

Le premier volume de la série, LORD COCHRANE VS CTHULHU, était un petit coup de cœur et une superbe réussite, mélange de roman historique, d’intrigue maritime, de cape et épée et de fantastique lovecraftien. Ce deuxième tome, quoiqu’efficace et globalement réussi, m’est apparu un peu en deçà.

Pour quelles raisons ? Elles sont multiples. Tout d’abord, évidemment, la surprise / nouveauté ne joue plus. On a déjà eu une belle évocation de la vie de ce protagoniste haut en couleur dans le premier volume. Ce tome 2 n’apporte donc que peu d’informations nouvelles.

Deuxième petit reproche : l’auteur nous rappelle régulièrement les évènements antérieurs ce qui est à la fois pratique et parfois un frein à l’action. L’intrigue parait également plus simpliste et linéaire dans cette nouvelle livraison, une course poursuite plus classique, avec notre héros à la recherche d’un parchemin manquant datant des campagnes de César. On retrouve un petit côté thriller ésotérique dans cette manière de procéder, certes toujours efficace, qui alterne les événements se déroulant à l’époque Napoléonienne avec d’autres, bien plus anciens, voyant César et Vercingétorix explorer R’lyeh. Un procédé éprouvé, utilisé de Clive Cussler à Steve Berry en passant par Dan Brown).

Cthulhu et les monstres lovecraftien sont également moins présents, ce qui s’avère un peu frustrant pour ceux qui cherchent le frisson et l’horreur cosmique. Néanmoins, la réflexion au sujet de cet ordre des catacombes et de son culte dissident se montre pertinente et originale.

Tout l’ouvrage est bien documenté mais, parfois, la précision dessert le côté « aventure fantastique » avec une surabondance de descriptions et de « compte-rendus » sur César, Vercingétorix, les lieux visités, etc. D’où quelques longueurs un peu préjudiciables : le roman est plus long que le précédent, ce qui se ressent, d’autant que l’intrigue est moins complexe. Elle met en réalité une bonne centaine de pages à démarrer réellement.

Mais ces défauts ne font pas oublier l’essentiel : cela reste un très plaisant roman avec une aventure rythmée, façon feuilleton, qui nous permet de voyager de Paris à La Rochelle jusqu’à l’île d’Aix. L’auteur combine toujours les événements historiques et authentiques (explicités dans les copieuses notes de fin de volume) et l’imaginaire, quoique celui-ci soit plus discret que dans le premier tome.

Si on ne retrouve pas la qualité exceptionnelle de COCHRANE Vs CHTULHU, une éclatante réussite de l’aventure fantastique lovecraftienne, cette deuxième livraison reste suffisamment divertissante pour emporter l’adhésion. Et donne envie de poursuivre la saga puisque « Cochrane reviendra ».

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Lovecraft, #Uchronie, #Fantastique, #Fantasy

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Publié le 27 Juillet 2023

DARWINIA de Robert Charles Wilson

Robert Charles Wilson est un des meilleurs écrivains de SF de notre époque, grand spécialiste des récits vertigineux basés sur le "high concept". On lui doit ainsi d'incroyables réussites comme SPIN, BLIND LAKE ou LES CHRONOLITHES, entre hard science et sense of wonder. L'auteur part souvent d'une idée forte, susceptible de développements immenses et d'intrigues incroyablement surprenantes. Une fois encore DARWINIA démarre très fort: dans cette uchronie, l'Europe disparait complètement en 1912. Où sont passé les habitants, les villes, les bâtiments? Personne ne le sait. A la place du continent disparu existe à présent la Darwinie, une terre inexplorée que vont tenter d'explorer, puis de coloniser, les humains.

Avec DARWINIA, le romancier décloisonne les genres: aventures, roman historique, romance, uchronie, science-fiction, voire fantasy…Tout parait donc pour le mieux…oui mais, en fait, l'ensemble peine quelque peu à convaincre. Nous avons, d'un côté, les aventures d'un jeune candide, le photographe Guilford Law, partit découvrir ce nouveau monde avec sa faune dangereuse, sa flore étrange, ses mystères, etc. Un récit façon "monde perdu" dans la lignée de Burroughs (fréquemment mentionné dans le texte) ou même de Verne (idem). Mais, l'auteur s'intéresse également à l'épouse (qui se croit veuve) du héros, laquelle refait sa vie de son côté. Et à un étrange personnage habité par une sorte de dieu extraterrestre. Ces trois lignes narratives sont entrecoupées par une série d'interludes métaphysiques, philosophiques et, surtout, un peu abscons et inutiles.

