policier

Publié le 5 Juin 2017

TUER MA SOLITUDE de Dorothy B. Hughes

La collection « Un mystère » fut longtemps considérée comme le parent pauvre de la Série Noire. C’est, entre autre, ce que nous rappelle la préface de « Polar années 50 », gros volume Omnibus comprenant 8 romans dont TUER MA SOLITUDE, datant de 1947. Si le principal protagoniste est un tueur en série, nous sommes loin de la plupart des titres actuels sur le sujet : ici, le héros, Dick Steele, est un pauvre type fraichement revenu à la vie civile (l’action se situe deux ans après la fin de la Seconde Guerre Mondiale) et installé en Californie dans un appartement qu’il sous-loue à son pote Mel, parti vivre à Rio. Oisif, Steele affirme écrire un roman policier et se renseigne auprès d’un de ses amis, Brub, un inspecteur à la criminelle, sur les méthodes d’enquête. Il se montre particulièrement intéressé par un serial killer surnommé Jack l’Etrangleur qui sévit dans la région et tue, chaque mois, une jeune femme. Bien vite, le lecteur comprend que Dick Steele (un nom qui sonne comme celui d’un espion de série B…ou d’un acteur porno) est, en réalité, cet Etrangleur que traque Brub. Bien qu’il ne puisse oublier une femme qu’il a jadis connu en Angleterre, Brucie, Dick noue cependant une relation avec sa voisine, une belle rousse prénommée Linda. Mais la situation se détériore…

L’identité de l’assassin étant rapidement dévoilée, TUER MA SOLITUDE ne joue pas la carte du whodunit mais bien du suspense et du thriller psychologique. Le roman se place ainsi résolument aux côtés de son tueur en série, pas spécialement intelligent ou machiavélique mais prudent et méticuleux. Il compte d’ailleurs sur la banalité de son apparence pour passer au travers des mailles de la police et, effectivement, les témoins ne peuvent identifier de type tellement ordinaire que nul ne le remarque. Futé, Steele prend soin de fréquenter un inspecteur de police afin d’être tenu au courant des derniers évènements, des développements de l’enquête et des preuves susceptibles de l’incriminer (la poussière de sa voiture ou les traces de pneu par exemple).

Voici un récit habile, bien mené et rythmé (le roman, très court, ne traine guère en route malgré les passages plus introspectifs plongeant dans la psyché du criminel) dont Nicolas Ray tira un excellent film, LE VIOLENT, en donnant à Bogart le rôle de  Steele.  Toutefois, les différences sont nombreuses entre le roman et son adaptation (l’une, en particulier, s’avère fondamentale) et même ceux qui connaissent la version filmée seront intéressés par ce suspense adroit et efficace.

La collection « Un mystère » fut longtemps considérée comme le parent pauvre de la Série Noire. C’est, entre autre, ce que nous rappelle la préface de « Polar années 50 », gros volume Omnibus comprenant 8 romans dont TUER MA SOLITUDE, datant de 1947. Si le principal protagoniste est un tueur en série, nous sommes loin de la plupart des titres actuels sur le sujet : ici, le héros, Dick Steele, est un pauvre type fraichement revenu à la vie civile (l’action se situe deux ans après la fin de la Seconde Guerre Mondiale) et installé en Californie dans un appartement qu’il sous-loue à son pote Mel, parti vivre à Rio. Oisif, Steele affirme écrire un roman policier et se renseigne auprès d’un de ses amis, Brub, un inspecteur à la criminelle, sur les méthodes d’enquête. Il se montre particulièrement intéressé par un serial killer surnommé Jack l’Etrangleur qui sévit dans la région et tue, chaque mois, une jeune femme. Bien vite, le lecteur comprend que Dick Steele (un nom qui sonne comme celui d’un espion de série B…ou d’un acteur porno) est, en réalité, cet Etrangleur que traque Brub. Bien qu’il ne puisse oublier une femme qu’il a jadis connu en Angleterre, Brucie, Dick noue cependant une relation avec sa voisine, une belle rousse prénommée Linda. Mais la situation se détériore…

