lovecraft

Publié le 20 Février 2020

OEUVRES de Howard Phillips Lovecraft

La bibliographie de Lovecraft a longtemps été éparpillée au fil des nombreuses publications francophones, ce qui rendait difficile la constitution d’une réelle une intégrale. Les Omnibus de Laffont rendent aujourd’hui cette tâche bien plus simple, sans être totalement exhaustive (mais est-ce possible, notamment sur le sujet des continuateurs ou des réécritures).

Mais, dira le lecteur avare, si on possède déjà tout quel est l’intérêt ? Et bien il est possible, voire même probable, que l’on n’avait pas tout en réalité. Ainsi, dans le premier tome, se trouve, outre les récits de Lovecraft lui-même, des nouvelles provenant des anthologies LEGENDES DU MYTHE DE CTHULHU, LA CHOSE DES TENEBRES et HUIT HISTOIRES DE CTHULHU rédigées par des épigones du maîtres. Bref, un culte en expansion comme le souligne Francis Lacassin. Même si on possède les différents recueils précités, cet épais tome peut intéresser le « complétiste » pour quelques récits non pas inédits mais plus difficile à dénicher et opportunément rassemblés ici.

Ainsi « la chose ailée sur le toit » de Robert E. Howard, court mais efficace petit conte fantastique jadis disponible dans le recueil L’HOMME NOIR de Howard (ou, chez Bragelonne, dans LES OMBRES DE CANAAN consacré aux histoires d’horreur d’Howard). Howard toujours avec le réussi « Le feu d’Asshurbanipal”, dans lequel, en une vingtaine de pages, le créateur de Conan nous emmène au coeur du désert à la recherche d’une gemme mythique cachée dans une cite maudite protégée par les Djinns. Un mélange d’aventures (on y trouve même un parfum à la Indiana Jones avec son “aventurier aux nerfs d’acier”), de fantasy, de conte orientaux et d’épouvante lovecraftienne. De la belle ouvrage, tiré du recueil LE PACTE NOIR et plus récemment republié dans LES DIEUX DE BAL SAGOTH.

 « L’Héritier des ténèbres », une nouvelle traitant de la peur de la mort, de la crainte de servir de nourriture aux goules et de la nécessité de la crémation (dans le désordre) constitue une autre belle réussie de Clark Ashton Smith à découvrir pour ceux qui ne possèdent pas le recueil LES ABOMINATIONS DE YONDO. On retrouve aussi dans ce recueil phénoménal l’excellent « Chiens de Tindalos » de Frank Belknap Long, « Horreur à Salem » de Kuttner, « L’habitant de l’ombre » de Derleth, « Le visiteur venu des étoiles » de Bloch, « Sueurs froides » de Campbell, etc.

En ce qui concerne Lovecraft lui-même, voici une bonne occasion de lire ou relire certains de ses textes les plus célèbres et réussis comme « Dagon », « L’appel de Cthulhu », « La couleur tombée du ciel », « L’abomination de Dunwich », « Celui qui chuchotait dans les ténèbres », « Le cauchemar d’Innsmouth » et les courts romans « L’affaire Charles Dexter Ward » et « Les Montagnes hallucinées ».

Des lettres, des contes de jeunesse, des notes, des brouillons, des articles, etc. complètent le sommaire, sans oublier de nombreux textes de présentation sur les différents sujets abordés.

Bref, voici un ouvrage indispensable si on souhaite découvrir HPL ou parfaire ses connaissances sur l’auteur phare du fantastique du XXème siècle.

Une somme !

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Publié le 12 Février 2020

UBBO-SATHLA de Clark Ashton Smith

Initialement édité en 1985 chez NéO, ce recueil du poète et nouvelliste Clark Ashton Smith nous permettait de découvrir quelques classiques de la littérature fantastique de l’âge d’or. Depuis, Clark Ashton Smith s’est imposé au lectorat francophone grâce à de nombreuses rééditions : « La mort d’Ilalotha a ainsi été repris par Jacques Sadoul dans ses MEILLEURS RÉCITS DE WEIRD TALES puis dans son HISTOIRE DE LA SCIENCE FICTON.

