science-fiction

Publié le 19 Mars 2020

STAR TREK: LE RETOUR de William Shatner et Judith et Garfield Reeves-Stevens

Attribué à William Shatner mais sans aucun doute écrit par ses « collaborateurs » Judith et Garfield Reeves-Stevens (prolifiques auteurs de la franchise ayant notamment offert l’excellent PRIME DIRECTIVE), LE RETOUR constitue un excellent roman « Star Trek », les auteurs effectuant le lien entre les différentes séries, que ce soit « Star Trek The Original Serie », « Star Trek The Next Generation » et « Deep Space Nine ». L’intrigue se veut la suite du film « Star Trek Generations » qui confrontait déjà la vieille garde (Kirk) à la nouvelle génération (Picard). Ici, l’histoire, certes alambiquée, n’en est pas moins très efficace puisqu’elle implique une nouvelle résurrection de Kirk par l’improbable alliance des Romuliens et des Borgs en vue d’assassiner Picard, bien proche pour sa part de retrouver son côté obscur et de redevenir Locutus.

Juste après « Star Trek Generation », en 1994, Shatner envisage une nouvelle aventure de Kirk sur les grands écrans, intitulées « Fires of Olympus ». La Paramount se montre intéressée, notamment par l’utilisation des Borgs, mais estime qu’il est temps de passer le relai à la Nouvelle Génération. Shatner publie finalement le roman qui crée une « timeline » alternative à la saga cinématographique (dénommée affectueusement « Shatnerverse »).

Le roman aurait certainement donné un excellent film (bon, on a eut à la place « Star Trek First Contact » qui reste le meilleur long-métrage de la saga donc ça passe), il permet de retrouver tous les personnages préférés des fans : Kirk (le livre est, on s’en doute, entièrement construit à sa gloire), Spock, McCoy, Picard, Riker, Beverly Crusher, Deanna Troy, Julian Bashir, Worf, Data, les Borg et même V’Ger, sans oublier un nouvel et improbable Enterprise.

Est-ce de la grande littérature ? Non ! Est-ce de la grande science-fiction spéculative ? Non plus ! Est-ce de la sci-fi pure et dure, pleine d’action, de rebondissements, de combats spatiaux, de voyages temporels, de personnages iconiques et d’aventures échevelées ? Oui ! 100 fois oui ! STAR TREK LE RETOUR est simplement de l’excellent divertissement et de l’excellent « Star Trek ». Parfois, on n’en demande pas plus. Sauf de poursuivre la lecture du « Shatnerverse » avec les cinq autres volumes disponibles en français (sur les neuf édités en anglais).

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Cinéma, #Space Opera, #science-fiction, #Star Trek

Repost0

Publié le 18 Mars 2020

HISTOIRES MYSTERIEUSES d'Isaac Asimov

Réédité en un seul épais volume, les deux tomes des HISTOIRES MYSTERIEUSES d’Asimov rassemblent les textes du Docteur mêlant science-fiction et policier. Les plus intéressantes donnent la vedette à Wendell Urth, spécialiste des extraterrestres n’ayant jamais, par peur des moyens de transport, quitté son petit chez lui. Asimov pousse ici à son paroxysme le principe du « armchair detective » des romans whodunit de l’âge d’or puisque notre héros résout toutes les énigmes insolubles sans bouger de sa maison.

D’autres nouvelles fonctionnent sur l’humour et se moquent gentiment des milieux scientifiques (« La cane aux œufs d’or ») ou se basent sur des calembours (« Cache-cash »). « Le patronyme accusateur », histoire purement policière mais basée sur la science, annonce les solutions à la fois astucieuse, évidente (une fois la chute dévoilée) et amusante du Club des Veufs Noirs tandis que « A port Mars sans Hilda » se veut un pastiche gentiment coquin (ça reste ultra soft, Asimov oblige) de James Bond mais ne réussit pas à convaincre. Comme dans les classiques du policier, Asimov joue « fair play » et offre aux lecteurs la possibilité de résoudre les énigmes proposées…bien peu y arriveront évidemment !

On retrouve également une historie de pure sf, « Au large de Vesta », qui ne comporte pas d’élément policier (mais reste construite comme un puzzle à résoudre). Explication à cette inclusion ? Asimov reviendra en guise d’hommage à ce texte de jeunesse 20 ans plus tard avec « Anniversaire » dans lequel un trio d’astronautes (les survivants miraculés de la nouvelle précédente) se lance sur la piste d’un mystérieux objet de grande valeur disparu dans la destruction de leur vaisseau. Technologiquement bien daté (même si Asimov avait imaginé un Internet très primitif avec son omniscient ordinateur Multivac) mais plaisant. Deux nouvelles (Le très réussi « Mortelle est la nuit », le plaisant « La poussière qui tue ») traitent de sujets similaires : un individu pense commettre un crime parfait mais un détail révélateur accuse le criminel. Dans les deux cas ce sont les habitudes, liées aux voyages spatiaux, qui incriminent le coupable. Dans « Le carnet noir » un homme invente le voyage temporel et en profite pour « simuler » sa mort à des fins publicitaires en profitant de la création d’un « double » temporel. Amusant en dépit d’un côté très prévisible un peu gênant.

