PORN VALLEY de Laureen Ortiz

Publié le 15 Septembre 2021

PORN VALLEY de Laureen Ortiz

Juin 2009. La mort de Michael Jackson occupe tous les médias. Laureen Ortiz, de son côté, se lance dans une enquête au long cours au cœur de la Porn Valley. Car, en Californie, non loin de la Silicon Valley et d’Hollywood se niche le haut lieu de l’industrie du X américain. Les geeks de la Silicon qui s’y sont aventurés y travaillent en effet sur les nouveaux sites web du porno, lesquels attirent des millions de click par jour (rien que PornHub tourne autour des… 800 visites à la seconde !).

De leur côté, les apprenties actrices assurent le turn-over constant des nouveaux « visages » du hard. Car depuis son « âge d’or » des seventies et le premier boom de la vhs, le X a bien changé et les vétérans du métier ont parfois beaucoup de mal à s’adapter aux nouvelles manières du XXIème siècle. Le format long-métrage est à présent globalement abandonné, la scénarisation a disparu et les Traci Lords ou Jenna Jameson ont laissé place à des starlettes interchangeables. Elles sont payées à la prestation (chaque spécialité étant tarifée avec précision) et enchainent des centaines de « scènes » en quelques mois avant de disparaitre dans l’anonymat…et la crainte d’être reconnue après leur reconversion. En dépit des sommes importantes qu’elles ont gagné (environ 1 000 dollars la scène), la plupart repartent aussi pauvres qu’elles étaient arrivées : drogue, contrats filous, vie de luxe, dépistage du sida, etc. Les « frais » nécessaires à cette existence.

Si quelques compagnies de « prestige » subsistent (Vivid, l’empire de Larry Flint, Penthouse,…) la majorité des tournages est aujourd’hui aux mains de MindGeek. Cette société tentaculaire se présente comme des spécialistes du développement web mais héberge la plupart des sites pornos les plus visités. Le bouquin revient aussi sur les côtés « rock & roll » du X avec ces karaokés d’actrices, ces cérémonies fastueuses où les studios se décernent des « oscars », ces innombrables starlettes qui passent entre les bras tatoués des stars à la Marylin Manson ou Tommy Lee. Beaucoup d’anecdotes et quelques touches d’humour, par exemple lorsque Ortiz rappelle que si la plupart des performeuses ont l’âge légal pour tourner des vidéos hard elles n’ont pas celui requis pour boire une bière dans les fêtes organisées par les compagnies !

Adoptant un format à mi-chemin entre le journal de bord et le reportage façon journalisme gonzo (ça tombe bien pour le sujet !), l’autrice propose de nombreuses interviews. Des acteurs, des actrices, des réalisateurs et divers autres personnages plus ou moins impliqués dans cette industrie aux marges de la légalité qui emploie pourtant des dizaines de milliers de personnes. De la pornstar éphémère à la militante pour l’imposition de préservatif en passant par ceux qui se retrouvent sur les tournages pour bosser de 9 à 17 heures le plus « simplement » du monde, Laureen Ortiz dévoile le versant méconnu de la Californie. Cette « zone grise » brasse des sommes absolument démentielles et se voit exposée et explorée sans complaisance (assortie d’un rappel des nombreux suicides survenus dernièrement) mais sans charge excessive non plus.

Comme dans tout bon reportage « gonzo », l’autrice tisse également des points communs entre les « performeuses » et son propre parcours. Au final, elle se sent souvent très proche des interviewées et brosse un portrait pas très reluisant mais instructif de « l’industrie la plus décriée des Etats-Unis ». Un bouquin qui, en dépit de quelques longueurs et passages redondants, se lit agréablement.

Rédigé par hellrick

Publié dans #Cinéma, #Erotique, #Essai

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