LES DESERTEURS TEMPORELS de Robert Silverberg

Publié le 12 Février 2018

LES DESERTEURS TEMPORELS de Robert Silverberg

Ecrit en 1967 voici un plaisant roman de science-fiction qui aborde, par la bande, la thématique du voyage dans le temps et des paradoxes temporels.

Nous suivons les pas de Joe Quellen, secrétaire criminel de septième classe (ce qui n’est pas si mal, il peut posséder un appartement d’une pièce) vivant sur la Terre ultra surpeuplée de 2490 dirigée par un invisible Gouvernement Suprême. Quellen, grâce à la téléportation, se réfugie régulièrement en Afrique, dans une zone paradisiaque normalement réservée aux plus hautes instances (la deuxième classe). Cette infraction l’oblige à payer une somme rondelette à un de ses collègues, apprenti maitre chanteur. A cette époque se déroule également un curieux phénomène : des individus, désespérés, « sautent » dans le temps et deviennent des « déserteurs temporels », se réfugiant cinq siècles auparavant. Le fait a été enregistré et il n’est pas question de s’y opposer tant les risques sont grands de détruire le continuum. Après tout le chef suprême de la Terre est peut-être lui-même un lointain descendant d’un de ses « sauteurs ». Pourtant Quellen enquête sur l’étrange organisation clandestine dirigée par un certain Lanoy qui se charge d’expédier dans le passé ses concitoyens. Que fera t’il une fois Lanoy identifié ?

En 190 pages, Silverberg démontre son talent pour offrir un récit rythmé qui brosse un tableau plausible d’un futur possible : la société y est totalement hiérarchisée, chacun appartient à une classe spécifique et le monde, incroyablement surpeuplé en dépit de mesures drastiques, est devenu pour beaucoup quasiment invivable. D’où le succès d’une organisation secrète qui se propose, contre rémunération, d’envoyer se perdre dans le temps les personnes les plus désespérées.

Si beaucoup de détails ont vieillis dans le décorum (la technologie imaginée pour le XXVème siècle parait déjà en grande partie obsolète aujourd’hui), le futur décrit n’en reste pas moins intéressant avec cette planète victime d’une surpopulation effarante et ses habitants répartis dans des classes sociales rigides. Silverberg imagine également des échappatoires possibles offertes aux humains trop cadenassés : religions bizarres, rites érotiques particuliers (des cérémonies de vomissements rituels qui préludent aux orgies), usages des drogues généralisées dans « les palais de l’illusion », prostitution institutionnalisée, etc. Tout semble prévu pour éviter que la bouilloire ne déborde, l’Etat se souciant de proposer des soupapes de sécurité afin d’éviter la révolte.

L’écrivain brosse de beaux portraits, caractérisant avec efficacité mais simplicité son principal protagoniste, un employé administratif de seconde zone tenté par une rébellion mineure (la possession d’un petit jardin africain) qui va lui causer bien du souci durant son enquête sur les « déserteurs temporels ». Les personnages secondaires, eux aussi, sont intéressants, comme quoi il n’est pas toujours nécessaire de pondre des pavés de 1000 pages pour rédiger un roman à la fois intelligent et divertissant.

Proche dans ses thématiques d’autres romans de l’écrivain comme LES DEPORTES DU CAMBRIEN ou LES TEMPS PARALLELES (ce dernier proposé dans le même recueil « Time Opera »), LES DESERTEURS TEMPORELS constitue une bonne porte d’entrée dans l’univers d’un des géants de la science-fiction américaine.

Rédigé par hellrick

Publié dans #science-fiction, #anticipation, #Dystopie

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