paul doherty

Publié le 31 Mai 2018

LA PIERRE DE SANG de Paul Doherty

Paul Doherty (parfois dissimulé sous divers pseudonymes comme C.L. Grace, Paul Harding, Michael Clynes, Ann Dukthas, Anna Apostolou et Vanessa Alexander) est un incontournable forçat du « thriller historique », ficelant avec une facilité déconcertante de tortueuses énigmes (pratiquement toujours assorties de meurtres en chambre close et autre crime impossible) que vont résoudre ses limiers tels Hugh Corbett ou Frère Athelstan. C’est ce dernier qui officie dans LA PIERRE DE SANG, onzième enquête qui nécessite la sagacité du débonnaire homme d’Eglise.

AU XIVème siècle, la compagnie des Guivres revient de la campagne de Poitiers avec une pierre sacrée, le Passio Christi formé, selon la légende, par le sang du Christ. Cette pierre de sang atterrit dans les mains de Sir Robert Kilverby. Bien des années plus tard, en 1380, alors que Kilberby doit rendre le joyau à l’abbaye de St Fulcher, il meurt mystérieusement empoisonné dans sa chambre close. Son assassin réussit également à s’emparer du Passio Christi sans que nul ne puisse expliquer ce miracle. La même nuit un soldat membre de la compagnie des Guivres est décapité. Frère Athelstan, accompagné du coroner londonien John Cranston, va mener l’enquête.

Apparus pour la première fois dans LA GALLERIE DU ROSSIGNOL, les deux limiers moyenâgeux revinrent ensuite à intervalles réguliers puisque Doherty leur écrivit huit aventures supplémentaires en autant d’années. Après LA TAVERNE DES OUBLIES, publié en 2003, l’ecclésiastique avait lui aussi été oublié du romancier, occupé à d’autres époques (une trilogie consacrée à Alexandre le Grand, une autre – inédite en français – dédiée à Akhénaton). Heureusement, en 2011, Cranston et Athelstan revinrent pour une enquête particulièrement complexe…les explications des différents crimes (dont un meurtre en chambre close et un incendie « impossible » dans une pièce fermée) occupent d’ailleurs le dernier chapitre, long d’une vingtaine de pages, et intitulé logiquement « le jugement ».

Comme souvent, Doherty prend son temps pour présenter la vie et les mœurs de l’époque : c’est très détaillé et précis bien que parfois un brin didactique. Il y a donc quelques longueurs et quelques lourdeurs. Rien de vraiment rédhibitoire, d’ailleurs on peut dire cela de tous les romans de Doherty : certains de ses collègues choisissent de reléguer ces détails à la fin du récit, dans des annexes explicatives, lui préfère les intégrer directement dans l’intrigue. C’est son choix et il n’est pas plus mauvais que l’autre, au lecteur de trancher selon sa sensibilité ou son envie d’aller directement à l’énigme proprement dite quitte à survoler certains passages plus descriptifs.

Néanmoins, les crimes se multiplient rapidement (une demi-douzaine !) permettant au roman d’avancer à un rythme soutenu en suivant les pas d’un Athelstan quelque peu dépassé par tous ces mystères : un commerçant empoisonné dans une pièce fermée, une pierre dérobée sans que l’on puisse comprendre la méthode employée, un incendie tout aussi incompréhensible, une décapitation, etc.

Les explications des mystères se montrent assez simples et crédibles (nous sommes loin des procédés parfois invraisemblables – mais tellement divertissants – d’un John Dickson Carr ou d’un Paul Halter) mais la résolution des crimes demande un bon niveau d’attention pour ne pas se perdre dans la multitude de protagonistes.

Au final un bon polar historique, sans doute pas le meilleur du genre ni de son auteur mais une lecture agréable, instructive et plaisante à conseiller aux amateurs de récits médiévaux et de whodunit complexe.

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Publié le 31 Août 2017

L'ASSASSIN DE SHERWOOD de Paul Doherty

Né en 1946, Paul Doherty est un des spécialistes incontestés du roman policier historique, auteur de nombreuses séries de qualités, parfois signées de ses pseudonymes (C.L. Grace, Paul Harding, etc.).

La saga de Hugh Corbett, située sous le règne d’Edward 1er d’Angleterre (au XIIIème siècle), reste sans doute sa plus célèbre : débutée en 1986 avec le très bon SATAN A SAINTE MARY-LE-BOW, elle compte à présent, trente ans plus tard, pas moins de dix-huit romans. Datant de 1993, L’ASSASSIN DE SHERWOOD, septième ouvrage de la série, se consacre à un personnage légendaire : Robin des Bois.

Lorsque débute le roman, en 1302, le Shérif de Nottingham est assassiné : il meurt empoisonné dans sa chambre (forcément close comme souvent chez Doherty grand amateur de ce type de problème) alors que tout ce qu’il a bu ou mangé a précédemment été goûté. Si la méthode est mystérieuse, l’identité de l’assassin semble, pour tout le monde, évidente : il s’agit du célèbre hors-la-loi Robin des Bois lequel tire, tous les 13 du mois, trois flèches enflammées en direction du château de Nottingham. Jadis admiré de la population pour redistribuer ses richesses aux plus démunis, Robin a dernièrement changé d’attitude : devenu bien plus cruel il n’hésite pas à massacrer des collecteurs d’impôts et se comporte en véritable brigand sanguinaire. Ces violences attirent l’attention du roi Edward qui dépêche à Nottingham son fidèle limier Sir Hugh Corbett pour mener l’enquête et trainer Robin devant la justice.

Comme souvent, Doherty mêle la petite histoire (l’assassinat impossible du Shérif) à la grande (un code secret français qui permettrait à Philippe le Bel de lancer une invasion contre l’Angleterre) et à la légende (ici, celle de Robin des Bois, personnage dont l’existence réelle reste sujette à caution).

En dépit d’une intrigue complexe, Doherty confère un bon rythme à l’ensemble, ramassé sur 250 pages, et lance de nombreuses pistes qui convergent avec fluidité vers une conclusion très satisfaisante. La méthode employée pour l’empoisonnement se révèle ingénieuse et crédible (loin des mises en scènes abracadabrantes de John Dickson Carr) et la solution du mystère incluant Robin des Bois fonctionne elle aussi de belle manière quoique la solution soit prévisible. Cela pourrait s’avérer un bémol mais cela prouve sans doute l’honnêteté d’un Doherty qui joue fair-play avec son lecteur sans lui cacher d’informations importantes. Les relations entre l’Angleterre et la France offrent, pour leur part, un tableau intéressant qui permet une sous-intrigue réussie à base de code secret, proche de l’espionnage.

Comme souvent avec l’auteur, le style est agréable et précis, les annotations historiques et les considérations socio-politiques concernant la période envisagée sont adroitement intégrées à l’intrigue, apportant au lecteur de nombreuses informations sur cette époque sans la moindre lourdeur. Du bon boulot pour ce véritable maître du roman policier médiéval. Vivement conseillé.

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