COSMIC EROTICA présenté par Jean-Marc Ligny
Publié le 8 Février 2019
Cette anthologie, dirigée par Jean-Marc Ligny, donne la plume à une quinzaine d’écrivains…tous des femmes ! Autre point commun des textes : traiter de la sexualité avec, ou non, une intention érotique. Bien évidemment, comme tous les recueils de nouvelles, cette « anthologie féminine » s’avère inégal et alterne le bon et le moins convaincant. Les premiers textes laissent d’ailleurs circonspects : celui de Poppy Z. Britte ne propose rien de bien innovant par rapport à ses précédentes œuvres et celui de Pat Cadigan n’est pas vraiment réussi.
Heureusement la suite relève le niveau avec l’excellent, très hard et humoristique « Prix coûtant » de Carol Ann Davis et ses jeunes filles élevées façon poulet (ou plutôt poule) en batterie pour répondre à tous les désirs des hommes. De la sexe-science-fiction bien crue mais sans verser dans l’excès. Sylvie Denis imagine, elle, un « Carnaval à Lapètre » ou, dans une ambiance légère et sur un ton volontiers sexy, elle s’attaque aux coutumes absurdes de l’excision et l’infibulation encore pratiquées, dans un avenir indéterminé, par des religieux arriérés. La suite est plaisante avec Sara Docke, Jeanne Faivre d’Arcier et une Anne Deguel que l’on a cependant connue plus inspirée. Kathe Koja propose, pour sa part, une histoire d’anges amoureux sensuelle et bien troussée (hum !) et Tanith Lee donne, sans surprise, dans la fantasy.
Un des meilleurs récits, signé Birgit Rabisch, propose avec « inversion, jeu de miroir » une anticipation plausible sur les dérives de l’eugénisme. Dans un monde où tous les individus se ressemblent (il ne reste que trois « types » standards) et où la moindre imperfection conduit - au mieux - à un camp de concentration, un homme sent naitre une attirance incestueuse pour sa sœur « imparfaite » qu’il garde cloitrée et observe à travers un miroir sans tain. Avec ses références aux situations et fantasmes classiques des romans érotiques d’antan et sa thématique d’actualité ce récit que l’on pourrait résumer par une variation hard de « Bienvenue à Gattaca » mérite à lui seul l’achat de l’anthologie.
Plus classique mas cependant efficace, Valérie Simon, dans « Le loup », traite des conséquences d’un viol commis envers une sorcière qui décide qu’un homme se comportant en loup mérite de devenir lui-même…un loup. Connie Willis et Joelle Wintrebert ferment l’anthologie avec deux textes aux antipodes : le premier, très cru, traite de l’inceste et de la frustration sexuelle, le second confronte une femme aux résultats de son combat d’antan dans un monde ayant éliminé tous les hommes.
Dans l’ensemble, ce recueil se montre intéressant, les textes les plus réussis compensant pour les plus faibles. Il parvient surtout à donner une photographie pertinente des récits féminins traitant de l’imaginaire au tout début des années 2000. Passant des auteures débutantes aux incontournables (Tanith Lee, Poppy Z. Brite, Connie Willis), du fantastique à la science-fiction en passant par l’horreur, de l’érotisme à l’anti-érotisme, voici une compilation variée et globalement satisfaisante que l’on se plait à picorer.