Publié le 12 Juin 2019
Ecrivain de science-fiction, John Sladek a écrit deux classiques du crime en chambre close : L’INVISIBLE MONSIEUR LEVERT et cette AURA MALEFIQUE, qui mettent tous deux en scène son détective excentrique au nom délirant de Thackeray Phin. Ce dernier, un Américain vivant à Londres au cœur des années ’70, possède suffisamment de biens pour vivre oisivement et s’adonner à ses passions, notamment la recherche de faux médiums qu’il aime démasquer. Il s’invite ainsi dans une communauté de « psychiques » dans laquelle on trouve un assortiment de personnages haut en couleur comme un prêtre, une star du rock, etc. Au cours d’une soirée de « recherches paranormales », Phin assiste à la disparition inexplicable d’un protagoniste qui pénètre dans une salle de bain pour ne plus en ressortir. Un prélude à un second tour de force puisque notre star du rock s’enferme à son tour sur un balcon avant de se mettre à léviter devant de nombreux témoins…puis de chuter sur le sol où il se tue. A Phin de résoudre cet impossible problème.
Avec L’AURA MALEFIQUE (celle qui, selon les spirites, entoure les futurs défunts), Sladek propose un hommage distancié mais respectueux aux classiques de l’âge d’or du roman policier. Il se confronte ainsi à un des poncifs du « crime impossible » avec cette séance de spiritisme qui tourne mal devant des témoins plus ou moins crédules. L’auteur offre donc deux disparitions inexplicables et cet incroyable chute au cours d’une lévitation forcément expliquée de manière cartésienne (et fort convaincante) dans les dernières pages. Ce tour de force de rigueur reste évidemment mémorable et justifie à lui seul l’inclusion de ce roman parmi les classiques du crime impossible.
Mais l’énigme du « howdunit » n’est pas tout et, heureusement, Sladek ne se limite pas à fournir une explication élégante aux diverses impossibilités. Son whodunit se montre surtout bien mené, rythmé par des dialogues incisifs et ponctué de nombreuses touches d’humour bienvenues. Quelques légers défauts (l’enquête reste un peu lâche) n’entament pas la grande réussite de ce classique de la « chambre close ».