DARWINIA n'est pas un mauvais roman, loin de là, et certaines idées sont mêmes brillantes avec des questionnements sur l'immortalité, la place de la religion (plus à même de pouvoir "expliquer" ce "miracle" que la science, totalement larguée) mais l'ensemble reste un brin boiteux. Le bouquin semble se perdre dans les différentes pistes évoquées et l'uchronie laisse à désirer: certes l'Europe a disparu et la Darwinie devient une sorte de colonie des Etats-Unis tout puissants mais que se passe t'il dans le reste du monde?

Le roman s'annonçait comme une "simple" aventure uchronique où une poignée d'explorateurs allaient découvrir un continent nouveau mystérieux. Wilson fait plus que ça et cette partie n'occupe, en réalité, qu'environ un tiers du récit. Hélas le reste n'est pas aussi intéressant que prévu: trop de digressions, une intrigue à base de dieu extraterrestre poussive et des interludes nourris de techno babillages épuisants. On en ressort donc plus déçu que convaincu même si le talent de l'auteur sauve globalement les meubles: à condition de survoler les insupportablement ennuyeux "interludes", DARWINIA reste un honnête roman de science-fiction. Mais, de la part de Robert Charles Wilson, on espérait mieux.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #Uchronie

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Publié le 31 Décembre 2022

PAX AUTOMATA d'Ariel Holzl

Ariel Holzl édite en 2017 son premier roman, LES SŒURS CARMINES. Depuis il a déjà publié une dizaine de titres dans les domaines de l'imaginaire. PAX AUTOMATA, le petit dernier, s'inscrit dans le Steampunk, l'uchronie et l'Historic Fantasy.

XIXème siècle, en France. L'Empereur Napoléon III s'apprête à inaugurer l'exposition universelle de Paris. La science a beaucoup progressé et le monde fonctionne grâce à des automates qui s'acquittent de nombreuses tâches subalternes. La principale loi de la Pax Automata interdit cependant à ces robots de posséder des traits humains. Pendant ce temps, Philémon, élève de la prestigieuse école de Saint-Cyr, se voit choisi pour piloter un nouvel aéronef révolutionnaire, le Zéphir. À la suite d'un sabotage, l'engin s'écrase et Philémon découvre un enfant automate qui pourrait bien être une nouvelle arme destinée à abattre l'Empire. Allié à Zélie, une romanicielle, Philémon mène l'enquête.

Roman d'aventures "jeunesse" très dépaysant, PAX AUTOMATA s'appuie sur un monde steampunk uchronique original qui part de la réalité historique pour lancer des pistes divergentes intéressantes. Ainsi Ada Lovelace, mathématicienne authentique considérée comme la pionnière de la programmation informatique a supplanté la reine Victoria et règne sur une Grande-Bretagne automatisée. De son côté Napoléon III a triomphé à Sedan et domine la France. L'auteur joue donc avec l'Histoire à la manière d'un feuilletonniste et entraine le lecteur dans une suite d'aventures enlevées et plaisantes, ponctuées de rencontres diverses. Le héros, flanqué d'une romanicielle, de son meilleur ami et de sa rivale, la meilleure élève de l'école, va ainsi mettre à jour une vaste conspiration aux ramifications politiques complexes.

L'auteur avance à rythme élevé, parfois même trop: l'intrigue ne prend guère le temps de se poser mais multiplie les péripéties pour maintenir l'attention du lecteur. Du coup ce dernier n'a pas le temps de s'imprégner de toutes les trouvailles bienvenues, notamment une belle inventivité dans les termes argotiques et autres néologismes. Vu la richesse de l'univers il serait cependant dommage d'en rester là, espérons que l'auteur y reviendra pour un nouveau récit. La fin, d'ailleurs, laisse la porte ouverte à une séquelle bien que ce roman se suffise à lui-même. Les nombreuses illustrations et les touches d'humour ajoutent un côté attrayant à ce roman fort bien présenté qui, en plus d'être réussi, s'avère un bel objet.

