BRIGADE MONDAINE: LA BÊTE DU LUBERON de Michel Brice

Publié le 14 Juillet 2021

BRIGADE MONDAINE: LA BÊTE DU LUBERON de Michel Brice

La Brigade Mondaine. Une institution du roman de gare, débutée par Bernard Touchais et Gérard de Villiers en 1975. Elle se poursuivra jusqu’à la mort du genre, tué par les tablettes et autres conneries, près de quarante ans plus tard. Parmi les belles plumes dissimulées sous le pseudonyme collectif de Michel Brice : le philosophe réactionnaire Didier Goux, le journaliste sportif Jean-Philippe Chatrier, l’essayiste Philippe Muray, etc. 280 bouquins qui firent les belles heures des halls de gare avec leur titre explicite et leur couverture racoleuse. Beaucoup de déchets, forcément, dans ces intrigues abracadabrantes mêlant polar et érotisme, souvent violent et sadomaso. Mais, également, quelques bonnes pioches bis comme cette BETE DU LUBERON particulièrement déjantée.

Les héros sont toujours les mêmes clichés ambulants : le commissaire Boris Corentin, idéal du mâle alpha musclé au zob surdimensionné, sosie d’Alain Delon qui tombe toutes les filles entre 18 et 48 ans. Et son adjoint « Mémé » Brichot, bon père de famille pantouflard qui enquête mollement entre deux biberons et se désole de n’être pas en compagnie de ses enfants plutôt que sur la route du vice. L’originalité vient donc des méchants, souvent des aristocrates décadents qui organisent des partouzes ou zieutent des snuff. Cependant, ceux-ci s’avèrent, dans le cas présent, plus gratinés que de coutume. Nous avons ainsi un richard tenté par la politique qui adore assister à des spectacles zoophiles privés orchestré par un chatelain dans sa réserve naturelle. Mais il y a mieux : une scientifique façon Ilsa espère créer une « sous-race du sous-prolétariat » en fécondant des femmes par des…gorilles ! D’ailleurs, histoire d’entrainer le grand singe à remplir son…office, notre jeune femme s’offre régulièrement à l’animal en rut. Comme on dit…gare au gorille !

Le récit, débuté classiquement sur le modèle habituel des « Brigade Mondaine » (viol, chantage, suicide, etc.) bascule donc dans un n’importe quoi réjouissant. A la manière d’un film de science-fiction horrifique des années ’40 (style « The Ape Man ») revisité par un Ed Wood converti au porno sado-maso le roman délire pas mal et ne refuse rien. Mention spéciale également au tournage d’un film X par un cinéaste sur le retour qui investit la réserve pour tourner une orgie menée par des figurants maquillés façon hommes préhistoriques. Une vraie guerre du feu aux fesses.

Bref, LA BÊTE DU LUBERON c’est donc très con mais aussi très sexe, bien sadique et complètement déjanté. Avec la particularité appréciable de bénéficier d’un réel talent d’écriture, loin de la banalité d’une (trop) large portion des productions estampillées Gérard de Villiers. Ici, le lecteur sent l’application, comme si les auteurs voulaient soigner un maximum la forme pour compenser l’inanité du fond. Bien sûr, il faut se farder les habituelles manœuvres de séduction de l’irrésistible Boris Corentin, lesquels permettent des passages olés olés placés à intervalles réguliers mais dénués de la moindre originalité. L’enquête policière en elle-même se révèle aussi palpitante qu’un épisode de série télé allemande de fin d’après-midi. Beaucoup de bémols donc. Toutefois, le côté outrageux du récit et ce plan farfelu (remplacer les ouvriers par des hybrides hommes-singes engendrés par des esclaves sexuelles fécondées par des gorilles, carrément mon bon monsieur si c’est pas malheureux que fait la CGT ?) rend le tout distrayant.

L’ensemble fonctionne donc plaisamment (d’autres titres de la collection reposent, malheureusement sur des intrigues routinières écrites au kilomètre) et se révèle une lecture étonnamment divertissante dans les limites de ses modestes prétentions.

Rédigé par hellrick

Publié dans #Erotique, #Polar, #Roman de gare

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