« La clé » donne à nouveau l’occasion à Wendell Urth de résoudre une énigme d’apparence insoluble (la localisation d’un artefact extraterrestre) tandis que la « Boule de billard » utilise les théories de la physique pour permettre à un chercheur revanchard de commettre le crime parfait.

Dans l’ensemble, ce recueil s’avère une très plaisante lecture avec des textes certes parfois un peu datés (dans leur construction), obsolètes par les progrès scientifiques (Asimov s’en excuse avec humour), peu convaincants (encore une fois, « A port Mars sans Hilda » s’impose comme le texte le moins réussi) ou quelque peu prévisibles mais, dans l’ensemble, voici une anthologie divertissante et astucieuse combinant policier d’énigme et science-fiction.

Voir les commentaires

Repost0

Publié le 6 Mars 2020

OEUVRES TOME 3 de Howard Phillips Lovecraft et August Derleth

Si cette dernière anthologie rassemble les textes de Lovecraft concernant les « Contrées du Rêve » (avec quelques classiques comme « la quête de Kadath »), le gros morceau de ce recueil se consacre aux « collaborations » entre HPL – August Derleth. Soit plus de 600 pages en (très) petits caractères qui permettent une vue globale de l’évolution du mythe de Cthulhu à la suite du décès de HPL.

Outre des récits tirés des précédents recueils disponibles en français (L’OMBRE VENUE DE L’ESPACE, le roman LE RODEUR DEVANT LE SEUIL, LE MASQUE DE CTHULHU, LA TRACE DE CTHULHU), l’anthologie offre des textes moins facilement accessibles rassemblés sous l’intitulé LES VEILLEURS HORS DU TEMPS, une traduction de l’ultime recueil de Derlteth, « The Watchers out of time » jusqu’ici inédit en français. Si le célèbre « La chambre condamnée » était proposé dans le recueil L’AMULETTE TIBETAINE (et précédemment dans « Histoires insolites ») « Le pêcheur du Falcon Point », « Le trou des sorcières », « L’ombre dans la mansarde », « Les frères de la nuit », « L’horreur de l’Arche centrale », « L’argile bleue d’Innsmouth » et « Les veilleurs hors du temps » seront autant de découvertes pour l’amateur.

« La chambre condamnée » est typique de Derleth, une séquelle lointaine de « L’abomination de Dunwich » de Lovecraft. Guère original mais plutôt efficace. Nous sommes à Dunwich et nous retrouvons un certain Abner Whateley ayant hérité (bâillement) des papiers de son grand-père Luther et d’un vieux moulin transformé en lieu de résidence. Rien de franchement transcendant pour les lecteurs de Lovecraft qui devinent la suite des événements mais la nouvelle, très linéaire, se lit sans déplaisir. Elle fut assez médiocrement portée à l’écran sous le titre « La malédiction des Whateley ».

« Le pêcheur du Falcon Point », beaucoup plus courte, traite, une fois de plus, des amours contre nature entre les humains et ceux des profondeurs. Derleth réussit une sorte de plaisant « conte de fées » macabre plutôt agréable à lire.

Le problème de Derleth, dans ses pastiches lovecraftien, a souvent été de tourner autour des mêmes thématiques, reprenant des éléments tirés du fameux « Livre de raison » de Lovecraft (pour justifier le principe de la « collaboration » post mortem) en les incluant dans des « remakes » déguisés des histoires les plus connues du Maitre. « Le trou des sorcières » n’échappe pas à ce travers mais demeure une des plus belles réussites de l’écrivain. Un jeune professeur débarque dans une école rurale d’Arkham et se confronte à un jeune garçon manifestement « différent », Andrew Potter. Peu à peu le narrateur arrive à la conclusion que la famille d’Andrew est sous l’influence d’une force maléfique provenant des étoiles (Hastur probablement) et, avec l’aide d’un collègue et des fameuses pierres portant le sceau de R’lyeh, il tente de combattre cette influence nuisible. Si, de prime abord, « Le trou des sorcières » ne se distingue aucunement des nombreuses autres « collaborations » entre Derleth et Lovecraft en ressassant des thématiques déjà abordées par HPL (l’histoire mélange des éléments du « Monstre sur le seuil » et de « La couleur tombée du ciel »), le tout fonctionne parfaitement. On y retrouve un Derleth à son meilleur, plus terre à terre que son mentor, plus bis sans doute, plus classique aussi (avec l’opposition du Bien et du Mal et les talismans permettant de s’en protéger) mais rudement efficace.

De son côté, « L’ombre dans la mansarde » débute de manière conventionnelle : le narrateur, Adam Duncan, hérite de son grand-oncle (bâillements à nouveau) à la réputation sinistre (sorcellerie, grimoires maudits, disque de Gims,…on connait la chanson) une maison à Arkham, la ville aux « toits en croupe ». Bref, rien de franchement original : Derleth reprend sa bonne vieille technique du « mash up littéraire » en combinant des éléments venants de « La maison de la sorcière », « L’affaire Charles Dexter Ward », « Le monstre sur le seuil », etc. Le tout se lit sans déplaisir ni passion. A noter cependant un discret soupçon d’érotisme habituellement absent des récits de Derleth.