Bref, si le déroulé reste un poil convenu et que le principal personnage manque de charisme ou de fantaisie pour totalement emporter l'adhésion, le riche décor, la langue inventive et les personnages secondaires bien typés font de PAX AUTOMATA un divertissement de qualité à déguster sans tarder.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Steampunk, #Uchronie, #Fantasy, #Historique, #Jeunesse

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Publié le 25 Septembre 2022

VERS LES ETOILES de Mary Robinette Kowal

Avec son triplet magique (Hugo, Nebula, Locus), VERS LES ETOILES titille l’amateur de SF. Le résultat se montre t’il à la hauteur des attentes ? Globalement… oui mais avec plusieurs réserves. Nous sommes en présence d’une uchronie proche de la série « For all manking » : la course à l’espace doit être accélérée. Si, dans la série précitée, il s’agit d’une simple rivalité entre les USA et les Russes, ici la motivation s’avère plus sérieuse : la survie de l’Humanité. Mais dans les deux cas, le récit se braque sur les femmes et montre leur contribution à la conquête spatiale, notamment via les « calculettes », déjà évoquées par le film « Les figures de l’ombre ».

En 1952, une météorite détruit Washington et dévaste une large portion des Etats-Unis. Des millions de morts, encore davantage de réfugiés. Elma York, génie des mathématiques juive, et son mari Nathaniel échappent à la mort et s’installent dans une base militaire. En étudiant le phénomène, ils se rendent compte que l’Humanité est condamnée à disparaitre : une élévation sans précédent des températures va envoyer les Hommes aux côtés des dinosaures en tant qu’espèce éteinte. Pour la Terre, il n’y a plus rien à faire si ce n’est limité les dégâts du réchauffement climatique pour gagner quelques années. La seule solution réside donc dans la course à l’espace : recruter et former des astronautes pour coloniser la galaxie. Bien sûr le projet nécessite des femmes. En dépit des réticences des autorités, Elma est décidée à participer ! Malgré son anxiété maladive dès qu’elle doit parler en public elle va élever la voix afin de devenir la première Lady Astronaute.

L’uchronie débute après la seconde guerre mondiale : Dewey est élu président à la place de Truman en 1948. Mais l’événement qui chamboule radicalement l’Histoire se produit quatre ans plus tard : la chute d’une météorite raye de la carte une large part des Etats-Unis. Dès lors, la course à l’espace s’accélère avec pour premier objectif d’installer, pour commencer, une base lunaire. Pas pour la gloire mais parce qu’il s’agit de l’étape nécessaire pour permettre à l’humanité d’essaimer dans le système solaire. Voire plus loin. Vers les étoiles.

Roman intéressant par sa reconstitution historique « alternée », VERS LES ETOILES souffre cependant de pas mal de longueurs. Les « problèmes personnels » de l’héroïne occupent une (trop ?) large place et mettent souvent au second plan la conquête spatiale proprement dite. L’opposé du très technique (et un peu ennuyeux) VOYAGE de Stephen Baxter. Cela dit, ici aussi on s’ennuie parfois. La seconde moitié du roman souffre d’un gros ventre mou…L’aspect post (et pré !) apocalypse semble oublié, les conséquences de la chute du météorite peu évoquées, si ce n’est par quelques brèves scènes (émeutes d’affamés) et de courts textes, en forme d’articles de journaux, introduisant les différents chapitres. Beaucoup de pages se consacrent aux problèmes d’Elma, de son agoraphobie / anxiété, des relations avec son époux (compréhensif), de sa fatigue, etc. Le tout est également très manichéen : la jeune et jolie Juive super intelligente doit s’imposer face aux mains baladeuses et à l’opposition systématique de l’inévitable homme blanc d’âge mûr fier de sa supériorité machiste. Ce centrisme sur le personnage d’Elma pose d’autres problèmes : que se passe t’il dans le reste du monde ? La catastrophe a forcément eu des conséquences dramatiques pour toute la planète mais l’auteur se cantonne presque uniquement aux USA. On apprend simplement que d’autres pays tentent également de conquérir les étoiles et, shocking !, que la France ne parvient plus à produire du bon vin. A part ça, rien.

Mary-Robinette Kowal court plusieurs lièvres à la fois. A l’aventure spatiale (façon « l’étoffe des héros ») s’ajoute de longues considérations notes sur la condition de la femme et des Noirs dans l’Amérique des années ’50. Nul doute que cela lui a permis de décrocher Hugo et compagnie. Cependant la science-fiction reste la portion congrue : si on se dirige vers les étoiles, on est loin d’y aller. Il faut attendre les derniers chapitres pour que le roman décolle réellement, au propre comme au figuré. Sur 560 pages, le tout patine et aurait facilement pu être allégé d’une centaine de pages pour lui donner davantage de rythme.

