LES 200 CLITORIS DE MARIE BONAPARTE d'Alix Lemel

Publié le 11 Mai 2023

LES 200 CLITORIS DE MARIE BONAPARTE d'Alix Lemel

Dans ce cours essai romancé, nous suivons l'opposition entre Freud et sa disciple française, Marie Bonaparte au sujet d'une question oh combien centrale de la psychanalyse. Pour Sigmund, le clitoris est un "pénis vestigial": il n'a qu'une utilité transitoire et masturbatoire pour la jeune fille avant qu'elle ne devienne une vraie femme par la découverte du le plaisir vaginal. D'ailleurs, en cas de problème, la chirurgie est là et si Freud conseille une excision symbolique afin que la femme puisse se mettre sous la domination de l'Homme, il n'est pas contre une excision réelle pour les récalcitrantes. Marie Bonaparte n'est pas tout à fait d'accord, d'ailleurs elle a eu beau recourir trois fois à la chirurgie, rien n'y fait, dans sa pratique le clitoris reste supérieur au vagin. Une position qu'elle explique dans un article pseudoscientifique après avoir, selon ses dires, rassemblé un échantillon de 200 clitoris afin de voir si le bouton fonctionne, même éloigné du vagin. Or il semble que le problème vienne de là.

Descendante de Napoléon, la princesse vit en outre un étrange ménage à trois avec son mari, homosexuel honteux, et le compagnon de celui-ci qui la rejoint dans leur lit. Elle s'intéresse à la sexualité et à la psychanalyse mais ne trouve pas de vraie réponse à son questionnement. En effet elle est clitoridienne, ce qui parait inconcevable pour Sigmund, pour qui seul la sexualité vaginale présente un intérêt. Fondatrice de la société de psychanalyse française, opposée à Lacan et sauveuse de son "cher père" Sigmund (elle organise son exil lors de la prise de pouvoir par les Nazis), Marie s'interroge: comment concilier sa position clitoridienne avec celle, vaginale, de Freud? Elle tente d'y parvenir par la chirurgie (elle rapproche son clitoris de son vagin par trois opérations successives) et par l'analyse mais aucune des deux méthodes ne fonctionnent réellement.

Mais Marie Bonaparte, qui se livre à une analyse "psy" des textes d'Edgar Poe, se retrouve également dans "La lettre volée" et récupère la correspondance de Sigmund, lequel entretient pendant des années une relation épistolaire passionnée avec un confrère fort proche d'une relation homosexuelle. Or le grand homme se montre honteux. Il préfère que tout ça ne se sache pas, ce qui le met en position de faiblesse face à Marie Bonaparte et son clito agressif. Le chasseur d'hystériques fait profil bas…

En 115 pages, l'auteur nous amuse avec ce récit tellement incroyable qu'il ne pouvait être qu'authentique et déboulonne un peu plus la statue de Freud. Un duel philosophique érudit et énergique qui se lit très vite, instructif et divertissant.

Rédigé par hellrick

Publié dans #Essai, #Novella (roman court), #Humour, #Biographie

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