humour

Publié le 12 Mai 2020

JUSQU'A LA QUATRIEME GENERATION d'Isaac Asimov

Troisième et dernier recueil francophones des nouvelles d’Asimov regroupées dans le pavé américain « Nightfall and other stories ». Les récits proposés vont de 1953 avec le petit conte fantastique humoristique « Les mouches » consacré à Belzébuth à 1967 avec « Ségrégationniste » jadis publié dans une revue médicale en vue de susciter la réflexion des médecins.

Les 9 nouvelles rassemblées ici sont pour la plupart courtes (le recueil ne fait que 196 pages) avec quelques exemples de très courts récits à chute comme « Introduisez la tête A dans le logement B » écrit en une demi-heure en guise de défi. « Le sorcier à la page » est une parodie des comédies musicales de Gilbert & Sullivan au sujet d’un philtre d’amour répandu dans le punch d’une soirée estudiantine. « La machine qui gagna la guerre » constitue un autre court récit à chute (ici bien trouvée et surprenante) consacrée au fameux super ordinateur Multivac. « Mon fils le physicien », moins convaincant, fonctionne de la même manière : un récit à chute amusant basé sur une astuce (le genre de nouvelles qu’Asimov livra à la pelle avec sa série policière des Veufs Noirs). « Jusqu’à la quatrième génération », rare exemple de récit influencé par le judaïsme, convainc moins.

Plus long et original, « Le briseur de grève » traite des tabous culturels et confronte ici un homme spécialisé, sur un astéroïde habité, dans le recyclage des excréments avec l’ostracisme du reste de la population. Enfin, « Les yeux ne servent pas qu’à voir » est une nouvelle mélancolique réussie bien qu’elle fut refusée par Playbloy.

Ce recueil dans la lignée des précédents (tous trois furent d’ailleurs réédités en un très épais volume intitulé QUAND LES TENEBRES VIENDRONT – L’INTEGRALE assortis d'intéressants commentaires de l'auteur.) montre la variété d’inspiration d’un Asimov allant du fantastique satirique à la science-fiction humoristique en passant par des thèmes plus sérieux. Du bon boulot.

 

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Publié le 6 Avril 2020

FLETCH (FLETCH AUX TROUSSES) de Gregory McDonald

Second roman de Gregory McDonald (publié dix ans après son premier, RUNNING SCARED), FLETCH (ou FLETCH AUX TROUSSES) devint aussitôt un succès qui amena l’auteur a lui donner de nombreuses suites et dérivés (SON OF FLETCH et les « Flynn »).

Journaliste iconoclaste et très peace & love, Irwin Maurice Fletcher, dit Fletch, déjà deux fois divorcés à 30 ans, ne porte jamais de chaussures et boit beaucoup lorsqu’il ne fume pas des joints. Il est donc le candidat idéal pour une infiltration dans le milieu des drogués vivotant sur les plages américaines. Plus vrai que nature, Fletch se voit abordé par le millionnaire Alan Stanwyck qui le prend pour un vagabond sans le sou et, se disant atteint d’un cancer incurable, lui offre 50 000 dollars pour l’assassiner, ce qui permettrait à son épouse de toucher la prime d’assurances de trois millions de dollars. Mais Fletch soupçonne le coup fourré et décide d’enquêter sur Stanwyck.

Lauréat du Prix Edgar Poe du meilleur roman (tout comme sa suite), FLETCH AUX TROUSSES s’avère une excellente réussite, offrant un enquêteur particulièrement original évoluant dans un monde bien typé, celui du début des années ’70 aux Etats-Unis. L’auteur alterne donc la description du milieu bohème des drogués et autres prostituées bloqués sur les plages depuis la fin du rêve hippie avec l’exploration du monde des ultra-riches qui passent leur temps en mondanité, cocktails après le tennis et coucheries diverses. Etonnamment, Fletch parvient à se montrer aussi à l’aise dans les deux univers, deux enquêtes apparemment indépendantes (qui fournit la drogue sur la plage ? Que veut vraiment le supposé agonisant millionnaire ?) mais qui, bien sûr, se rejoindront pour une conclusion cynique et amorale typique de l’époque.