« Le retour du Sorcier » a, lui aussi, intégré diverses anthologies lovecraftienne et son côté horriblement macabre, dans une tradition ensuite popularisée par les TALES FROM THE CRYPT fonctionne toujours de belle manière. Le récit (adapté en 1972 dans un épisode de la série télévisée « Night Gallery ») est devenu un incontournable de l’horreur inspirée par les univers de Lovecraft.

La nouvelle-titre, « Ubbo-Sathla », se montre elle-aussi lovecraftienne à souhait avec cette quête d’un initié pour retrouver les dieux primitifs dont parle le Necronomicon. Une belle réussite.

On découvre également, dans plusieurs nouvelles, le fameux Livre d’Eibon et la divinité Tsathoggua, sorte de monstrueux crapaud que repris par la suite Lovecraft (en particuliers dans son court roman LE TERTRE) et d’autres continuateurs du mythe.

Les différents récits nous font également voyager dans la légendaire Hyperborée et Clark Ashton Smith y mélange efficacement une fantasy mythique à la Robert Howard, une horreur morbide à la Edgar Poe et un fantastique teinté de science-fiction cosmique proche de Lovecraft. Bref, tout un univers qu’explorèrent par la suite les épigones de ces récits macabres « à la Weird Tales ».

Avec un style brillant, un vocabulaire précis légèrement archaïque, des phrases ciselées à la perfection et un sens du rythme hérité de la poésie, l’écrivain se révèle, en outre, d’un abord bien plus aisé que Lovecraft et d’une efficacité au moins aussi grande.

Un « grand petit recueil » (180 pages, toutes superbes !) destiné aux amateurs de fantastique de l’âge d’or mais dont les thèmes et l’écriture ont finalement fort peu vieilli. Conseillé.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Fantasy, #Golden Age, #Horreur, #Lovecraft, #Recueil de nouvelles

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Publié le 30 Janvier 2020

LA BALLADE DE BLACK TOM de Victor LaValle

Victor LaValle, déjà plusieurs fois primé (Shirley Jackson, Locus), se voit ici pour la première fois traduit en français, l’engouement actuel démesuré pour Lovecraft ne devant pas y être étranger. L’auteur, afro-américain, dédie en effet son récit à HPL « avec mes sentiments contradictoires ». Son court roman constitue une sorte de relecture de « Horreur à Red Hook », un texte assez médiocre de Lovecraft dont on retient surtout le côté autobiographique (l’écrivain vivait dans ce quartier à l’époque) et le racisme quasiment délirant.

Victor LaValle va donc s’inspirer de cette nouvelle pour plonger son héros, un musicien raté de Harlem, Charles Thomas Tesser, surnommé Black Tom, dans l’univers des Grands Anciens. Nous sommes dans les années 20 et notre Black Tom égrène les quelques mêmes accords de guitare (les seuls qu’il connaisse) lorsqu’il croise la route d’un énergumène, le vieux Blanc Robert Suydam qui souhaite l’engager pour animer une soirée dans sa demeure…A partir de là tout dérape.

Le texte étant court, nous n’allons pas trop le détailler, ce qui enlèverait au lecteur le plaisir de la découverte. Il s’agit d’un mélange de chronique sociale sur l’entre-deux Guerres aux Etats-Unis, avec tous les problèmes d’argent qui se posent à la population (et en particulier aux Noirs), et de fantastique. Victor LaValle possède une écriture travaillée, précise et ciselée, et il l’utilise pour créer une ambiance effrayante tout en remettant la nouvelle originale de Lovecraft en perspective. Il dénonce la virulence attaque raciste lancée par Lovecraft sans charger inutilement la bête, refusant le simple pamphlet pour une approche plus subtile. Il reprend ainsi certaines idées de l’écrivain de Providence afin de s’en distancer ou de les démonter mais sans que cela transforme son roman en simple exercice. En effet, il use également à bon escient de la mythologie lovecraftienne pour offrir une intrigue réussie qui se tient parfaitement, proposant donc deux niveaux de lecture : une critique littéraire et une novella fantastique de qualité.

