SHERLOCK HOLMES ET LES MONSTRUOSITES DU MISKATONIC de James Lovegrove
Publié le 13 Janvier 2022
Etonnamment, alors que l’engouement pour Cthulhu n’a jamais été aussi prononcé et que nous mangeons du Sherlock a toutes les sauces depuis plusieurs années, rares sont les auteurs à avoir fusionné ces deux univers. On se souvient de l’excellent nouvelle « Une étude en émeraude » de Neil Gaiman mais peu d’autres si étaient risqués. La rationalité du limier de Baker Street se marie, en apparence, assez mal avec une horreur cosmique qu’on imagine davantage du ressort d’Harry Dickson. Néanmoins, ce deuxième volet d’une trilogie confrontant Holmes et les Grands Anciens se révèle convaincante, respectueuse et bien menée.
Au printemps 1895, Sherlock Holmes et John Watson sont fatigués. Quinze ans de combats contre les Grands Anciens ont laissé des traces : le premier a vieilli prématurément, le second a perdu son épouse. Ils acceptent cependant de traiter le cas d’un homme, amnésique et mutilé, hébergé à l’asile de Bedlam. Il est le seul survivant d’une expédition partie à l’aventure dans l’espoir de capturer un légendaire Shoggoth. Mais Holmes et Watson vont découvrir que les apparences sont parfois trompeuses…
Le roman débute à la manière de Conan Doyle avec une enquête menée par Holmes, toujours aidé de Watson. Ce-dernier prend des notes « pour plus tard » quoique l’équivalent littéraire de Sherlock soit mort, tué avec Moriarty lors du « dernier problème ». Le bon docteur a donc renoncé aux aventures, pourtant lucratives, de sa version « édulcorée » de Holmes, lequel affronte – dans les livres - des criminels ordinaires et non les entités surnaturelles combattues par le « véritable » détective. On le voit, nous sommes en plein pastiche et l’auteur ne se prive pas de quelques clins d’œil comme la présence d’un certain Joshi, bien connu des lecteurs lovecraftiens, ici personnifié en gardien de l’asile Bedlam. Les références et clins d’œil « canoniques » s’avèrent eux aussi nombreux, Watson se démenant pour transformer les rencontres surnaturels en crimes de tous les jours.
La seconde moitié du bouquin tient davantage de Lovecraft et constitue le récit d’une expédition partie à la chasse au Shoggoth. Forcément, puisqu’un des membres de la dite expédition se nomme Whateley, la situation se dégrade rapidement et des expériences pas très catholique de transferts d’identité se produisent à bord du navire.
Dans les derniers chapitres, les deux mythologises se rassemblent : Moriarty, Holmes, les Grands Anciens, les rituels, les possédés,…James Lovegrove connait sa matière et maintient l’intérêt même si le roman se montre plutôt linéaire et, en particuliers durant la partie consacrée à l’expédition scientifique, prévisible. Les connaisseurs de Lovecraft seront donc rarement surpris mais ce n’est qu’un défaut mineur car le roman, bien mené et rythmé, parvient néanmoins a maintenir l’intérêt et le lecteur passe un bon moment. De la bonne littérature d’évasion policière et fantastique.