Après sa prestation sur les Avengers, Jonathan Hickman effectue un break avec Marvel. Lorsqu’il revient, en 2019, il propose de relancer l’univers « Mutants ». Pour ce faire, Hickman imagine deux séries qui se répondent, longues de 6 épisodes chacune : « House of X » et « Power of X ». Les voici rassemblées dans un très épais volume de 450 pages. Hickman se charge de redéfinir les X-men et toutes les séries dérivées (qui seront logiquement supprimées). Une tâche énorme que le scénariste parviendra pourtant à mener à bien.
L’intrigue est vaste : nous voyons Colossus, Tornade, Diablo, etc. sous la guidance de Xavier. Les Mutants disposent à présent d’une ressource incroyable : les fleurs de Krakoa. Celles-ci possèdent des propriétés curatives extraordinaires et prolongent la longévité. Différents ambassadeurs sont accueillis par Magneto, en remplacement de Charles Xavier, qui leur explique les souhaits des Mutants. Le récit se déplace alors de Westchester à Krakoa et nous rencontrons Marvel Girl, Wolverine et bien d’autres héros. Nous visitons également une station spatiale et assistons au combat entre les Fantastiques et les anciens membres de la confrérie, à savoir le Crapaud, Dents de Sabre et Mystique. Très vite, tout se complexifie !
Le scénariste se fait plaisir et lire ce récit d’une traite (ou du moins dans un intervalle de temps restreint) permet de ne pas se sentir (trop) perdu. Car Hickman balance de très nombreux personnages, entremêle les lignes narratives et temporelles, se permet des pages de texte dénuées de dessin qui expliquent les bienfaits des fleurs de Krakoa, le problème de l’augmentation de la population mutante ou la composition de diverses organisations en opposition.
L’intrigue passe vraiment à la vitesse supérieure en imaginant les mutants comme un peuple en construction. Ainsi, ils se détachent peu à peu de la branche homo-sapiens en se créant leur propre alphabet, leur langue, leur nation avec leurs dirigeants et leurs lois. Nous sommes ici très loin des « bêtes » bastons entre gentils mutants et mauvais mutants que proposaient les X Men à leurs débuts, voici six décennies. Le scénariste ne nous offre ainsi pas moins de dix vies possibles, soit autant de futurs envisageables, pour une mutante possédant le pouvoir de se réincarner. Or, dans tous les cas, le rêve de Xavier semble vouer à l’échec.
Servi par des dessins impeccables mis au service de l’intrigue mais capables, également, de planches d’une grande richesse, ces douze épisodes constituent une belle reconstruction de l’univers mutant. Avec une option évidente : privilégier le côté politique et social ainsi que la crédibilité de l’ensemble tout en questionnant le droit à la différence. L’option existe évidemment depuis soixante ans chez les X-men mais a rarement été aussi bien exploitée.
Entre le redémarrage, l’exploitation d’un riche passé (Hickman ne fait pas table rase mais pioche dans ce qui l’intéresse), le soft reboot et, surtout, la préparation du futur placé sous la continuité de ce riche nouveau statu quo, HOUSE OF X / POWER OF X s’impose comme une œuvre majeure de Marvel. Un déjà classique de la BD super-héroïque et un des récits les plus ambitieux de la Maison des Idées.