Truffé de moments décalés et humoristiques qui en font une plaisante comédie policière, le roman s’appuie cependant sur une énigme fort bien construite, à mi-chemin entre le « policier » classique et le polar « rentre-dedans ». Le meilleur des deux mondes ? Assurément ! Bref, vite…la suite !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Humour, #Polar, #Policier, #Whodunit

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Publié le 19 Février 2020

PLUS X d'Erik Frank Russell

Après la redécouverte de l’excellent GUEPE d’Erik Frank Russell, ce roman ne peut que décevoir. Ecrit à la fin des années ’50 sous forme de nouvelle puis étendu à une novella et finalement à un (court) roman de 190 pages, PLUS X envoie son héros John Leeming au fond de la Galaxie, sans espoir de retour, pour être capturé par les vilains envahisseurs menaçant d’attaquer la Terre. Emprisonné, John commence à imaginer un moyen tortueux pour déstabiliser l’adversaire en se basant sur le principe des équations : il va devenir un « homme plus X », X représentant ici un compagnon imaginaire, son Eustache. John affirme ainsi que tous les terriens possèdent cet étonnant Eustache, une information capable de remettre en question tout ce que les aliens pensent savoir des hommes…

PLUS X dénote quelque peu dans le paysage de la SF des années ’50, l’écrivain utilisant clairement le genre pour une satire de la Guerre Froide avec ces messages contradictoires et ses tentatives d’embrouiller l’adversaire par de fausses informations. Les machinations du personnage principal paraissent donc amusantes et finalement pas si stupides que ça, son « enfumage » des esprits adverses fonctionnant de belle manière.

Malheureusement, le bouquin perd rapidement de son « peps » : très plaisant dans les premiers chapitres il finit par s’enliser dans une seconde partie où l’humour se fait plus rare et dans laquelle la redondance des situations à tendance à ennuyer le lecteur. Là où GUEPE restait réussi de bout en bout, PLUS X perd de son intérêt à mi-parcours et ne parvient jamais à retrouver le charme de ses premières pages.

Quelques notes humoristiques, une bonne idée de départ et une loufoquerie bien présente ne suffisent pas à sauver un roman décevant. Du coup on aimerait lire la version courte, sous forme de nouvelle, probablement plus satisfaisante.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Humour, #science-fiction

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Publié le 14 Février 2020

JUSTUS, MALONE & Co de Craig Rice

Holly Inglehart a découvert le corps de sa tante Alexandria dans une maison dont toutes les horloges indiquent 3 heures. Immédiatement suspecte, Holly reçoit l’aide de Jake Justus et Hélène Brand, bien décidés à la disculper. Pour cela, ils ont besoin d’un avocat de choc et ce sera la star du barreau de Chicago John Joseph Malone.

Le cul entre deux chaises, Craig Rice (une femme contrairement à ce que son nom laisse penser), écrit, à la fin du Golden Age et juste avant la Seconde Guerre Mondiale, ce bouquin situé entre le classique whodunit de l’école britannique et le polar musclé à l’américaine. L’intrigue débute ainsi par le traditionnel crime d’une personne pas vraiment sympathique et y ajoute diverses situations déroutantes (en particuliers l’arrêt de toutes les horloges à 3 heures du matin).

Les « usual suspects » sont bien présents : domestiques qui cachent quelque chose, héritiers en passe d’être déshérités, etc. On attend aussi l’arrivée de l’inévitable maitre chanteur qui finira en seconde victime pour avoir voulu monnayer ses renseignements. Mais, très vite, le bouquin emprunte également au polar à la Hammett / Chandler avec ses personnages truculents (ils passent toute l’enquête à se bourrer la gueule sous prétexte que l’ivresse les aide à mieux réfléchir), ses rebondissements improbables (une évasion rocambolesque), sa suspension d’incrédulité continuelle et assumée et ses réparties amusantes. Car le roman se veut également humoristiques et navigue entre Vaudeville et Screwball comedy en avançant à pleine vitesse. Craig Rice ayant l’habitude de travailler sans plan préalable, le lecteur ne doit pas s’attendre à une construction policière rigoureuse mais, dans l’ensemble, le divertissement fonctionne…du moins jusqu’à la moitié du livre. Car ensuite, tout cela commence à patiner, avec sa multiplication de situations improbables, d’indices découverts fort opportunément et d’informations soudainement découvertes (quoique d’importance capitale personne ne songeait à les révéler auparavant) tandis que les saouleries continuelles fatiguent les plus indulgents. Au final le détective joue les Sherlock Holmes inversé : si-ce dernier n’inventait rien et déduisait tout notre Malone ne déduit rien, il invente tout, fabrique une théorie de bric et de broc et découvre, satisfait, qu’elle tient la route (à condition de ne pas y regarder de trop près).