TUER MA SOLITUDE de Dorothy B. Hughes

L’identité de l’assassin étant rapidement dévoilée, TUER MA SOLITUDE ne joue pas la carte du whodunit mais bien du suspense et du thriller psychologique. Le roman se place ainsi résolument aux côtés de son tueur en série, pas spécialement intelligent ou machiavélique mais prudent et méticuleux. Il compte d’ailleurs sur la banalité de son apparence pour passer au travers des mailles de la police et, effectivement, les témoins ne peuvent identifier de type tellement ordinaire que nul ne le remarque. Futé, Steele prend soin de fréquenter un inspecteur de police afin d’être tenu au courant des derniers évènements, des développements de l’enquête et des preuves susceptibles de l’incriminer (la poussière de sa voiture ou les traces de pneu par exemple).

Voici un récit habile, bien mené et rythmé (le roman, très court, ne traine guère en route malgré les passages plus introspectifs plongeant dans la psyché du criminel) dont Nicolas Ray tira un excellent film, LE VIOLENT, en donnant à Bogart le rôle de  Steele.  Toutefois, les différences sont nombreuses entre le roman et son adaptation (l’une, en particulier, s’avère fondamentale) et même ceux qui connaissent la version filmée seront intéressés par ce suspense adroit et efficace.

TUER MA SOLITUDE de Dorothy B. Hughes

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Thriller, #Polar, #Polar Années 50

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Publié le 26 Mai 2017

QUANTUM de Peter Hamilton

L’Anglais Peter Hamilton (né en 1960) s’est fait le spécialiste des space-opéras gigantesques et des récits s’étendant sur des centaines, voire des milliers de pages, comme en témoigne son magnum opus, L’AUBE DE LA NUIT, œuvre fleuve (de plus de six mille pages) divisée en six tomes bien épais et qui serait, de fait, le plus long roman de SF jamais écrit. Hamilton aime les séries et celle de Greg Mandell en constitue une autre, trilogie cyberpunk mêlant science-fiction réaliste, politique fiction et énigme policière. Le premier tome, MINDSTAR, pose les bases d’un univers encore développé dans ce second opus, QUANTUM, situé dans un XXIème siècle dévasté par le réchauffement climatique.

Ancien militaire ayant combattu les djihadistes durant la guerre de Turquie, Greg Mandel travaillait pour la Mindstar, une branche des forces armées britanniques dont les agents disposent de pouvoirs psychiques (empathie, télépathie, préscience, intuition, etc.) augmentés par divers implants neuronaux. L’Angleterre se reconstruit après la période la plus sombre de son histoire : en effet, durant dix ans, le président Armstrong a imposé une infâme dictature socialiste sous l’égide du Parti Socialiste Populaire. Heureusement, aujourd’hui, le parti est tombé suite à un attentat ayant couté la vie à Armstrong. La chute des gauchistes a permis la seconde restauration et l’accession au pouvoir d’un gouvernement capitaliste néo conservateur bien plus apprécié du peuple qui chasse et extermine les derniers sympathisants socialistes. Directrice de la compagnie Event Horizon, la milliardaire Julia Evans fait appel aux services de Mandel pour élucider la mort d’un spécialiste de la physique quantique, Edward Kitchener, vénéré par ses élèves et disciples tel un véritable gourou. Mandel enquête, découvre l’attraction physique exercée par le défunt sur ses étudiantes mais également l’impossibilité apparente de ce crime : personne n’a pu venir de l’extérieur mais tous les suspects semblent innocents, ce que confirment les dons psychiques de Mandel.

QUANTUM est un roman touffu qui brasse de nombreux thèmes (physique quantique, voyages dans le temps, voyages interstellaires, problématique du réchauffement climatique, pouvoirs psy amplifiés par des implants,…) typiques du cyberpunk et qui, associés au contexte politique développé avec une réelle originalité (la suprématie conservatrice et libérale, associé à la toute-puissance des mégacorporations, comme solution après dix ans de tyrannie socialiste), offrent un background fouillé et intéressant à une énigme policière assez classique dans l’esprit des romans de l’âge d’or. Nous ne sommes pas loin des « cosy murder » et des « country house mystery » avec cette investigation menée par un enquêteur perspicace devant élucider le meurtre impossible d’un savant retranché dans un lieu isolé. Pour coller à son époque, l’auteur recourt néanmoins à la technologie et ajoute à son énigme une bonne rasade d’action, en particuliers durant les cent dernières pages, créant ainsi un hybride, ma foi fort efficace, entre le policier d’énigme, le polar hard boiled et la science-fiction politisée.

