Panini propose ici un omnibus très épais (850 pages !) qui compile deux années d’Amazing Spiderman, soit 35 épisodes pour la plupart illustrés par Mac Farlane. Evidemment, tout n’est pas du même niveau mais, dans l’ensemble, cette copieuse lecture se révèle de qualité.
On débute avec un arc consacré au Docteur Octopus qui, lassé d’être toujours battu par Spidey, décide de détruire entièrement New York et on enchaine avec un double épisode centré sur un vilain de seconde zone, Chance. Ce-dernier est cependant relativement intéressant puisque ce mercenaire ne travaille pas pour l’argent mais bien par amour du risque. D’abord adversaire de Spidey, il finit par s’allier au monte-en-l’air et se retourne contre ses employeurs qui l’ont trahi. Plutôt agréable.
Vient ensuite le légendaire épisode 300 qui marque les 25 ans de Spiderman et introduit le plus célèbre de ses vilains, le fameux symbiote extra-terrestre Venom. Pas mal, quoiqu’on eût aimé davantage de développement et que la personnalité d’Eddie Brock (le journaliste disgracié porteur du parasite alien) soit plus creusée. Cet épisode permet néanmoins d’inaugurer un nouveau statu quo : le Tisseur récupère son ancien costume rouge et bleu puis déménage pour s’établir avec Mary-Jane dans un appartement huppé de Manhattan, ce qui aura rapidement de dramatiques conséquences.
L’arc suivant montre Spidey s’allier avec Silver Sable et l’Homme Sable (beaucoup de sable donc !) afin de dérouiller quelques nazillons. Rien de bien original pour ces trois épisodes qui traitent des hésitations de Peter Parker à déménager au Kansas (où on lui offre un nouveau job). Notre héros se demande en outre comment va réagir une Mary-Jane toujours présentée comme particulièrement futile et uniquement préoccupée par sa carrière de mannequin. Heureusement, lorsque la tension monte, MJ sait comment détendre son mari. Bref, ces épisodes ne sont pas exceptionnels et ont même pris un coup de vieux (le dessin accuse lui aussi le poids des ans) mais se révèlent parfois amusants avec quelques touches d’humour bienvenues.
Pour la suite, Spidey s’associe encore avec un autre personnage borderline, le Rodeur, afin de récupérer un précieux calice dans lequel un puissant homme d’affaires à dissimuler des informations compromettantes. Le cambrioleur grabataire Black Fox complique la donne mais tout rentre dans l’ordre au final. Pendant ce temps, un riche nouveau venu, Jonathan Caesar, propriétaire de l’appart où logent Peter et sa copine, se montre entreprenant envers MJ. Le scénariste, par petite touche, annonce la suite de son intrigue tandis que Peter affronte le ringard Hanneton Brutal dans un épisode humoristique de transition qui annonce le retour de l’autrement plus redoutable Caméléon.
Une longue intrigue va, par la suite, occuper de manière plus personnelle Peter Parker puisque Mary-Jane est kidnappée par un admirateur détraqué, le précité Jonathan Caesar. Peter, qui pense tout d’abord qu’un de ses ennemis a découvert son identité secrète, mène l’enquête. Il croise quelques vilains de seconde zone, retrouve finalement son jackpot de rouquine et arrête Caesar ce qui conduit, directement, à l’expulsion du couple de leur appartement. Les voici donc de retour chez tante May. Entre temps, Spidey a été pris dans le crossover « Inferno » dont nous ne connaitrons que des épisodes épars. Cela n’aide guère à la compréhension de cet événement qui impacta les trois séries « Spiderman » à la fin des années ’80. Un peu plus tard on croise Mysterio avant un combat entre le Super Bouffon et un Harry Osborn assumant l’identité du Bouffon Vert.
La suite traite des difficultés du couple Peter – MJ, leur recherche d’un appartement abordable à New York, les problèmes de MJ (depuis sa prison Caesar cherche à ruiner sa carrière), le peu de temps dont dispose Peter pour combiner ses études, son job de photographe et sa vie super-héroïque, etc. On retrouve quelques vilains biens connus comme le Lézard, Venom, Scorpion, Rhino, Backlash, etc. Certaines intrigues, malheureusement, se poursuivent hors des pages d’Amazing Spiderman, ce qui nous prive des conclusions de certains arcs, en particulier celui qui voit le Caméléon remplacer Jonah. Pour une fois ne blâmons pas trop Panini : inclure les développements et conclusions de toutes les sous-intrigues auraient doubler l’épaisseur de ce déjà très imposant recueil.
L’histoire la plus longue (en six épisodes) expédie Spidey en Symkarie où il aide Silver Sable à déjouer un « grand complot ». Si le contexte géopolitique se montre restreint et guère crédible, l’intrigue fonctionne agréablement et Spidey croise le Paladin, le radical Solo et même Captain America afin de déjouer les plans de Crane Rouge.
Moins convaincant, les derniers récits appartiennent au cross-over ACTS OF VENGEANCE durant lequel les héros combattent des vilains qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de rencontrer. Spidey affronte ainsi Graviton, Magneto et une Tri-Sentinelle, obtenant au passage les immenses pouvoirs de Captain Universe. Malgré les fréquentes notes de bas de page de Panini nous invitant à acheter le cross-over en question (dont les critiques disponibles n’incitent guère à cette couteuse acquisition) tout cela ne semble guère passionnant et lire ces épisodes, souvent amputés de leur début et de leur fin, demeure frustrant. Le tout, assez simpliste, reste cependant compréhensible et distrayant mais ces histoires ne vont jamais au-delà de leur très basique et très geek idée de base : et si on confrontait Spidey à des vilains qu’il n’a jamais combattus, comme ça, sans vraie justification, juste pour voir.
Malgré ses bémols, cet Omnibus s’avère de bonne facture. Au fil des pages MacFarlane prend plus d’aisance avec le personnage et immortalise Spidey dans des poses acrobatiques improbables qui soulignent ses muscles (bon travail d’encrage aussi) et sa toile souvent entortillée de manière très organique. Les histoires combinent, souvent adroitement, la vie quotidienne de Peter et ses soucis journaliers avec son existence super-héroïque, ce qui rend le personnage fort attachant. On a donc les touches d’émotion avec la maladie de Nathan (le protégé de tante May), l’envie de Peter de voler de ses propres ailes tout en restant proche de tantine, les disputes et réconciliations du couple Peter – MJ. Bref, cela se conforme totalement à la volonté de Stan Lee de présenter des personnages extraordinaires dans des situations ordinaires.
Certes, l’omnibus se montre forcément inégal mais, dans l’ensemble, ces quelques 800 pages, agrémentées de bonus un peu chiches, montrent un très bon rapport qualité / prix…à condition de pouvoir aujourd’hui le trouver à un prix décent car la spéculation a fait son oeuvre.