Pourtant, en dépit de tous ces défauts, VERS LES ETOILES reste un « bon bouquin » : si on bataille parfois en se disant qu’il faudrait accélérer cette course à l’espace, l’ampleur du récit possède suffisamment de « sense of wonder » pour soutenir l’intérêt quelque peu défaillant. Les 150 premières pages et les cinquante dernières sont suffisamment prenantes et réussies pour compenser les grosses faiblesses de la partie centrale. Du coup, on ressort de la lecture quelque peu déçu mais en se disant qu’on poursuivra éventuellement le voyage, VERS MARS ou SUR LA LUNE.

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Publié le 7 Septembre 2022

LADY ASTRONAUTE de Mary Robinette Kowal

Mary Robinette Kowal, né en 1969, signe une première tétralogie (« Jane Ellsworth ») avant d’obtenir la reconnaissance grâce à sa série consacrée à la « Lady Astronaute ». Pour l’instant, le cycle se compose de trois romans (dont VERS LES ETOILES lauréat des Hugo, Nebula et Locus) et de ce court recueil de cinq nouvelles. En 128 pages, l’auteur nous propose donc cinq récits (dont un ultra bref), à commencer par « Nous interrompons cette émission » qui relate la destruction de Washington par un astéroïde détourné de sa course par un mégalomane. La suite, « L’expérience Phobos », s’intéresse à une expédition sur les lunes de Mars. « Le Rouge des fusées » traite de la tentative de proposer un feu d’artifice sur la planète rouge avec les clins d’œil attendus (le dôme protecteur Bradbury) et une thématique moins science-fictionnelle qu’émouvante : un homme retrouve sa mère et se rend compte du temps qui passe.

Elma York, alias la « lady astronaute », boucle le recueil dans une nouvelle récompensée par le Hugo. Sexagénaire, Elma veille sur son époux en train de mourir d’une longue maladie. De quoi la décourager d’accepter de partir, une dernière fois, vers les étoiles. L’intrigue science-fictionnelle, basée sur une conquête de l’espace uchronique, constitue une simple trame de fond pour un récit humaniste sur la fin de la vie et le renoncement à ses rêves. Encore une fois, le temps qui s’écoule, le renoncement et la vieillesse sont le cœur de l’œuvre mais l’emballage SF n’en est pas moins soignée.

Un recueil de nouvelles (vaguement liées entre elles par l’univers et les thèmes abordés, en particulier l’écoulement du temps et les difficultés d’y faire face) intéressante mais dont on retiendra surtout l’excellente histoire qui lui donne son titre, le reste étant plus dispensable sans être désagréable. Une bonne introduction à l’univers de la « lady astronaute ».  

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Publié le 5 Juillet 2022

LE VILLAGE DU BOUT DU MONDE (LOUIS LE GALOUP TOME 1) de Jean-Luc Marcastel

Premier volet de la saga du « gars loup » (ou galoup, ou garou), LE VILLAGE AU BOUT DU MONDE nous conduit dans la région d’Aurillac pour une uchronie fantastique. Une brèche est apparue au royaume de France : elle change les hommes et les bêtes, les transformant en Malbestes. A Mandaille, petit village isolé, vivent deux frères, Louis et Séverin, qui vont se confronter à la bête monstrueuse, découvrir la vérité sur leurs origines, rencontrer la sorcière la Roussote, etc.

Ecrit dans une langue très vivante, qui use des métaphores et des redondances volontaires, dans une sorte d’ancien français qui joue sur la sonorité des mots, le récit s’apparente à un conte qu’un troubadour aurait pu déclamer au coin du feu. L’intrigue, elle, reprend la formule de l’apprentissage chère à la Fantasy : découverte par le héros de sa marginalité et de ses véritables origines, obligation de quitter son havre de paix pour partir à l’aventure, etc. C’est classique, quelque peu linéaire parfois, mais réussi et fort agréable à lire.

En prenant son temps, Marcastel pose le décor de sa saga, à mi-chemin du roman historique (uchronique), du fantastique et de la Fantasy, le tout à destination d’un large public. Attention toutefois, si le roman se veut « jeunesse », le vocabulaire est soutenu et la langue riche. C’est travaillé, avec ce mélange d’ancien français (plus ou moins authentique), de patois, de termes inventés…tout cela est immersif et bien pensé, quelque peu déstabilisant au début mais rapidement prenant et convaincant. Le lecteur entre ainsi dans l’histoire et, en quelque sorte, « écoute » cette légende.

