Voici un des “nouveaux” Défis Fantastiques (ou Fighting Fantasy en VO) écrits par des auteurs ayant une certaine réputation, ici Rhianna Pratchett. Cette dernière a scénarisé de nombreux jeux vidéo (dont des « Tomb Raider »), quelques comics et, bien sûr, elle est la fille de Terry Pratchett. Un background intéressant pour un livre où le bon et le moins bon voisinent.
Tout d’abord l’intrigue est originale et la région de Titan où elle se situe encore inexplorée, il s’agit de Pangaria, un « continent » composé de six îles flottantes maintenues en l’air par la technomancie des Goblins. Or, au début de l’aventure, l’une de ses îles s’écrase dans l’océan, anéantissant au passage pratiquement tous les membres de la Garde Céleste, une sorte de police chargée de protéger Pangaria. Bien sûr, le joueur / lecteur en réchappe…à lui de mener l’enquête pour découvrir qui est le responsable du désastre.
CRYSTAL OF STORMS se distingue de nombreux Défis Fantastiques par son univers « ouvert » avec des choix nombreux. Dès le premier paragraphe le joueur décide de son île natale (sur laquelle il aura des avantages) et peu explorer, au choix, une des trois îles principales de Pangaria. Il faudra divers éléments pour « débloquer » les deux dernières. Les mondes proposés sont également originaux, avec une technologie spécifique, des moyens de transports uniques (des sortes d’ULM qui nécessitent des cristaux pour fonctionner) et des créatures inédites (Cloudkin, Canidor, etc.). Le lecteur va tous les visiter, ce qui est intéressant et ne laisse pas de zones inexplorées (mais diminue grandement la rejouabilité).
Mais, bémols, les trois premières iles se ressemblent très (trop) fortement : on peut y trouver une arme spécifique (qui cause 3 dégâts) et un side-kick bien utile au déroulement du récit. Il faudra beaucoup explorer, ce qui entraine de nombreux combats. Là encore trop de combats. Après en avoir fait « à la loyale » 18 ( !!!) j’ai considéré que je gagnais les suivants. Triche ? Oui sans doute mais les adversaires sont assez faibles, avec un skill moyen de 6 et une stamina guère plus élevée. Du coup on gagne généralement en deux ou trois assauts et on n’y perd que quelques points…que l’on regagne immédiatement car après chaque affrontement le lecteur bénéficie d’une récompense (souvent un objet et un peu de nourriture permettant de regagner 2 ou 3 points). Après quelques paragraphes le lecteur est normalement suffisamment équipé pour gagner assez facilement tous les combats avec un skill de base tournant autour de 10.
On reçoit en outre régulièrement des « mots de passe » venant récompenser nos explorations et qu’il faudra noter, ce qui est bien géré et permet de guider le lecteur assez subtilement. Toute cette première partie rappelle assez grandement LA PLANETE REBELLE…et comme pour ce dernier, la suite de l’aventure est moins convaincante car un peu trop linéaire (même si moins « One true path ») : on visite Incus puis on s’embarque pour une expédition sous-marine (le bathyscaphe possède ses propres caractéristiques qui se substituent à celles du lecteur). Ce final un peu steampunk à la 20 000 LIEUES SOUS LES MERS rachète en partie la section centrale trop banale du livre. Le combat final est, bien sûr, beaucoup plus difficile et se distingue aussi par le fait qu’un allié (rencontré précédemment) combat à la place du lecteur / joueur. Et si il vous manque un objet pas de fin abrupte comme dans de trop nombreux Défis Fantastiques : le lecteur retourne simplement quelques pas en arrière pour récolter ce qu’il a manqué la première fois.
L’écriture, de son côté, est professionnelle, avec quelques notes d’humour (mais vu le patronyme de l’autrice on pouvait s’attendre à plus délirant) et rend le tout plaisant à lire.
Du positif donc mais, au final, CRYSTAL OF STORMS souffre également de défauts assez rédhibitoires : tout d’abord il est linéaire (en dépit du fait que le lecteur semble posséder de nombreux choix il faudra grosso modo tout explorer dans un ordre ou un autre pour parvenir à la solution), il est ensuite facile (seul le final peut poser des difficultés et en cas d’échec personne n’aura envie de reprendre le livre depuis le début puisque le lecteur en aura déjà fait le tour) ce qui rend la rejouabilité quasi nulle. On fera donc le parcours, sans déplaisir, une seule fois.
En résumé, une aventure pas désagréable mais quelque peu décevante qui pourra toutefois constituer une initiation à ce genre de livre-jeu pour les plus jeunes auxquels il semble plus spécifiquement destiné (univers, humour, difficulté très faible, quasiment aucune « pan t’es mort’…).