Publié le 6 Octobre 2021
Pour une de ses dernières créations, peu avant son décès, Asimov nous propose le gentil démon de deux centimètres Azazel (à moins qu’il s’agisse d’un extraterrestre venu d’une autre dimension ? La question reste posée), petite créature facétieuse mais pas vraiment méchante, capable d’exaucer bien des vœux. Pas en échange d’une âme (il ignore ce que c’est), mais simplement pour montrer sa puissance et lui permettre de s’occuper depuis qu’il a quitté l’enfer (un endroit très bien, contrairement à ce que disent les mauvaises langues). Le hic c’est qu’il finit toujours par causer des soucis à ceux qui lui réclame un service. D’où 18 nouvelles humoristiques assez courtes (une douzaine de pages en moyenne) qui démontrent l’art de la chute d’Asimov, le principe immuable étant, évidemment, qu’il ne faut jamais souhaiter quelque chose car on pourrait bien l’obtenir. Une seule thématique donc mais beaucoup de variations possibles, d’ailleurs Asimov écrivit par la suite d’autres nouvelles sur ce petit démon, réunies dans le recueil LEGENDES
La jeune fille amoureuse d’un athlète qui souhaite à son élu de devenir un champion, la cantatrice désirant devenir la meilleure chanteuse du monde, la femme qui veut immortaliser sur une photo le sourire ravageur de son époux,…Tous obtiendront leur souhait mais sans que leur situation n’en soit améliorée pour autant. Bien au contraire ! Autre classique du vœu, surtout pour les mâles : devenir irrésistible pour la gent féminine. Ce qui peut rapidement devenir épuisant. Voici quelques exemples des facéties de notre Azazel.
Toutes les nouvelles ne sont pas d’égale qualité. Jouant la carte de l’humour et de la dérision de manière un brin systématiques, certains textes tombent un peu à plat : leurs références ont vieilli ou les récits tirent un peu à la ligne (« les méfaits de l’humanité », par exemple). Mais d’autres fonctionnent parfaitement et combinent érudition, humour et imagination (« On est logique ou on ne l’est pas »), sans oublier une certaine autodérision d’Asimov vis-à-vis de lui-même et de son métier, comme quoi il n’avait pas toujours l’égo surdimensionné que mentionne ses détracteurs.
Recueil de pur délassement, AZAZEL permet donc au bon docteur de s’essayer à la Fantasy humoristique « à chute » avec beaucoup de verve et d’inventivité. Le peu de pages de chacune des nouvelles oblige l’auteur à écrire de manière très ramassée et donc efficace afin que le « gag » final ne traine pas. Une lecture aisée, facile et pourtant très plaisante grâce à l’imagination toujours aussi enlevée d’Asimov. Nous sommes sans doute loin de ses nouvelles les plus mémorables (« Quand les ténèbres viendront », « la dernière question », « L’homme bicentenaire ») mais le tout demeure une agréable lecture à déguster à petite dose par temps morose.