Débuté sur les chapeaux de roue et de manière amusante, JUSTUS, MALONE & CO finit par s’enliser et à perdre son intérêt au point que l’on termine ce livre avec plus de soulagement que de satisfaction. Les romans ultérieurs étant réputés meilleurs on réservera son avis sur une auteur souvent louée par les Américains.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Golden Age, #Humour, #Policier, #Polar, #Whodunit

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Publié le 14 Janvier 2020

QUI PRENDS LA MOUCHE? de M.C. Beaton

Voici l’autre série phare (après Agathe Raisin) de la récemment disparue M.C Beaton, les aventures du policier écossais Hamish Macbeth, lequel animera 35 enquêtes.

Daté de 1985, QUI PRENDS LA MOUCHE possède un indéniable parfum rétro…une époque dénuée de téléphone portable, d’Internet, de réseaux sociaux,…si loin, si proche. D’autant que les personnages agissent de manière très caricaturale, notamment les femmes qui parlent et se comportent à la manière des héroïnes des romans « golden age » les plus naïfs. La plupart ne rêvent que du prince charmant, de préférence riche. Alice aligne ainsi les stéréotypes : jeune secrétaire empotée, elle ne se sent pas à sa place parmi les « lady », ne porte pas de vêtements suffisamment beaux, essaie de prendre l’accent maniéré des nantis et se voit mariée à Jeremy, séduisant célibataire rencontré la veille. Un Jeremy qui n’a d’yeux que pour la poitrine opulente d’une Daphné passant tout le roman à minauder façon femme fatale.

Une partie de pêche à la mouche organisée dans un petit village écossais donne ainsi le cadre à un whodunit très cosy suite à la mort de Lady Jane Winters, spécialiste de la pique assassine et de la petite phrase blessante. Il apparait ensuite que notre Lady était en réalité une journaliste s’amusant à dévoiler les travers de ses contemporains dans des articles assassins. Bien sûr, chaque participant du stage de pêche cachait quelque secret plus ou moins inavouable et possédait, par conséquent, une bonne raison de mettre Lady Jane hors d’état de nuire. Hamish, le détective local, mène très mollement l’enquête mais son indolence à la Colombo mâtiné de Poirot pourrait bien cacher un esprit plus affuté que prévu.

Typique, QUI PRENDS LA MOUCHE ? présente son petit groupe de personnages typés enfermés dans un lieu bien défini pour une semaine. Rancoeurs à peine dissimulées et secrets variés occupent le quotidien de nos stagiaires de la pêche jusqu’au meurtre de l’horrible mégère Lady Jane pratiquement à mi-parcours. La seconde moitié du roman suivra donc l’enquête de notre Hamish, personnage amusant qui permet à M.C.Beaton d’orchestrer l’une ou l’autre séquence humoristique, pour ne pas dire bouffonnes (Hamish se retrouve tout nu dans la rivière) ou vaudeville (il se cache sous les draps d’une demoiselle pour échapper à son paternel très remonté).

Dans l’ensemble, QUI PRENDS LA MOUCHE ? n’invente rien mais se lit avec plaisir, l’enquête reste souvent anecdotique (Hamish avoue qu’il ne connait pas le coupable et lance souvent des suspicions au hasard pour observer les réactions) et il parait impossible au lecteur de deviner le fin mot de l’histoire (les indices menant à la résolution n’apparaissent que dans les dernières pages) mais le tout reste agréable. Nous sommes dans un mélange de whodunit « cosy », d’humour bon enfant et d’influences chick-lit pour un ensemble sans prétention mais divertissant, d’autant que le roman ne fait que 250 pages.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Whodunit, #Policier, #Humour

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Publié le 6 Décembre 2019

CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU de Karim Berrouka

Revoici Karim Berrouka, chanteur du groupe punk rigolo Ludwig Von 88, qui s’attaque cette fois au Mythe de Cthulhu. Il nous présente son héroïne, Ingrid Planck qui va découvrir être la seule constante dans un univers délirant. En effet, cette trentenaire parisienne typique est contactée par cinq factions « cultistes » qui veulent soit détruire le Grand Cthulhu soit provoquer son retour.

