UNE HISTOIRE DE LA SCIENCE-FICTION, TOME 4 de Jacques Sadoul

Publié le 1 Avril 2019

UNE HISTOIRE DE LA SCIENCE-FICTION, TOME 4 de Jacques Sadoul

Ce tome débute par un état des lieux de la science-fiction dans une époque en mutation, alors qu’elle ploie sous les assauts de la sci-fi (autrement dit la SF commerciale déclinant des licences comme « Star Trek » ou « Star Wars ») et d’une Fantasy facile inspirée par le jeu de rôle. Cependant Sadoul ne passe pas à côté des mouvements alors en vogue comme le cyberpunk et le steampunk. Le pape du cyber, William Gibson, illustre évidemment ce courant avec son classique « Gravé sur chrome » autrefois disponible dans le recueil du même titre. Autre grand auteur du cyberpunk, Bruce Sterling livre un « Maneki Neko » qui lui valut le Locus.

On débute donc avec « Gravé sur chrome » de Gibson qui reste un parfait témoignage du courant cyberpunk avec tous les ingrédients indispensables : affrontements de hacker dans le cyberspace, mur de glace protégeant les corporations des intrusions intempestives et trame générale inspirée par le polar hard boiled mais revisitée dans un cadre anticipatif et dystopique très sombre. Une excellente entrée en matière pour les novices tant « Gravé sur chrome » s’impose en véritable distillat de ce que fut le cyberpunk des années 80.

« Venise engloutie » de Kim Stanley Robinson est, de son côté, un très beau texte de science-fiction réaliste, typique de l’auteur, qui imagine ici les conséquences prévisibles de la montée des eaux et des bouleversements climatiques. L’auteur suit un guide conduisant, dans une Venise engloutie, deux touristes japonais aux allures de modernes pilleurs de tombe. Ce texte, que l’on a déjà pu lire dans l’anthologie UNIVERS 86 ou dans le recueil de Kim Stanley Robinson LA PLANETE SUR LA TABLE, reste un classique de haute volée et se relit toujours avec le même plaisir !

Après un court récit de Stephen Baxter, Connie Willis livre avec « Ado » une satire (de plus en plus plausible) des dérives induites par le politiquement correct, les féministes, les groupes de pression diverses et les tenants de l’écriture inclusive, ramenant une pièce de Shakespeare à une poignée de répliques anodines afin de ne froisser aucune sensibilité. Un texte encore plus crédible et prophétique qu’à l’époque de sa rédaction dans les années ’90. Belle  réussite là encore.

Le texte qui valut le Locus à Sterling était jusqu’ici uniquement disponible dans la revue Galaxie, il est donc intéressant de pouvoir le lire dans ce recueil, d’autant qu’il s’agit d’une belle réussite du cyberpunk. « Maneki neko » combine tous les éléments du genre (ambiance sombre, intrigue polar, influence de l’espionnage, fascination pour le Japon) et les innovations technologiques prophétiques (notamment le Secrétaire Numérique qui anticipe les applications de smartphone) en un ensemble harmonieux et accessible. Car l’anticipation proche du cyberpunk se rapproche chaque jour davantage de notre monde actuel qui, parfois, a même  dépassé les « élucubrations » de ces écrivains des années 80.

Enfin, « le styx coule à l’envers » signait l’entrée en littérature de Dan Simmons : une nouvelle traitant des zombies de manière originale et réussie, un beau coup d’essai !

Sadoul, une fois de plus, a eu le nez creux en sélectionnant quatre auteurs qui ne bénéficiait pas encore de la reconnaissance ultérieure dont ils jouissent aujourd’hui : Kim Stanley Robinson, Stephen Baxter, Connie Willis et Dan Simmons. L’ensemble, de grande qualité, constitue donc un nouveau recueil incontournable à prix dérisoire, comme les trois précédents. Incontournable.

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