Peut-être la plus originale des nouvelles, « Les frères de la nuit » voit le narrateur, Arthur Phillips, rencontrer, à Providence, Edgar Allan Poe…puis plusieurs Poe…Forcément cela cache quelque chose. Voici un récit divertissant qui, pour une fois, ne semble pas décalqué une nouvelle antérieure de Lovecraft. Certes, tout n’est pas toujours réussi (le plan général des extraterrestres parait aussi folklorique que le fameux « Plan 9 » de Ed Wood) mais la bizarrerie de voir une série de clones d’Edgar Poe hanter Providence en invoquant les Grands Anciens démontre un talent certain pour l’humour absurde et le twist final constitue une belle réussite. De plus, les clins d’œil à HPL sont ici bien intégrés sans paraitre plaqués sur l’intrigue ou envahissants. « Les frères de la nuit » mérite vraiment l’attention, quel dommage que Derleth n’ait pas signé davantage de textes de ce style.

Avec « L’horreur de l’Arche centrale » nous retrouvons le Derleth le plus classique, le plus critiqué (et le plus critiquable) qui, en partant d’une courte notice de Lovecraft dans son « Livre de raison » ressort la grosse artillerie. Ambrose Bishop a hérité d’une maison située à Dunwich qui appartenait jadis à son grand- oncle Spetimus (et re bâillements) disparu depuis 1929 suite aux événements mystérieux mais bien connus contés par HPL. Et on repart pour l’hostilité des villageois, les « choses maléfiques » revenant à la vie, etc. Une recette déjà éprouvée dans « La chambre condamnée » et « L’ombre de la mansarde » dont cette nouvelle constitue une simple resucée. Autant dire qu’on est content d’arriver au bout.

« L’argile bleue d’Innsmouth » s’inspire apparemment d’une note du « livre de raison » de Lovecraft mais son thème n’est guère original et remonte à la mythologie et aux croyances ancestrales (façon Golem) avec ce jeune artiste qui, après divers rêves érotiques au sujet d’une déesse aquatique, soupçonne une statue façonnée dans une argile venue d’Innsmouth de prendre vie. Rien d’original mais un petit récit plaisant et gentiment sexy qui se lit sans ennui. C’est déjà pas mal.

« Les veilleurs hors du temps », publié initialement par Arkham House en 1974, demeure la dernière nouvelle de Derleth. La mort empêcha d’ailleurs le romancier de la terminer et nous sommes par conséquent en présence d’un texte incomplet…et donc à réserver aux complétistes (hum !).

Près de 400 (!) pages supplémentaires terminent cette somme avec des articles divers qui font de ce troisième volume un nouvel incontournable pour les fans de l’écrivain et, plus généralement, de fantastique « old school ».

Voir les commentaires

Repost0

Publié le 3 Mars 2020

CERES ET VESTA de Greg Egan

Greg Egan a signé d’excellentes nouvelles de science-fiction tendance Hard Science reprises par exemple dans le recueil AXIOMATIQUE. La collection « Une heure lumière » nous propose ici un texte plus long, une novella (ou roman court, long d’une centaine de pages) au sujet de deux astéroïdes colonisés par l’Homme, Cérès et Vesta. Sur ce dernier se développe peu à peu une haine envers une des classes, les Sivadiers, descendants des colons n’ayant œuvré au bien-être commun « que » par des découvertes et du travail « intellectuel ». Un fait accepté depuis longtemps mais à présent remis en question par la classe gouvernante qui leur impose de payer un impôt de « privilégiés ».

On le devine, l’auteur jongle ici avec les questions de l’exclusion, d’autant que les Sivadiers sont immédiatement reconnaissables et que leurs efforts de résistance ont bientôt des conséquences dramatiques. La futilité de l’origine de la querelle illustre, avec un certain détachement mais aussi une pertinence très actuelle, les mécanismes sociaux et l’effet de meute, faisant immédiatement du roman une parabole assez transparente de l’antisémitisme.

Si le message est efficace et le monde futuriste bien pensé, Egan ne semble pas très à l’aise dans la construction de ses protagonistes, assez schématiques. Leurs actions ne sont pas toujours très crédibles non plus (en particulier pour le personnage de Camille) même si elles restent acceptables d’un point de vue dramatique (et relativement plausibles dans des situations de crise).

Le principal problème réside toutefois dans la construction du récit : celle-ci ne parait pas franchement claire de prime abord et le lecteur peut s’y sentir perdu. L’ensemble est même quelque peu confus avec les changements de point de vue, de lieu, d’époque, ou des concepts pas toujours abordables (du moins sur le moment) comme celui des « surfeurs ». Bref, on ne comprend véritablement les enjeux que durant les dernières pages, non pas en raison de la complexité des notions théoriques mais simplement par la faute d’une construction touffue (ou embrouillée diront les mauvasies langues).

Bref, on sent ici le potentiel d’un récit ambitieux mais peut-être pas complètement abouti. Egan semble assis entre deux chaises entre une nouvelle strictement « d’idées » comme l’auteur s’en est fait le chantre ou, au contraire, un roman plus touffu et creusé au niveau de ses personnages. Le format de la novella (pourtant souvent stimulant pour l’auteur de SF) parait donc, cette fois, inadapté. Trop court ou trop long, CERES ET VESTA se lit sans déplaisir ni véritable implication… Ce qui, pour un auteur d’un tel calibre, s’appelle une déception.