Dans la masse immense des pastiches « tentaculaires » sortis ces dernières années, LA BALLADE DE BLACK TOM constitue, à coup sûr, une belle réussite, un texte efficace et (relativement) original. Primé par le British Fantasy et le Prix Shirley Jackson, voici une découverte à faire pour les amateurs de HPL…et les autres. On aimerait à présent découvrir les romans de LaValle afin de vérifier qu’il sache tenir la distance sur le format long…Editeurs, à vous de jouer !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Fantasy, #Horreur, #Lovecraft, #Roman court (novella)

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Publié le 24 Janvier 2020

CALLING CTHULHU - ANTHOLOGIE VOLUME I

Cette anthologie forcément lovecraftienne démarre par un texte de Thomas Lecomte, « la toile », dont l’idée n’est pas mauvaise mais qui souffre d’un certain amateurisme. Bref, pas la meilleure façon d’entamer un recueil de nouvelles…On craint le syndrome de la fan fiction tentaculaire vite torchée et du recueil de nouvelles avec du poulpe gluant à toutes les pages (et il en existe beaucoup)…Heureusement la suite s’avère nettement plus intéressante.

« Le trou » de Jean-Jacques Jouannais constitue ainsi un bel exercice de fantastique insidieux sur un thème classique : un « trou » dans le sol à l’influence maléfique, thème abordé notamment dans le roman BRECHE VERS L’ENFER de Kate Koja…mais la nouvelle de Jouannais se montre, en une trentaine de pages, plus réussie que l’interminable bouquin de Koja.

Suivent deux textes plus courts sympathiques sans être transcendants (« portraits macabres » et « Shiloh ») puis le très réussi « L’affaire Philippe Lardamour » de Fabien Lyraud, certes classique mais rondement mené et qui se lit avec plaisir.

On repart pour deux nouvelles courtes, encore une fois classiques mais correctes (« Visite guidée de R’lyeh » et « les masques de Kahnuggah ») avant un excellent « Tibériade » de Nicolas Page au sujet d’un archéologue israélien parti plonger dans les eaux du lac Tibériade en 2013…et qui y retrouve son ancienne petite amie qui l’a quitté trois ans plus tôt pour explorer le Crater Lake…Sans doute le texte le plus maitrisé et réussi de cette anthologie, un mélange de mystère vertigineux et de fantastique cosmique du meilleur tonneau.

La suite reste de haut niveau avec un original « Cthulhu le déchu » qui apporte un peu de fraicheur au mythe et les très efficace et gentiment déjanté « La bonne étoile » de Mathieu Dugas dans lequel trois cambrioleurs bras cassés supporter du FC Lens s’introduisent dans une demeure pour y dérober un artefact magique.

Sans être incontournable, CALLING CTHULHU s’avère une anthologie d’un bon niveau général qui saura contenter les inconditionnels de l’univers lovecraftien.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Horreur, #Lovecraft, #Recueil de nouvelles

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Publié le 6 Décembre 2019

CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU de Karim Berrouka

Revoici Karim Berrouka, chanteur du groupe punk rigolo Ludwig Von 88, qui s’attaque cette fois au Mythe de Cthulhu. Il nous présente son héroïne, Ingrid Planck qui va découvrir être la seule constante dans un univers délirant. En effet, cette trentenaire parisienne typique est contactée par cinq factions « cultistes » qui veulent soit détruire le Grand Cthulhu soit provoquer son retour.

Suite à une sorte de blague cosmique, notre pauvre Ingrid se retrouve Centre du Pentacle et chaque fois qu’elle sort de chez elle rencontre des mecs complètement fracas. La voilà donc contrainte d’écouter les élucubrations des Adorateurs de Dagon (dont l’église se trouve confronté à un schisme) ou des laudateurs de Shub-Niggurath. Et pendant ce temps, le Grand Cthulhu attend en rêvant depuis bien trop longtemps.

En dépit d’un côté un peu redondant dans les premiers chapitres (L’héroïne voyage et rencontre des cultistes toujours plus frappadingues), CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU constitue un roman amusant et efficace qui remet un peu d’humour dans un univers lovecraftien de plus en plus encombré. Jacques Finné disait déjà, voici 40 ans, « le mythe de Cthulhu est aujourd’hui devenu aussi monstrueux que le dieu qui lui donne son nom ». Que dirait-il aujourd’hui devant la profusion d’œuvres estampillées du Grand Ancien Endormi ? Comme disent les critiques sérieux, CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU est donc un livre « nécessaire », afin de délirer un peu entre deux bouquins (trop ?) sérieux se référant à Lovecraft. Ici, les références sont nombreuses et le lecteur adepte du Vieux Gentleman de Providence s’amusera à les référencer.