On retrouve aussi dans ce VILLAGE DU BOUT DU MONDE un côté régionaliste car l’auteur veut nous faire découvrir sa région (ce que les notes en fin d’ouvrage nous permettent d’ailleurs) à travers ses spécialités culinaires, etc. Cela change agréablement des Fantasy invariablement situées dans de grandes villes : nous sommes du côté des petits nobliaux et des curés, pas des rois et des évêques.

Bref, un premier tome réjouissant qui donne envie de poursuivre les aventures de ce sympathique Galoup.

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Publié le 3 Juin 2022

SUPERMAN: RED SON

Publié dans la gamme « elsewhere », donc hors continuité, cette aventure propose une cauchemardesque dystopie uchronique (sauf pour les électeurs décérébrés de la Rance Insoumise). Jugez plutôt : Superman n’atterrit pas au pays de la liberté mais bien en enfer, autrement dit dans un kolkhoze de l’autre côté du rideau de fer. Là ses parents adoptifs lui inculquent les « valeurs » abjectes du communisme et Super Coco devient le fervent zélote de la puante idéologie de Stalline.

Bien des années plus tard, Superman, aussi sûr de son bon droit qu’un Jean-Cul Mélanchon en campagne, devient le serviteur du peuple et surtout de son petit Père. Car notre arme de propagande extra-terrestre se transforme en bras droit tout-puissant du camarade Stalline. A la mort de celui-ci, notre Super Rouge prend carrément sa place et devient chef de l’URSS puis, avec l’aide de la convertie Wonder Woman, de pratiquement tous les pays du monde. Seuls les fiers Etats-Unis résistent encore, cernés de toute part par la peste rouge. La dernière terre de liberté dans un monde pourri par le socialisme triomphant.

Car imaginez si vous le pouvez l’horreur d’un monde où le Soviet Suprême est un extraterrestre quasiment immortel au cerveau empoisonné par le communisme. Ce  n’est plus un reich de mille ans c’est un gauchisme éternel, Fabien Roussel en serait tout émoustillé s’il lisait des comics.

Même le chef du KGB trouve qu’il y a quelque chose de pourri au royaume de Russie. Seul adversaire sur son terrain : un gamin dont les parents ont été abattus par la police soviétique et qui, vingt ans plus tard, combat dans l’ombre sous l’identité du Batman. Pendant ce temps, aux USA, le Daily Planet met la clé sous la porte (les gens ne lisent sans doute plus que l’Huma). Lois, elle, a épousé l’homme le plus intelligent du monde, Lex Luthor, accessoirement candidat à la succession de JFK et probablement le seul type au monde a pouvoir lutter efficacement contre Super Coco.  Luthor multiplie les inventions et créations (Bizarro and co) pour purger le monde du mal et trouve même le valeureux Hal Jordan pour lui confier un anneau étrange afin de l’aider dans sa croisade.

Un grand récit épique, qui montre à quel point l’univers DC a échappé au pire et comment, le cerveau bousillé par une idéologie infecte, Superman passe à l’Ennemi. Heureusement, Luthor finira par triompher dans un happy-end tempéré par un excellent retournement de situation à base de paradoxe temporel. Une bonne histoire, quelques notes d’humour, des clins d’œil et références à l’univers DC bien intégrés et des dessins de qualité pour une très belle réussite.

Un excellent comics et une belle dénonciation d’un régime politique immonde, à conseiller à tous, même aux électeurs de Poutou qui, peut-être ouvrirons les yeux sur leur conception du monde.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #DC, #DC Comics, #Comic Book, #Superhéros, #Superman, #Uchronie

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Publié le 4 Février 2022

LE MYSTERE DU TRAMWAY HANTE de P. Djeli Clark

A l’occasion de L’ETRANGE AFFAIRE DU DJINN DU CAIRE nous avions lié connaissance avec les agents du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Toujours en Egypte et plus précisément au Caire nous retrouvons, en 1912, ces mêmes agents qui tentent de résoudre une nouvelle affaire. Ainsi Hamed Nasr et Onsi Youssef ont, cette fois, pour tâche de résoudre le problème posé par la hantise d’un tramway. Ils devront recourir à différents spécialistes pour conjurer l’entité présente dans le wagon 15 tandis que, dans les rues du Caire, gronde la contestation des suffragettes qui réclament le droit de vote.

