Publié le 6 Novembre 2017

LE GEANT DE PIERRE de Paul Halter

Au milieu des années ’80, Paul Halter (né en 1956) a ressuscité le roman d’énigme en chambres closes avec une série de titres publiés au Masque comme LA MALEDICTION DE BARBEROUSSE ou LA QUATRIEME PORTE (récompensé par un Prix à Cognac) et LE BROUILLARD ROUGE (lauréat du Prix du roman d’aventures).

Devenu le plus prolifique épigone de John Dickson Carr, Halter a écrit une quarantaine de livres qui renouvellent toutes les situations classiques du crime impossible : chambre close, pièce surveillée par des témoins dignes de foi, corps découvert environné de neige ou de sables, prémonition, bilocation, réincarnation, voyage dans le temps, etc. On lui doit ainsi quelques chefs d’œuvres du genre comme LA MORT VOUS INVITE, LE CERCLE INVISIBLE, l’extraordinaire LA SEPTIEME HYPOTHESE ou le formidable LE VOYAGEUR DU PASSE, véritable tour de force de récit policier tarabiscoté.

D’emblée, LE GEANT DE PIERRE apparait comme quelque peu différent du reste de la production de l’auteur. En effet, le crime en chambre close, commis aux temps minoens, s’avère ici anecdotique, l’intrigue principale se consacrant à « la plus grande énigme de tous les temps », à savoir la disparition de l’Atlantide. Autre différence notable avec la plupart des romans d’Halter : le livre approche des 300 pages.

Ce mélange d’énigme historique et de crime en chambre close aurait pu donner une grande réussite mais, malheureusement, tout cela n’est pas très convaincant. Le narrateur, après la mort de son épouse durant l’éruption du mont Saint Helens, décide d’employer l’argent de son héritage (cinq millions de dollars !) à résoudre le mystère entourant la disparition de l’Atlantide. Un jour, en 1980, il rencontre Hélène, une jeune femme un peu hippie qui abuse de la marijuana et semble avoir des réminiscences d’un passé très lointain. Passionné par l’Atlantide, notre héros décide d’en découvrir l’emplacement, qu’il situe à l’île de Santorin. Accompagné d’Hélène, il se rend sur cette île où il retrouve un ami de la jeune femme, Guy. Or, au cours d’une plongée, ce-dernier meurt transpercé par un trident. Un crime inexplicable, à moins d’invoquer la colère de Poséidon…

Avec LE GEANT DE PIERRE, Paul Halter, passionné par l’Antiquité, tente de résoudre l’énigme de l’Atlantide. Le voici donc sur les traces de l’île engloutie en retournant aux sources du récit de Platon et en expliquant les principales hypothèses sur le sujet, ce qui rend l’histoire plutôt bavarde. Les lecteurs peu intéressé par ce mystère peuvent passer leur chemin tant Halter nous abreuve de détails sur cette civilisation disparue. Toutefois, pour contenter ses admirateurs, l’écrivain concocte un crime impossible (un nageur tué par un trident sans quel nul n’ait pu l’approcher) qui renvoie à un autre meurtre commis peu avant la destruction de l’Atlantide. Un grand prêtre s’enferme dans une pièce après avoir blasphémé contre les dieux, ce qui entraine la colère de Poséidon : lorsque la porte s’ouvre on découvre son corps percé d’un trident. Ces deux crimes impossibles ne sont pas vraiment à la hauteur de ce que l’auteur nous a précédemment proposé : les solutions sont assez classiques et évidentes. L’explication de la mort du plongeur, en particulier, s’impose immédiatement…ce qui conduit le lecteur à comprendre où Halter veut nous mener. Or, la pirouette finale déçoit (tout comme les explications de LA MALEDICTION DE BARBEROUSSE) et laisse une impression amère. A croire que la partie policière a été plaquée par l’écrivain sur son intrigue afin de rassurer ses fans.  La partie historique, pour sa part, n’intéressera que les curieux de l’Atlantide. Bref, LE GEANT DE PIERRE n’est pas un mauvais roman (demeure le talent de conteur d’Halter et les notations historiques pour ceux qui aiment ça) mais constitue une déception indéniable et sans doute un des trois ou quatre romans les moins réussis de Paul Halter. Dommage.

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Publié le 3 Novembre 2017

SPIDERMAN OMNIBUS de David Michelinie et Todd McFarlane

Panini propose ici un omnibus très épais (850 pages !) qui compile deux années d’Amazing Spiderman, soit 35 épisodes pour la plupart illustrés par Mac Farlane. Evidemment, tout n’est pas du même niveau mais, dans l’ensemble, cette copieuse lecture se révèle de qualité.

On débute avec un arc consacré au Docteur Octopus qui, lassé d’être toujours battu par Spidey, décide de détruire entièrement New York et on enchaine avec un double épisode centré sur un vilain de seconde zone, Chance. Ce-dernier est cependant relativement intéressant puisque ce mercenaire ne travaille pas pour l’argent mais bien par amour du risque. D’abord adversaire de Spidey, il finit par s’allier au monte-en-l’air et se retourne contre ses employeurs qui l’ont trahi. Plutôt agréable.