L’humour, pour sa part, fonctionne de belle manière, en particulier pour les différentes sectes aux pratiques improbables : les hippies partouzeurs de la Chèvre aux Milles Chevreaux (pire que les allumés de Krishna, ne manque que la paix l’amour la liberté et les fleurs), l’Eglise du Christ quantique Higgs Boson, les anti mélomanes vénérant Azatoth (« Tout pour le trash ! »), les Profond de l’American Dagon Scuba Diving Society, etc. Karim Berrouka en profite pour se moquer de toutes ces religions aux croyances ridicules et à leur improbable Messie. Les titres de chapitre sont, eux aussi, référentiels et bien trouvés. Bref, CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU ne se moque pas de son sujet mais le traite avec la dérision nécessaire, sans – heureusement - verser dans la parodie à gros sabots (dans le style des illisibles LORD OF THE RINGARDS) où trois jeux de mots foireux font office de comédie trop drôle (ou pas).

On fait donc gaffe aux Anciens (« ils font trembler la terrer, font déborder la mer’), on apprécie le style efficace, travaillé mais sans lourdeur (là aussi pas la peine d’essayer de copier HPL, les phrases boursouflées il faisait ça très bien mais ceux qui ont tenté de l’imiter ce sont bien vautrés) et des descriptions convaincantes parfois carrément lyriques voire poétiques, comme quoi la déconnade c’est sympa mais sur 400 pages mieux vaut garder quelques cartouches en réserve pour le grand final façon Horreur Cosmique.

Un bon moment à conseiller particulièrement aux amateurs d’HPL qui n’en peuvent plus des copies faisandées des récits de Lovecraft (ou Derleth).

 

 

 

Et pis Hou-là-là!

Na.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Lovecraft, #Humour

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Publié le 29 Novembre 2019

LES FURIES DE BORAS d'Angers Fager

Petit recueil ayant retenu l’attention de la critique à sa sortie, LES FURIES DE BORAS s’apparente à une relecture des grands mythes du fantastiques de façon souvent très rentre-dedans. Le style de l’auteur (qualifié de « Lovecraft suédois sous acide ») s’avère simple et les phrases paraissent souvent éructées : courtes et hachées elles usent d’un vocabulaire volontiers familier pour plonger le lecteur au cœur d’une action frénétique. Si l’influence de Lovecraft se montre patente dans les intrigues, Fager s’éloigne cependant du reclus de Providence dans son traitement et se place à l’opposé du puritanisme de son inspirateur. Nous sommes davantage proche d’Edward Lee pour ce mélange d’horreur cosmique, de thématiques contemporaines, de gore, de drogues diverses et de sexe explicite.

La première nouvelle, « les furies de Boras », donne le ton avec cette bande de gonzesses excitées s’en allant baiser dans les bois avant d’offrir en sacrifice un jeune homme aux Grands Anciens. Tentacules phalliques, foutre et sang, Fager ne fait pas dans la dentelle mais le côté brut de son écriture compense la prévisibilité de l’intrigue.

La nouvelle suivante nous plonge en pleine guerre au XVIIIème siècle avec toute la violence attendue avant l’intervention d’une célèbre entité « qui marche sur le vent ». Encore une fois le côté outrancier et agressif de l’écriture compense un récit très classique.

« Trois semaines de bonheur » pourrait être la nouvelle la plus réussie du recueil, l’auteur dépeignant avec beaucoup de subtilité sa principale protagoniste dont il dévoile peu à peu la monstruosité. Comme les autres récits, celui-ci mélange horreur aquatique poisseuse et déviance sexuelle mais de manière moins frontale. Cette relative retenue rend le résultat plus convaincant et marquant avec une « héroïne » pathétique et attachante en dépit de sa différence.