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Hard Science, #Roman court (novella), #anticipation, #science-fiction

Repost0

Publié le 27 Février 2020

BAIGNADE ACCOMPAGNEE de Serge Brussolo

Dans ce roman nous retrouvons Peggy Meetchum rencontrée précédemment dans LES ENFANTS DU CREPUSCULE et revue par la suite dans ICEBERG Ltd. Les trois livres peuvent toutefois se lire de manière indépendante.

Comme toujours avec Brussolo, les intrigues sont nombreuses, l’imagination fourmille et le récit prend différents tours et détours, proposant suffisamment de matière pour alimenter trois ou quatre gros bouquins d’un romancier « classique ». Brussolo, pour sa part, préfère empiler les sous-intrigues et remplir ses 200 pages de surprises sans laisser le temps au lecteur de souffler.

Au début du roman, le lecteur découvre ainsi Peggy Meetchum en pleine combine en compagnie de son plus jeune amant, Brandon. La jeune femme organise des escapades sous-marines dans une épave engloutie façon Titanic, en réalité une mascarade fabriquée par Peggy elle-même afin de tromper ses clients tout heureux de découvrir les restes d’une fictive tragédie maritime. Mais elle croise sur sa route une sorte de secte d’illuminés, le Club des Dévorés Vifs, dont tous les membres ont été victimes d’attaques de requins. A présent diminués physiquement et menés par un psychopathe impuissant aux airs de grand gourou, nos dévorés vifs rêvent de vengeance. Leur but : obliger Peggy à leur capturé un requin afin de le massacrer en un rite purificateur. Brandon, de son côté, aimerait utiliser une drogue découverte dans l’épave (laquelle sert de point de rendez-vous à des trafiquants) et pouvant augmenter les capacités de son utilisateur. Ce-dernier se déplace nettement plus vite, ce qui encourage Brandon à imaginer de braquer une banque façon Superman sans que nul ne puisse le stopper. Mais une mafia criminelle ne l’entend pas de cette oreille et délègue des ninjas pour récupérer la précieuse substance. Se sentant épié, Brandon la balance dans un enclos à requin, transformant un squale en coffre-fort. Peggy va devoir monter une opération « serrure carnivore » pour remettre la main sur la drogue…

Comment ne pas aimer un roman dans lequel on trouve à la fois des requins (L’auteur semble en connaitre un bout sur le sujet) et des ninjas ? Voici un thriller alerte, nerveux, bien mené, avec un soupçon de science-fiction grâce à cette drogue augmentant les capacités de ses utilisateurs, et qui fonce à cent à l’heure, un flot d’énergie et d’inventivité qui balaie tous les reproches (certaines situations sont un peu grosses ou invraisemblables…mais qu’importe !) pour divertir le lecteur durant une bonne soirée de suspense. Efficace à souhait !

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Aventures, #Polar, #Thriller, #science-fiction

Repost0

Publié le 25 Février 2020

OEUVRES VOLUME 2 de Howard Phillips Lovecraft

Deuxième volet d’une somme considérable (ne parlons pas d’intégrale mais on s’en rapproche) consacrée à Lovecraft, ce deuxième tome contient lui aussi son lot de classiques : « de l’au-delà », « je suis d’ailleurs », « Herbert West, réanimateur », « La peur qui rôde », « Air froid », etc. Des textes que l’on trouvait déjà dans de précédents recueils consacrés à l’auteur mais que l’on apprécie de voir rassemblé ici aux côtés des fameuses « révisions » effectuées par HPL.

Cependant le lecteur sera ravi de retrouver quelques textes aujourd’hui difficiles à dénicher. Ainsi, « L’horreur venue des collines », un court roman de Frank Belknap Long, a jadis été publié dans la revue Weird Tales et, en France, dans « Crépuscule » de Richard D. Nolane. Frank Belknap Long (1901 – 1994) a écrit de nombreuses nouvelles, rassemblées dans deux recueils, LE GNOME ROUGE et LE DRUIDE NOIR chez Marabout. On lui doit aussi un des plus fameux pastiches de Lovecraft, « les chiens de Tindalos ». Il livre ici un récit maitrisé quoiqu’un peu bavard, effectuant un surprenant flashback au temps de la Rome antique pour assister aux célébrations impies des adorateurs des Anciens Dieux. L’écrivain introduit d’ailleurs un nouveau membre de ce panthéon noir avec Chaugnar Faugn. Avec la permission de Lovecraft il incorpore d’ailleurs un rêve de ce-dernier, relaté dans une lettre, dans sa narration. Voilà, sans hésiter, une bonne raison de se procurer ce recueil pour les admirateurs de HPL et de ses disciples.