Certes, on peut regretter quelques longueurs (le bouquin fait quand même 540 pages, à peine une nouvelle selon les standards de son auteur mais un pavé pour la plupart des écrivains de SF), des digressions parfois un brin ennuyeuses ou exagérément étirées (était-il nécessaire de consacrer autant de pages à l’opposition entre la milliardaire Julia Evans et la présentatrice télé qui se moque de ses tenues ?) mais, dans l’ensemble, QUANTUM reste un divertissement bien mené, prenant et réussi dans lequel on ne s’ennuie pas.

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Publié le 24 Mai 2017

DETECTIVE CONAN TOME 11 de Gosho Aoyama

Gosho Aoyama crée en 1994 le personnage du détective lycéen Shinichi Kudo qui, âgé de 17 ans, aide la police. Alors qu’il visite un parc d’attraction avec sa petite amie, Ran Mouri, il est repéré par de mystérieux « hommes en noir » membres d’une organisation criminelle et forcé d’absorber un poison expérimental. Au lieu de le tuer, le produit le fait régresser physiquement et lui donne l’apparence d’un petit garçon de sept ans. Dès lors, Shinichi adopte le pseudonyme de Conan Edogawa (double hommage à Conan Doyle et Edogawa Rampo) et parvient à être placé sous la garde de Kogoro Mouri, le père détective privé de Ran qu’il va aider secrètement dans ses enquêtes.

Après avoir bouclé l’enquête entamée dans le tome précédent, ce onzième volume se consacre à trois enquêtes indépendantes de haute volée basées sur d’habiles stratagèmes permettant de perpétrer des crimes impossibles.

Dans le premier récit, Kogoro, devenu un détective très populaire, participe à un talk-show du présentateur Matsuo. Or, le producteur de l’émission, Suwa, souhaite évincer Matsuo au profit d’une nouvelle présentatrice plus avenante, ce qui évidemment n’est pas du goût de Matsuo. Durant l’émission, Suwa est assassiné et, bien sûr, les soupçons de Conan se porte immédiatement sur Matsuo, lequel fanfaronne et promet d’arrêter le coupable. En tout cas, précise t’il, ça ne peut être lui puisqu’il lui était matériellement impossible de supprimer son ami dans le peu de temps dont il disposait. Mais, pour Conan, les meurtres impossibles ne le sont jamais longtemps et le détective miniature comprendra l’astuce très ingénieuse employée par le criminel.

Par la suite, Ran se rend à un rendez-vous, et Conan, jaloux, la suit. Or, alors qu’il attend tranquillement dans un café, le « petit garçon » découvre qu’une jeune fille vient d’être assassinée dans les toilettes : son corps bloque la porte et le meurtrier n’a pu s’enfuir que par une fenêtre ouverte. Mais Conan comprend, une fois encore, les limites de ce raisonnement trop simple : pour lui l’assassin est un des clients du café. Mais comment a t’il put commettre ce véritable crime en chambre close…dans des toilettes à la fenêtre ouverte ?

Enfin, suite à une panne de voiture, Conan, Ran et Kogoro échoue dans un monastère à la sinistre réputation. Accueilli par le bonze, nos trois amis apprennent qu’un jeune moine s’est pendu, deux ans auparavant, dans une très haute pièce, dite de l’ascète, destinée aux punitions. Depuis, on murmure que le temple est hanté par le tengu (« démon ») de la brume. Durant la nuit, le bonze est à son tour victime de la malédiction et découvert pendu de la même manière. Pour le commissaire Maigret il ne peut s’agir que d’un suicide mais Conan soupçonne un meurtre habilement orchestré.