En dépit d’une réelle originalité, plusieurs nouvelles laissent malheureusement une impression mitigée par leurs fins ouvertes qui semblent parfois inachevées. « Encore ! Plus fort ! » constitue ainsi un texte érotico-fantastique original dans lequel deux amants s’étranglent durant l’acte sexuel afin d’atteindre les contrées du rêve (ils ne devaient pas posséder la clé d’argent de Randolph Carter) mais le tout échoue à offrir une conclusion satisfaisante. « Un pont sur Vasterbron » décrit de façon très détachée une situation extraordinaire ayant mené au suicide de très nombreuses personnes âgées. L’auteur ouvre quelques hypothèses mais laisse au lecteur le soin de trancher. Le climat fantastique et la complète étrangeté de l’histoire s’avère toutefois intéressante. Même constat pour « L’escalier de service » qui nous ramène aux débuts de la psychothérapie, du temps où les médecins soignaient l’hystérie par le laudanum et les « massages » intimes afin de relâcher les tensions. Un récit très efficace jusqu’à une conclusion un peu trop attendue, pas à la hauteur de ce qui précède. Ce qui s’applique également au dernier récit de ce recueil.

Si LES FURIES DE BORAS déçoit parfois, nul doute que le recueil possède une véritable force accentuée par les « fragments », de très courtes nouvelles (plutôt des tranches de vie) amenant le lecteur à accepter la résurgence, dans la Suède du XXIème siècle, des manifestations des Grands Anciens. Au final, une lecture agréable qui offre un regard neuf sur les horreurs lovecraftiennes.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Erotique, #Fantastique, #Horreur, #Recueil de nouvelles, #Lovecraft

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Publié le 27 Novembre 2019

NEONOMICON d'Alan Moore

NEONOMICON constitue l’hommage d’Alan Moore (V POUR VENDETTA, WATCHMEN, FROM HELL,…) à Lovecraft. Le prologue, narré par l’agent spécial Aldo Sax, multiplie déjà les références : dans le nightclub Zothique, situé à Red Hook, se produit le groupe Les Chats d’Ulthar mené par la punkette Randolph Carter. Sax contacte Johnny Carcosa (en réalité l’avatar de Nyarlathotep) pour obtenir une nouvelle drogue. Mais Sax devient fou et mutile plusieurs jeunes femmes.

Cette première partie, évocatrice et mystérieuse, se compose de deux cases verticales par pages, ce qui permet au dessinateur Jacen Burrows de donner sa pleine mesure. L’histoire principale sera, pour sa part, essentiellement construite par l’utilisation de quatre cases horizontales par page, donnant là aussi l’ampleur nécessaire (façon cinémascope) au récit d’Alan Moore consacré à deux agents du FBI, Gordon Lampers et Merril Brears. Dans une volonté de pervertir l’univers de Lovecraft, Moore donne ainsi la vedette à un Noir et une nymphomane.

L’intrigue, linéaire, s’avère facile à suivre et ne ménage guère de surprise, ce qui n’empêche pas l’ensemble de posséder une grande force évocatrice. L’auteur n’hésite pas à plonger dans les tréfonds de l’horreur glauque et de la sexualité débridée avec des scènes d’orgies contre-nature dans lesquelles l’héroïne est violée à de nombreuses reprises par une créature des profondeurs.

Moore frôle souvent la parodie et se moque gentiment de l’exploitation outrancière du Mythe (« je n’ai jamais lu Lovecraft mais ces histoires sont partout aujourd’hui, ils font même des Cthulhu en peluche » déclare un enquêteur) tout en versant lui-même, par instant, dans ce travers de références multiples. On retient néanmoins quelques passages bien délirants comme ce sex-shop proposant des poupées gonflables au visage de Cthulhu ou ces godes tentaculaires, sans oublier une orgie dans une piscine souterraine abritant un Profond à l’appétit sexuel insatiable. Oui, tout ça donne parfois une impression de joyeux foutoir devant autant aux mangas pornos qu’à Lovecraft. Mais ce n’est pas désagréable à condition d’apprécier cette option « série B ».

Néanmoins, le final d’une portée réellement cosmique avec une utilisation adroite des théories sur le temps cyclique rachète les aspects parfois grand-guignolesques d’un récit globalement convaincant et original, pour amateurs avertis (comme on dit) de HPL.