Suite à une sorte de blague cosmique, notre pauvre Ingrid se retrouve Centre du Pentacle et chaque fois qu’elle sort de chez elle rencontre des mecs complètement fracas. La voilà donc contrainte d’écouter les élucubrations des Adorateurs de Dagon (dont l’église se trouve confronté à un schisme) ou des laudateurs de Shub-Niggurath. Et pendant ce temps, le Grand Cthulhu attend en rêvant depuis bien trop longtemps.

En dépit d’un côté un peu redondant dans les premiers chapitres (L’héroïne voyage et rencontre des cultistes toujours plus frappadingues), CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU constitue un roman amusant et efficace qui remet un peu d’humour dans un univers lovecraftien de plus en plus encombré. Jacques Finné disait déjà, voici 40 ans, « le mythe de Cthulhu est aujourd’hui devenu aussi monstrueux que le dieu qui lui donne son nom ». Que dirait-il aujourd’hui devant la profusion d’œuvres estampillées du Grand Ancien Endormi ? Comme disent les critiques sérieux, CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU est donc un livre « nécessaire », afin de délirer un peu entre deux bouquins (trop ?) sérieux se référant à Lovecraft. Ici, les références sont nombreuses et le lecteur adepte du Vieux Gentleman de Providence s’amusera à les référencer.

L’humour, pour sa part, fonctionne de belle manière, en particulier pour les différentes sectes aux pratiques improbables : les hippies partouzeurs de la Chèvre aux Milles Chevreaux (pire que les allumés de Krishna, ne manque que la paix l’amour la liberté et les fleurs), l’Eglise du Christ quantique Higgs Boson, les anti mélomanes vénérant Azatoth (« Tout pour le trash ! »), les Profond de l’American Dagon Scuba Diving Society, etc. Karim Berrouka en profite pour se moquer de toutes ces religions aux croyances ridicules et à leur improbable Messie. Les titres de chapitre sont, eux aussi, référentiels et bien trouvés. Bref, CELLE QUI N’AVAIT PAS PEUR DE CTHULHU ne se moque pas de son sujet mais le traite avec la dérision nécessaire, sans – heureusement - verser dans la parodie à gros sabots (dans le style des illisibles LORD OF THE RINGARDS) où trois jeux de mots foireux font office de comédie trop drôle (ou pas).

On fait donc gaffe aux Anciens (« ils font trembler la terrer, font déborder la mer’), on apprécie le style efficace, travaillé mais sans lourdeur (là aussi pas la peine d’essayer de copier HPL, les phrases boursouflées il faisait ça très bien mais ceux qui ont tenté de l’imiter ce sont bien vautrés) et des descriptions convaincantes parfois carrément lyriques voire poétiques, comme quoi la déconnade c’est sympa mais sur 400 pages mieux vaut garder quelques cartouches en réserve pour le grand final façon Horreur Cosmique.

Un bon moment à conseiller particulièrement aux amateurs d’HPL qui n’en peuvent plus des copies faisandées des récits de Lovecraft (ou Derleth).

 

 

 

Et pis Hou-là-là!

Na.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Lovecraft, #Humour

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Publié le 5 Décembre 2019

PAX AMERICANA de Roland C. Wagner

Les auteurs de SF avaient quand même parfois le nez creux… En 2005, le trop tôt disparu Roland C. Wagner imaginait déjà très bien les conséquences possibles du Réchauffement et de la disparition des ressources.

XXIème siècle…le pétrole n’est plus qu’un souvenir pour beaucoup. Les USA (rebaptisés Zu’ssa) se sont accaparé les derniers stocks afin d’alimenter leur armée chargée d’imposer la Pax Americana au reste du monde. Violemment privés de leurs réserves, l’Europe a dû se tourner, contrainte et forcée, vers les énergies renouvelables. Bien sûr, la transition a entrainé des changements drastiques : fini la voiture individuelle, bonjour l’ordinateur à pédales. Les USA, de leur côté, ont continué d’épuiser les dernières ressources à la manière d’un ogre insatiable. Aujourd’hui le pays fonce droit dans le mur au point que le Président des USA s’apprête à renouer les relations avec le Vieux Continent. Mais la rumeur d’un attentat à son encontre enfle…

Roland C. Wagner propose ici une anticipation crédible avec d’un côté une Europe retournée à l'avant pétrole et des USA qui épuisent le peu de ressources restantes en guerroyant à tout va. Ils gardent ainsi la maitrise des énergies fossiles au point de s’être illusionné : pensant ces dernières inépuisables voilà le grand pays rattrapé par la réalité.