Trois enquêtes, trois énigmes, trois belles réussites qui brodent avec les conventions du « crime impossible » et du « meurtre en chambre close ». Comme souvent, on peut chipoter sur la plausibilité des moyens employés par les criminels (en particulier pour l’affaire du bonze pendu) mais on salue l’imagination de Gosho Aoyama pour élaborer des stratagèmes aussi complexes n’ayant rien à envier aux grands spécialistes d’antan comme John Dickson Carr. Les déductions de Conan sont claires, le rappel des protagonistes impliqués, sous forme de case donnant leur identité, âge et fonction, rend la progression de l’enquête aisée à suivre et les indices placés à bon escient orientent le lecteur dans la bonne direction…quoique la résolution complète du mystère se révèle, à chaque fois, surprenante.

De plus, l’humour est toujours de la partie et Kogoro se montre de plus en plus délirant dans son numéro de détective infaillible et satisfait quoiqu’incapable de répondre à la moindre question sur les énigmes qu’il est censé avoir débroussaillées. En réalité tout le travail est effectué par Conan, obligé d’endormir le stupide limier et d’expliquer à sa place, en modifiant sa voix, le modus operandi des criminels.

En résumé, trois enquêtes (d’excellent niveau) agrémentées de nouvelles pistes permettant d’enrichir l’univers général de la saga, notamment grâce à l’arrivée, dans la deuxième histoire, d’un nouveau personnage dont l’identité surprendra positivement les admirateurs du détective lycéen.

Peu importe que l’on aime ou pas le manga : si on apprécie les enquêtes policières tordues, les machinations machiavéliques et les crimes impossibles, la lecture de DETECTIVE CONAN s’impose comme un incontournable et ce tome constitue une excellente entrée en matière pour aborder cette série fleuve.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Impossible Crime, #Detective Conan, #Manga

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Publié le 22 Mai 2017

LORD PETER ET LE BELLONA CLUB de Dorothy L. Sayers

Lord Peter Wimsey, aristocrate oisif et détective à ses heures perdues, fut créé par Dorothy Sayers en 1923 dans LORD PETER ET L’INCONNU. Très vite, le personnage rencontre le succès et Sayers en fait son héros récurrent puisqu’il intervient dans douze romans et de nombreuses nouvelles.

Cette quatrième aventure démontre l’originalité de Sayers et part d’une situation problématique inédite : Lady Dormer, sentant venir la mort, souhaite se réconcilier avec son frère, le général Fentiman. Elle le rencontre et lui explique que, selon son testament, si elle décède avant lui, sa fortune sera répartie entre Robert et George Fentiman, ses petits-fils. Dans le cas contraire, à savoir si le général devait mourir avant elle, son héritage reviendrait par contre à sa dame de compagnie, Ann Doland. Or, la brave Lady décède le lendemain à 10h37 tandis que le vieux militaire est, de son côté, découvert mort dans un fauteuil de son club, le Bellona. Cependant déterminer l’heure exacte de ce décès s’avère délicat, ce qui complique la question de l’héritage : doit-il revenir aux frères Fentiman ou à Ann Doland ?  A Lord Peter Wimsey de tenter d’établir qui a précédé qui dans la mort avec l’aide du médecin, Penberthy. Or, ce-dernier se montre prudent : si, pour lui, le décès du gradé est d’origine naturelle, le feu de cheminée empêche d’estimer avec précision l’heure de survenue de la rigidité cadavérique. La situation va par la suite s’envenimer entre les Fentiman et Doland, d’autant qu’une autopsie prouve qu’en réalité le général a été empoisonné à la digitaline. De plus le docteur Penberthy entretenait une relation amoureuse avec Ann Doland.

Entre roman d’énigme et tableau d’une époque révolue (celle de l’entre-deux Guerres), LORD PETER ET LE BELLONA CLUB brosse avec humour et une certaine nostalgie l’évolution de la société et les changements induits par la Première Guerre Mondiale dont le traumatisme pèse sur les personnages. Dès lors, il n’est donc guère étonnant de débuter l’intrigue le jour de l’armistice, le 11 novembre, ni de prendre pour victime un général nonagénaire, dernier témoin des temps anciens. Le contexte sociétal apparait donc de manière évidente mais reste toujours en filigrane et l’énigme policière demeure le véritable moteur de ce court récit (environ 180 pages), ponctué de remarques sur l’évolution des mœurs, les clubs de gentilhomme et les changements à l’œuvre dans le monde, en particulier en ce qui concerne les rapports entre les hommes et les femmes.