NEONOMICON d'Alan Moore

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Comic Book, #Fantastique, #Horreur, #Lovecraft, #Erotique

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Publié le 22 Novembre 2019

L'HORREUR DANS LE CIMETIERRE de H.P. Lovecraft et autres

Après L’HORREUR DANS LE MUSEE voici le deuxième tome de cette série reprenant les « révisions » et autres « collaborations » de Lovecraft. Le sujet est abordé par une préface d’August Derleth suivi d’un très intéressant article de Francis Lacassin : « H.P. Lovecraft : « nègre » littéraire ou accoucheur de talent ?. Le même Lacassin fournit d’ailleurs en fin de volume une bibliographie de ses revisions (aujourd’hui toutes disponibles en français)

Le corps du recueil se compose d’une sympathique nouvelle d’Hazel Heald qui lui donne son titre, « L’horreur dans le cimetière ». Pa la suite, Hazel Heald (1896 – 1961) a admis que Lovecraft « l’a aidée pour ses histoires et a véritablement réécrit des paragraphes entiers. Il critiquait les alinéas les uns après les autres, notait au crayon des remarques marginales et les faisait ensuite réécrire jusqu’à ce qu’ils lui plaisent ». Les « révisions » effectuées par Lovecraft se montrent d’ailleurs de plus en plus importantes : si les premières histoires nécessitent une révision moins radicales et peuvent se contenter des conseils de l’écrivain de Providence (par exemple dans « L’homme de pierre » et « L’Horreur dans le cimetière »), les suivantes (« L’horreur dans le musée » et « Surgi du fond des siècles ») constituent de véritables collaborations, Lovecraft y apportant ses thématiques familières et de nombreux emprunts au Mythe de Cthulhu. En ce qui concerne le très divertissant et quasi parodique « La mort ailée », dernière « collaboration » entre Heald et Lovecraft, ce-dernier avoue, dans une lettre à August Derleth, qu’il en a écrit au moins 90%. Nous sommes donc loin d’un simple travail de correction !

Zealia Bishop est une autre romancière aidée par Lovecraft : « j’avais appris de lui les principes fondamentaux de la technique de l’écriture. Ma dette à son égard est considérable. Je considère que cela a été un grand bonheur d’avoir été au nombre de ses corresponds amicaux et de ses élèves ». Quoique sa production personnelle relève de la littérature romantique, Zealia Bishop est aujourd’hui essentiellement connue pour les trois révisions effectuées par Lovecraft. Ce-dernier détaille la genèse du plutôt réussi « La malédiction de Yig » en affirmant qu’il s’agit pratiquement d’une « composition originale du fait que tout ce dont je disposais était un ensemble de notes ». Il ajoute « toute l’intrigue et les motivations sont de moi, j’ai inventé le dieu-serpent, la malédiction, le prologue et l’épilogue,… ». Lovecraft récidiva avec « La chevelure de la Méduse » (qui a pris un bon coup de vieux et dont les aspects racistes n’aident guère à la reconnaissance de HPL) et surtout le roman « Le Tertre » à l’indéniable efficacité dans sa description d’un  monde souterrain niché sous un tertre maudit. Lovecraft a d’ailleurs confié à Clark Ashton Smith (auquel il emprunte la divinité batracienne Tsathoggua) qu’il a composé « une histoire originale à partir d’un simple photographe, pas même le germe d’une intrigue ». Lovecraft ajoute que l’idée initiale (« une histoire de tertre hanté par une paire d’Indiens fantômes ») serait « insupportablement fade et plate », d’où son idée d’y inclure les expéditions espagnoles de Coronado, le monde souterrain et la présence de Tsathoggua. Le résultat se révèle une belle réussite pour les amateurs de mondes perdus.  

Alors qu’il tentait toujours de donner à ses révisions une réelle qualité, Lovecraft baisse les bras devant « Le dernier examen » d’Adolpho De Castro qu’il juge « illisible » et « détestable ». En dépit d’un mois de travail, rien ne peut sauver le texte. Lovecraft acceptera pourtant de réviser, en 1930, « L’Exécuteur des hautes œuvres ». Pas très palpitant non plus.