Mi satire, mi politique fiction, cette anticipation parfois grave et parfois amusante n’oublie pas de raconter une histoire et évite les excès loufoques (mais rapidement lassant) de LA SAISON DE LA SORCIERE du même Wagner. L’écrivain brosse quelques jolis portraits, dont un président européen aussi gentleman qu’insatiable sexuellement. Le tout donne une novella bien ficelé qui n’oublie pas l’humour pour parler de choses sinistres car comme le disait Didier Super « On va tous crever, on va tous crever,
Y'a la fin du monde qui nous guette et nous on fait la fête!”.

Sympathique et finalement optimiste donc recommandé même si le bouquin aurait mérité quelques dizaines de pages supplémentaires pour développer un univers à peine effleuré.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Roman court (novella), #anticipation, #science-fiction, #Humour

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Publié le 22 Mars 2019

ELRIC A LA FIN DES TEMPS de Michael Moorcock

Comme bien des auteurs avant lui (cf. Asimov et ses robots fondateurs), Moorcock s’est laisse tenter par le crossover entre ses deux plus fameuses créations, Elric le Necromancien et la saga des Danseurs de la Fin des Temps. Notre empereur albinos atterrit donc dans un futur incroyablement lointain dans lequel s’ennuie des immortels blasés qu’il identifie aux Seigneurs du Chaos.

Rédigé en 1981 cette « ultime » (rire) aventure d’Elric s’avère très agréable mais nécessite une bonne connaissance des deux sagas précitées pour être pleinement appréciée. Longue nouvelle (ou roman court), ELRIC A LA FIN DES TEMPS constitue un divertissement amusé à l’humour très anglais : les immortels de la Fin des Temps s’amusent des combats du Loup Blanc, de son souci d’équilibrer la Loi et le Chaos mais, au final, le trouvent un peu raseur, comme tous les voyageurs temporels égocentriques. Moorcock se joue des clichés qu’il a lui-même contribué à établir et offre un récit alerte découpé en une suite de courts chapitres, le tout s’achevant par une pirouette ironique. Nous sommes clairement proche de l’auto-parodie et il est possible de rejeter le récit en le taxant de bouffonnerie mais, avec un peu d’ouverture d’esprit (et en sachant à quoi s’attendre), ELRIC A LA FIN DES TEMPS est plutôt une réussite. L’autre nouvelle, beaucoup plus courtes, consacrée à Elric, « Le dernier enchantement », se laisse lire sans déplaisir mais reste totalement dispensable. Le recueil est complété par une très courte nouvelle, « la chose dans la pierre » (pas lue) et un roman de jeunesse, écrit par un Moorcock adolescent, SOJAN, une fantasy qui annonce apparemment Elric et qui est également incluse dans le gros volume consacré au GUERRIER DE MARS. J’y reviendrais donc (ou pas) à ce moment mais les avis disponibles n’encouragent guère à franchir le pas.

En résumé, ELRIC A LA FIN DES TEMPS constitue un recueil composé en dépit du bon sens dans lequel on lira en priorité le court roman intitulé lui aussi « Elric a la fin des temps » qui en constitue l’élément essentiel (et, à n’en pas douter, l’argument de vente principal). Un texte plaisant (également disponible dans l’énorme omnibus consacré à Elric) qui ne justifie en rien cette édition fourre-tout aux limites de l’arnaque pure et simple.