L’identité de l’assassin se montre par contre plus évidente tant le faisceau d’indices et le nombre restreint de suspects indique assez rapidement au lecteur qui est le coupable le plus probable. Mais cela ne gâche en rien le plaisir pris à lire ce classique du whodunit écrit d’une plume alerte fort appréciable tant les rebondissements nombreux et les dialogues efficaces rendent l’ensemble aussi rythmé que divertissant. Recommandé !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Golden Age, #Dorothy L. Sayers

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Publié le 16 Mai 2017

EN SCENE POUR LA MORT de Helene McCloy

Helen McCloy (1904 – 1994) publie son premier roman en 1938, DANCE OF DEATH dans lequel apparait déjà le psychiatre Basil Willing qui deviendra son enquêteur récurent, héros d’une quinzaine de whodunit. On citera en particulier LE MIROIR OBSCUR, classique du crime impossible fréquemment cité parmi les meilleurs romans de ce style. Par la suite, McCloy délaissera quelque peu l’énigme pure pour se rapprocher du thriller psychologique.

EN SCENE POUR LA MORT se déroule dans un théâtre. Une troupe y répète le mélodrame « Fedora » dans lequel un personnage secondaire, Vladimir, meurt sur scène. Si, durant les répétitions, un mannequin est utilisé, un véritable comédien est engagé pour la première de la pièce. Au cours de celle-ci, Vladimir, qui git inconscient et dans le coma, est approché par trois autres acteurs : Leonard, Rod et la vedette, Wanda. A la fin de la représentation, Vladimir ne se révèle pas : il a été assassiné devant des dizaines de témoins. Leonard, Rod et Wanda ont tous eu l’opportunité de commettre le crime et la police ne possède aucun mobile et pas la moindre preuve permettant d’incriminer un des trois suspects. Le psychiatre Basil Willing intervient pour résoudre le mystère.

Sur cette base classique mais d’une redoutable efficacité, McCloy brode une énigme prenante dans laquelle on retrouve quelques mystères secondaires intéressants. Le roman débute par exemple par un étrange cambriolage chez un rémouleur : nul objet ne semble avoir été dérobé mais, par contre, le canari en cage a été libéré. La science déductive et les connaissances psychologiques de Willing permettront de résoudre ce problème et pour déterminer toute l’importance d’un traité médical et d’un synopsis abandonné (sur lequel une réplique est soulignée). Une mouche fournira même la preuve de culpabilité espérée. Willing usera également, à différentes reprises, d’une perspicacité proche de Sherlock Holmes pour énoncer quelques vérités évidentes…du moins après que le psychiatre ait expliqué le cheminement de sa pensée.

Comme dans de nombreux romans de ce style, l’énigme s’avère ingénieuse mais la solution proposée, qui pointe logiquement vers le coupable n’était sans doute pas la seule possible. Les whodunit sont souvent construits comme des puzzles où plusieurs résolutions fonctionnent (comme en témoigne l’incroyable CLUB DES DETECTIVES d’Anthony Berkeley, véritable tour de force qui propose pas moins de huit solutions plausibles à l’énigme). Il s’agit toutefois d’un défaut mineur (en est-ce véritablement un d’ailleurs ?) au sein d’un roman très plaisant, vivant et enlevé. Les dialogues sont réussis, le rythme alerte et les anecdotes sur le monde théâtrales instructives (un débutant déclame la dernière réplique de la pièce lors d’une répétition, ce qui provoque la colère des comédiens pour lesquels cela « porte malheur ») avec les rivalités entre acteurs, les uns cabotins, les autres en déclin, les autres espérant atteindre la gloire, sans oublier les seconds couteaux qui courent le cachet ou les types qui vivotent dans le milieu du spectacle en espérant qu’un jour un metteur en scène daigne s’intéresser à leurs écrits.

Une excellente surprise, immanquable pour les amateurs de whodunit rétro !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Golden Age

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Publié le 10 Mai 2017

LE MIROIR SE BRISA d'Agatha Christie

Quoiqu’il soit rarement cité parmi les incontournables de Christie, LE MIROIR SE BRISA démontre pourtant toute la science narrative de la romancière.

