Publié le 6 Février 2019

CELUI QUI CHUCHOTAIT DANS LES TENEBRES d'Howard Phillips Lovecraft

Cette novella qui semble synthétiser toutes les thématiques et obsessions de Lovecraft pourrait bien être la porte d’entrée idéale pour découvrir l’écrivain. Elle commence, comme souvent, par une lettre revue par le professeur Albert Wilmarth de l’université d’Arkham spécialiste du folklore. Le courrier provient d’un autre lettré, Henry Akeley, habitant d’une région du Vermont où se produisent d’étranges phénomènes. On y entendrait, par exemple, des chuchotements dans la nuit qui seraient émis par des créatures venues d’un autre monde.

CELUI QUI CHUCHOTAIT DANS LES TENEBRES oppose classiquement deux personnalités cultivées : Wilmarth est le sceptique, qui s’intéresse aux superstitions et aux croyances mais les considèrent simplement comme des racontars. Face à lui il trouve Akeley le convaincu, persuadé qu’il existe des créatures surnaturelles dans les collines du Vermont. Il recueille des témoignages, des preuves diverses de la présence extra-terrestre comme d’étranges pierres couvertes de symboles ésotériques.

La relation épistolaire de ces précurseurs de Mulder et Scully confère au récit son originalité car, sinon, nous sommes dans le Lovecraft pur jus : un mélange de science-fiction cosmique, de fantastique et d’horreur avec les fameux grimoires maudits et autres connaissances interdites. Les différentes lettres échangées suivent la progression de l’angoisse et la multiplication des phénomènes terrifiants, créant une atmosphère étouffante. Comme toujours avec l’écrivain nous restons dans un certain flou, un mystère entretenu par des descriptions vagues et une épouvante allusive qui se refuse à donner trop d’explications. Ce texte, de part sa forme (un court roman) reste toutefois plus limpide et moins alambiqués que la plupart des nouvelles de l’écrivain, sa progression se montre plus traditionnelle et linéaire.

Comme souligné précédemment CELUI QUI CHUCHOTAIT DANS LES TENEBRES n’est peut-être pas le meilleur texte de Lovecraft mais il reste sans doute le plus représentatif, le plus…lovecraftien dirait on ! Si on apprécie ce style, cette narration parfois ampoulée, ce vocable souvent désuet alors il très probable que l’on devienne un amateur de Lovecraft. Dans le cas contraire il est sans doute préférable de ne pas poursuivre.

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Publié le 4 Février 2019

DETECTIVE COMICS TOME 4: DEUS EX MACHINA

Detective Comics #957 à #962.

Ce quatrième recueil remet en lumière un personnage très intéressant de la mythologie du Chevalier Noir, Jean Paul Valley, alias Azrael, justicier rentre-dedans ayant remplacé Batman après que ce dernier ait été vaincu par Bane (durant la saga KNIGHTFALL). Nous retrouvons donc Valley confronté à un nouveau vilain mandaté par l’Ordre de Saint Dumas et destiné à lui succéder, Ascalon. En parallèle ce tome approfondit la relation entre le Caped Crusader et la magicienne Zatanna, notamment grâce à des flash-backs réussis. Toute cette histoire est efficace, développant les relations entre les différents membres de l’équipe. Si Azrael et Zatanna sont mis en avant, le scénariste approfondit également les relations entre Batman, Batwoman et Luke Fox. Le premier récit, consacré à Spoiler, semble plus anecdotique mais annonce quelques développements ultérieurs et remet en lumière ce personnage amené à prendre de l’importance par la suite.

Ce quatrième tome confirme les qualités de Detective Comics : intrigue bien menée et joliment rythmée, alternance de passages intimistes et de scènes d’action efficaces, approfondissement judicieux de la mythologie du Dark Knight via des flash-backs éclairants, etc. Batman étant à présent entouré d’une équipe, nous faisons, à chaque nouvel arc, un peu plus connaissance avec ces nouveaux alliés, par exemple l’ancien super criminel Gueule d’Argile en quête de rédemption quoique ce soit réellement Jean Paul Valley qui vole ici la vedette à toute l’équipe.

DETECTIVE COMICS TOME 4: DEUS EX MACHINA

Les scénaristes proposent aussi quelques coups de théâtre savamment distillés et le récit se termine logiquement par un cliffhanger de qualité. Le tout étant servi par des dessins de haute volée avec quelques belles planches référentielles, notamment lorsque Azrael retrouve sa glorieuse armure d’antan. Alors évidemment on pardonne une narration classique qui se repose une fois de plus sur des événements oubliés (ici la relation jadis nouée par Batman et Zatanna) et l’énième artifice de la mort supposée de Robin (Tim Drake pour cette fois) pour faire avancer le récit.