P. Djeli Clark approfondit ici l’univers d’urban fantasy uchronique mâtiné de steampunk (oui, tout ça !) débuté dans L’ETRANGE AFFAIRE DU DJINN DU CAIRE : l’Egypte est devenue une grande puissance depuis qu’un sorcier a ouvert un portail. Mais, au passage, il a libéré dans notre monde différentes créatures magiques, certaines bienveillantes et d’autres non. Des enquêteurs du surnaturel sont chargés de combattre les entités maléfiques. Le duo de « détectives de l’étrange », joliment typé, associe classiquement un individu chevronné à un débutant tandis que l’intrigue combine, elle, policier et fantastique. L’utilisation des magies et mythologies orientales change agréablement de la sorcellerie occidentale mais le cadre reste traditionnel : l’irruption du surnaturel opère un profond changement sociétal. Ici, globalement, l’évolution est positive puisque l’Egypte connait un nouvel âge d’or de libertés. Seuls certains désagréments, consécutifs à la présence des créatures magiques, demande l’intervention de spécialistes. L’auteur observe également les changements dans les mentalités et l’importance grandissante des femmes dans la destinée du pays. Bien sûr cela perturbe certains individus, notamment l’un des deux détectives qui éprouve quelques difficultés à s’adapter au « nouveau monde ».

En peu de pages, LE MYSTERE DU TRAMWAY HANTE fonctionne de manière très efficace : aventure, fantastique, considération sociale, touche d’humour, intrigue policière,…de la bel ouvrage !

Après trois novellas réussies et bardées de prix, espérons que P. Djeli Clark confirme avec son passage au roman, toujours dans le même univers, via MAITRE DES DJINNS.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Fantasy, #Roman court (novella), #Uchronie

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Publié le 23 Décembre 2021

SUR L'EPAULE DU GRAND DRAGON d'Alain Paris

Alan Paris poursuit sa vaste saga de la Terre Creuse avec ce troisième tome toujours aussi réussi. Nous sommes en l’an 802 du Reich, dans l’attente du retour du Premier (autrement dit Adolf) en messie au terme des milles ans prédits. L’intrigue se complexifie encore : Arno Von Hagen, toujours décidé à se venger, est devenu Seigneur des Runes. Une nouvelle mission lui est confiée : récupérer auprès des agents du Vril des cartes du monde. Il part donc à Nuremberg, poursuivi par la police secrète de la Sainte-Vehme. En effets, cette organisation refuse la thèse officielle concernant la mort de Nepomuk (dans le tome précédent) et interroge, à sa manière brutale, quelques individus. Entre également dans la danse le Stern, groupe résistant secret qui combat le Reich depuis des siècles.

Alan Paris poursuit sa vaste fresque dans une Europe uchronique entre médiéval fantastique et steampunk. La Sainte-Vehme, un mouvement extrémiste tient le monde dans sa main de fer, à la manière de l’Inquisition. La Fraternité des Runes se complait dans la guerre, le Vril se compose de pseudo-scientifiques partagés entre sciences exactes et superstitions. Le roman va à l’essentiel en dépit des manigances de nombreuses forces antagonistes. La priorité reste le divertissement et l’auteur ne se perd pas (heureusement !) dans d’interminables description de son « système ». Au lecteur de combler les manques et de reconstituer l’évolution de cet univers ayant dévié de sa route voici huit siècles. Le romancier évoque brièvement la situation du reste du monde, partagé entre divers « empires » mais l’essentiel demeure les rebondissements, l’action, le souffle de la grande aventure avec un sens de l’épique indéniable. Nous sommes à la croisée de bien des genres « populaires » : aventure donc mais aussi cape et épées, fantasy, uchronie, steampunk, science-fiction,…agrémenté d’une bonne dose de roman feuilleton avec toutes les conventions indispensables (cliffhanger, protagonistes qui entrent et sortent de l’histoire pour croiser la route du héros, retournements de situation, poursuites, duels, bagarres, mystère,…). Le vaste tableau d’Alan Paris prend encore davantage d’ampleur et ne laisse jamais au lecteur le temps de souffler. Un bouquin précis, haletant, qui avance rapidement et ne cherche qu’une chose : offrir trois heures d’évasion sans le moindre ennui. Ce que devrait toujours être la littérature. En des temps encombrés de cycles « fantasy » interminables plus soucieux de décrire un château sur un chapitre (ou de préciser la couleur de la culotte de l’héroïne), la concision d’Alan Paris fait un bien fou. Et une fois le tome 3 terminé on n’a qu’une envie : entamer le suivant !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Fantasy, #science-fiction, #Uchronie, #steampunk

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