Une grande partie du recueil est ensuite consacré aux révisions de HPL, des textes que Lovecraft va remodeler, réviser, améliorer, voire réécrire. « Dépanneur du fantastique », Lovecraft se fait donc nègre littéraire pour de nombreux auteurs qui seraient, aujourd’hui, complètement oublié sans le coup de pouce du maitre. La plupart de ces récits furent compilés dans deux anthologies très plaisantes : L’HORREUR DANS LE CIMETIERRE et L’HORREUR DANS LE MUSEE et d’autres étaient proposées dans DAGON ou encore NIGHT OCEAN. Cependant les archéologues de Laffont y ajoutent des textes jusqu’ici inédits en français

Trois textes d’Henry S. Whitehead sont inclus. Le premier, « Piège », était disponible dans un précédent recueil, le très « fond de tiroirs » NIGHT OCEAN. Il s’agit d’un court récit science-fictionnel, aujourd’hui très classique (mais probablement original à l’époque de sa rédaction) sur un étrange miroir maudit (de Loki) et sur la possibilité de s’y retrouver coincé. Le second, « Cassius », figurait au sommaire d’un recueil consacré à Whitehead, LA MORT EST UNE ARAIGNEE PATIENTE. Une belle variation sur le thème du jumeau maléfique, assez proche dans son déroulement d’un film comme « Basket Case », dans lequel un esclave se voit persécuté par un étrange homoncule. Très efficace. Whitehead a composé sa nouvelle sur la base d’un plan fourni par Lovecraft, lequel avait une vision complètement différente de l’intrigue au point qu’il envisageait d’ailleurs d’écrire sa propre version alternative, ce qu’il n’a pas fait. Le dernier, « Bothon », était inédit mais n’est guère convaincant puisqu’il reprend le schéma classique de la vie antérieure dont se remémore le protagoniste ayant jadis vécu sur le mythique continent de Mu. Pas désagréable mais pas transcendant.

Trois nouvelles de Clifford M Jr Eddy avaient déjà été proposées au lecteur francophone, le recueil en ajoute une supplémentaire, « Cendres », une petite histoire pas désagréable qui fonctionne sur le cliché de la machine à désintégrer cher à la science-fiction d’antan. Déroulement et chute prévisible mais plaisant.

Deux textes de Duane W. Rimel complètent l’anthologie au rayon des inédits : « le déterré » et « L’arbre sur la colline ». Le premier constitue une excellente variation sur le thème du zombie (au sens Vaudou du terme, donc créé à partir d’une poudre simulant la mort) et fonctionne de belle manière jusqu’à sa chute effective. Le second traite d’une sorte d’univers parallèle pouvant être visualisé par le héros mais reste anecdotique.

Le court récit de Richard F. Searight (« le coffre scellé ») n’était jusqu’ici disponible que dans une anthologie consacrée à Weird Tales, on apprécie donc son inclusion, tout comme celle du plaisant « Les serviteurs de Satan » disponible dans le recueil hommage de Robert Bloch EMBARQUEMENT POUR ARKHAM.

Enfin, le recueil ajoute l’article de HPL « Horreur et surnaturel en littérature », de très nombreuses poésies et une quinzaine d’articles divers pour un total de 1350 pages.

Nouvelles connues mais rassemblées de manières pratiques, raretés difficiles à se procurer, y compris chez les bouquinistes, et inédits…que demandez de plus ? Une anthologie indispensable.

Voir les commentaires

Repost0

Publié le 21 Février 2020

VOYAGE - TOME 1 de Stephen Baxter

Quoique divisé en deux tomes pour des questions de longueur, VOYAGE raconte une histoire unique : à la fin du tome 1 il faudra donc impérativement poursuivre la lecture avec le tome 2. Voici donc un très gros pavé de près de 900 pages dans son édition de poche !

VOYAGE inaugure la « trilogie de la NASA » et célèbre les astronautes décidés à explorer, quel que soit le prix à payer, « l’espace, frontière de l’infini ». La science-fiction y est donc minimale une fois le principe de base établi : JFK a réchappé à sa (tentative) d’assassinat à Dallas et les USA n’ont pas abandonné leurs projets de conquête spatiale. Le vol vers Mars, envisagé dès les années ‘60 par la Nasa, n’a pas été mis de côté par Nixon, contrairement aux sondes spatiales inhabitées et à la navette réutilisable.

Nous allons donc suivre la grande aventure de ces héros qui partent vers la planète rouge la tête remplie de la prose de Wells, Clarke, Bradbury, Heinlein et les autres. Baxter choisit deux trames pour illustrer son propos : la première s’intéresse à la réalisation proprement dite du projet avec les magouilles politiques (on parle par exemple de la « marre aux requins de la politique de la Nasa »), les jeux d’influence et de pouvoir, la sélection des astronautes puis leur entrainement, etc. Sans oublier les aspects économiques et le souhait de ménager l’électeur pour qui tout ça ne sert pas à grand-chose, excepté à planter un drapeau sur un tas de poussière à des millions de kilomètres.

La seconde ligne narrative prend place à bord de la fusée Arès ave le quotidien des astronautes finalement choisis pour ce voyage de deux ans (avec seulement un petit mois sur la planète rouge…mais ce premier tome ne nous permet pas encore de nous y poser).

VOYAGE pourrait sans doute donner lieu à une bonne série TV tant Baxter en reprend les éléments clés (avant que ceux-ci ne deviennent la norme scénaristique) : vaste intrigue générale et multitude de petites sous-intrigues, plus personnelles, avec le parcours des différents protagonistes.