Toujours modeste, Lovecraft refusait souvent, parfois même devant l’évidence, la paternité des textes révisés. Ainsi, en dépit des nombreuses retouches, suggestions et corrections qu’il fait subir aux « Deux bouteilles noires » de Wilfrid Blanch Talman il n’estime pas « sa participation suffisante pour mériter le titre de co-auteur » et incite Talman à « publier l’histoire sous votre seul nom ».

August Derleth reconnaissait le caractère forcément inégal de ces « révisions » mais ajoutaient que les meilleures d’entre elles étaient « certainement d’assez bonne qualité pour figurer parmi les histoires de Lovecraft » avant de conclure avec logique que « Lovecraft était responsable de ce qu’il y avait de plus digne d’être retenu » dans ces contes. Nous pouvons d’ailleurs ajouter que tous les écrivains « aidés » par Lovecraft sont aujourd’hui tombés dans l’oubli et que « leurs » uniques nouvelles encore publiées sont justement celles sur lesquelles Lovecraft a posé le stylo. 

Un recueil plus intéressant et historique que réellement transcendant mais qui saura satisfaire les complétistes de Lovecraft.

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Rédigé par hellrick

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Publié le 14 Novembre 2019

CEUX DES PROFONDEURS de Fritz Leiber

Georg Reuter Fischer, aidé d’Albert Wilmarth, expert de Lovecraft, découvre de nombreux liens entre son histoire personnelle et celle de l’écrivain de Providence. Il comprend aussi les liens existants entre ses rêves et les abominations cosmiques décrites par Lovecraft, quitte à sombrer à son tour dans les abimes.

Fritz Leiber a connu Lovecraft qui l’avait encouragé à poursuivre dans l’écriture après avoir lu ses premiers essais. En 1976, il décide de rendre hommage au maitre à travers un court roman, CEUX DES PROFONDEURS, dans lequel apparait Lovecraft lui-même. Comme plusieurs continuateurs du Mythe de Cthulhu, Leiber adopte en effet le point de vue voulant que Lovecraft ait été un initié dont les écrits, authentiques, étaient trop terrifiants pour se voir révélés autrement que sous la forme d’histoires de fiction.

Précédemment édité dans un gros recueil de nouvelles (accompagnées d’une autobiographie) chez Lefrancq, le texte réapparait chez Mnemos ce qui le rend, forcément, plus facile d’accès. Malheureusement l’éditeur n’a pas jugé opportun de revoir la traduction or celle de CEUX DES PRONFONDEURS aurait grandement gagné à une bonne révision tant elle parait pesante, voire boiteuse. La lecture s’avère donc peu aisée car les phrases ne « coulent » pas…Evidemment, Leiber adopte ici un style ampoulé et alambiqué, riche en épithètes, dans l’esprit de Lovecraft et la traduction se doit d’être irréprochable. Comme c’est loin d’être le cas, cela rend la lecture particulièrement difficile et gâche une bonne partie du plaisir.

L’intrigue en elle-même ne s’avère pas spécialement originale mais fonctionne plaisamment, à la manière de certains pastiches de Robert Bloch qui brodent sur les thématiques lovecraftienne avec un certain talent teinté de roublardise. Le récit suit ainsi la destinée d’un personnage non seulement complètement lovecraftien (il répond à tous les clichés en vigueur de l’érudit solitaire à la généalogie tortueuse) mais en outre fort proche du réel Lovecraft. De nombreuses situations semblent provenir des nouvelles antérieures de HPL et bien des protagonistes de ses fictions reviennent effectuer un petit tour de piste dans des lieux eux aussi coutumiers aux lecteurs de Lovecraft. L’ensemble se révèle donc agréable et bien mené mais sans dépasser l’aspect hommage prononcé. CEUX DES PRONFONDEURS ressemble donc souvent à une fan-fiction pour initiés qui se délecteront des références et autres clins d’œil disséminés par Leiber. Amusant mais un peu vain.