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Publié le 2 Janvier 2019

UNE CHALEUR VENUE D'AILLEURS de Michael Moorcock

Cycle romanesque en trois tomes (accompagné d’un recueil de nouvelles annexes), LES DANSEURS DE LA FIN DES TEMPS envisage l’avenir extrêmement lointain d’une humanité déifiée. Les hommes, devenus immortels, s’ennuient fatalement et se complaisent dans les spectacles grandioses (quitte à incendier un continent pour la beauté de la vision), les perversions sexuelles et la collectionnite. Jherek, par exemple, s’intéresse quasi exclusivement au XIXème siècle de la Terre. Il faut dire qu’en cette époque proche de la fin des temps « il n’y a plus grand-chose à faire ». Alors Jherek décide, par ce qu’il faut bien s’occuper (comme disait l’autre, « l’éternité c’est très long, surtout vers la fin »), de s’enticher d’une prude jeune mariée du XIXème siècle et de l’arracher à son époque. Dès lors, Moorcock, qui ne devait pas fumer que du tabac, se lance dans une aventure picaresque et déjantée, revisitant d’une certaine manière ALICE AU PAYS DES MERVEILLE par sa propension à construire un univers coloré et sous acide, dans lequel tout devient possible : se balader dans une locomotive volante en pierres précieuses, voyager dans le temps, garder des ménageries où vivent des extra-terrestres,…C’est la fête, le carnaval de Venise et de Rio mélangé pour une bande de partouzards défoncés qui attendent impatiemment la fin des temps parce qu’au moins il va se produire quelque chose d’inattendu dans leur vie ennuyeuse.

Bref, dans ce roman très marqué par son époque, on croise de nombreux voyageurs de l’espace ou du temps, y compris le petit frère de Mao qui critique les « pratiques sexuelles immondes de ces bourgeois dégénérés ». Comme quoi, même dans un million d’années, il restera toujours des gauchistes pour emmerder le monde.

Si la première moitié du roman souffre de quelques longueurs en dépit de son inventivité, Moorcock se lâche dans la seconde partie qui convoque le roman feuilleton et l’esprit des romanciers victorien. L’écrivain, très inspiré, plonge son candide immortel dans le fog épais d’un Londres pétri de convention. Jherek ne comprend rien à ce qui lui arrive (il se rend complice d’un vol, passe en jugement, se fait emprisonner et finalement condamner à mort), ce qui permet à l’iconoclaste Moorcock d’offrir des passages très drôles. Dès lors, cette CHALEUR VENUE D’AILLEURS s’inscrit dans la brève liste des réussites de la SF humoristique.

En résumé, cette vision futuriste mêle humour et désespoir dans un grand foutoir parfois légèrement irritant (on sent l’auteur, sous l’emprise du « new world », vouloir jouer la provocation à grand coup de sexualité débridée, d’inceste et autres perversions) mais souvent vivifiant et divertissant. Une explosion d’inventivités et de non-sens qui réconcilie science-fiction et comédie. Conseillé !

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Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #humour, #Michael Moorcock

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Publié le 1 Août 2018

KONNAR LE BARBANT 1 - LE FILS DU GRAND KONNAR de Pierre Pelot

Dans la lignée de LORD OF THE RINGARDS, Pierre Pelot se lance, au début des années ’80, dans la démolition en règle des clichés de la Fantasy.

Au pays des héros, le Grand Konnar s’ennuie de sa morne existence, entre ripailles et orgies rien de vraiment passionnant ne se passe et les humbles humains ne semblent même plus intéressés par les exploits de ces fiers guerriers. Alors le Grand Konnar décide, via un concours, de recruter de nouveaux héros. Gilbert Lafolette, inscrit par ses collègues au concours, remporte la victoire et décide de se rendre au pays des héros afin d’accomplir sa destinée : devenir le fils (adoptif) du Grand Konnar et adopter son nouveau patronyme de Konnar le Barbant.

Publié en feuilleton dans la revue « Fiction », les aventures de Konnar le Barbant seront ensuite reprises au Fleuve Noir, étendues sur pas moins de cinq tomes et finalement republiées dans une intégrale révisée chez Bragelonne en 2006.

Malheureusement, si tout cela peut faire sourire, ce roman ne va guère plus loin, niveau humour, que son titre en forme de contre-pétrie un peu facile. Sans doute parti d’une boutade en forme d’agacement à l’encontre de la mode des barbares à gros bras, LE FILS DU GRAND KONNAR, premier volet de la saga de notre apprenti héros Konnar le Barbant, avance à gros sabots, bien loin de la dérision respectueuse d’un Pratchett ou d’un Gayman. Ici, Pelot donne dans la parodie bien lourde et sans la moindre subtilité, avec gags pachydermiques et intermèdes graveleux.

Les blagues les plus courtes étant, on le sait, souvent les meilleures cette pochade qui semble écrite au fil de la plume devient assez rapidement lassante, voire laborieuse, tant le romancier parait avoir, à mi-parcours, épuisé toutes les ressources comiques de son intrigue.

En résumé on ne se pressera pas à lire les suites…

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantasy, #Humour, #Parodie

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