Beaucoup de personnages sont ainsi conviés à l’aventure : astronautes, responsables de projet, scientifiques, ingénieurs, etc. On s’y perd parfois et certains passages, très techniques (mais parfaitement abordables contrairement à d’autres romans hard-science où interviennent des notions très pointues), peuvent ennuyer un brin par leur jargon et leur précision maniaque sur chaque détail du projet, accompagnés de nécessaires mais parfois lourdes notes de bas de page.  

L’auteur de focalise davantage sur ces trois astronautes : Phil Stone, Ralph Gershon et Natalie York. Avec quelques classiques de la narration pour compenser le côté très froid et documentaire du récit : les relations extraconjugales et les hésitations sentimentales de son héroïne, Natalie York, géologue décidé coute que coute à poser le pied sur Mars même si elle doit, pour cela, sacrifier dix ans de sa vie. On comprend aussi les difficultés quotidiennes de la vie d’un astronaute : chaque petits gestes devient une bataille à mener (prendre sa douche, manger, aller aux toilettes, dormir,…). Ca ne donne pas franchement envie de s’embarquer et Baxter, bien qu’épaté par l’entreprise titanesque décrite, semble questionner la futilité d’un tel vol habité. Il faut attendre près de 400 pages pour que la tension monte d’un cran avec les défaillances d’une capsule Apollo N. Le roman prend alors, durant quelques dizaines de pages, les allures d’un récit catastrophe à la « Apollo 13 » (ou aux « Naufragés de l’espace » pour les plus vieux)

Linéaire dans son déroulement (en dépit des deux époques envisagées), VOYAGE convie le sense of wonder pour une expédition réaliste qui pourrait constituer la suite du grand film « L’étoffe des héros ». On peut cependant estimer que le roman aurait gagné à se voir élaguer d’une bonne centaine de pages pour le rendre plus digeste.

En dépit d’évidentes longueurs et de scènes un brin fastidieuses (un défaut aggravé par le côté technique des descriptions, associé à un style d’écriture purement fonctionnel), ce premier tome s’avère suffisamment intéressant pour donner envie de poursuivre le voyage. Peut-être pas vers l’infini et au-delà mais au moins jusqu’aux montagnes martiennes…et au tome 2.

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Hard Science, #anticipation, #Uchronie, #science-fiction

Repost0

Publié le 20 Février 2020

OEUVRES de Howard Phillips Lovecraft

La bibliographie de Lovecraft a longtemps été éparpillée au fil des nombreuses publications francophones, ce qui rendait difficile la constitution d’une réelle une intégrale. Les Omnibus de Laffont rendent aujourd’hui cette tâche bien plus simple, sans être totalement exhaustive (mais est-ce possible, notamment sur le sujet des continuateurs ou des réécritures).

Mais, dira le lecteur avare, si on possède déjà tout quel est l’intérêt ? Et bien il est possible, voire même probable, que l’on n’avait pas tout en réalité. Ainsi, dans le premier tome, se trouve, outre les récits de Lovecraft lui-même, des nouvelles provenant des anthologies LEGENDES DU MYTHE DE CTHULHU, LA CHOSE DES TENEBRES et HUIT HISTOIRES DE CTHULHU rédigées par des épigones du maîtres. Bref, un culte en expansion comme le souligne Francis Lacassin. Même si on possède les différents recueils précités, cet épais tome peut intéresser le « complétiste » pour quelques récits non pas inédits mais plus difficile à dénicher et opportunément rassemblés ici.

Ainsi « la chose ailée sur le toit » de Robert E. Howard, court mais efficace petit conte fantastique jadis disponible dans le recueil L’HOMME NOIR de Howard (ou, chez Bragelonne, dans LES OMBRES DE CANAAN consacré aux histoires d’horreur d’Howard). Howard toujours avec le réussi « Le feu d’Asshurbanipal”, dans lequel, en une vingtaine de pages, le créateur de Conan nous emmène au coeur du désert à la recherche d’une gemme mythique cachée dans une cite maudite protégée par les Djinns. Un mélange d’aventures (on y trouve même un parfum à la Indiana Jones avec son “aventurier aux nerfs d’acier”), de fantasy, de conte orientaux et d’épouvante lovecraftienne. De la belle ouvrage, tiré du recueil LE PACTE NOIR et plus récemment republié dans LES DIEUX DE BAL SAGOTH.

 « L’Héritier des ténèbres », une nouvelle traitant de la peur de la mort, de la crainte de servir de nourriture aux goules et de la nécessité de la crémation (dans le désordre) constitue une autre belle réussie de Clark Ashton Smith à découvrir pour ceux qui ne possèdent pas le recueil LES ABOMINATIONS DE YONDO. On retrouve aussi dans ce recueil phénoménal l’excellent « Chiens de Tindalos » de Frank Belknap Long, « Horreur à Salem » de Kuttner, « L’habitant de l’ombre » de Derleth, « Le visiteur venu des étoiles » de Bloch, « Sueurs froides » de Campbell, etc.

En ce qui concerne Lovecraft lui-même, voici une bonne occasion de lire ou relire certains de ses textes les plus célèbres et réussis comme « Dagon », « L’appel de Cthulhu », « La couleur tombée du ciel », « L’abomination de Dunwich », « Celui qui chuchotait dans les ténèbres », « Le cauchemar d’Innsmouth » et les courts romans « L’affaire Charles Dexter Ward » et « Les Montagnes hallucinées ».