L’intrigue tourne autour de la célèbre actrice Marina Gregg venue tourner un nouveau film dans le petit village tranquille de St Mary Mead en compagnie de son époux, le réalisateur Jason Rudd. Lors d’une réception donnée dans leur nouvelle maison, Heather Baddock, jeune femme sans histoire, renverse son cocktail. Marina lui tend innocemment le sien mais, dès que Heather l’a bu, elle s’écroule, victime d’une overdose de tranquillisant. L’inspecteur Dermot Craddock de Scotland Yard arrive à St Mary Mead pour enquêter, aidé par Jane Marple. Très vite, tous deux acquièrent la conviction que la victime désignée était en réalité Marina, d’ailleurs cible de lettres anonymes très menaçantes.

Inspirée par la vie de l’actrice Gene Tierney, ce « country mystery » fonctionne comme une sorte de séquelle à UN CADAVRE DANS LA BIBLIOTHEQUE (datant de 1942) auquel il est fréquemment fait référence. Publié vingt ans plus tard (en 1962), LE MIROIR SE BRISA se montre nostalgique et analyse les changements connus dans un petit village anglais typique où, à présent, les gens ont arrêté de cultiver leur potager et préfèrent acheter leurs légumes au supermarché. Le village s’est étendu, un nouveau quartier résidentiel a été construit (le Quartier Neuf) pour la génération de l’après-Guerre et, horreur ! malheur !, certains hommes portent les cheveux longs.

Pour sa huitième enquête, Miss Marple apparait très âgée (on la décrit, de manière exagérée, comme « presque centenaire ») aussi effectue t’elle l’essentiel de l’enquête par les yeux d’autres personnages qui lui servent de témoins. Peu à peu, elle résout le mystère. La maitrise de Christie apparait d’ailleurs dans ces dernières pages : alors que certains de ses collègues s’étendent sur des dizaines de pages pour expliquer le « comment » et le « pourquoi », la romancière n’a besoin que d’une vingtaine de lignes pour démêler l’intrigue : un changement de perspective, un renversement de point de vue et, en prenant les faits par « le bon bout de la raison », tout semble limpide.

Une belle réussite qui résiste très bien à la relecture.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Golden Age, #Agatha Christie, #Miss Marple

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Publié le 3 Mai 2017

LE TROISIEME TROU (PERRY MASON) de Erle Stanley Gardner

Créé par Erle Stanley Gardner (1889 – 1970), le personnage de l’avocat enquêteur Perry Mason effectue ses débuts en 1933 avec PERRY MASON SUR LA CORDE RAIDE. Par la suite, sous le pseudonyme d’A.A. Fair, l’écrivain lance une nouvelle série, consacrée aux détectives Cool & Lam. Nouveau succès pour Gardner qui abandonne son métier d’avocat et écrit, chaque année, plusieurs romans policiers jusqu’à son décès. Au final, Perry Mason vivra 82 aventures et Cool & Lam résoudront 29 énigmes.

Dans ce court roman (180 pages dans l’édition originale), Kerry Dutton débarque dans les bureaux de Mason pour avouer un détournement de fonds. Très vite, il apparait que Dutton été animé des meilleures intentions : en effet, le père de l’insouciante Desere Ellis lui avait confié la gestion d’une importante somme d’argent. Or, Desere semble être tombée sous la coupe d’un jeune beatnik désireux d’utiliser la fortune de la demoiselle afin de lancer un nébuleux projet d’aide aux artistes. Amoureux de Desere, Kerry Dutton a voulu l’empêcher de dilapider cet argent et a procédé à différents placements, obtenant au final un joli bénéfice en son nom propre qu’il souhaite laisser à la jeune fille. Une affaire de meurtre, commis près du troisième trou d’un parcours de golf, complique la situation et Mason devra sauver de la mort un Dutton que tout accuse.