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Rédigé par hellrick

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Publié le 7 Novembre 2019

LA QUETE ONIRIQUE DE KADATH L'INCONNUE de Howard Philip Lovecraft

Cette novella (également connue, lors de sa première publication française, sous le titre de « A la recherche de Kadath ») constitue le point culminant du « cycle des rêves », un ensemble de textes écrits par Lovecraft entre sa première période (celle des « histoires macabres » proches de Poe) et la fin de sa vie, époque à laquelle il s’intéresse au Mythe de Cthulhu. Ici, ce texte énumère les périples conduisant Randolph Carter jusqu’au légendaire Plateau de Leng, à la recherche de la merveilleuse cité de Kadath. On retrouve ce protagoniste dans trois autres nouvelles : « Le témoignage de Randolph Carter », « La clé d’argent » et, finalement, « A travers les portes de la clé d’argent » écrit en collaboration avec E. Hoffman Price en 1933. Ces quatre nouvelles furent rassemblées dans l’indispensable recueil, sans équivalent en langue anglaise, « Démons et merveilles » publié en France en 1955. Ces récits, maintes fois réédités et retraduits par la suite, demeurent la porte d’entrée idéale pour découvrir le versant onirique de Lovecraft ; une sorte de réécriture de « l’Odyssée » d’Homère à laquelle se mêlent les contes orientaux des « Milles et une nuit ».

Publiée de manière posthume par Arkham House en 1943 et longtemps négligée, LA QUETE ONIRIQUE DE KADATH L’INCONNUE constitue aujourd’hui un des récits les plus célébrés de l’auteur, réussissant à combiner une fantasy onirique et merveilleuse à un fantastique plus sombre et horrifique. Double littéraire de Lovecraft, Randolph Carter s’y enfonce dans les royaumes du rêve pour découvrir la légendaire Kadath. Mais Nyarlathotep, le Chaos rampant, multiplie les obstacles pour l’arrêter. Carter va ainsi croiser différentes peuplades, des êtres étranges comme des vampires ou les fameuses Maigres Bêtes de la nuit. La route est longue jusqu’à la ville merveilleuse, tout comme elle sera longue pour les Hobbits s’en allant au Mont du Destin, pour le Guerrier Eternel recherchant Tanelorn ou pour Roland désireux de trouver sa Tour Sombre. Bref, Lovecraft inaugure pratiquement la « dark fantasy à quête » dans ce court roman qui, au départ, peut sembler austère. Pas de dialogues, beaucoup de descriptions, voilà le programme de ce récit dans lequel le ressenti parait plus important que la narration proprement dite, parfois décousue. En effet, Lovecraft aura rarement été aussi hyperbolique dans l’utilisation des termes évocateurs. Dès les premières pages, l’écrivain nous convie « dans cet ultime abîme du plus grand désordre où les chimères et les blasphèmes sont le centre de toute infinité », là où « Azathoth se goinfre au milieu des battements sourds et insensés d’abominables tambours et des faibles lamentations monotones d’exécrables flutes ». L’écrivain multiplie les adjectifs : tout est « horrible », « monstrueux », « obscène », « blasphémateur », etc. Son style emphatique trouve ici son apogée, à la plus grande joie des laudateurs de l’écrivain et à la consternation de ses critiques. Quoiqu’il en soit, Lovecraft reprend des éléments de divers récits antérieurs : la ville d’Ulthar où les félidés sont sacrés, l’Anglais Kuranès régnant avec nostalgie sur la cité merveilleuse de Celephaïs, les divinités Nyarlatothep et Azathot, les Grands Anciens, les Manuscrits Pnakotiques et le Necronomicon, etc. Une véritable synthèse de ses thématiques revisitées durant une aventure épique, véritable Odyssée inspirée des grands auteurs mythologiques. Une réussite exceptionnelle, plus proche de la poésie en prose que d’un véritable roman. Parfois ardu mais doté d’une force d’évocation exceptionnelle LA QUETE ONIRIQUE DE KADATH L’INCONNUE multiplie les images fulgurantes.

Le lecteur intéressé poursuivra son exploration des contrées du rêve avec quelques nouvelles très réussies comme « Les chats d’Ulthar », « Le témoignage de Randolph Carter » ou « La clé d’argent » qui nous conte les entreprises d’un Carter vieilli pour redécouvrir le chemin des univers oniriques. Les passionnés se procureront également le magnifique « Kadath, guide de la cité inconnue » dans lequel quatre nouvelles voisinent avec de nombreuses illustrations pour proposer une véritable cartographie de l’imaginaire lovecraftien. 

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