Des lettres, des contes de jeunesse, des notes, des brouillons, des articles, etc. complètent le sommaire, sans oublier de nombreux textes de présentation sur les différents sujets abordés.

Bref, voici un ouvrage indispensable si on souhaite découvrir HPL ou parfaire ses connaissances sur l’auteur phare du fantastique du XXème siècle.

Une somme !

Voir les commentaires

Repost0

Publié le 19 Février 2020

PLUS X d'Erik Frank Russell

Après la redécouverte de l’excellent GUEPE d’Erik Frank Russell, ce roman ne peut que décevoir. Ecrit à la fin des années ’50 sous forme de nouvelle puis étendu à une novella et finalement à un (court) roman de 190 pages, PLUS X envoie son héros John Leeming au fond de la Galaxie, sans espoir de retour, pour être capturé par les vilains envahisseurs menaçant d’attaquer la Terre. Emprisonné, John commence à imaginer un moyen tortueux pour déstabiliser l’adversaire en se basant sur le principe des équations : il va devenir un « homme plus X », X représentant ici un compagnon imaginaire, son Eustache. John affirme ainsi que tous les terriens possèdent cet étonnant Eustache, une information capable de remettre en question tout ce que les aliens pensent savoir des hommes…

PLUS X dénote quelque peu dans le paysage de la SF des années ’50, l’écrivain utilisant clairement le genre pour une satire de la Guerre Froide avec ces messages contradictoires et ses tentatives d’embrouiller l’adversaire par de fausses informations. Les machinations du personnage principal paraissent donc amusantes et finalement pas si stupides que ça, son « enfumage » des esprits adverses fonctionnant de belle manière.

Malheureusement, le bouquin perd rapidement de son « peps » : très plaisant dans les premiers chapitres il finit par s’enliser dans une seconde partie où l’humour se fait plus rare et dans laquelle la redondance des situations à tendance à ennuyer le lecteur. Là où GUEPE restait réussi de bout en bout, PLUS X perd de son intérêt à mi-parcours et ne parvient jamais à retrouver le charme de ses premières pages.

Quelques notes humoristiques, une bonne idée de départ et une loufoquerie bien présente ne suffisent pas à sauver un roman décevant. Du coup on aimerait lire la version courte, sous forme de nouvelle, probablement plus satisfaisante.

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Humour, #science-fiction

Repost0

Publié le 18 Février 2020

AXIOMATIQUE de Greg Egan

Voici un copieux recueil pour l’un des fers de lance de la SF « hard science » actuelle, Greg Egan. Précédemment publié dans une version française très tronquée composée de seulement quatre nouvelles (ouch !), AXIOMATIQUE a été republié intégralement en 2006. Ces 17 récits offrent donc un bon panorama de l’œuvre d’Egan et constituent la première partie d’une « intégrale raisonnée » de ces nouvelles, poursuivie avec RADIEUX et OCEANIQUE.

Nous détaillons ici ces textes, au minimum intéressants et pertinents par leur questionnement, souvent très bons voire excellents.

« L'Assassin infini » suit un tueur parcourant les univers parallèles pour supprimer des drogués dont les expériences “psychédéliques” menacent le continuum lui-même. Un bon récit, complexe mais pas trop ardu, pour débuter en douceur

« Lumière des événements » constitue un des meilleurs textes de ce recueil, basé sur un postulat vertigineux et très hard science. En résumé, une découverte astronomique permet d’envoyer des messages dans le passé. Un homme sait donc qu’il va rencontrer sa future épouse à telle date, un autre qu’il se fera casser le bras en se rendant à un mariage, etc. Mais que reste-t’il du libre arbitre dans ces conditions ? Et n’est-on pas tenté de faire mentir le futur lorsqu’un événement particulièrement déplaisant survient ? De la grande SF spéculative, aux questionnements riches, un excellent texte ciselé en une vingtaine de pages et fourmillant de plus d’idées que bien des pavés 30 fois plus long !

Encore de la bonne SF d’idées, « Eugène » est un exemple d’anticipation (très) proche au sujet d’un couple ayant gagné à la loterie et décidé à s’offrir l’enfant parfait grâce aux manipulations génétiques.

« La Caresse » traite d’un art dévoyé mis au service d’un individu tellement riche qu’il oublie toute morale pour créer des créations artistiques littéralement chimériques, autrement dit de merveilleuses / horribles créatures mi-homme mi-animal en hommage à différents artistes d’antan. Et notamment au Belge Fernand Khnopff et ses “Caresses”. Etrange !

Greg Egan se fait ensuite humaniste avec l’histoire de deux « Sœurs de sang » atteintes d’une maladie potentiellement mortelle. L’une se croit à l’agonie aux Etats-Unis mais finit par entrer en rémission, l’autre décède en Afrique. En filigrane, Egan s’interroge sur les méthodes de l’industrie pharmaceutique et les fameux tests en double aveugle médicament / placebo.