Datant des années ’60 (il s’agit d’une des dernières enquêtes de Mason), le bouquin a plutôt bien vieilli, décrivant un milieu de jeunes artistes oisifs voulant utiliser l’argent d’autrui pour leurs combines (« Desere fréquentait surtout des garçons aux cheveux longs et aux ongles sales, des idéalistes d'extrême gauche, qui n'hésitaient pas à piocher dans son argent tout en continuant à la tenir à l'écart. »). Le style de Gardner est, en version originale, parait-il exécrable et il faut, si cela est exact, saluer la traduction de Maurice-Bernard Endrèbe (lui-même romancier et créateur du personnage d’Elvire, la Vieille dame sans merci) qui, dénuée de circonvolution, n’en reste pas moins très efficace et va droit à l’essentiel : peu de description mais beaucoup de dialogues, un peu à la manière d’une pièce de théâtre et, d’ailleurs, les jeux de manches entre avocats ne sont-ils pas les meilleurs héritiers du théâtre classique avec l’unité de lieu (le prétoire), de temps (la durée – courte – du procès) et d’action (qui relève du pur whodunit) ?

Si l’enquête est réussie (quoique les premières pages, assez techniques, peuvent rebuter pour les non familiers des problèmes juridiques), les personnages sont, eux-aussi, intéressants : Perry Mason est aidé de sa secrétaire forcément énamourée (Della Street) et d’un détective qui enquête sur le terrain, Paul Drake. Face à lui, Mason doit compter avec Hamilton Burger (sacré patronyme !) bien décidé à incriminer le pauvre Dutton. Une fois de plus, la vérité sera dévoilée durant les dernières pages, menées à un rythme des plus soutenu et même si l’identité du coupable n’est pas franchement surprenante, la recette fonctionne impeccablement. Un plaisant whodunit, une énigme bien construite, un zeste de romance, une pincée d’humour,…cette première rencontre avec le plus célèbre des avocats s’avère très agréable et donne envie de découvrir d’autres enquêtes de cette longue série. Du divertissement pur (il ne fait pas en attendre de la grande littérature ou une quelconque recherche stylistique) qui se lit quasiment d’une traite.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Policier, #Whodunit, #Perry Mason

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Publié le 25 Avril 2017

VOUS PERDEZ LA TETE de Christianna Brand

Christianna Brand (1907 – 1988) débute sa carrière au début des années ’40 avec LA MORT EN TALONS HAUTS. Peu après, elle publie son deuxième roman dans lequel elle crée son enquêteur récurent, l’inspecteur de police Cockrill. Après cette première apparition dans ce classique whodunit (assorti d’un apparent crime impossible) datant de 1941 l’inspecteur reviendra dans six autres romans (dont cinq furent traduits en français) et plusieurs nouvelles. Par la suite, Christianna Brand se spécialisa dans la littérature jeunesse, concevant notamment le personnage de Nanny McPhee (campée par Emma Thompson dans les deux adaptations cinématographiques tournées en 2005 et 2010).

VOUS PERDEZ LA TETE se déroule durant la Seconde Guerre Mondiale alors que les Londoniens se sont réfugiés à la campagne pour échapper aux bombardements. A Pigeonsford Manor, par exemple, quelques personnes sont réunies, dont Grace Morland, une vieille fille tombée amoureuse du forcément séduisant quinquagénaire Stephen Pendock, dit Pen, lequel semble davantage attiré par la jeune nymphette Francesca, une fille « exquise et si jolie qu’on en était mal à l’aise ». Cette dernière exhibe son nouveau cadeau, un chapeau, qui attise la jalousie de Grace, laquelle déclare avec dédain, en référence à un précédent meurtre ayant ensanglanté la région, qu’elle n’aimerait pas mourir avec un tel couvre-chef sur la tête. Or, peu après, Grace est découverte décapitée…avec le chapeau en question sur sa tête tranchée. L’inspecteur Cockrill vient investiguer le crime et établit rapidement que le meurtrier appartient à la maison et n’a pu provenir de l’extérieur, ce qui limite à six le nombre de suspects. Par la suite, un nouveau meurtre survient : là encore la victime est retrouvée décapitée mais, cette fois, le crime semble impossible puisque aucune empreinte n’apparait sur la neige entourant le corps. 

Avec ce whodunit typique, Christianna Brand se lance dans le « country house mystery » si cher aux auteurs de l’Age d’Or du roman policier et il ne lui faudra que 185 pages pour résoudre l’énigme pourtant complexe proposée. En effet, en comptant un précédent meurtre commis un an avant les évènements relatés, la romancière donne à son inspecteur la lourde tâche de résoudre trois crimes. Mais Cokrill se montrera à la hauteur et l’assassin sera, logiquement et classiquement, dévoilé lors du dernier chapitre.