Vient ensuite le légendaire épisode 300 qui marque les 25 ans de Spiderman et introduit le plus célèbre de ses vilains, le fameux symbiote extra-terrestre Venom. Pas mal, quoiqu’on eût aimé davantage de développement et que la personnalité d’Eddie Brock (le journaliste disgracié porteur du parasite alien) soit plus creusée. Cet épisode permet néanmoins d’inaugurer un nouveau statu quo : le Tisseur récupère son ancien costume rouge et bleu puis déménage pour s’établir avec Mary-Jane dans un appartement huppé de Manhattan, ce qui aura rapidement de dramatiques conséquences.

SPIDERMAN OMNIBUS de David Michelinie et Todd McFarlane

L’arc suivant montre Spidey s’allier avec Silver Sable et l’Homme Sable (beaucoup de sable donc !) afin de dérouiller quelques nazillons. Rien de bien original pour ces trois épisodes qui traitent des hésitations de Peter Parker à déménager au Kansas (où on lui offre un nouveau job). Notre héros se demande en outre comment va réagir une Mary-Jane toujours présentée comme particulièrement futile et uniquement préoccupée par sa carrière de mannequin. Heureusement, lorsque la tension monte, MJ sait comment détendre son mari. Bref, ces épisodes ne sont pas exceptionnels et ont même pris un coup de vieux (le dessin accuse lui aussi le poids des ans) mais se révèlent parfois amusants avec quelques touches d’humour bienvenues.

Pour la suite, Spidey s’associe encore avec un autre personnage borderline, le Rodeur, afin de récupérer un précieux calice dans lequel un puissant homme d’affaires à dissimuler des informations compromettantes. Le cambrioleur grabataire Black Fox complique la donne mais tout rentre dans l’ordre au final. Pendant ce temps, un riche nouveau venu, Jonathan Caesar, propriétaire de l’appart où logent Peter et sa copine, se montre entreprenant envers MJ. Le scénariste, par petite touche, annonce la suite de son intrigue tandis que Peter affronte le ringard Hanneton Brutal dans un épisode humoristique de transition qui annonce le retour de l’autrement plus redoutable Caméléon.

Une longue intrigue va, par la suite, occuper de manière plus personnelle Peter Parker puisque Mary-Jane est kidnappée par un admirateur détraqué, le précité Jonathan Caesar. Peter, qui pense tout d’abord qu’un de ses ennemis a découvert son identité secrète, mène l’enquête. Il croise quelques vilains de seconde zone, retrouve finalement son jackpot de rouquine et arrête Caesar ce qui conduit, directement, à l’expulsion du couple de leur appartement. Les voici donc de retour chez tante May. Entre temps, Spidey a été pris dans le crossover « Inferno » dont nous ne connaitrons que des épisodes épars. Cela n’aide guère à la compréhension de cet événement qui impacta les trois séries « Spiderman » à la fin des années ’80. Un peu plus tard on croise Mysterio avant un combat entre le Super Bouffon et un Harry Osborn assumant l’identité du Bouffon Vert.

La suite traite des difficultés du couple Peter – MJ, leur recherche d’un appartement abordable à New York, les problèmes de MJ (depuis sa prison Caesar cherche à ruiner sa carrière), le peu de temps dont dispose Peter pour combiner ses études, son job de photographe et sa vie super-héroïque, etc. On retrouve quelques vilains biens connus comme le Lézard, Venom, Scorpion, Rhino, Backlash, etc. Certaines intrigues, malheureusement, se poursuivent hors des pages d’Amazing Spiderman, ce qui nous prive des conclusions de certains arcs, en particulier celui qui voit le Caméléon remplacer Jonah. Pour une fois ne blâmons pas trop Panini : inclure les développements et conclusions de toutes les sous-intrigues auraient doubler l’épaisseur de ce déjà très imposant recueil.

L’histoire la plus longue (en six épisodes) expédie Spidey en Symkarie où il aide Silver Sable à déjouer un « grand complot ». Si le contexte géopolitique se montre restreint et guère crédible, l’intrigue fonctionne agréablement et Spidey croise le Paladin, le radical Solo et même Captain America afin de déjouer les plans de Crane Rouge.

SPIDERMAN OMNIBUS de David Michelinie et Todd McFarlane

Moins convaincant, les derniers récits appartiennent au cross-over ACTS OF VENGEANCE durant lequel les héros combattent des vilains qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de rencontrer. Spidey affronte ainsi Graviton, Magneto et une Tri-Sentinelle, obtenant au passage les immenses pouvoirs de Captain Universe. Malgré les fréquentes notes de bas de page de Panini nous invitant à acheter le cross-over en question (dont les critiques disponibles n’incitent guère à cette couteuse acquisition) tout cela ne semble guère passionnant et lire ces épisodes, souvent amputés de leur début et de leur fin, demeure frustrant. Le tout, assez simpliste, reste cependant compréhensible et distrayant mais ces histoires ne vont jamais au-delà de leur très basique et très geek idée de base : et si on confrontait Spidey à des vilains qu’il n’a jamais combattus, comme ça, sans vraie justification, juste pour voir.

