parodies et pastiches

Publié le 14 Octobre 2022

ARSENE LUPIN CONTRE HERLOCK SHOLMES: LA LAMPE JUIVE de Takashi Morita et Maurice Leblanc

Revoici le gentleman cambrioleur embarqué dans une abracadabrante intrigue au cours de laquelle il croise à nouveau le chemin de son plus grand ennemi, le détective privé Herlock Sholmes. Le meilleur limier d’Angleterre, flanqué de son adjoint Wilson, a décidé de mettre hors d’état de nuire Lupin. Bien sûr, ce combat de Titans s’annonce difficile. L’Anglais est ainsi convié par un riche baron à résoudre une affaire de cambriolage apparemment simple. Evidemment, Sholmes comprend rapidement que tout est plus complexe qu’il n’y parait. Pendant ce temps, l’inspecteur parisien Ganimard, découragé, s’apprête à baisser les bras, convaincu de la supériorité de Lupin. Mais Sholmes, lui, refuse de se laisser abattre. Il identifie la jolie gouvernante Alice comme la complice du cambrioleur et essaie de la contraindre à avouer son crime. Toutefois, il se trompe sur la nature de l’affaire…

Le premier volume des adaptations « manga » de Lupin se montrait plaisant mais souffrait d’une théâtralité quelque peu forcée qui trahissait ses origines sur les planches. Ce deuxième volume, toujours épais de 250 pages, est plus mouvementé et énergique. Nous voyageons de Londres à Paris en compagnie d’un Sholmes forcément décalqué de qui-vous-savez. L’enquête avance gentiment tandis que Lupin reste tapis dans l’ombre durant les trois quarts du récit, manipulant son monde comme à son habitude. Il apparait finalement sur une barque isolée sur la seine afin de s’entretenir avec son rival dans une lutte d’esprit.

Ce manga nous replonge plus d’un siècle en arrière, au temps des premiers pastiches du détective de Conan Doyle. Pour des raisons de droits, Maurice Leblanc transforma avec humour le nom de Sherlock Holmes, utilisé dans les premiers chapitres du roman, en Herlock Sholmes. Le mangaka reprend donc cette anagramme humoristique pour son adaptation. Le personnage reste toujours aussi hautain et parfois antipathique mais guidé par sa logique. Il assène, une fois de plus, qu’il ne devine jamais, « je déduis, ce sont les imbéciles qui devinent ».

Enlevé et charmant, avec une belle reconstitution du Paris des débuts du XXème siècle, le manga s’avère efficace et agréable. L’intrigue opère un mélange d’humour, d’aventure et de mystère bien dosé. L’intrigue s’avère en outre plus solidement charpentée que dans le premier volume et les invraisemblances moins criantes quoique Lupin aime toujours se donner en spectacle. Plus que l’argent que lui rapporte les vols, effectués à la manière d’un Robin des Bois moderne, il joue et s’amuse, se moque gentiment des forces de l’ordre et apprécie son affrontement mental avec son égal, Sholmes, qu’il appelle « maître ». Le personnage est intéressant, passant d’un être logique et calculateur à un doux-dingue aux réactions presque enfantines. Sholmes, lui-aussi, alterne le froid détachement de l’homme d’esprit avec des colères foudroyantes. La rencontre entre le génie du crime et le prince des détective produit donc les étincelles attendues.

Les dessins, eux, sont bons, les décors bien rendus et les personnages efficacement croqués (quoique le côté elfique de Sholmes avec ses oreilles pointues paraisse étrange). Dans l’ensemble, la mise en page est dynamique, plus nerveuse que dans le premier tome.

Bref, ce bon recueil permet de s’initier à l’œuvre de Maurice Leblanc de manière détournée mais fidèle.

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Rédigé par hellrick

Publié dans #Arsène Lupin, #BD, #Manga, #Parodies et pastiches, #Policier, #Sherlock Holmes

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Publié le 27 Mai 2019

LES AVATARS DE SHERLOCK HOLMES

Ce petit recueil composé de huit nouvelles revient aux sources du pastiche puisqu’il débute par une nouvelle de James M. Barrie, « Une soirée avec Sherlock Holmes » daté de 1891 soit quelques mois seulement après la création du limier de Baker Street. On y trouve aussi un récit de P.G. Wodehouse (inventeur de Jeeves) et un autre de A.A.Milne (créateur de Winnie l’ourson mais également auteur d’un petit classique de la chambre close, LE MYSTERE DE LA MAISON ROUGE). En tout, huit nouvelles, toutes anciennes et pour la plupart inédites. Un programme alléchant…sur le papier… car il faut avouer que l’ensemble s’avère répétitif, décevant et même ennuyeux en dépit de sa brièveté. Les 140 pages n’apportent en effet guère d’originalité et tournent généralement autour du même procédé, à  savoir se moquer du pouvoir déductif d’Holmes. Le détective élabore ainsi des constructions incroyables qui s’avèrent fantaisistes ou complètement erronées. On retrouve d’ailleurs très récemment ce type de moqueries « gentillettes » dans les très réussies et rigolotes bandes dessinées « Baker Street ».

Dans les récits les plus originaux (comme Le Mystère de Pegram de Robert Barr) Sherlock multiplie les déductions et se trompe complètement sur l’identité du coupable et sa manière de procédé…cependant toutes ses erreurs mettent la police sur la piste du véritable assassin. Voici sans doute la nouvelle la plus amusante et convaincante du recueil, la seule qui va au-delà de l’humour un peu facile (la fatuité du détective et ses procédés d’analyse peuvent facilement tomber dans l’excès et devenir les cibles désignées de la parodie) pour creuser davantage les procédés de Conan Doyle et égratigner avec davantage de pertinence la (ou les) méthode(s) du détective. Les auteurs se moquent aussi de certains haut faits du Canon (la mort du héros dans le « Problème final » se voit revisitée sur le mode humoristique) et inaugurent quelques théories farfelues reprises ensuite par d’autres pasticheurs (Par exemple l’idée que Moriarty n’existe pas et qu’il est simplement la création de Holmes pour masquer ses propres activités criminelles).

Dans l’ensemble, en dépit de quelques bons moments et d’une présentation soignée (chaque auteur bénéficie d’un texte introductif pertinent bien utile pour replacer les nouvelles dans leur époque), LES AVATARS DE SHERLOCK HOLMES s’avère trop répétitif pour emporter l’adhésion. Toutefois, remis dans leur contexte (il s’agit des toutes premières tentatives de pastiches holmésiens), cette anthologie vite parcourue (en deux heures c’est plié) constitue une curiosité acceptable pour les inconditionnels du limier de Baker Street. Pour les autres il existe de plus plaisants « à la manière de… »

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