Si le roman ne se montre pas très original, le style est très agréable et l’écriture fluide, plaisante, sans les scories de certains auteurs du Golden Age. Brand propose des descriptions vivantes, des dialogues ciselés et confère un bon rythme à son récit empreint d’un certain humour noir et d’un côté macabre, voire grand-guignolesque, appréciable.

Le principal bémol réside dans la conclusion : contrairement à la tradition du whodunit, le plus suspect s’avère être le coupable. Si on peut saluer le réalisme d’une telle fin (à l’opposé des retournements de situations peu crédibles de nombreux romans d’énigme), le lecteur peut se sentir quelque peu floué. Plus embêtant, le mobile de l’assassin se base sur des données médicales erronées et pas vraiment convaincantes. Le processus, qui a été ultérieurement repris plusieurs fois dans la littérature policière, devait cependant être original au début des années ’40. Enfin, l’énigme de l’absence d’empreintes sur la neige se voit évacuée avec une désinvolture déstabilisante (après que plusieurs hypothèses plausibles aient été avancées) et n’a finalement aucune importance. Frustrant.

Malgré ces défauts, VOUS PERDEZ LA TÊTE constitue un bon début pour l’inspecteur Cockrill, personnage intéressant même si pas encore pleinement développé. Le roman se lit en tout cas avec plaisir et reste suffisamment moderne dans son écriture pour ne pas rebuter le lecteur. Le tout donne envie de poursuivre les aventures de Cockrill qui allait résoudre pas moins de trois « crimes impossibles » (dans LA MORT DE JEZABEL, SUBITEMENT DECEDEE et TOUR DE FORCE). Conseillé.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Golden Age, #Policier, #Christianna Brand, #Whodunit, #Impossible Crime

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Publié le 20 Avril 2017

CRIME A BLACK DUDLEY  de Margery Allingham

 

Né en 1904, Margery Allingham débute sa carrière littéraire à 19 ans mais accède au succès avec ce CRIME A BLACK DUDLEY publié en 1929, première apparition de son détective favori, Albert Campion, que l’on retrouva dans dix-huit autres romans. Ici, il n’a qu’un rôle secondaire, un peu perdu au milieu des invités rassemblés à Black Dudley pour participer à un rituel familial consistant à se passer une dague dans l’obscurité. Durant ce jeu, le colonel Coombe meurt d’une crise cardiaque apparente. En réalité, il a été poignardé par une bande d’escrocs décidés à garder les invités prisonniers à Black Dudley.

Débutant comme un classique whodunit typique du Golden Age (protagonistes rassemblés dans un lieu clos, malédiction familiale, jeu tournant au drame, etc.), le roman se transforme ensuite en récit de gangsters avec papiers de grande valeur perdu (ou détruits), enlèvements, séquestrations, évasions, etc. On pense à certains John Dickson Carr des débuts ou, plus gênants, à Edgar Wallace tant le tout parait daté dans une veine feuilletonesque, proche du serial, qui multiplie les surprises mais demeure plus fatiguant que divertissant.

Destiné à devenir le héros récurent d’Allingham, Albert Campion n’a ici qu’un rôle secondaire, tandis que le pathologiste travaillant pour Scotland Yard, George Abbershaw, tient le haut de l’affiche. Le roman part donc dans plusieurs directions sans parvenir à passionner, quoique l’écriture alerte, les rebondissements nombreux et quelques touches d’humour parviennent à éviter au lecteur un complet désintérêt.

On trouve heureusement une plaisante ambiance de « country house mystery » avec des invités au passé mystérieux, des passages secrets et même un rituel familial folklorique (cependant moins obscur que celui des Musgraves). Toutefois, CRIME A BLACK DUDLEY se révèle décevant et l’identité de l’assassin (la dernière partie du roman revient à un whodunit plus traditionnel) quelque peu prévisible quoique son mobile soit, lui, plus original.

En dépit de ce quasi faux-départ, Albert Campion s’imposa comme un des grands détectives de l’Age d’Or et Allingham prit sa place aux côtés des trois autres reines du crime : Christie, Marsh et Sayers.

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Rédigé par Hellrick

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