Bref, aucune raison de se priver de ce nouveau volet de la grande histoire du Batman.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Batman, #Comic Book, #DC, #Superhéros

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Publié le 1 Février 2019

LE PASSAGE de Justin Cronin

La première chose qui frappe devant le bouquin c’est, forcément, son épaisseur. Une brique ! Même au sein d’une science-fiction souffrant de plus en plus d’éléphantiasis, le roman de Justin Cronin détonne avec (en poche) ses 1260 pages bien tassées. Et il s’agit seulement du premier tome d’une trilogie apocalyptique accumulant les superlatifs et s’étendant sur près de 3 000 pages.

Une fois la lecture entamée, on constate également que l’auteur semble totalement imprégné des codes de la série télévisée. Si on a souvent dit des auteurs de best-sellers de la fin du XXème siècle qu’ils écrivaient « à la manière d’une superproduction hollywoodienne » dont ils avaient intégré la narration alors Cronin propose peut-être la première « série télé » sur papier. Pas étonnant d’ailleurs que les droits aient été acquis (avant même la publication du livre !) par Ridley Scott qui songeait à en tirer trois films…avant qu’une adaptation pour les petits écrans soit lancée début 2019.

Au programme : multiplication des personnages, abondance des lignes narratives destinées à se rejoindre à mi-parcours, temporalité étirée avec plusieurs bonds temporel (l’intrigue se déroule sur plus d’un siècle !),…

Tout débute dans un futur très proche. Tandis qu’un commando militaire traque des individus atteints d’une étrange maladie, au Texas un condamné à mort et onze autres prisonniers sont choisi pour participer à une expérience médicale révolutionnaire. Mais, bientôt, un virus est libéré, se propage sur la planète entière et aboutit à un effondrement total de la civilisation, dévastées par des hordes d’infectés avides de sang. Un siècle plus tard, une petite communauté survit face à ces « vampires ». Surgit alors une « fille de nulle part », apparemment âgée de 14 ans mais en réalité né un siècle auparavant…Elle possède peut-être la clé permettant de relancer la civilisation.

La première partie, la plus prenante, propose une série d’expériences top secrètes menées par l’armée américaine. Le mystère est prenant, les personnages bien caractérisés, le background étoffé sans devenir envahissant. Impossible de ne pas penser à Stephen King engagé pour écrire un épisode de X Files (comment ça il l’a fait ? Bref…).

La suite se déroule après un bond de près de cent ans. L’apocalypse a eu lieu, l’humanité a tenté de survivre, la Californie a quitté l’union, l’Europe a fermé ses frontières mais rien n’a pu empêcher l’effondrement. Du coup, au début du XXIIème siècle, les hommes survivent dans des petites colonies retranchées comme des forteresses féodales. Le retour à l’âge des ténèbres s’annonce puisque tout va bientôt s’éteindre… « Mad Max » dans « La Nuit des morts vivants » ou « Je suis une légende ». Des infectés, des « vampires », des viruls (dénomination officielle),…la fin du monde est là et bien là. Bref, on entre dans le survival horrifique post-apocalypse façon blockbuster hollywoodien. Cette partie reste intéressante mais n’évite pas quelques baisses de rythme, le romancier se perdant parfois dans ses (trop) nombreux protagonistes certes habilement brossés mais qui n’évitent pas toujours les lieux communs (romance contrariée, infidélité,…). Avec les gardes protégeant la colonie LE PASSAGE s’apparente parfois à une relecture de certains chapitres du TRONE DE FER dans l’univers de « Walking Dead ».

Les plus critiquent dirons même que le bouquin s’apparente parfois à un de ces romans de gare des années ’80 (souvenez-vous des collections « Apocalypses » ou « Le Survivant » avec leurs titres tapageurs comme LES MURAILLES DE L’ANGOISSE ou ENFER CANNIBALE) à la différence que Justin Cronin étire son récit non pas sur 200 pages mais sur 1200. Mais ne faisons pas trop la fine bouche : en dépit de sa longueur et de certaines longueurs (comme dans une série il y a fatalement des intrigues et des personnages moins intéressants – de manière subjective), la lecture de ce roman reste fluide et agréable, quoique certains passages puissent exaspérer par leur lenteur. On peut donc se permettre de les survoler…

Si certains, qui « binge watch » des séries, voudront s’enfiler ce pavé d’une traite les plus raisonnables peuvent opter pour une lecture fractionnée en trois ou quatre fois, histoire de raviver l’intérêt pour un roman sans doute plaisant mais incontestablement trop long d’au moins 300 pages.

Loin d’égaler le classique LE FLEAU de Stephen King qui demeure le mètre étalon du post apocalypse littéraire, LE PASSAGE demeure efficace et trouvera certainement son public. Mais, maintenant que la boucle est bouclée et que le bouquin est devenu une série peut-être serait il plus judicieux de passer directement à l’adaptation télévisuelle.

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