Très réputée, « Axiomatique » questionne les choix d’un homme pour qui la vie humaine a toujours été sacrée. Cet axiome peut cependant être neutralisée dans cette société future à l’aide d’implant permettant de remodeler, pour un temps, certaines caractéristiques personnelles. Certains choisissent ainsi de s’injecter une croyance religieuse ou une perversion sexuelle inédite. Le narrateur, pour sa part, va s’en servir afin d’ôter ses hésitations à se venger du meurtrier de sa femme, abattue stupidement dans un braquage.

On poursuit avec « Le coffre-fort », un texte réussi au sujet d’un homme ayant le pouvoir (qui s’apparente à une sorte de malédiction), d’occuper le corps d’autrui et de changer de « peau » chaque jour. Comment rester un individu, un être unique, lorsque sa vie se voit ainsi morcelée ?

Passons sur « Le point de vue du plafond » et son expérience de décorporation qui, paradoxalement, manque sans doute d’un point de vue (hum !) et ressemble à un exercice de style à vrai dire hermétique. Le point faible du recueil.

Autre sujet de questionnement abordé par « L’enlèvement » :ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, une réflexion classique mais toujours pertinente de la littérature d’anticipation. Si on crée un « scan » d’un individu celui-ci va t’il accéder à l’immortalité ou n’est ce qu’une vulgaire copie ? Et si des criminels s’en emparent et menacent de torturer cette copie peut-on objecter qu’il s’agit simplement d’une simulation sans réelle existence ? Egan invite à la réflexion au travers d’un texte à la fois abordable et exigeant dans ses concepts philosophiques et psychologiques.

Des questions similaires sous-tendent « En apprenant à être moi » au sujet du cristal Ndoli, un ingénieux dispositif qui réplique les pensées de son porteur et prend le relais lorsque ce-dernier vieillit, lui permettant d’accéder à l’immortalité via le « basculement ». Mais qui est vraiment l’humain dans ce cas ? L’original ou sa copie cristalline ?

Les manipulations génétiques sont au cœur de « Les douves », un texte qui, sur fond de racisme et de réfugiés climatiques, traite de la création, par les élites dominantes, d’une humanité alternative ayant bidouillé son code ADN afin d’être insensible aux maladies.

La thématique très cyberpunk de l’implant (l’Homme est-il encore Homme lorsque ses pensées sont altérées, pour son bien, par un implant ?) transforme le classique face à face entre un tueur à gages et sa victime désignée en science-fiction philosophique dans « La marche ». Sans vraiment convaincre bien que le récit se lise sans déplaisir.

Le thème de l’homme (masculin donc) qui veut enfanter lui-même joue les tire-larmes avec « P’tit mignon ». L’histoire d’un bébé conçu sur commande mais condamné à vivre seulement quatre ans et considéré, par son papa, comme un simple jouet ou, au mieux, un animal de compagnie.

Dans « Vers les ténèbres » les reliquats ratés d’une ingénierie temporelle venu du futur se manifestent sous forme de grands trous de vers qui, tels des trous noirs, empêchent quiconque de s’en échapper. La seule solution pour leur survivre consiste à courir vers leur cœur, un havre permettant de résister à la brusque disparition de ces gouffres temporels. Des sauveteurs spécialisés sont chargés de guider le plus de captifs possibles vers la sécurité…Une nouvelle assez folle basée sur des théories quantiques et utilisant également les probabilités pour rassurer (sans y parvenir, l’humain est ainsi !) ces sauveteurs plongeant dans les ténèbres.

Autre nouvelle à peine prophétique, « Un amour approprié » (précédemment titré « Baby Brain ») questionne ce qui est possible (lorsque la technique est disponible) et ce qui est souhaitable (avec bien sur les questions éthiques sous-jacentes) lorsqu’une femme se voit obligée par les assurances « d’enfanter » le cerveau de son mari accidenté placé dans son utérus dans l’attente d’un corps de substitution.

Plus classique mais non moins glaçant « La morale et le virologue » suit un biologiste décidé à créer une sorte de super sida capable de tuer sélectivement les homosexuels et les adultères. Le final montre bien la folie religieuse poussée dans ses derniers retranchements.

Retour du fameux cristal Ndoli avec « Plus près de toi » qui démontre qu’en matière amoureuse et sexuelle mieux vaut garder une part de mystère. Intéressant mais attendu.

Enfin « Orbite instable dans la sphère des illusions » décrit l’avènement des attracteurs, lesquels vous convertissent instantanément à une religion, une croyance ou à un mode de vie. Pour les « athées » du futur la seule solution est de vivre littéralement en marge des zones géographiquement contaminées… Pas le meilleur récit du recueil mais des interrogations pertinentes.

En dépit de trois ou quatre textes moins réussis ou plus mineurs, AXIOMATIQUE est un véritable condensé de science-fiction spéculative, intelligente et passionnante, une anthologie monstrueuse qui prend place aux côtés de LA TOUR DE BABYLONE de Ted Chiang, JARDINS DE POUSSIERE de Ken Liu, QUAND LES TENEBRES VIENDRONT d’Asimov, PERSISTANCE DE LA VISION de John Varley, AUX CONFINS DE L’ETRANGE de Connie Willis, LE CHANT DU BARDE de Poul Anderson et quelques « best of » de Dick au panthéon des recueils incontournables !

Voir les commentaires

Rédigé par hellrick

Publié dans #Hard Science, #Recueil de nouvelles, #anticipation, #science-fiction

Repost0