Malgré ses bémols, cet Omnibus s’avère de bonne facture. Au fil des pages MacFarlane prend plus d’aisance avec le personnage et immortalise Spidey dans des poses acrobatiques improbables qui soulignent ses muscles (bon travail d’encrage aussi) et sa toile souvent entortillée de manière très organique. Les histoires combinent, souvent adroitement, la vie quotidienne de Peter et ses soucis journaliers avec son existence super-héroïque, ce qui rend le personnage fort attachant. On a donc les touches d’émotion avec la maladie de Nathan (le protégé de tante May), l’envie de Peter de voler de ses propres ailes tout en restant proche de tantine, les disputes et réconciliations du couple Peter – MJ. Bref, cela se conforme totalement à la volonté de Stan Lee de présenter des personnages extraordinaires dans des situations ordinaires.

Certes, l’omnibus se montre forcément inégal mais, dans l’ensemble, ces quelques 800 pages, agrémentées de bonus un peu chiches, montrent un très bon rapport qualité / prix…à condition de pouvoir aujourd’hui le trouver à un prix décent car la spéculation a fait son oeuvre.

SPIDERMAN OMNIBUS de David Michelinie et Todd McFarlane

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Fantastique, #Comic Book, #Superhéros, #Marvel Comics, #Spiderman

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Publié le 2 Novembre 2017

STAR TREK - LA CROISEE DES TEMPS de Della Van Hise

Ce roman « Star Trek » propose une altération de l’Histoire telle que nous la connaissons, conséquence des manigances des Romuliens. Cela aboutit à une Seconde Histoire, un univers parallèle dans lequel bien des personnes éprouvent un étrange sentiment de dysharmonie, conséquence d’une vie non vécue. En effet, les Romuliens n’ont jamais pu vaincre la Fédération. Par un voyage temporel ils vont altérer le continuum tout en plaçant leur propre flotte en hyper espace afin d’être immunisé contre les modifications engendrées par la Seconde Histoire. Ils tuent trois scientifiques et aboutissent à la non-création du Starfleet que nous connaissons. Pourtant cette idée semble trop forte pour être éradiquée. En affaiblissant les Terriens, ils laissent le champ libre aux Vulcains qui sont, à présent, l’espèce dominante. Le Capitaine Spock commande le Shikhar (L’Enterprise de cette nouvelle réalité) et Kirk, un simple enseigne, est sous ses ordres. Toutefois des actes inconsidérés entrainent l’univers vers la destruction. Spock et Kirk doivent dès lors agir de concert pour rétablir la première ligne temporelle avant qu’il ne soit trop tard.

On le sait, dans ce genre de série tirée d’une licence à succès on trouve, obligatoirement, à boire et à manger. On sait également que, même si on aime retrouver des personnages connus et appréciés, les chances de tomber sur un roman médiocre sont nettement supérieures à celles de tomber sur un classique méconnu. LA CROISEE DES TEMPS constitue donc une excellente surprise qui, à l’image du formidable PRIME DIRECTIVE, exploite à merveille l’univers « Star Trek ». Le scénario se révèle tortueux (« Les complexités de l’altération temporelle sont vraiment paradoxales. ») mais bien mené, riche en péripétie et même saupoudré d’un humour bienvenu. Ainsi, un des protagonistes s’adresse à Kirk en lui donnant une tunique de soie bleu : « vous vivrez plus longtemps comme ça Jim. Sur ce vaisseau il n’est pas très intelligent de porter une tunique rouge lorsque vous faites partie d’une patrouille d’intervention ». Evidemment, le roman ayant été écrit au milieu des années ’80 certaines remarques donnent le sourire, comme ces ordinateurs du XXIIIème siècle fonctionnant à l’aide de cassette. Mais passons…

Le récit, alerte, fonctionne joliment en dépit de quelques longueurs (nous sommes dans le format « super Star Trek » soit un peu plus de 300 pages) et prend le temps nécessaire pour approfondir la relation d’amitié entre Kirk et Spock qui semble destinée à se perpétuer quels que soient les univers. Autre idée novatrice, le continuum lutte pour rétablir la ligne temporelle antérieure, idée reprise dans le 22 11 63 de Stephen King dans lequel le temps devient lui-même un antagoniste des personnages. Ici les héros, « déracinés temporels » sombrent peu à peu dans la folie.

Divertissant, bien mené et intelligent dans sa gestion des paradoxes temporelles, servis par une écriture efficace qui parvient à caractériser avec brio des personnages bien connus, LA CROISEE DES TEMPS constitue en résumé une belle réussite dans la masse (immense) des romans inspirés par la célèbre série.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #Uchronie, #Star Trek

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